Question de M. RUELLE Jean-Luc (Français établis hors de France - Les Républicains-R) publiée le 27/11/2025

Question posée en séance publique le 26/11/2025

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Ruelle, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Luc Ruelle. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, le vendredi 7 novembre, la France, après les États-Unis et le Royaume-Uni, a appelé ses ressortissants à quitter temporairement le Mali. Ces appels traduisent un point de rupture sécuritaire. Nous sommes non plus dans l'alerte, mais dans l'urgence, une urgence immédiate dans un contexte devenu instable, confus et sans visibilité, allant certainement vers un califat consenti.

Depuis 2012, le Mali fait face à une crise profonde : coups d'État en 2020 et 2021, installant une junte autoritaire ; recomposition des alliances sécuritaires après le retrait des forces françaises ; et, surtout, contrôle d'une grande partie du territoire par des groupes djihadistes désormais installés également dans le sud du pays.

Résultat : la déstabilisation franchit les frontières et fait craindre un effet domino sur des États comme le Burkina Faso, dont l'équilibre institutionnel et social demeure fragile.

La contagion s'étend au Bénin, au Togo, au Ghana, à la Côte d'Ivoire, à la Guinée, au Sénégal et à la Mauritanie, sous une triple pression : sécuritaire, avec la multiplication d'attaques terroristes ; migratoire, alimentée par l'insécurité ; criminelle, avec l'expansion du narcotrafic et du blanchiment. C'est toute l'architecture sécuritaire de l'Afrique de l'Ouest qui est menacée.

Or, dans cette zone, ce sont près de 55 000 Français qui résident, travaillent et scolarisent leurs enfants, notamment dans les établissements français.

Je profite de cette occasion pour alerter sur la situation du lycée Liberté à Bamako : accueillant 1 300 élèves, il connaît une situation financière difficile et il est fragilisé par un possible retrait de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).

À cet égard, il faut signaler que la mobilisation de nos personnels diplomatiques et consulaires au Mali, auprès des opérateurs comme de nos compatriotes, a été exemplaire. Je souhaitais les en remercier chaleureusement. (M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, acquiesce.)

Monsieur le ministre, la coopération internationale et régionale peut-elle encore contenir cette progression ? Que faisons-nous pour prévenir l'embrasement ? Le dispositif de protection et d'évacuation de nos ressortissants au Mali et dans les pays voisins est-il prêt à être activé si la situation bascule ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. - Mmes Évelyne Perrot et Sophie Briante Guillemont applaudissent également.)


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 27/11/2025

Réponse apportée en séance publique le 26/11/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, vous avez souligné quelques points absolument essentiels de la crise qui se déroule aujourd'hui au Sahel.

D'une part, vous avez signalé la dégradation de la situation, liée notamment au blocus énergétique provoqué par les terroristes du Jnim (Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans) autour de Bamako. Cette situation a d'ores et déjà des répercussions régionales, que ce soit du point de vue sécuritaire, avec l'expansion du terrorisme, ou migratoire, avec des déplacements de population propices au développement de tous les trafics.

D'autre part, vous avez souligné le courage et l'action exemplaire des agents de notre dispositif diplomatique et consulaire dans une zone du monde et de l'Afrique en prise à de grandes convulsions - ils mériteraient les applaudissements du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. - Mmes Sylvie Vermeillet et Patricia Schillinger, MM. Louis Vogel, Thani Mohamed Soilihi et Simon Uzenat applaudissent également.)

Je voudrais ajouter que la situation actuelle du Mali est le résultat d'un échec patent de la Russie qui, alors qu'elle avait garanti à un certain nombre de pays du Sahel qu'elle allait résoudre tous leurs problèmes, notamment repousser les assauts du terrorisme, a montré toute son inefficacité.

Oui, nous avons pris un certain nombre de dispositions.

Vous l'avez rappelé, le 7 novembre dernier, nous avons invité nos compatriotes présents sur place - 4 200 ressortissants français sont inscrits au registre - à quitter temporairement le pays par les voies aériennes disponibles.

Puis, vendredi dernier, nous avons dû prendre la décision d'ajuster à la baisse notre dispositif diplomatique et consulaire, en conservant sur place les personnels essentiels qui vont continuer à offrir à nos ressortissants les services consulaires dans une période particulièrement éprouvante. Nous espérons, bien sûr, que la situation puisse se détendre, qu'un retour à la normale puisse être observé pour les populations civiles du Mali, mais également pour nos compatriotes, qui sont donc plusieurs milliers à vivre sur place.

Je vous remercie de l'attention que vous accordez à cette situation et des encouragements que vous avez offerts à nos agents sur place. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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