2. L'excédent ponctionné

Les articles 12, 22, 23, 24 du présent projet de loi de financement bouleversent complètement l'économie générale des recettes et dépenses de la première section du FSV.

a) 10,4 milliards de francs de pertes de recettes
(1) 7 milliards de francs de CSG en moins (article 12)

Le FSV bénéficie depuis 1993 du produit de 1,3 point de CSG. Cela représentait 90,4 % de ses recettes en 2000.

Cependant, pour compenser à la CNAMTS la perte de ses droits sur les tabacs (utilisés au financement des 35 heures à partir de 2001), l'article 12 du projet de loi de financement de la sécurité sociale minore la part de CSG attribuée au FSV de 0,15 point et affecte cette ressource à la CNAMTS.

Répartition de la CSG entre la CNAMTS et le FSV

Avant le plfss 2001

Après le plfss 2001

CNAMTS

part assise sur les revenus d'activité et d'épargne financière

5,1 % déductibles

5,25 % (dont 0,15 point non déductible)

part assise sur les revenus de remplacement des personnes imposables

3,8 %

3,95 %

FSV (CSG tous revenus)

1,3 %

1,15 %

Cela se traduit donc par un transfert de 7 milliards de francs de recettes du FSV vers la CNAMTS. Au passage, ce transfert brouille définitivement les liens entre les hausses de CSG, les organismes bénéficiaires et la déductibilité : la CSG de 1,3 % de 1993, non déductible, se justifiait théoriquement pour rembourser les 110 milliards de francs de déficits cumulés de la sécurité sociale (dette aujourd'hui reprise par la CADES avec la CRDS pour la rembourser). Le C du I en tire d'ailleurs les conséquences sur le code général des impôts en prévoyant une simple référence de 5,1 % pour la déductibilité de la CSG.

Outre les pertes de recettes pour le FSV, victime inconsciente des 35 heures, votre rapporteur pour avis soulignera une fois de plus la complexité liée à la déductibilité partielle de la CSG.

(2) 5,7 milliards de francs de droits sur les alcools en moins (article 11)

Le IV de l'article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 bouleverse une nouvelle fois l'affectation des droits sur les alcools pour en priver le FSV et affecter la part ainsi libérée au FOREC.

Ces droits sont nombreux :

• article 402 bis du code général des impôts (CGI) : droits de consommation des produits intermédiaires (titrant entre 16° et 22°) ;

• article 403 du CGI : droits de consommation sur les alcools (titrant au dessus de 22°) ;

• article 406 A du CGI : droits de fabrication sur les alcools ;

• article 438 du CGI : droits de circulation (vins, cidres, poirés et hydromels) ;

• article 520 A : droits sur les bières et les eaux.

Ils obéissent aussi à des régimes extrêmement complexes. Par exemple, les droits de l'article 403 perçus sur le territoire de la région corse reviennent à la collectivité territoriale de Corse. De même, le BAPSA bénéficie d'une infime partie de ces droits.

Le paragraphe IV de l'article 11 prévoit ainsi d'affecter au FOREC l'intégralité du produit des droits des articles 402 bis , 428 et 520 A du code général des impôts. Le FOREC bénéficiera aussi de 55 % du produit des droits de l'article 403, les 45 % restants demeurant au profit de la CNAMTS. Il s'agirait pour ces derniers de la troisième modification en un an et demi !

Changements de l'affectation des droits 403

1999 avant la loi CMU

1999 après la loi CMU

LFSS 2000

PLFSS 2001 (valable en 2000)

Régimes maladie
dont CNAMTS

40 %

40 %

-

-

CNAMTS

-

5 %

45 %

45 %

FSV

60 %

55 %

8 %

-

FOREC

-

-

47 %

55 %

Au total, le FSV devrait perdre 5,4 milliards de francs de recettes en 2000 et 5,7 milliards en 2001, au profit du FOREC.

Votre rapporteur pour avis ne peut que rester coi devant tant de contorsions :

• cette mesure est rétroactive ; elle réduit à zéro l'excédent du FSV ;

• elle le fait au profit des 35 heures ;

• en deux ans, ces droits auront été répartis de quatre manières différentes.

(3) 2,3 milliards de francs de prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine en plus (article 24)

L'article 24 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 modifie complètement la répartition du produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, en l'affectant en totalité à la vieillesse. Ainsi, la première section du FSV, qui n'en bénéficiait pas jusqu'à présent, en percevra 20 % (alors que la deuxième section qui bénéficiait de 49 % voit sa part passer à 50 %). Le pourcentage de la CNAVTS (30 %) reste inchangé. La CNAMTS (qui en percevait 8 %) et la CNAF (13 %) perdent tout bénéfice de cette taxe.

Il faut noter la vie agitée de ce prélèvement qui a été établi pour 1998, a vu sa répartition changer en 2000 et encore en 2001.

Changements de l'affectation du prélèvement de 2 %

Droit en vigueur en 1999

Loi de financement pour 2000

Loi de financement pour 2001

CNAMTS

28 %

8 %

0

CNAVTS

50 %

30 %

30 %

CNAF

22 %

13 %

0

FSV 1ère section

0

0

20 %

Fonds de réserve

0

49 %

50 %

Pour le FSV, cette nouvelle affectation devrait se traduire par un gain de 2,3 milliards de francs, venant atténuer un peu la rigueur des pertes précédentes. Sur la forme, votre rapporteur pour avis espère seulement que la prochaine loi de financement de la sécurité sociale n'apportera pas à nouveau son lot de changements.

Sur le fond, on ne peut que s'étonner de ces manipulations diverses et variées qui tendent en apparence à limiter les pertes de ressources des uns et des autres : plus il est brouillé, meilleur est le mode de financement des 35 heures, semble dire le gouvernement. Votre rapporteur pour avis n'est pas dupe de ces tours de passe-passe.

Par ailleurs, il s'interroge sur l'utilité de maintenir l'affectation à la CNAVTS de 30 % du prélèvement de 2 % alors que celle-ci verse ses excédents au fonds de réserve pour les retraites. Il est vrai qu'un transfert de la ressource vers ce dernier réduirait l'excédent apparent de la CNAVTS et donc celui du régime général. Bref, s'il n'est pas inutile pour le gouvernement de débudgétiser certaines dépenses et recettes pour afficher un objectif présentable d'évolution des dépenses de l'Etat, il préfère ne pas faire de même avec les recettes de la sécurité sociale de peur de dégrader un solde qui de toutes les façons le sera, mais a posteriori et donc après présentation à la presse...

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