Question de Mme PAOLI-GAGIN Vanina (Aube - Les Indépendants) publiée le 27/11/2025
Mme Vanina Paoli-Gagin attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique sur les conditions de mise en oeuvre du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF).
Ce dispositif européen constitue un outil essentiel pour accompagner la décarbonation de l'industrie tout en préservant l'équité concurrentielle avec les pays tiers. Cependant, à l'approche de son entrée en vigueur opérationnelle au 1er janvier 2026, plusieurs signaux préoccupants appellent à une vigilance accrue.
D'une part, la mise en oeuvre actuelle du MACF crée un déséquilibre économique entre producteurs européens et importateurs de produits bruts (acier, ciment, aluminium, textile, chimie - notamment les engrais encore nécessaires à nos agriculteurs, etc.), sans prise en compte suffisante des chaînes de valeur transformées. La disparition progressive des quotas gratuits d'émission d'ici 2034 pour les acteurs européens accentuera encore ce désavantage, alors que les contrôles sur les importations demeurent fragiles.
D'autre part, des phénomènes de contournement et de fraude sont déjà observés : certains producteurs extra-européens réorganisent leur production pour réserver à l'Union européenne leurs unités les plus performantes, tout en maintenant ailleurs des pratiques fortement émettrices. Ce « resource shuffling » compromet l'efficacité environnementale du MACF. De plus, la fiabilité des vérificateurs tiers et la sincérité des données déclarées ne sont pas toujours garanties.
Afin de rendre ce mécanisme crédible et équitable, plusieurs pistes mériteraient d'être soutenues au niveau européen : renforcer la traçabilité et la vérification des données carbone grâce à des audits accrédités réalisés dans les États membres ; clarifier la nomenclature douanière (codes TARIC) afin d'assurer une application homogène ; recourir à des valeurs moyennes de référence par pays pour éviter les manipulations de données ; introduire une marge de sécurité ou « pénalité carbone » pour compenser les contraintes imposées aux industriels européens soumis au système d'échange d'émissions (ETS).
Elle alerte ainsi le Gouvernement sur le risque de distorsion de concurrence et de désindustrialisation que pourrait entraîner une application insuffisamment encadrée du MACF, contraire à la double ambition européenne de décarbonation et de réindustrialisation.
Elle lui demande quelles mesures la France compte défendre, dans les discussions européennes à venir, pour garantir un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières réellement écologique, équitable et protecteur de nos industries.
- page 5813
Transmise au Ministère de l'action et des comptes publics
En attente de réponse du Ministère de l'action et des comptes publics.
Page mise à jour le