D. LE DISPOSITIF DE GESTION DES CRISES DOIT ÉVOLUER

Le dispositif de gestion de crise a été mis en oeuvre dans un contexte particulièrement difficile, dans un pays privé d'une partie de ses infrastructures de transport, de communication, et d'alimentation en électricité.

La situation de crise déclenchée par les tempêtes de décembre 1999 a permis de constater que l'organisation du dispositif de secours n'avait pas suivi les évolutions de la société. Cette organisation est restée très centralisée et très centrée sur les services de l'Etat. Elle ne prend pas suffisamment en compte les responsabilités des collectivités locales, et n'associe pas suffisamment les élus à l'élaboration et à la mise en oeuvre des dispositifs de gestion de crise. Elle doit également prendre en compte la montée en puissance des grands opérateurs privés gestionnaires de réseaux, et d'une façon générale l'appui que peut apporter le secteur privé face à une crise de grande ampleur qui déborde les moyens d'intervention du secteur public.

1. L'amélioration du dispositif public

Au sein du dispositif public, une réflexion devra être engagée sur la pertinence des niveaux d'intervention, et sur le maillage du territoire.

Plusieurs de nos interlocuteurs ont insisté sur la nécessité de disposer d'un échelon assez vaste pour permettre une bonne mobilisation des moyens en personnel et en matériel. Ils nous ont indiqué qu'une réflexion était actuellement en cours sur un redécoupage des zones de défense, de façon à mieux intégrer la région Centre dans le dispositif, et sur un renforcement de leurs moyens.

Les modes de transmission des différents services appelés à intervenir devront également, semble-t-il, être réexaminés de façon à s'assurer de leur interopérabilité : il faut éviter à l'avenir que les différents corps de secours soient dans l'impossibilité de communiquer entre eux du fait de l'incompatibilité de leurs systèmes de radio .

D'une façon générale, les dysfonctionnements provoqués par les tempêtes mettent à jour un problème récurrent de l'aménagement du territoire : le regroupement des moyens et des infrastructures au détriment de l'échelon local, outre qu'il accentue la désertification du monde rural, a contribué à fragiliser de vastes pans du territoire dans cette situation de crise .

Les retours d'expérience ont également souligné l'intérêt des structures de proximité, et en particulier des centres de première intervention (CPI), qui ont donné la preuve de leur efficacité et de leur caractère opérationnel.

L'expérience a montré qu'ils ont toute leur place à l'échelon local, et que celle-ci doit être réaffirmée.

2. ... passe par une meilleure association avec les élus

Les tempêtes de décembre 1999 ont illustré la place prise par les collectivités territoriales dans l'organisation du territoire et montre que les élus locaux -maires, conseillers généraux- sont des acteurs majeurs de la gestion des crises et doivent être associés à l'élaboration des dispositifs comme à leur mise en oeuvre.

Les maires ont assuré le lien avec la population, particulièrement dans le cas des habitats dispersés, et ont pris les premières mesures d'urgence, avec les moyens limités dont ils disposaient.

Les départements ont mis en place, en liaison avec les préfectures, des cellules de crise, qui se sont attachées, dans un premier temps à la diffusion de l'information, et à l'organisation des secours. Les conseils généraux se sont réunis très rapidement pour voter des plans d'aide de plusieurs millions de francs, afin de procéder aux réparations urgentes et de venir en aide aux petites communes en difficulté. En Charente-Maritime, une enveloppe de 200 millions de francs a été votée à cette fin. En Dordogne, ces crédits exceptionnels se sont élevés à 52 millions de francs, en Meurthe-et-Moselle à près de 25 millions de francs, dans l'Orne à 10 millions de francs...

Or les collectivités territoriales n'ont pas été jusqu'à présent associées à l'élaboration des plans ORSEC et des plans de crise, alors qu'elles disposent d'une excellente connaissance de la géographie physique et humaine de leur territoire. Aucune information préalable n'est dispensée aux élus sur la conduite à tenir en cas de crise grave, alors qu'ils constituent des relais de communication privilégiés avec la population.

3. ... une meilleure prise en compte des capacités d'intervention des moyens privés

Le caractère global de la crise engendrée par les tempêtes de décembre 1999 a souligné l'insuffisance des moyens d'intervention publics en hommes et en matériel, et manifesté la nécessité de s'appuyer également sur les entreprises et les bonnes volontés privées.

L'incapacité des services publics à répondre à la demande de groupes électrogènes en a sans doute été l'illustration la plus criante.

En outre, les règles de passation des marchés publics en période de crise et d'urgence ont parfois provoqué des blocages et des délais mal ressentis dans des situations difficiles.

Sans doute conviendrait-il, et de nombreux élus locaux le suggèrent, de réexaminer si un assouplissement des procédures de réquisition et de passation de marchés ne pourrait être envisagé pour mieux répondre aux exigences de semblables situations de crise.

Enfin, le statut des collaborateurs occasionnels du service public , qui interviennent le plus souvent bénévolement dans des situations parfois périlleuses, devrait sans doute être conforté, de façon à ne pas pénaliser des volontaires qui ont pris des risques au service de la collectivité.

4. ... et souligne l'intérêt de la coopération transfrontalière

L'ampleur des dégâts occasionnés par les tempêtes sur l'ensemble du territoire française est venue confirmer l'intérêt d'une coopération renforcée avec nos voisins européens immédiats pour l'organisation des secours. Les liens qui ont été tissés avec les centres opérationnels de certains de ces pays frontaliers, et notamment de l'Espagne et de l'Italie, ont effectivement permis l'envoi rapide de renforts. Ces liens directs transfrontaliers qui permettent, en situation de crise, d'accélérer l'instruction des demandes, devront à l'avenir être développés avec nos principaux voisins.

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