Question de M. SOMON Laurent (Somme - Les Républicains) publiée le 27/11/2025

Question posée en séance publique le 26/11/2025

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. - Mme Corinne Bourcier applaudit également.)

M. Laurent Somon. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Madame la ministre, sur les violences faites aux femmes, quel est le constat ? En France, tous les deux jours, une femme meurt sous les coups de son dit partenaire. Un viol ou une tentative de viol a lieu toutes les trois minutes. Les féminicides repartent à la hausse - +11 % - et les violences sexuelles demeurent impunies : 94 % des plaintes pour viol sont classées.

Mes larmes vont aux enfants de Claire, amiénoise victime à 34 ans d'une mort annoncée. Le 9 mai 2021, Claire a été criblée d'une vingtaine de coups de couteau par son dit compagnon, cocaïnomane, connu par la justice pour sa violence. Le verdict a été rendu hier. Nous n'oublierons jamais.

Quelles évaluations faites-vous des dispositifs censés protéger les victimes ? La hausse constatée n'est pas seulement intolérable, elle est inexplicable au regard des engagements répétés du Gouvernement.

On a dit aux victimes qu'elles allaient voir leur situation prise en considération, qu'elles auraient accès à la sécurité et à un traitement judiciaire adapté, tandis que les bourreaux seraient, eux, cernés par les institutions.

Le 3919 a enregistré 100 000 appels en 2024, triste record. Le nombre de femmes orientées vers les associations sans trouver de réponse sur le territoire a augmenté de 25 %. En ruralité, on recense 50 % des féminicides, alors que 30 % des femmes y vivent. Les femmes ne disposent pas des mêmes ressources selon qu'elles résident en ville ou à la campagne.

Grande cause des deux quinquennats, Grenelle en 2019 : quels résultats en matière de lutte contre les violences faites aux femmes ? Une victime sur six porte plainte. Quatre femmes ont été tuées jeudi dernier. On dénombre 107 féminicides et 906 suicides en 2024.

Madame la ministre, l'urgence n'est plus à démontrer, elle est à affronter. Que manque-t-il encore aux 272 400 victimes de violences conjugales enregistrées par le ministère de l'intérieur ?

La Somme figure parmi les départements les plus touchés, avec le Pas-de-Calais, La Réunion et la Seine-Saint-Denis. Vous annoncez de nouvelles mesures. Avec quels moyens, quelle temporalité et quelle coordination allez-vous les mettre en oeuvre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. - Mmes Corinne Bourcier, Cathy Apourceau-Poly et M. Didier Marie applaudissent également.)


Réponse du Ministère délégué auprès du Premier ministre, chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations publiée le 27/11/2025

Réponse apportée en séance publique le 26/11/2025

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Monsieur le sénateur, vous avez raison, notamment en ce qui concerne la ruralité. Il s'agit non pas évidemment de stigmatiser ces territoires ni ceux qui y vivent, mais simplement d'assumer que ces territoires concentrent parfois davantage de difficultés. Le manque d'anonymat et de mobilité fait que l'on y subit des violences plus longtemps qu'ailleurs, en accédant moins facilement à la capacité de s'en libérer et de les dénoncer.

C'est la raison pour laquelle nous avons précisément concentré plus de moyens sur les territoires ruraux. Si je prends l'exemple de votre département, la Somme dispose de soixante places d'hébergement d'urgence et sept intervenants sociaux en police et en gendarmerie ont pour mission de garantir aux femmes, dès le dépôt de plainte, accompagnement et soutien. Nous avons en outre prévu la possibilité, ouverte aussi dans votre département, de déposer plainte à l'hôpital.

Tout cela n'existait pas voilà quelques années. Je ne dis pas que c'est suffisant, car nul satisfecit n'est jamais possible en ce domaine, mais au moins y a-t-il à la fois des protocoles, des formations et des moyens supplémentaires qui ont été déployés. Tout cela nécessite une mobilisation collective.

Vous avez par ailleurs évoqué le féminicide qui a touché votre département. Là aussi, il est important de le dire, la justice est passée, et de manière extrêmement claire. La personne qui a assassiné cette femme, son ex-conjoint, a été condamnée à vingt-cinq années de prison ferme. Autrement dit, lorsque des enquêtes préliminaires sont ouvertes et qu'un tel travail peut être conduit, dans 95 % des cas, la justice passe et se montre extrêmement déterminée.

C'est aussi ce message que nous devons tous collectivement adresser aux victimes, où qu'elles se trouvent. Quand elles déposent plainte, elles sont accueillies, respectées, écoutées. Des dispositifs de protection peuvent et doivent être déployés : téléphone grave danger, bracelet antirapprochement, ordonnance de protection, dépôt de plainte à l'hôpital...

Il est aussi de notre responsabilité collective d'arriver à garantir cette protection pour que la parole soit respectée et, surtout, pour que les violences soient éradiquées. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI. - Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour la réplique.

M. Laurent Somon. Madame la ministre, je vais reprendre le propos d'une vice-présidente de mon département engagée sur cette question : les associations alertent, accompagnent, sauvent des vies avec des budgets dérisoires ; les professionnels se battent avec des effectifs insuffisants ; les femmes meurent en ayant pourtant signalé les violences ; et la justice tarde.

Assez ! Assez de promesses, assez de minutes de silence, assez de statistiques qui s'aggravent année après année. Il est temps de disposer d'une vraie politique publique coordonnée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe SER. - Mmes Évelyne Perrot et Cathy Apourceau-Poly applaudissent également.)

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