Question de Mme BOURGUIGNON Brigitte (Pas-de-Calais - UC) publiée le 27/11/2025

Question posée en séance publique le 26/11/2025

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Brigitte Bourguignon. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux.

Monsieur le garde des sceaux, ce matin encore, vous avez affiché votre volonté d'une justice ferme, en annonçant avoir lancé hier soir à Nanterre une nouvelle opération de fouilles dans les prisons.

Votre démarche était la même lors de l'ouverture du quartier de lutte contre la criminalité organisée de Vendin-le-Vieil. Tout était millimétré, des convois blindés aux hommes cagoulés. Les habitants étaient prévenus : leurs nouveaux voisins comptaient parmi eux les cent détenus les plus dangereux de France.

Pourtant, lundi, l'un de ces détenus, qui s'était déjà évadé par le passé, a quitté seul ce quartier dit de haute sécurité. Le voilà donc dans le train, pour aller passer un entretien d'embauche à l'autre bout de la France, en vue d'une sortie espérée en 2029. Le soir venu, il est revenu sonner à la porte de la prison - retard de vingt minutes de la SNCF compris... (Sourires.)

Monsieur le garde des sceaux, pour les surveillants, déjà éprouvés par la dureté du métier, cette sortie suscite un profond sentiment d'incompréhension. Cette incompréhension vaut aussi pour les Français : à l'heure de la visioconférence, ce trajet de 600 kilomètres était-il indispensable ?

Nous sommes profondément attachés à l'indépendance de la justice.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. On ne dirait pas...

Mme Brigitte Bourguignon. Nous connaissons trop bien la complexité du droit et il nous appartient autant qu'à vous d'améliorer les choses. Dans ce même centre sont incarcérés d'autres criminels dont la dangerosité n'est plus à prouver.

Ma question est concrète : quelle décision immédiate comptez-vous prendre et, surtout, quels moyens entendez-vous mettre en place pour conjuguer les objectifs de sécurité de nos concitoyens et de réinsertion des détenus ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Quand on pense qu'elle était au PS...


Réponse du Ministère de la justice publiée le 27/11/2025

Réponse apportée en séance publique le 26/11/2025

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice, je forme le voeu, et je le sais partagé ici au Sénat, que l'ensemble de la représentation nationale et, à travers elle, tous les Français mesurent le danger extrêmement important que représente le narcotrafic pour notre pays.

C'est un danger, je l'ai dit et je pèse mes mots, au moins égal à celui du terrorisme. Il tue tous les jours et dans le monde entier. Il touche tous les pays, y compris ceux qui ont parfois recours à l'armée pour lutter contre les narcotrafiquants. La première cause de mortalité aux États-Unis d'Amérique, malgré le volontarisme de M. Trump, est le fentanyl.

Nous avons su changer en 2015 : toute la classe politique a soutenu le gouvernement d'alors, lorsqu'il a décidé de répondre avec force à l'intégrisme religieux qui mène à l'islamisme radical, puis au terrorisme.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous devons changer de braquet. C'est ce que vous avez accompli, ici même, avec la loi sur le narcotrafic. C'est aussi ce que nous faisons pour lutter contre les narcotrafiquants - je pense notamment aux prisons de haute sécurité.

Je veux appliquer aux narcobandits les mêmes règles que celles qui s'appliquent aux condamnés pour terrorisme. Il est inconcevable qu'un individu condamné pour terrorisme puisse passer un entretien d'embauche trois ans avant son éventuelle sortie de prison et alors même qu'il se trouve soumis à un régime carcéral spécifique, parce que considéré comme particulièrement dangereux.

Cette dangerosité n'est pas décrétée par le ministre ; elle est appréciée par les juges d'instruction spécialisés, qui autorisent le placement en prison de haute sécurité, et par nos services de renseignement, qui établissent les profils.

Madame la sénatrice, dans votre département, la prison de Vendin-le-Vieil ou, plutôt, « du bassin minier », puisque j'ai promis au maire de cette commune de l'appeler autrement, a été construite en quelques mois : aucun drone ne la survole, aucune clé USB ni aucun téléphone n'y entre.

Je proposerai en janvier prochain la fin de ces possibles aménagements, qui paraissent en effet très décorrélés de la grande inquiétude qu'ont, à juste titre, les Français face au narcotrafic. J'espère que le Sénat en particulier et le Parlement en général me suivront. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI ainsi que sur des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)

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