4. L'emploi dans l'hôpital public : 35 heures et fonds pour l'emploi hospitalier (articles 17 et 18)

L'article 17 du présent projet de loi de financement définit les modalités de mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière.

Il modifie l'ordonnance n° 82-272 du 26 mars 1982 relative à la durée hebdomadaire du travail dans la fonction publique hospitalière afin de tenir compte de l'application des 35 heures dans l'ensemble de la fonction publique à compter du 1 er janvier 2002. Ainsi il est précisé que le temps de travail des agents de la fonction publique hospitalière est réduit dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Ce décret fixe également les règles relatives à l'organisation du travail des mêmes agents en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces établissements.

D'après le gouvernement, 45.000 emplois spécifiques pour la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière seront créés sur les trois années 2002 à 2004. En 2002, ce sont l'équivalent de 12.300 emplois qui pourront être pourvus soit 27,5 % du total des créations annoncées.

Votre rapporteur pour avis souhaite d'abord s'interroger sur la pertinence de la présence de cette disposition dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale puisque, ayant une dimension purement statutaire, elle n'a aucune incidence financière directe.

Votre rapporteur pour avis estime également que le gouvernement veut imposer l'application des 35 heures dans un univers, l'hôpital public, où la gestion et l'organisation du temps sont très particulières et seront incompatibles avec une réduction immédiate du temps de travail. Le manque de personnel, les nombreux départs à la retraite dans les prochaines années et plus encore la nécessité d'assurer la continuité des soins à l'hôpital, sont autant d'obstacles à l'application de la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière que ne permettra pas de contourner la création encore hypothétique de quelque 45.000 postes supplémentaires d'ici 2004.

Parallèlement, l'article 18 du présent projet de loi de financement a également un effet incident sur l'emploi dans le secteur hospitalier puisqu'il vise à majorer la cotisation versée par les établissements de santé au fonds pour l'emploi hospitalier (FEH).

Le FEH a été créé par l'article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique. Il est géré par la Caisse des dépôts et consignations.

Il prend en charge :

- les deux tiers des surcoûts des rémunérations des agents à temps partiel à 80 % (rémunérés à 86 %) et à 90 % (rémunérés à 91 %) ;

- les deux tiers de l'indemnité exceptionnelle de 30 % des agents en cessation progressive d'activité ;

- le remboursement des engagements de servir des agents contraints d'effectuer une mobilité professionnelle à la suite d'une réorganisation ou pour suivre un conjoint ;

- le complément de traitement (0,15 %) des agents de catégorie C en congé de formation professionnelle dans le cadre du protocole du 14 mars 2000.

Ces prestations représentent plus de 70 % des dépenses du FEH.

Depuis la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, le FEH finance le remboursement aux établissements de santé du revenu de remplacement que ceux-ci versent aux bénéficiaires de congé de fin d'activité.

Le fonds est financé par une contribution des établissements publics de santé dont le taux plafond a été fixé à 0,8 % des rémunérations soumises à retenues pour la pension. Le taux applicable a ensuite été fixé par décret, à 0,67 % à compter du 1 er janvier 1999 par le décret n° 98-1226 du 29 décembre 1998, et relevé à 0,8 % à compter du 1 er janvier 2000 par le décret n° 2000-23 du 12 janvier 2000.

Depuis sa création, le fonds est déficitaire. Mais les décalages des remboursements et le portefeuille mobilier (300 millions de francs, soit 45,73 millions d'euros) permettent au FEH d'avoir une trésorerie positive en fin d'exercice même si celle-ci se dégrade d'année en année.

Situation financière du FEH

1997

1998

1999

2000

2001 prévision

Ressources

- contribution des établissements de santé

- produits financiers

399,2 MF

14,3 MF

409,1 MF

12,7 MF

629,5 MF

15,1 MF

776,9 MF

7,2 MF

804,4 MF

0

Dépenses

- indemnité exceptionnelle CPA

- prise en charge de rémunération dans le cadre du temps partiel

- aides à la mobilité et actions de formation

- financement du CFA hospitalier

- frais de gestion


66,6 MF

390,1 MF

0 MF

-
10 MF


41,3 MF


615,9 MF

2,5 MF

-
10,3 MF


21,5 MF


411,1 MF

6,5 MF

29,1 MF
11,4 MF


37,8 MF


599,7 MF

16,3 MF

227,3 MF
11,6 MF





686, 1 MF

280, 2 MF
11,6 MF

Solde de l'exercice

- 53,2 MF

- 248,4 MF

165 MF

- 108,7 MF

- 161, 9 MF

Dette cumulée

- 79,9 MF

- 328,3 MF

- 163,3 MF

- 272,0 MF

- 433,8 MF

Source : Caisse des dépôts et consignations

L'article 18 du présent projet de loi de financement vise à porter le taux plafond de la contribution des établissements de santé au FEH de 0,8 % à 1,8 % « compte tenu de la forte mobilisation du fonds liée au succès des divers dispositifs qu'il finance » et afin de lui permettre « d'assurer la couverture budgétaire relative à ses missions ».

Or, compte tenu de la situation financière du FEH, fournie par la Caisse des dépôts et consignations, votre rapporteur a été en mesure de calculer la majoration du taux qu'il aurait été nécessaire d'appliquer en vue de parvenir un équilibre budgétaire du FEH.

Ainsi, d'après les chiffres fournis par la CDC, en 2001, la contribution des établissements de santé devrait s'élever à 804,4 millions de francs (122,6 millions d'euros), tandis que le solde du FEH au titre de l'exercice 2001 correspond à un déficit de 161,9 millions de francs (24,7 millions d'euros) et que la dette cumulée du FEH en 2001 est de l'ordre de 434 millions de francs (66 millions d'euros).

La contribution des établissements de santé résulte actuellement de l'application d'un taux de 0,8 % des rémunérations soumises à retenue pour la pension, ce qui correspond donc à un total du montant de ces rémunérations de l'ordre de 100,55 milliard de francs (15,3 milliards d'euros).

De façon optimale, si l'on souhaite effacer la dette cumulée du fonds (434 millions de francs) en un seul exercice, le taux de la contribution des établissements de santé doit donc s'élever à : [(804,4 + 434)] 100 100.550, soit 1,23 %.

Votre rapporteur estime donc que le nouveau taux plafond défini par le gouvernement de 1,8 % des rémunérations des établissements de santé soumises à retenue pour la pension dépasse largement les moyens nécessaires au fonds pour assurer ses missions.

En 2002, le gouvernement prévoit une augmentation du taux, à l'intérieur du nouveau plafond fixé par la loi soit 1,8 %, de 1 %, ce qui stabiliserait le déficit du FEH à 200 millions de francs (30,5 millions d'euros). Votre rapporteur pour avis souhaite que le gouvernement fixe le nouveau taux plafond à 1,2 % ce qui permettrait d'assainir la situation budgétaire du fonds à moyen terme.

En outre, votre rapporteur pour avis considère que, par le biais d'une augmentation du taux de la contribution des établissements de santé au FEH, contribution assise sur les rémunérations de ces établissements soumises à retenues pour la pension, c'est-à-dire in fine sur la masse salariale de ces établissements, le gouvernement réduit d'autant la dotation nationale hospitalière (l'ONDAM hôpital) qui inclut une enveloppe liée à l'évolution de la masse salariale des établissements de santé. Une partie de la marge de manoeuvre budgétaire laissée aux hôpitaux est donc en quelque sorte confisquée par l'obligation légale de cette augmentation de leur contribution au FEH. Ce que l'Etat accorde d'une main, il le reprend donc de l'autre, espérant ainsi un prélèvement supplémentaire sur l'assurance-maladie.

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