2. Des ressources largement insuffisantes (articles 24 et 25)

Les ressources du fonds de réserve pour les retraites sont énumérées par l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale, modifié par le présent projet de loi de financement et par le projet de loi, en cours de discussion, sur l'épargne salariale. Elles comprendraient, si toutes les dispositions de ces textes étaient adoptées :

1° Une fraction, fixée par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, du solde du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) ;

2° Tout ou partie du résultat excédentaire de la première section du FSV, dans des conditions fixées par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget ;

3° Les montants résultant de l'application de l'article L. 251-6-1 ;

4° Une fraction égale à 50 % du produit des prélèvements visés aux articles L. 245-14 à L. 245-16 ;

5° Les versements du compte d'affectation institué par le II de l'article 23 de la loi de finances pour 2001 ;

6° Toute autre ressource affectée au fonds de réserve en vertu de dispositions législatives ;

7° Le produit des placements effectués au titre du fonds de réserve ;

8° Le produit des fonds en déshérence de l'épargne salariale à l'issue de la prescription trentenaire ;

9° Le produit de la cotisation de 8,2 % applicable aux abondements d'un plan partenarial d'épargne salariale volontaire supérieurs à 15.000 francs 45 ( * ) .

Le fonds de réserve a déjà bénéficié de certaines de ces ressources et devrait en percevoir de nouvelles.

Il a reçu : - 2 milliards de francs de C3S, - 5,4 milliards de francs de produit 2000 du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital, - 5 milliards de francs d'excédents de la CNAVTS en droits constatés sur 1999, - 2,9 milliards de francs d'excédents prévisionnels de la CNAVTS sur 2000, - 4,7 milliards de francs tirés de la vente des parts de caisses d'épargne, - 3 milliards de francs de " don " de la Caisse des dépôts et consignations, - 209 millions de francs de produits financiers pour 2000.

Pour 2001, les ressources du fonds de réserve augmenteront de 13,2 milliards de francs : 5,6 milliards de francs de prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine, 1,4 milliard de francs d'excédent prévisionnel en droits constatés de la CNAVTS, 4,7 milliards de francs des ventes de parts de caisses d'épargne, 1,4 milliard de francs de produits financiers.

Devraient s'y ajouter 18,5 milliards de francs de produit d'une première tranche d'attribution des licences de téléphonie mobile et 115 millions de francs issus de l'attribution de 0,1 point supplémentaire de prélèvement social de 2 % au fonds de réserve.

L'article 25 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit en effet d'ajouter à la liste des ressources du fonds de réserve une partie des produits de la cession de quatre licences de téléphonie mobile de troisième génération, dites licences UMTS, inscrits au budget de l'Etat dans un compte d'affectation spéciale, créé à cet effet par l'article 23 du projet de loi de finances pour 2001. Au total, sur les 130 milliards de francs attendus de la cession, 116 milliards devraient revenir au fonds de réserve, le solde allant au remboursement de la dette de l'Etat 46 ( * ) . Les versements seraient de 18,5 milliards de francs en 2001 et 2002 puis de 4,64 milliards de francs par an jusqu'en 2016.

Votre rapporteur pour avis n'est pas favorable à cette affectation. Il estime d'abord que le fonds de réserve doit être doté de ressources pérennes et non au coup par coup, au gré de cessions, d'occasions. Il lui faut un mode de financement clair et immuable. Il ne doit pas être suspendu au bon vouloir du gouvernement une année, et à son besoin de recettes une autre.

Par ailleurs, ces recettes sont rien moins que floues, très liées au budget de l'Etat, dépendantes de la vie économique et de l'avenir du secteur de la téléphonie mobile. Le fonds de réserve n'a pas besoin d'incertitudes.

En conclusion, votre rapporteur pour avis vous proposera de supprimer cette affectation au fonds de réserve, et, en loi de finances, de l'affecter exclusivement au désendettement de l'Etat.

Enfin, l'article 24 du projet de loi de financement de la sécurité sociale modifie les règles de répartition du produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital en l'affectant uniquement au risque vieillesse. Ainsi, la CNAMTS (pour 900 millions de francs) et la CNAF (pour 1,5 milliard de francs) perdent cette ressource qui sera désormais répartie :

• à 50 % pour le fonds de réserve pour les retraites (au lieu de 49 %) ;

• à 30 % à la CNAVTS ;

• à 20 % à la première partie du FSV (nouvelle ressource de 2,4 milliards de francs).

Au total, ce seront 31,8 milliards de francs qui devraient être ajoutés au fonds de réserve pour l'année 2001.

Le compte du FSV en encaissements/décaissements
(2 ème section)

(en millions de francs)

1999

2000

2001

Ressources

2.007

21.271

31.790

Excèdent du FSV 1 ère section

0

nd

nd

Prélèvement de 2 % sur le capital

5.410

5.750

Acompte de l'excèdent de la CNAVTS (n)

-

2.900

0

Affectation de l'excèdent de la CNAVTS (n-1)

-

5.033

1.421

Versement des caisses d'épargne

-

4.719

4.719

Versement de la CDC

-

3.000

0

Licence des téléphones mobiles de 3 ème génération

-

-

18.500

Produits financiers

7

209

1.400

C3S

2.000

-

Emplois

-

-

-

Solde (ressources - emplois)

2.007

21.271

31.790

Solde cumulé

2.007

23.278

55.068

Source : annexe f au PLFSS 2001

Cependant, ces projections négligent, toutes, la question de l'affectation de l'excédent de la première section du FSV au fonds de réserve. Le FSV avait un excédent structurel tendanciel qui se retrouve affecté par les mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. En deux ans, le solde positif cumulé du FSV, destiné à alimenter le FSV, sera réduit de 7,4 milliards de francs liés soit à des pertes de recettes soit à des hausses de charges pérennes. Au total, ce sont donc des recettes qui n'iront pas au fonds de réserve (cf. supra ).

Dégradation du solde de la première partie
du FSV en 2001

(en milliards de francs)

Perte de 0,15 point de CSG

- 7

Transfert au FOREC des droits sur les alcools

- 5,7

Transfert de la CNAF d'une partie du 2 % sur le patrimoine

+ 1,4

Transfert de la CNAMTS d'une partie du 2 % du patrimoine

+ 0,9

Transferts de la CNAF relatifs aux majorations de pension

+ 2,9

Nouvelles charges du FSV

- 3,2

Total

- 10,4

Le gouvernement a donc choisi : entre tenter aujourd'hui de financer les 35 heures et résoudre demain le problème des retraites, il a préféré la première solution et ponctionné 7,4 milliards de francs sur le FSV alors que cette somme aurait dû aller au fonds de réserve.

De même, le fonds de réserve doit recevoir l'excédent de C3S de l'année. En réalité, le gouvernement a, un nouvelle fois, ponctionné pour financer le déficit du BAPSA, privant le fonds de réserve de 1,35 milliard de francs, qui succède au milliard de francs prélevé en 1999 et 2000.

Ainsi, le fonds de réserve n'a jamais reçu de ressources en provenance du FSV et n'a reçu depuis 1999 que deux milliards du produits de la C3S. Or il faut rappeler les prévisions du gouvernement lors de la déclaration du Premier ministre le 21 mars 2000 quand il annonçait un fonds doté de 1.000 milliards de francs d'ici à 2020 : elles se fondaient sur 4.000 milliards de francs issus de ces deux sources, soit 20 milliards de francs par an.

Alimentation du fonds de réserve pour les retraites (2000-2020)

(en millions de francs)

Ressources

Cumul des flux annuels

Excédents de la CNAVTS

100

Excédents C3S et FSV

400

Prélèvement de 2 % sur les revenus du capital

150

Produit des parts sociales des caisses d'épargne et versement de la caisse des dépôts et consignations

20

Revenus financiers

330

Total estimé en 2020

1.000

*

Plus de deux ans après la création du fonds, et huit mois après les déclarations du gouvernement, le fonds de réserve de toute évidence connaît un rythme de progression bien inférieur à ce qui était prévu et, surtout, bien inférieur aux besoins. De plus, rien n'a été mis en place pour sa gestion et son fonctionnement. On peut donc se demander si, à l'image de l'ensemble de la politique du gouvernement en matière de vieillesse, le fonds de réserve existe vraiment.

* 45 Cf. projet de loi sur l'épargne salariale, articles 6 ter et 7.

* 46 Le budget supportera probablement aussi une charge fiscale liée au traitement comptable des sommes déboursées pour cette acquisition par les opérateurs.

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