Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE-K) publiée le 06/11/2025
Question posée en séance publique le 05/11/2025
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. Fabien Gay. Monsieur le Premier ministre, une soif de justice sociale et fiscale grandit partout dans le pays.
Dans le contexte budgétaire tendu, deux idées sont devenues majoritaires dans la population : sur les recettes, la taxe Zucman, qui a été enterrée à l'Assemblée nationale par les droites et l'extrême droite coalisées ; sur les dépenses, le chiffre de 211 milliards d'euros d'aides aux entreprises, issu du rapport que j'ai réalisé avec Olivier Rietmann.
Ce chiffre a été repris par tout le mouvement social, et pour cause : il représente deux fois le budget des collectivités et quatre fois celui de l'éducation nationale.
Notre travail a été caricaturé : nous n'avons jamais proposé la suppression des aides publiques, qui sont des leviers économiques essentiels au moment où la bataille commerciale fait rage. Notre travail a aussi été invisibilisé : vingt-six recommandations ont été adoptées à l'unanimité, sur lesquelles devrait se cristalliser le débat.
Ces recommandations visent à imposer une transparence, à l'heure où les 2 267 dispositifs recensés forment une jungle dans laquelle personne ne se retrouve, mais aussi un conditionnement, un suivi et une évaluation de ces fonds publics pour garantir qu'ils remplissent bien les objectifs pour lesquels ils ont été octroyés.
Depuis, nous attendons une réaction de votre part, monsieur le Premier ministre. Allez-vous enterrer notre rapport sans même nous recevoir, au mépris de votre engagement devant l'intersyndicale, ou soutenir nos amendements, voire une proposition de loi transpartisane ?
Enfin, notre travail suit un fil rouge : l'argent public ne peut pas servir les actionnaires. À la suite de leur audition, d'un épisode de l'émission Complément d'enquête et de ma tribune dans Libération, Michelin s'est engagé, dans une perspective éthique, à rembourser 4,3 millions d'euros qui n'ont jamais été investis sur le sol français.
Monsieur le Premier ministre, vous engagez-vous à ce que ce remboursement intervienne dans les plus brefs délais ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique publiée le 06/11/2025
Réponse apportée en séance publique le 05/11/2025
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur Fabien Gay, je vous remercie de votre question et, surtout, de votre travail. Vous avez mené une commission d'enquête complète et rigoureuse, qui a été assez médiatisée, ce qui a permis de mettre en lumière le sujet très important des aides publiques aux entreprises.
Je voudrais rappeler que, si la France est le pays d'Europe qui aide le plus ses entreprises, elle est aussi celui qui les taxe le plus. (M. Fabien Gay s'exclame.)
Une voix à droite. Bravo !
M. Roland Lescure, ministre. Quand on fait la différence entre les deux, nous sommes toujours champions d'Europe.
Mais peu importe, comme vous l'avez dit, la transparence doit être absolue pour nos concitoyens sur les sujets de fiscalité comme sur ceux des aides aux entreprises, et vous y avez contribué.
Je suis prêt à prendre plusieurs engagements devant vous aujourd'hui.
Tout d'abord, le Premier ministre m'a demandé de vous recevoir, avec Amélie de Montchalin, pour que nous puissions faire le bilan de votre commission d'enquête et passer en revue toutes les recommandations.
Ensuite, nous souhaitons atteindre cette transparence de la manière la plus rapide possible, sur la fiscalité comme sur les aides - les deux comptent. Une plateforme de la direction générale des entreprises (DGE) rend déjà publiques les aides aux petites entreprises. Vous m'opposerez qu'il est quelque peu paradoxal que l'on sache tout des aides aux petites entreprises, mais que celles qui sont versées aux grandes entreprises fassent l'objet d'un certain flou. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons élargir cette plateforme de manière à ce que l'ensemble des aides soient consultables.
Je rappelle tout de même que, contrairement à ce qui est souvent dit, l'immense majorité des aides publiques aux entreprises en France est conditionnée. On peut critiquer le crédit d'impôt recherche (CIR), mais il est conditionné à des investissements dans la recherche. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRCE-K.) Les allègements de charges sur les bas salaires sont évidemment conditionnés à de l'emploi. (Mêmes mouvements.)
M. Fabien Gay. Et Michelin ?
M. Roland Lescure, ministre. Nous allons travailler avec vous, je m'y engage.
Nous allons aussi continuer de travailler avec Michelin, car ce n'est pas tous les jours qu'une entreprise souhaite faire un chèque à l'État. Et je vous assure que nous ferons en sorte que ce chèque soit signé et qu'il arrive à bon port ! (Ah ! sur les travées du groupe CRCE-K. - M. François Patriat applaudit.)
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