Projet de loi de finances pour 2002 - Tome I : Agriculture

CESAR (Gérard)

AVIS 89 - TOME I (2001-2002) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES

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Table des matières




N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

AGRICULTURE

Par M. Gérard CÉSAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Gérard Larcher, président ; Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Jean-Marc Pastor, Mme Odette Terrade, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Patrick Lassourd, Bernard Piras, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut, André Ferrand, Hilaire Flandre, François Fortassin, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kerguéris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 3 ) (2001-2002)


Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de budget de l'agriculture pour 2002 n'est pas à la hauteur de la situation de crise traversée actuellement par le monde agricole.

L'agriculture a été durement éprouvée pendant l'année qui s'est écoulée. La nouvelle crise de l'ESB, déclenchée il y a exactement un an, a bouleversé l'économie de toute une filière, à travers des mesures qui, telles l'interdiction des farines animales et la mise en place de mesures drastiques de dépistage et de prévention, étaient pourtant, sans nul doute, nécessaires.

Dans le même temps, l'image volontiers colportée par les médias des destructions massives de viande bovine dans le cadre des opérations de retrait-destruction, bientôt relayée par celle des abattages préventifs d'animaux dans les départements touchés par la fièvre aphteuse, a profondément marqué l'opinion publique et laissé la profession impuissante et découragée.

Pour la filière de l'élevage bovin, les conséquences sont sans précédent. Après avoir diminué de 60 % au plus fort de la crise, la consommation de viande bovine semble rester durablement inférieure à son niveau antérieur. Pendant des mois, les éleveurs ont été tenus de garder à l'étable des animaux consommant les réserves fourragères, alors même que le prix de la paille connaissait une flambée au printemps. L'effondrement des cours des bovins quand, dans le même temps, les prix de vente aux consommateurs demeuraient élevés, a suscité cet été chez les éleveurs une révolte bien légitime.

La situation est particulièrement dramatique pour le bassin allaitant qui, ayant investi pendant des années dans une stratégie de qualité, se trouve de surcroît fragilisé par une organisation orientée vers l'exportation. Les crises de santé animale provoquent facilement la fermeture des frontières, souvent bien au-delà de ce qui est nécessaire. C'est ce qu'a illustré cette année l'attitude de l'Italie, qui a suspendu les importations de broutards provenant de départements français pourtant exempts de foyer de fièvre aphteuse.

Spécificité française dans une production bovine européenne très largement tournée vers l'élevage laitier, le bassin allaitant attend désormais la mise en oeuvre du prochain plan d'aides annoncé récemment par le ministre de l'agriculture.

Une autre crise a touché cette année un secteur tout aussi important de notre production agricole -il alimente, en effet, le premier poste des exportations agro-alimentaires de la France- : celui de la viticulture. Cette crise s'est traduite par une diminution significative des ventes des vins de table et d'une partie des vins de pays, qui a rendu nécessaire de recourir à plusieurs distillations.

Prenant conscience de la montée en puissance de nouveaux pays producteurs sur le marché mondial des vins, et confronté à une diminution structurelle de la consommation française, le secteur viticole a entrepris, sous l'égide du ministère de l'agriculture et de la pêche, de définir un plan stratégique pour rétablir sa situation. Le groupe de travail mis en place par votre commission sur l'avenir de la viticulture espère apporter sa contribution à cette réflexion.

Il reste que les crises touchant les secteurs bovin et viticole appellent, de manière urgente, un renforcement des organisations communes de marchés (OCM) qui les encadrent au niveau européen.

Au-delà de ces deux crises sectorielles, il convient d'insister sur la nouvelle diminution du revenu agricole durant l'année 2000. Cette baisse s'établit à -2,1 % si l'on retient comme indicateur le revenu d'entreprise agricole. A l'évidence, il est de plus en plus difficile de vivre de l'agriculture.

Dans ces conditions, comment s'étonner de la diminution continue du nombre d'installations, et de la disparition, selon les chiffres donnés par le dernier recensement agricole, d'un tiers des exploitations agricoles depuis 1988 ? Il est temps de mettre en place une politique volontariste qui permette aux agriculteurs de vivre dignement du revenu tiré de leur production.

Avant d'en venir à l'examen des crédits de l'agriculture, il est nécessaire d'évoquer les discussions qui se déroulent à Doha et qui devraient ouvrir la voie à de nouvelles négociations multilatérales incluant l'agriculture. Grande puissance exportatrice, l'Union européenne ne peut que tirer parti d'un renforcement des règles de discipline de l'OMC. Il est, par exemple, souhaitable, d'élargir le champ des aides considérées comme subventions à l'exportation afin de tenir compte des soutiens déguisés versés par certains Etats sous les formes les plus diverses.

Cependant, l'Union européenne ne doit pas s'engager dans de nouvelles concessions sans contreparties, pas plus qu'elle ne doit minorer les efforts qu'elle a déjà accomplis pour respecter les engagements de l'accord de Marrakech . A cet égard, la signature d'une déclaration qui figerait les résultats des futures négociations agricoles ou qui permettrait le traitement séparé des différents volets de celle-ci, serait inacceptable.

Au vu du désarroi ressenti par une grande majorité du monde agricole, le projet de budget de l'agriculture qui vous est ici soumis apparaît bien insuffisant.

Passant de 5.078 millions d'euros en 2001 à 5.075 millions pour 2002, les crédits de l'agriculture connaissent une diminution de 0,08 %. Encore cette diminution ne prend-elle pas en compte la budgétisation d'une partie du Fonds national des Haras et des activités hippiques, sans laquelle la baisse subie atteint 0,6 % soit, en termes réels, une diminution de 2,6 %. Ainsi, le budget de l'agriculture est le seul budget civil dont le montant diminue, ce qui souligne l'intérêt porté par le Gouvernement à ce secteur !

Ces crédits font l'objet d'une répartition entre les cinq grandes priorités affichées par le Gouvernement:

- le renforcement de la sécurité alimentaire et de la qualité des produits ;

Cet objectif, qui est explicité dans l'agrégat n° 12 du bleu budgétaire, se voit affecter une enveloppe de crédits d'un montant de 388,5 millions d'euros. Les lignes budgétaires qui bénéficient de majorations sont principalement celles consacrées à la lutte contre les maladies animales, notamment l'ESB, (+ 19,6 %), à la sélection végétale (+ 14,3 %), et à l'identification des animaux (+ 17,6 %).

- la promotion de la multifonctionnalité de l'agriculture, qui se voit attribuer 752,7 millions d'euros ;

Les principales augmentations de crédits concernent les contrats territoriaux d'exploitation (+ 25 %), les moyens de fonctionnement du CNASEA (+23 %), les bâtiments d'élevage et la maîtrise des pollutions agricoles (+19 %), les aménagements fonciers et hydrauliques, et le Fonds national de garantie des calamités agricoles, qui se voit allouer 40 % de crédits supplémentaires.

S'agissant des CTE, votre rapporteur pour avis se demande si une telle progression est justifiée, compte tenu du succès mitigé de cet instrument. Est-il nécessaire de souligner que deux ans après leur création, moins de 15.000 contrats ont été signés, alors que le Gouvernement ambitionnait 50.000 signatures dès la première année.

En ce qui concerne le Fonds national de garantie des calamités agricoles, l'augmentation de 3 millions d'euros de sa dotation, qui est ainsi portée à 10,7 millions d'euros, doit servir à la mise en place du premier volet de la réforme de l'assurance-récolte. Votre rapporteur pour avis tient à rappeler que le Parlement souhaiterait être associé à cette réforme, attendue depuis longtemps par la profession agricole, ce qui passe notamment par la publication du rapport Babusiaux sur la gestion des risques en agriculture .

- le soutien aux filières et à la régulation des marchés est doté de 818,09 millions d'euros ;

Au sein de cet objectif, le Gouvernement a considéré comme prioritaires les actions en faveur de la politique de la qualité (+4,3 %), la gestion des aides versées dans le cadre de la PAC (+6%). Il a également majoré de 29% les crédits consacrés aux primes au maintien du troupeau de vaches allaitantes, portés à 794 millions d'euros, et au soutien l'investissement des industries agro-alimentaires (+ 9,4 %).

Votre rapporteur pour avis tient toutefois à souligner l'insuffisance de la dotation allouée à l'INAO, dont la progression affichée (+4 %) correspond à une augmentation de seulement 700.000 euros, ce qui est loin d'être suffisant pour satisfaire les besoins de cet organisme, récemment confronté à une extension significative de ses missions.

- l'effort en faveur de l'enseignement et de la recherche, auxquels sont affectés 1173,02 millions d'euros ;

Au titre de cet objectif, les augmentations de crédits concernent surtout l'enseignement technique agricole et l'enseignement supérieur public.

- la rénovation de la politique forestière, à laquelle 308 millions d'euros sont alloués .

L'analyse de ces priorités conduit à formuler trois remarques :

La première porte sur l'absence de continuité dans les efforts affichés . Ainsi, après une augmentation de 31 % de ses crédits en 2001, la politique forestière voit ses dotations diminuer de 7 % en dépenses ordinaires et de 15 % en dépenses en capital.

Il faut souligner, ensuite, la tendance du Gouvernement à profiter de l'augmentation des cofinancements communautaires pour diminuer son effort financier en faveur d'un secteur ou d'une mesure. C'est le cas pour les crédits de la forêt, mais également pour ceux destinés à la dotation d'installation en faveur des jeunes agriculteurs ou encore aux prêts bonifiés à l'agriculture.

Enfin, force est de constater que les véritables priorités du Gouvernement -la sécurité alimentaire et la multifonctionnalité de l'agriculture- si légitimes soient-elles n'apportent pas de vraie réponse aux préoccupations urgentes des agriculteurs.

Votre rapporteur pour avis déplore, à cet égard, la stagnation des crédits destinés au versement des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) et aux offices agricoles.

De même, la diminution de 9,3 % des crédits prévus pour la dotation d'installation des jeunes agriculteurs (DJA) démontre l'absence de volontarisme politique dans ce domaine, le Gouvernement se contentant de constater chaque année la chute des installations, pour ajuster à la baisse, l'année suivante, les crédits qu'il y consacre, alors qu'il pourrait les utiliser pour abonder des dispositifs fiscaux incitatifs, notamment en matière de transmission des exploitations.

Par ailleurs, ce budget ne tient pas compte de la profonde crise dans laquelle se trouvent certains secteurs de notre agriculture.

La simple reconduction à 16,77 millions d'euros des crédits destinés aux procédures « agriculteurs en difficulté » dites « procédures Agridiff », de même que celle de la dotation au Fonds d'allègement des charges (FAC) ne semble pas suffisante au regard des importants besoins des exploitants en prêts et soutiens financiers, en particulier dans le domaine de l'élevage.

S'agissant des dispositifs de cessation anticipé d'activité, dont les crédits diminuent encore cette année de 39 millions d'euros du fait de l'extinction programmée de leur régime, il est dommage qu'ils ne prennent pas en compte la nécessité de mettre en place un accompagnement social à la restructuration de certains secteurs, comme celui de l'élevage bovin. Des mesures d'aide au départ des vignerons âgés sont également attendues dans la filière viticole .

Loin d'être à la hauteur de la crise, économique pour certains secteurs, et plus largement morale, vécue actuellement par le monde agricole, ce budget ne mérite pas l'approbation de notre commission. Votre rapporteur vous proposera, par conséquent, de ne pas adopter les crédits de l'agriculture.

CHAPITRE IER -

LE CONTEXTE DU PROJET DE BUDGET

I. LES RESULTATS DE L'AGRICULTURE FRANCAISE EN 2000

A. LE REVENU AGRICOLE

1. L'évolution de la valeur ajoutée

a) Une progression modérée de la production en valeur

Pour l'année 2000, les comptes de l'agriculture 1( * ) font apparaître une légère diminution de la production en volume (-0,4 %) , après six années de hausse consécutive au taux annuel moyen de 1,9 %.

Cette diminution s'explique par une diminution de 1 % des productions végétales alors que les productions animales restent stables à 0,1 %.

S'agissant des productions végétales, la baisse de volume concerne particulièrement :

- les oléoagineux (-14,7 %) et protéagineux (-25,4 %) dont le régime a été rendu moins attractif que celui des céréales par l'Agenda 2000 ;

- les betteraves (-4,6 %), en raison de la réduction des surfaces cultivées et de l'effet de mauvaises conditions climatiques ;

- les vins (-2,4 %), après une année 1999 marquée par une production importante.

A la différence des évolutions constatées l'année précédente, l'ensemble des productions animales sont restées stables en 2000.

La production de gros bovins progresse de 0,9 % en volume. La production de volailles, en baisse de 2,4 % l'année précédente, se redresse légèrement de 1 %. Cependant, la production d'oeufs diminue (-2,1 %).

La production de lait et de produits laitiers est quasiment stable.

Enfin, les autres productions animales, au premier rang desquelles celle de veaux (-4,4 % ), décroissent légèrement.

Les prix hors subventions augmentent de 1,8 %, la croissance relativement forte des prix des productions animales (+4,9 %) n'étant pas compensée par la diminution modérée (-0,3 %) de ceux des productions végétales .

La stabilité des prix des productions végétales recouvre des évolutions différentes selon les produits.

Les prix des protéagineux (+12,1 %) augmentent de manière soutenue, en raison de la diminution des volumes produits, ainsi que de la forte demande de protéines végétales en fin d'année, consécutive à l'interdiction de l'utilisation des farines carnées en alimentation animale.

De même, le prix des fruits (+5,7 %) et celui des pommes de terre (+4,6 %) progressent, après une diminution marquée en 1999.

Les prix des céréales connaissent en revanche une baisse sensible (-1,9 %), imputable à la diminution du prix d'intervention, à une récolte abondante, mais aussi à une qualité inégale en raison des aléas climatiques.

Enfin, les prix de vins continuent à décroître (-1,6 %), en raison de l'importance des stocks.

Les prix des productions animales ont, en revanche, fortement augmenté, sauf pour la viande bovine.

La bonne tenue des cours de la viande bovine au cours des dix premiers mois explique la progression de son prix sur l'année 2000 (+3,6 %), en dépit de l'effondrement des prix d'achat aux producteurs à partir du mois d'octobre.

A près plusieurs années de baisse liée à des crises de surproduction, les prix des productions hors sol se redressent en 2000. Cette hausse atteint ainsi 21,8 % pour les porcins, 2,9 % pour les volailles et 16,1 % pour les oeufs.

? Il ressort de l'analyse de ces deux séries de données (production en volume et prix) que la production agricole en valeur progresse modérément, au rythme de 1,4 % sur l'année 2000 , alors qu'elle avait diminué de 2,1% en 1999.

b) L'augmentation des consommations intermédiaires

L'année 2000 marque une rupture dans l'évolution qui caractérisait les consommations intermédiaires depuis une décennie . Leurs prix qui diminuaient jusqu'à présent ont, en effet, subi un retournement de tendance à la hausse , notamment en raison de l'augmentation du prix des aliments pour animaux, qui représentent près d'un cinquième de la valeur totale des consommations intermédiaires. En conséquence, la valeur des consommations intermédiaires a progressé en 2000 de 2,7 %.

Outre la hausse du coût du soja liée à l'appréciation du dollar, l'interdiction en fin d'année de l'utilisation des farines carnées en alimentation animale, qui a tendu le marché des protéines végétales, a poussé à la hausse les prix des aliments pour animaux (+5,8 %). Leur consommation en valeur progresse de ce fait de 4,9 % .

A l'inverse, le prix (-1,9) et le volume (-0,7 %) des engrais étant en baisse, la valeur des consommations d'engrais diminue de 2,6 %.

Enfin, le poste énergie et lubrifiants , qui ne représente que 6,5 % de la valeur de l'ensemble des consommations intermédiaires, connaît une augmentation substantielle en prix (+21,4 %) et en valeur (+19,3 %) en raison de l'envolée des prix des produits pétroliers en 2000.

ÉVOLUTION DES CONSOMMATIONS INTERMEDIAIRES EN 2000/1999

(en %)

 

Volume

Prix

Valeur

Ensemble

+O,1

+2,6

+2,7

Dont Aliments pour animaux 1 (19,6 %)

-0,9

+5,8

+4,9

Engrais (8,9 %)

-0,7

-1,9

-2,6

Produits de protection des cultures (8,1 %)

+0,2

+0,2

+0,4

Energie et lubrifiants (6,5%)

-1,7

+21,4

+19,3

Source : Insee

c) La stabilité de la valeur ajoutée

Selon les comptes de l'agriculture 2000, la valeur ajoutée brute de l'agriculture est restée quasiment stable à 0,3 % en valeur, alors qu'elle a diminué de 1,4 % en volume.

La consommation de capital fixe, en hausse depuis 1996, augmente de 3 % en valeur sur l'année 2000, en conséquence de la forte reprise des investissements ces dernières années.

Obtenue en soustrayant la consommation de capital fixe de la valeur ajouté brute au prix de base, la valeur ajouté nette s'établit à 156,666 milliards de francs, se dégradant de 0,6 % (1,5 % en termes réels) au cours de l'année 2000.

2. Une augmentation trompeuse du revenu agricole

a) Le résultat agricole net

Obtenu par l'addition, à la valeur ajouté nette, des subventions d'exploitation, desquelles sont ensuite soustraits les impôts à la production, le résultat agricole net s'élève à 157, 981 milliards de francs pour l'année 2000, en régression (-0,6 %) par rapport à l'année précédente.

Cette stabilité s'explique par la neutralisation de la légère diminution du montant des subventions d'exploitation versées par l'augmentation des impôts sur la production.

b) Le résultat net par actif

Compte tenu de la diminution de l'emploi total, qui atteint -1,8 % en nombre d'unités de travail annuel, le résultat net agricole par actif augmente de 1,2 % en 2000, soit de 0,3 % en termes réels .

Votre rapporteur pour avis insiste sur la nécessité de considérer avec la plus grande précaution ces chiffres, qui tendraient à faire croire que les agriculteurs se sont enrichis en 2000, alors qu'une étude récente de l'INSEE indique qu'un quart des ménages d'agriculteurs vivent encore en dessous du seuil de pauvreté.

c) Le revenu d'entreprise agricole

Cet indicateur est obtenu en déduisant du résultat agricole net les charges salariales, les intérêts et les charges locatives nettes.

Ces trois éléments augmentant de 1,8 % sur l'année 2000, en raison de la forte progression des charges salariales -salaires et cotisations sociales-, le revenu net d'entreprise agricole accuse une baisse importante de 2,1 %, soit 3 % en termes réels.

? Evolution sectorielle du revenu agricole

L'évolution du revenu agricole de certaines catégories de producteurs porte la marque de l'Agenda 2000, dont l'année 2000 était la première année d'application.

C'est le cas pour les exploitations de grandes cultures, dont le revenu a diminué de 9 % . Cette diminution atteint 13 % pour les producteurs de céréales, d'oléagineux et de protéagineux en raison des baisses de prix des céréales et des réductions d'aides aux cultures oléo-protéagineuses. Elle est toutefois plus limitée (-2 %) pour les autres grandes cultures, telles que la production de betteraves et celle de pommes de terre.

Durement éprouvés par la crise de confiance à l'égard de la viande bovine à partir d'octobre 2000, les éleveurs bovins viande sont censés avoir bénéficié d'une augmentation de leurs revenus de 14% , grâce à la bonne tenue des cours en début d'année et à la revalorisation des aides directes prévue par l'Agenda 2000. La progression du revenu des éleveurs laitiers a été moindre (+5%) dans la mesure où ces derniers ont été moins concernés par la revalorisation des aides directes.

Ces résultats, en décalage total avec la situation dramatique supportée actuellement par les éleveurs bovins, illustrent les limites des statistiques, qu'il convient, là encore, d'utiliser avec la plus extrême prudence.

Confortant une sortie de crise amorcée depuis le début de l'année, le report de consommation sur les viandes blanches a contribué à l'augmentation du revenu de l'élevage hors sol -porcins et volailles-, qui s'élève à 29,3 %.

Le résultat des éleveurs ovins a, quant à lui, progressé plus modérément (+3 %).

En horticulture , le revenu a augmenté de 7 %, grâce à l'appréciation du prix des légumes.

Le revenu de la production fruitière arboricole n'a progressé que de 0,5 % .

Enfin, le revenu de la viticulture s'est considérablement dégradé, après des années de hausse continue depuis 1993. Cette diminution a touché les productions AOC (-8,4 %) comme les vins courants (-7,1 %) .

3. L'évolution de l'investissement agricole

Alors que les investissements du secteur agricole s'étaient redressés de 1993 à 1999, ils connaissent à nouveau une stagnation (-0,1 %) en 2000.

Cette stabilité recouvre toutefois des réalités différentes.

Ainsi, la formation brute de capital fixe (FBCF) en biens non agricoles a légèrement diminué (-1,3 %) en raison de la baisse significative (-4,4 %) des investissements en matériel, et alors même que les investissements en bâtiments ont augmenté de 5,7 %.

A l'inverse, la FBCF en biens agricoles est en forte augmentation (+8,7%), l'augmentation du nombre de gros bovins en stock en fin d'année, liée à la crise de l'ESB, ayant poussé à la hausse la FBCF bétail.

FORMATION BRUTE DE CAPITAL FIXE DE LA BRANCHE AGRICULTURE

 

Montant en 2000

(en milliards d'euros
)

Evolution 2000/1999

(en %)

FBCF en biens non agricoles

- matériel

- bâtiments

8146,87

5313,15

2670,14

-1,3

-4,4

5,7

FBCF en biens agricoles

- bétail

- plantations

1156,02

588,15

567,87

8,7

26,1

-7,1

FBCF totale

9302,89

-0,1

Source : Insee

B. L'EVOLUTION DES STRUCTURES AGRICOLES

1. Le prix des terres agricoles

Selon le service central des enquêtes et études statistiques (SCEES) du ministère de l'agriculture et de la pêche, la tendance à l'augmentation du prix des terres agricoles s'est ralentie en 2000, puisqu'elle s'établit à 4 %, contre 12,5 % en 1999.

Les plus fortes progressions concernent les terres viticoles, dont les prix ont augmenté de 10 % pour les vignes AOC et de 5,4 % pour les autres vignes. Depuis six ans, l'augmentation du prix des terres viticoles a été de 62 %.

Les hausses enregistrées sont, en revanche, moins importantes pour les terres labourables (+ 4,2 %) et pour les prairies naturelles (+ 3,5 %).

Il convient cependant de nuancer ces évolutions selon les régions , le prix des terres agricoles restant relativement bas -inférieur à 15.000 francs par hectare- dans les régions d'élevage comme les Pays de Loire et la Bourgogne, alors qu'il est très élevé -supérieur à 25.000 francs par hectare- dans les régions à forte concentration urbaine, telles que le Sud-Est, la région parisienne et le Nord de la France.

La poursuite de l'augmentation du prix des terres agricoles tient non seulement à une offre réduite au regard des demandes, mais également à un environnement économique globalement favorable, avec des taux d'intérêt bas qui rendent attractifs les placements fonciers pour les non-agriculteurs et la baisse récente des droits de mutation. Les dernières réformes de la PAC, poussant à l'extensification ont, par ailleurs, stimulé l'agrandissement des exploitations.

Cependant la baisse des revenus agricoles et les crises de l'élevage, ainsi que l'évolution incertaine des taux d'intérêt, ont contribué au ralentissement de la progression des prix en 2000.

2. Les premiers résultats du recensement agricole

Le ministère de l'agriculture et de la pêche a rendu publics, en juin dernier, les premiers résultats du recensement agricole entrepris en octobre 2000. Il s'agit du quatrième recensement de ce type, après ceux de 1970, 1979 et 1988.

Ces résultats font, tout d'abord, apparaître une concentration des exploitations agricoles , dont le nombre s'établit à 664 000, alors qu'il dépassait le million en 1988, ce qui signifie qu'un tiers des exploitations ont disparu depuis cette date.

Parallèlement, la taille des exploitations agricoles, qui atteint 42 hectares en moyenne, s'est accrue de 14 hectares en douze ans.

En outre, parmi ces exploitations, 400.000, qualifiées de « professionnelles » -c'est à dire ayant une superficie d'au moins 12 hectares et utilisant au minimum une personne occupée aux trois quarts de son temps- concentrent 95 % du potentiel agricole.

La conséquence directe de ce phénomène de concentration est une diminution du nombre d'actifs agricoles, dont le nombre a baissé de 35 % depuis 1988. Hors salariés saisonniers ou occasionnels, 1.319.200 personnes travaillent en 2000 à temps plein ou partiel sur les exploitations.

La population agricole est moins jeune, en raison de la diminution des installations qui sont, en outre, plus tardives en conséquence de la prolongation des études. En outre, les conjoints exercent de plus en plus leur activité professionnelle en dehors de l'exploitation.

La deuxième tendance lourde qui ressort du dernier recensement agricole est la spécialisation accrue des exploitations , avec pour conséquence, une diminution du nombre d'exploitations en polyculture-élevage qui ne représentent plus que 19 % des exploitations.

A titre d'illustration, deux tiers des porcs à l'engraissement et des volailles sont aujourd'hui élevés dans des élevages spécialisés hors sol.

On observe également un recul du modèle de l'exploitation individuelle, au profit des formes sociétaires , qui représentent aujourd'hui 19 % des exploitations, contre seulement 7 % en 1988.

Il faut également souligner le mouvement de recomposition des sols agricoles au profit des terres labourables qui, progressant de 7 %, couvrent désormais les deux tiers de la superficie agricole française. A l'inverse les superficies toujours en herbe ont perdu 1,9 million d'hectares depuis 1988.

Enfin, les contrastes entre les agricultures régionales se creusent, les exploitations à fort potentiel économique se situant essentiellement au Nord, à l'Ouest et dans une partie du Sud-Ouest.

3. La diminution continue du nombre d'installations

Selon le rapport d'activité 2000 du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA), le nombre de dossiers d'installation ayant fait l'objet d'un premier versement de la dotation d'installation des jeunes agriculteurs (DJA) a été égal à 6.314 en 2000, contre 6.919 l'année précédente, soit une baisse de 8,74 %.

Parmi ces nouveaux installés aidés, 55 % se situent en zone de plaine, 27 % en zone de défavorisée simple et 18 % en zone de montagne.

Le nombre d'installations régresse de manière continue depuis 1997, alors que la Charte pour l'installation de 1995 avait contribué à relancer leur mouvement.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DES DJA ET DU COÛT BUDGÉTAIRE
SUR LES CINQ DERNIÈRES ANNÉES

Années

Sommes versées
(en millions de francs)

Nombre de bénéficiaires
(premiers versements)

1995

893

7 787

1996

931

8 677

1997

916

9 804

1998

841

8 306

1999

735

6 919

2000

687

6 314

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

Pourtant, 12.677 candidats à l'installation étaient inscrits sur le répertoire à l'installation en 2000. L'analyse de ce répertoire fait apparaître une progression des candidats d'origine urbaine (16 % en 2000) et une diminution des candidats d'origine agricole (56 %) ou rurale (27 %).

Il est vrai que la succession des crises agricoles, dans les secteurs du porc, des volailles, des fruits et légumes et, plus récemment, de l'élevage bovin, a dessiné un contexte défavorable à l'installation.

En outre, la concentration croissante des exploitations, la pression de la hausse des prix du foncier agricole, jointes à la diminution du nombre de départs en retraite, constituent autant de freins à la reprise. La perspective de réformes de la PAC génère également un manque de visibilité qui décourage parfois les jeunes.

Votre rapporteur pour avis estime que le Gouvernement ne peut se contenter de constater comme une fatalité la diminution du nombre d'installations, et de réduire en conséquence les crédits qui y sont consacrés, comme il le propose cette année dans le projet de loi de finances . Il conviendrait, sur ce dossier, d'adopter une stratégie volontariste, qui mobiliserait notamment des dispositifs fiscaux incitatifs tels qu'une exonération totale des plus-values pour les cédants, ainsi qu'une réduction supplémentaire des droits de mutation et des abattements sur les bénéfices en faveur des jeunes agriculteurs.

II. L'ACTION DES POUVOIRS PUBLICS

A. LES CRISES DE SANTÉ ANIMALE

1. L'encéphalopathie spongiforme bovine

a) L'interdiction des farines

En vigueur depuis 1991 pour les bovins et, depuis 1994, pour l'ensemble des ruminants, l'interdiction d'utiliser des protéines animales dans l'alimentation a été étendue à l'ensemble des animaux de rente par un arrêté du 14 novembre 2000. Depuis cette date est ainsi suspendue l'autorisation d'incorporer dans l'alimentation et la fabrication d'aliments pour animaux :

- des farines de viande, des farines d'os, des farines de viande osseuse, ainsi que toute autre protéine d'origine animale, à l'exception des protéines issues du lait, des produits laitiers ou des ovoproduits et de la gélatine de porc ;

- des graisses issues de la transformation des os destinés à la production de gélatine et des graisses obtenues à partir des farines de viande, des farines d'os et des farines de viande osseuse, des farines de volailles, des farines de plumes et des farines de poisson.

Par dérogation à ces dispositions, restent toutefois admis :

- les produits issus de poissons, de crustacés ou coquillages dans l'alimentation des poissons ;

- les farines de poisson dans l'alimentation des animaux autres que ruminants. Cette mesure est autorisée dès lors qu'aucun ruminant n'est détenu sur l'exploitation faisant usage des farines de poisson. Cette mesure, conforme à la décision 2001/9/CE, est introduite par l'arrêté du 13 février 2001.

Ces dispositions ont été complétées par un arrêté du 24 août 2001 qui interdit l'utilisation, pour l'ensemble des animaux de rente :

- des graisses de ruminants, à l'exception des tissus adipeux de bovins collectés à l'abattoir avant fente de la colonne vertébrale ;

- des graisses issues de la transformation des os de ruminants destinés à la production de gélatine ;

- ou des graisses contenant des tissus osseux de ruminants.

L'arrêté précité interdit également l'incorporation dans l'alimentation des ruminants :

- de phosphate bicalcique dérivé d'os ;

- de protéines hydrolysées issues de poissons et de plumes.

Les graisses de ruminants encore valorisables sont, par ailleurs, soumises à des traitements spécifiques -filtration des impuretés et traitement thermique à 133°, sous trois bars de pression pendant vingt minutes-, conformément à deux arrêtés du 9 avril 2001 et du 2 août 2001.

Des mesures de précaution ont également été prises à l'égard de l'alimentation des animaux de compagnie, un arrêté du 15 juin 2001 interdisant dans ce cas l'emploi de :

- protéines animales transformées issues de ruminants, telles que les farines de viande et d'os, les farines de cornes et de sang, ainsi que les cretons séchés ;

- graisses extraites de protéines animales transformées issues de produits de ruminants.

Depuis le 14 novembre 2000, les co-produits de viande provenant des abattoirs continuent à être transformés en farines et graisses, avant d'être détruites.

Compte tenu de leurs caractéristiques qui les rapprochent du fuel lourd, les graisses animales ont rapidement trouvé un débouché commercial comme combustible.

En revanche, la faiblesse des capacités de destruction des farines animales -essentiellement les cimenteries- a rendu nécessaire leur stockage dans une vingtaine de sites.

Selon les déclarations du ministre de l'agriculture devant la Commission des Affaires économiques, le 7 novembre dernier, le volume de farines stockées devrait atteindre 450.000 tonnes d'ici la fin de l'année 2001.

L'ouverture d'un site de stockage est cependant rendue difficile par les réticences des populations riveraines qui craignent les nuisances environnementales, olfactives, ainsi que les risques d'accidents qu'une telle présence pourrait occasionner.

Le financement du service de collecte et de transformation en farines des co-produits animaux est temporairement assuré par l'Etat qui verse, sur le fondement du décret n° 2000-1166 du 1 er décembre 2000, une indemnité dans ce but aux équarrisseurs. Il semblerait que cette prestation de service doive, à terme, être financée par les industriels des viandes eux-mêmes.

Compte tenu des problèmes soulevés par le stockage des farines, les pouvoirs publics souhaiteraient voir se développer la technique de l'incinération des déchets crus, en particulier au niveau des abattoirs. Un décret du 16 mars 2001 encourage le développement de ce procédé, qui semble, pour l'heure, n'être pas encore opérationnel.

b) La systématisation du dépistage
(1) La mise en place du dépistage systématique de l'ESB à l'abattoir

La décision, prise par un arrêté du 2 janvier 2001, de soumettre systématiquement à un test de dépistage tous les bovins de plus de trente mois entrant dans la chaîne alimentaire, est une mesure de prévention sanitaire complémentaire à celle du retrait des MRS.

Elle a également constitué une mesure de réassurance des consommateurs qui a contribué à faire remonter le niveau de la consommation de viande bovine, tombé très bas au cours du dernier trimestre de l'année 2001.

Rendu obligatoire à compter du 1 er janvier 2001, ce dépistage a quelque peu désorganisé l'activité d'abattage durant les deux premiers mois de l'année, dans la mesure où il impliquait d'intégrer, dans l'organisation interne des établissements, le délai d'analyse par les laboratoires des échantillons prélevés.

Pour la mise en oeuvre du dépistage systématique, le ministère de l'agriculture et de la pêche a autorisé le recours au test Biorad, développé par le Commissariat à l'énergie atomique et produit par une entreprise américaine, et au test Prionics, développé par une société suisse. Cer dernier a été le plus souvent choisi, parce qu'il avait déjà été utilisé dans le cadre du programme pilote de dépistage de l'ESB sur les bovins à risque.

Le dépistage systématique de l'ESB sur les bovins abattus en vue de la consommation humaine a été étendu aux animaux âgés de vingt-quatre mois et plus par un arrêté du 19 juillet 2001.

Au 13 novembre 2001, 58 cas d'ESB ont été diagnostiqués dans le cadre du dépistage systématique à l'abattoir.

(2) Le dépistage dans le cadre du programme national de surveillance de l'ESB sur les bovins à risque

Un programme national de surveillance de l'ESB sur les catégories de bovins à risque a été lancé en juin 2001. Il consiste à pratiquer un dépistage systématique de l'ESB sur tous les bovins de plus de 24 mois arrivant dans les équarrissages après avoir été trouvés morts ou euthanasiés.

Ce programme, qui devrait concerner 200.000 bovins sur la période comprise entre juin 2001 et juin 2002, a pour l'instant permis de diagnostiquer 61 cas d'ESB.

Il prend la suite de l'étude dite « pilote » réalisée en 2000, principalement dans les douze départements du grand Ouest, sur les bovins à risque de plus de 24 mois.

Portant sur 56.000 bovins, morts à la ferme, malades ou abattus d'urgence pour cause d'accident, cette étude avait permis de détecter 60 cas d'ESB en 2000 et 14 en 2001, soit un total de 74 cas.

Les résultats intermédiaires du programme, rendus publics par l'AFSSA le 11 décembre 2000, ont fait apparaître un taux de prévalence assez important de 2,1 pour mille de l'ensemble des catégories à risque, et de 3 pour mille chez les bovins abattus d'urgence à la suite d'un accident.

Afin de tenir compte de ce dernier résultat, les bovins accidentés ont été totalement exclus de la chaîne alimentaire par un arrêté du 7 février 2001, alors qu'ils pouvaient auparavant être vendus en vue d'être consommés, dans le délai maximal de 48 heures après l'accident.

(3) La détection de l'ESB dans le cadre du réseau national d'épidémio-surveillance

Depuis le 13 juin 1990, date à laquelle l'ESB a été reconnue comme maladie contagieuse à déclaration obligatoire, est en place un réseau national de surveillance clinique de cette maladie, qui fait intervenir les éleveurs, les vétérinaires sous mandat sanitaire, les laboratoires départementaux d'analyse, les services vétérinaires et le laboratoire national de référence -l'AFSSA-.

Ce dispositif vise à repérer tout bovin vivant présentant des troubles neurologiques suspects en élevage ou à l'abattoir et à assurer la collecte et l'analyse de ces bovins suspects.

Il a diagnostiqué 102 cas d'ESB en 2000 et 84 cas en 2001 (résultat au 13 novembre 2001).

Au total, depuis l'apparition de la maladie en 1991, 458 cas d'ESB avaient été diagnostiqués en France, dont 217 (58 lors du dépistage systématique à l'abattoir, 75 dans le cadre du programme de recherche sur les animaux à risque et 84 par le réseau d'épidémio-surveillance) en 2001 (résultats au 13 novembre 2001).

(4) Programme de dépistage du prion pathogène chez les ovins et les caprins

La prévention d'un éventuel risque d'ESB chez le mouton passant par un renforcement des mesures de lutte contre la tremblante, tous les Etats membres de l'Union européenne devront obligatoirement, à compter du 1 er janvier 2002, procéder à des tests de dépistage de cette maladie sur une partie de leur cheptel d'ovins et de caprins âgés de 18 mois.

Pour la France, ce programme impliquera au minimum la réalisation de 3.000 tests sur des ovins et caprins à risque : morts ou euthanasiés pour cause de maladie ou d'accident, et de 15.000 tests sur des animaux sains.

c) L'extension de la liste des matériaux retirés de la chaîne alimentaire

Dès 1996, la France a établi une liste des matériaux à risque spécifiés (MRS) dont le retrait est imposé à l'abattoir, compte tenu de leur exposition particulière au risque de contamination par l'ESB.

(1) Le retrait des MRS chez les bovins

Cette liste, qui comprenait, jusqu'à l'automne 2000, l'encéphale, la moelle épinière, les amygdales, l'iléon (partie de l'intestin), la rate, ainsi que, pour les bovins nés avant le 1 er mai 1999, le thymus, a été étendue par un arrêté du 10 novembre 2000 au thymus, aux amygdales et aux intestins des bovins, quel que soit leur âge.

Les obligations françaises vont plus loin que la réglementation européenne qui distingue selon l'âge des bovins pour certains matériaux.

Par ailleurs, des mesures de précaution ont été prises à l'égard de la colonne vertébrale, compte tenu du risque de projection de moelle épinière lors de la fente des carcasses, mais aussi de la présence de ganglions nerveux rachidiens.

L'obligation de retirer la moelle épinière avant la fente des carcasses à l'abattoir -dite opération de démédullation- entrera en vigueur le 1 er janvier 2002.

Par ailleurs, des dispositifs de retrait ont été définis avec les professionnels de la découpe et avec les bouchers détaillants, afin d'assurer que la manipulation des viandes contenant de l'os vertébral, incontournable dans cette profession, soit réalisée dans des conditions satisfaisantes pour la santé humaine.

Un avis du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie aux distributeurs de viande bovine, publié au journal officiel du 30 octobre 2001 définit ainsi le contenu des cahiers des charges des bouchers et des ateliers de découpe s'agissant du retrait des os de la colonne vertébrale des bovins de plus de douze mois.

(2) Le retrait des MRS chez les ovins et les caprins

L'obligation de retrait des matériaux à risque spécifiés concerne également les ovins et caprins. Jusqu'en 2001, étaient inclus dans cette liste l'encéphale, la moelle épinière, la rate et les amygdales des ovins de plus de douze mois.

Un arrêté du 24 juillet 2001 renforce ces mesures. En premier lieu, il abaisse l'âge à partir duquel le système nerveux central doit être retiré et détruit. Dorénavant le crâne entier sera détruit quel que soit l'âge de l'animal, à l'exception des muscles des joues et de la langue.

La cervelle des animaux de moins de six mois pourra être commercialisée sous réserve que l'âge puisse effectivement être prouvé à l'abattoir. En outre, à partir du 1 er janvier 2002, date à laquelle tous les abattoirs devront être équipés du matériel de prélèvement nécessaire, la moelle épinière sera éliminée sur toutes les bêtes de plus de six mois, ou quel que soit l'âge, si ce dernier ne peut être attesté par l'éleveur.

Enfin, dans son avis du 14 février 2001, l'AFSSA recommande le retrait et l'élimination des intestins d'ovins et caprins quel que soit leur âge. Cependant ces intestins subissent avant d'entrer dans la chaîne alimentaire un traitement mécanique, appelé délimonage, qui est en théorie susceptible d'éliminer les tissus nerveux et lymphoïdes seuls susceptibles d'être contaminants. Aucune donnée scientifique ne permet à ce jour de vérifier l'efficacité de ce processus de délimonage. C'est pourquoi l'AFSSA mène actuellement une étude visant à évaluer l'efficacité de ce processus.

2. La fièvre aphteuse

L'apparition en Grande-Bretagne d'une épizootie de fièvre aphteuse le 20 février 2001 a conduit à l'adoption de mesures drastiques de prévention en France, qui ont permis de limiter son extension à seulement deux foyers.

En application de la loi n° 91-639 du 10 juillet 1990 relative à la fièvre aphteuse, le programme de préalerte fièvre aphteuse a été appliqué dès le lendemain de l'annonce du premier cas en Grande-Bretagne, ce qui a conduit, tout d'abord, à recenser et à mettre sous séquestre toutes les exploitations ayant reçu des animaux du Royaume-Uni, ainsi que toutes les carcasses et viandes d'ovins importées de ce pays entre le 31 janvier et le 21 février 2001.

A partir du 28 février, a été mise en oeuvre la destruction de tous les animaux importés de Grande-Bretagne -essentiellement des ovins-, de l'ensemble des animaux avec lesquels ces derniers ont été en contact, ainsi que des animaux sensibles à la fièvre aphteuse dont l'origine n'avait pu être établie avec certitude, soit en tout près de 50 000 bêtes, auxquelles il convient d'ajouter quelques 10 000 carcasses.

9000 animaux en provenance des Pays-Bas et d'Irlande, pays dans lesquels s'étaient, entre-temps, déclarés des foyers de fièvre aphteuse, ont également été abattus.

En Grande-Bretagne, le nombre total d'animaux abattus s'est élevé, rappelons-le, à plus de trois millions.

Des prélèvements sanguins ayant été réalisés sur une partie des animaux euthanasiés afin d'évaluer leur contact avec le virus de la maladie, des périmètres de protection ont pu être instaurés autour des élevages ayant révélé des cas séro-positifs pendant quatre semaines après l'abattage.

Des systèmes de désinfection des personnes -pédiluves- et des véhicules -rotoluves- ont été mis en place autour de ces périmètres de protection, ainsi que dans les zones côtières en relation avec le Royaume-Uni et les aéroports.

Les mouvements et les rassemblements d'animaux des espèces sensibles, ainsi que les déplacements d'équidés ont été interdits à partir du 6 mars 2001.

Deux foyers de fièvre aphteuse ont été recensés en France, le premier dans le département de la Mayenne, l'autre en Seine-et-Marne. Si ce chiffre reste sans commune mesure avec les quelque 2000 foyers déclarés en Grande-Bretagne, les restrictions de mouvements d'animaux et de denrées animales imposées par la Commission européenne dans les départements touchés et les départements voisins n'en ont pas moins affecté significativement l'activité économique autour de ces foyers.

Les indemnisations versées aux éleveurs dont les animaux ont été abattus se sont élevées à près de 7,3 millions d'euros (48 millions de francs), auxquels il convient d'ajouter 5 millions d'euros (33 millions de francs) dépensés pour la mise en oeuvre des différentes mesures de maîtrise de l'épizootie, telles que la surveillance sanitaire, l'euthanasie et la destruction des animaux, ou encore la désinfection. Le coût pour le budget de l'Etat s'est élevé à plus de 12,2 millions d'euros (80 millions de francs), l'Union européenne devant toutefois prendre en charge 60% de cette somme.

DÉTAIL DES INDEMNISATIONS VERSÉES

(en euros)



Origine

Montant des indemnisations par espèce


Montant
des
indemnisations

Ovins

Bovins

Porcins

Caprins

Nombre

75,5 €/anl

Nombre

984 € /anl

Nombre

165 €/anl

Nombre

107 €/anl

RU

47 850

3 610 347

558

398 885

396

50 966

216

22 995

4 083 193

PB

1 868

142 387

707

7 166 655

6 673

810 190

0

0

1 890 633

F1

0

0

112

239 345

3 133

828 067

0

0

1 086 422

F2

1 447

107 629

119

116 959

26

915

1

152

225 655

TOTAL

51 165

3 860 363

1 496

1 471 844

10 228

1 687 398

217

23 147

7 300 772

RU : Royaume-Uni et contacts

PB : Pays-Bas

F1 : Foyer n° 1 et périfocaux

F2 : Foyer n° 2 et périfocaux

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche

Dans son rapport 2( * ) , au nom de la mission d'information de la Commission des Affaires économiques sur la lutte contre l'épizootie de fièvre aphteuse, présidée par M. Philippe Arnaud, notre collègue Jean-Paul Emorine a relevé l'insuffisante indemnisation des préjudices indirects générés par les mesures de restriction de la circulation, qui ont paralysé des secteurs comme l'élevage, les industries agroalimentaires ou le tourisme.

Dès le 23 juin 2001, la France a pu demander à l'Office international des épizooties (OIE) sa requalification en pays indemne de fièvre aphteuse, ce qui permet la levée des restrictions aux échanges de la part de pays tiers.

Ce statut, qui ne peut être attribué que trois mois après que le dernier cas a été traité et que le dernier animal vacciné a été abattu, a été officiellement reconnu à la France le 19 septembre 2001.

Si la gestion de cette crise a illustré le bon fonctionnement de l'organisation sanitaire française, elle a souligné l'enjeu que représentent les mouvements d'animaux sur le plan tant économique que sanitaire. Cet épisode aphteux a révélé à cet égard les lacunes du système d'identification des ovins, qui devrait prochainement être renforcé.

Le rapport de la mission d'information sénatoriale sur la fièvre aphteuse s'interroge, quant à lui, sur la possibilité de rétablir la vaccination contre la fièvre aphteuse, compte tenu du risque non négligeable de survenue d'une nouvelle épidémie, dès lors que ce virus existe à l'état endémique sur les trois quarts du globe. Il propose notamment de prendre en considération les progrès récents des techniques vaccinales, qui permettent désormais de distinguer les animaux infectés de ceux vaccinés.

Il recommande, en outre, de renforcer la veille sanitaire par la réalisation de contrôles sérologiques réguliers, et plaide en faveur d'une délimitation plus précise des périmètres soumis à embargo.

B. LA GESTION DES CRISES SECTORIELLES

1. La crise bovine

a) Une succession de plans d'aides
(1) Les mesures communautaires

? Face à l'ampleur de la crise qui gagnait l'ensemble des pays de l'Union européenne, le Conseil agriculture du 4 décembre 2000 a pris des décisions visant à rétablir l'équilibre du marché. Il s'agit :

- de la mesure de retrait ( régime dit d'achat-destruction ) des bovins de plus de trente mois présenté à l'abattage et n'ayant pas fait l'objet d'un test ESB. 500.000 tonnes de viande bovine devaient à l'origine être détruites dans le cadre de ce programme.

Financée à 70 % par le budget communautaire, cette mesure devait être appliquée de 1 er janvier au 30 juin 2001.

- de la mise en oeuvre du régime d'intervention publique sur le marché de la viande bovine, qui oblige la Commission a procéder à des achats lorsque les prix du marché tombent en dessous d'un certain niveau de prix.

? Un nouveau régime de retrait à caractère obligatoire, dit « régime de retrait spécial » a été instauré en mars 2001, en vue de remplacer le régime facultatif d'achat-destruction. Il concerne les bovins non éligibles à l'intervention, âgés de plus de trente mois et ayant donné un résultat négatif au test de l'ESB. Il laisse le choix aux Etats de procéder au stockage des carcasses retirées plutôt qu'à leur destruction. Cette dernière disposition vise à répondre aux préoccupations de l'opinion publique de certains pays comme l'Allemagne, qui désapprouve les destructions massives.

A la différence du régime d'achat-destruction, basé sur des prix préfixés auxquels les éleveurs peuvent souscrire en proposant leurs bovins de plus de trente mois à la destruction en contrepartie d'indemnités, le régime spécial met en oeuvre une procédure d'adjudication, en moyenne deux fois par mois, les abattoirs présentant eux-mêmes les offres aux agences d'intervention. Le financement de cette mesure, applicable jusqu'à la fin de l'année 2001, est assuré à 70 % par le budget communautaire.

? Lors du Conseil agricole du 20 juin 2001, les ministres européens de l'agriculture ont adopté la réforme de l'organisation commune de marché de viande bovine présentée par la Commission en février 2000.

Cette réforme a relevé de 350.000 à 500.000 tonnes le plafond de l'intervention publique, pour l'année 2001, afin de permettre un dégagement plus efficace du marché dans un contexte marqué par l'importance de l'excédent de production. Ce plafond est ainsi relevé, et maintenu à 350.000 tonnes pour le premier semestre 2002, avant la suppression de l'intervention.

En contrepartie, les Etats membres ont dû accepter des mesures tendant à restreindre certaines aides, en vue d'encourager la maîtrise de la production. C'est ainsi que :

- le taux de chargement maximal à l'hectare pour bénéficier de la prime au maintien du troupeau de vache allaitante (PMTVA) et de la prime spéciale pour les bovins mâles (PSBM) a été réduit de 2 à 1,9 unité de gros bovin (Ugb) pour 2002 et à 1,8 Ugb pour 2003 ;

- les plafonds régionaux de droits à la prime spéciale pour bovins mâles ont été diminués pour les années 2002 et 2003. Cette diminution atteint 1  pour la France et 9 % pour l'ensemble des pays européens ;

- la part maximale de génisses dans les troupeaux éligibles à la prime à la vache allaitante a été portée de 15 à 40 %, sauf lorsque l'éleveur a droit à moins de 14 primes ;

- la possibilité pour les Etats d'introduire des dérogations au plafond de 90 têtes de bétail par exploitation pour la prime spéciale au bovin mâle a été supprimée ;

- enfin, les droits à PMTVA reversés à la réserve nationale ont été gelés jusqu'à la fin de l'année 2003.

Votre rapporteur pour avis déplore le manque de solidarité dont a fait preuve l'Union européenne en refusant le versement d'aides directes aux éleveurs . Il convient, par ailleurs, de regretter le comportement de certains Etats qui, à l'instar de l'Allemagne, ont refusé d'appliquer chez eux les mesures européennes de dégagement de marchés, contribuant ainsi à aggraver et à prolonger la crise à l'échelle de l'Union européenne.

(2) Les plans français

Le Gouvernement a annoncé un premier train de mesures en faveur de la filière bovine le 21 novembre 2000 .

Doté d'une enveloppe de 3,2 milliards de francs (0,49 milliards d'euros), ce plan prévoyait le versement d'environ 1,6 milliard de francs aux éleveurs sous la forme de reports de cotisations sociales (1,2 milliards de francs) et d'allègements de charges (400 millions de francs).

A la suite de l'échec des Etats membres à s'accorder sur l'attribution d'aides communautaires aux éleveurs, le Gouvernement a mis en place un second plan de soutien aux éleveurs le 28 février 2001 , comportant 1,2 milliard de francs de crédits destinés :

- au versement d'aides ciblées, plafonnées, et décentralisées, pour un montant d'un milliard de francs ;

- au versement de 100 millions de francs d'aides à la filière « veaux de boucherie » ;

- au versement, pour 100 millions de francs, du complément national de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes.

En apparence significatives, ces mesures ont cependant déçu le monde agricole dans la mesure où elles n'ont pas permis une couverture satisfaisante des pertes subies du fait de la crise. En outre leur versement est apparu souvent tardif, ce qui a contribué à fragiliser la trésorerie de nombreux éleveurs.

Enfin, après l'annonce de versements anticipés de diverses primes, le Gouvernement a rendu public, le 17 octobre 2001 , un nouveau plan de vingt mesures , parmi lesquelles :

- la mise au point, sur la base d'une enquête nationale, relative à la situation de l'élevage bovin, d'un plan d'accompagnement des éleveurs en difficulté, qui ne devrait toutefois pas entrer en application avant l'année 2002 ;

- une réflexion sur les moyens de valoriser les jeunes veaux dans des filières spécifiques telles que l'alimentation des animaux domestiques (petfood) ;

A court terme devrait toutefois être instauré un dispositif de dégagement des jeunes veaux.

- le lancement d'une mission sur l'avenir du bassin allaitant ainsi qu'une réflexion autour de la différenciation de la viande issue du troupeau allaitant .

Votre rapporteur pour avis espère que ces mesures seront appliquées dans les plus brefs délais. Il souhaite également que l'accent soit mis plus fortement sur les actions de promotion et de communication, lesquelles sont indispensables pour rétablir le niveau de la consommation.

b) Une crise sans précédent

La nouvelle crise de l'ESB, déclenchée à l'automne 2000, a plongé l'élevage bovin français dans un marasme profond et durable.

Les premiers mois de l'année 2001 ont été marqués par la rétention d'un gros volume d'animaux sur les exploitations, la chute brutale du niveau de la consommation et les difficultés liées à la mise en place du dépistage systématique à l'abattoir ayant pour conséquence une forte diminution de l'activité d'abattage.

En dépit de la mise en place de mesures de dégagement du marché, qui ont permis de retirer plus de 150.000 tonnes de viande bovine, la filière reste durablement engorgée . Un excédent estimé à 80.000 tonnes subsiste à l'échelle européenne.

Si le niveau de consommation est remonté depuis l'automne dernier, il reste encore inférieur de 8 % à ce qu'il était avant la crise. Considérée comme structurelle, la diminution de la consommation concerne autant les achats des ménages que les commandes de la restauration collective.

Il en résulte une forte baisse des cours à la production, dont le niveau a chuté de 25 à 30% depuis un an, avec pour conséquence une dégradation substantielle du revenu des éleveurs . Dans ces conditions, le maintien à un niveau élevé des prix de vente aux consommateurs, expliqué partiellement par la répercussion du coût des tests et de l'augmentation de la taxe d'équarrissage, pose la question de la répartition des marges entre les différents opérateurs de la filière.

De même, l'afflux sur le marché français de viande bovine étrangère à bas prix a déclenché la colère légitime des producteurs français au début de l'automne.

Les initiatives prises au sein de la filière, en particulier la signature, le 24 octobre 2001, d'un accord entre producteurs et abatteurs convenant d'une grille de prix d'achat des bovins et suspendant provisoirement les importations de viande bovine, ont toutefois contribué à apaiser les tensions.

Alors que les trésoreries des éleveurs restent vides, votre rapporteur pour avis plaide pour l'attribution rapide des aides directes annoncées dans le cadre du dernier plan gouvernemental. Il tient également à souligner la nécessité de mettre en place, de manière urgente, le programme d'abattage temporaire des veaux laitiers, afin de dégager le marché à moyen terme.

De nombreuses exploitations sont au bord de la faillite. Une étude de l'Institut national de la recherche agronomique évalue à 59 000 le nombre des exploitations directement menacées. Sans un engagement massif en faveur des éleveurs, notamment du bassin allaitant, l'effondrement de toute une filière est à craindre, qui fragiliserait l'équilibre économique de nombreuses régions, sans parler des conséquences en termes d'occupation de l'espace rural.

Les deux composantes du cheptel bovin français ont été affectées par la crise de confiance. Traditionnellement valorisées dans la production de steak haché, les vaches laitières de réforme ont vu leur principal débouché se restreindre.

Le cheptel allaitant a quant à lui subi les conséquences de la diminution des achats de broutards par l'Italie. L'organisation de l'élevage allaitant en France, essentiellement tourné vers l'activité de naissage a démontré ses faiblesses à l'occasion de cette crise. Alors qu'il semble exister, en France, une demande spécifique des consommateurs à l'égard des races bovines dites à viandes, il conviendrait de développer une activité d'engraissement dans les zones françaises de production.

A cet égard, votre rapporteur pour avis attend avec intérêt les propositions que devrait formuler l'expert désigné par le Gouvernement sur l'avenir du bassin allaitant.

Estimant que la filière ne fera pas l'économie d'une réflexion sur la maîtrise de sa production, il considère aussi comme indispensable la réforme de l'organisation commune de marché. Celle-ci devra notamment renforcer les outils de gestion du marché et permettre une meilleure prise compte de l'élevage bovin allaitant, qui reste une spécificité française.

2. La crise viticole

Le secteur viticole a connu une année difficile, notamment en raison de la surproduction et de la mévente des vins de table et des vins de pays du sud est.

Cette crise provoquée par la tendance confirmée au recul de la consommation française et par la concurrence accrue des vins des nouveaux pays producteurs s'est traduite par une augmentation de l'excédent qui devrait s'établir à 5 millions d'hectolitres à la fin de l'année 2001. Il est vrai que les parts de marché de la France à l'exportation ne cessent de baisser. Après le niveau record de 15 millions d'hectolitres vendus en 1998, les exportations ont connu un repli de 0,6 million d'hectolitres en 1999, confirmé par une nouvelle diminution de 0,7 million d'hectolitres sur l'année 2000.

La chute des ventes a entraîné une baisse des prix des vins de l'ordre de 30 % , qui a contraint les coopératives à diminuer les acomptes versés à leurs adhérents. Ceux-ci ont très vite été confrontés à un manque de trésorerie, compte tenu de l'importance de leurs charges.

Les producteurs de vins de pays et de vins de table de la région Languedoc-Roussillon ont exprimé leur mécontentement au cours de plusieurs manifestations qui se sont déroulées avant l'été. La tension été particulièrement forte à l'égard de la grande distribution, accusée d'accorder sa préférence à la vente de vins européens.

A la suite de réunions qui se sont tenues en juillet à l'ONIVINS, la Fédération du commerce et de la distribution, (FCD), qui représente une partie des distributeurs, s'est engagée à mettre en avant les vins français dans les linéaires.

Par ailleurs, la France a dû recourir à plusieurs distillations de crise pour assainir le marché. Du 9 janvier au 15 février 2001, une première distillation de crise avait été réalisée en vue de transformer en alcool quelques 800.000 hectolitres de vins. Cette distillation s'étant avérée insuffisante pour redresser les cours, le Gouvernement français, sur la demande des professionnels, a obtenu en juin dernier de la Commission européenne l'autorisation de distiller 1,5 million d'hectolitres supplémentaires.

En juillet dernier, un rapport 3( * ) sur la situation du secteur viticole français au regard du marché mondial des vins a été remis au ministre de l'agriculture et de la pêche.

Dans la droite ligne de ce rapport, le Ministre de l'agriculture a annoncé, le 25 septembre 2001, un plan d'adaptation pour la viticulture , invitant par ailleurs les acteurs professionnels à élaborer avec Jacques Berthomeau une stratégie pour la filière à l'horizon 2010.

Le plan d'adaptation rendu public définit les objectifs suivants :

- accélérer et achever la restructuration du vignoble ;

Il s'agit de reconvertir, avec le soutien de la nouvelle OCM viti-vinicole, les surfaces produisant des vins pour lesquels il n'existe plus de demande.

- moderniser et restructurer l'outil de vinification ;

Cette action sera fondée sur des schémas de restructuration établis au niveau départemental, en vue de favoriser une meilleure adéquation entre les vignobles et les caves. Elle implique un recours accru des caves aux services d'oenologues. Un soutien à l'accompagnement technique serait est prévu dans ce but.

- renforcer la puissance commerciale de la filière ;

Ce renforcement nécessite une concentration dans le secteur du négoce, actuellement très éclaté. Les soutiens publics, y compris les aides classiques telles que les primes d'orientation agricole (POA), seront conditionnés à des projets s'inscrivant dans des stratégies définies au niveau départemental.

- améliorer l'OCM viti-vinicole ;

Il s'agirait de reconnaître aux Etats membres la possibilité de rendre obligatoire tout ou partie de la distillation de crise qu'ils sollicitent. Une demande en ce sens devait être formulée par le Gouvernement français. De même devrait être demandées la mise en place d'une mesure de reconversion différée et l'instauration d'un délai indemnisé entre l'arrachage et la replantation.

Dans l'immédiat  devraient être appliquées des mesures destinées à constituer le premier volet du plan d'adaptation . Le Ministre de l'agriculture a ainsi annoncé :

- la demande, auprès des autorités communautaires, d'une distillation supplémentaire d'un volume de 4 à 5 millions d'hectolitres, ainsi que l'autorisation d'attribuer une aide nationale pour relever le prix payé aux producteurs ;

- l'affectation d'une enveloppe de 15 millions de francs en vue du versement aux jeunes agriculteurs d'aides à la trésorerie ;

- le paiement des aides à la restructuration du vignoble - pour un montant de 141 millions de francs - et des primes d'orientation agricole - pour un montant de 841 millions de francs - dont le versement est en retard.

Le Gouvernement a, en outre, promis l'attribution, dès cette année, de 115 millions de francs à l'ONIVINS en vue de soutenir l'amélioration des structures de production et de vinification.

Prenant la mesure des enjeux auxquels est aujourd'hui confrontée notre filière viti-vinicole, la Commission des affaires économiques a récemment décidé la c réation d'un groupe de travail sur l'avenir de la viticulture française.

Ce groupe de travail cherchera à analyser les causes structurelles de la diminution des ventes de vin en France, et les problèmes liés à la surproduction, à l'insuffisante organisation des producteurs et à l'inadaptation partielle de l'offre. Il s'agira également de prendre la mesure de la percée des nouveaux pays producteurs sur le marché mondial des vins, d'identifier leurs facteurs de réussite, notamment en termes de communication et de stratégie commerciale, et de formuler des propositions en vue de préserver l'avenir de ce secteur.

Il devrait rendre ses conclusions au cours du premier trimestre de l'année 2002.

III. L'ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL

A. L'ÉLARGISSEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE

Le Conseil européen qui s'est tenu à Nice en décembre 2000 a rappelé le caractère historique du processus de l'élargissement et a défini l'ordre des négociations pour 2001 et 2002, prévoyant qu'elles devraient être achevées pour la fin de l'année 2002.

Durant l'année 2001 devaient être abordées les questions de fonds non encore débattues. En ce qui concerne le dossier agricole, l'examen des volets vétérinaires et phytosanitaires devait débuter au deuxième semestre 2001.

Toutefois, les questions ayant un fort impact sur le plan budgétaire ne seront, de même que l'ensemble des questions non résolues, évoquées qu'au cours du premier semestre 2002, avec les questions institutionnelles. Pour le volet agricole, cela vise les questions relatives aux quotas, aux organisations communes de marché et aux aides directes.

S'agissant de celles-ci, les pays candidats ont exprimé leur inquiétude à l'égard d'éventuelles discriminations après leur adhésion. La Commission européenne a exclu cette éventualité, même si elle a toutefois reconnu qu'une période de transition serait nécessaire avant de parvenir au versement des mêmes aides directes.

Le principe de la reprise, par les pays candidats, de l'acquis communautaire a été réaffirmé. Seule une application stricte de ce principe est à même d'empêcher des perturbations des prix et des marchés lors des adhésions. En outre, elle apparaît particulièrement indispensable en matière sanitaire, afin de garantir au mieux la sécurité alimentaire des consommateurs européens.

Entamées lors des conférences d'adhésion du 14 juin 2000 avec les six premiers pays, et à l'occasion de celles du 12 juin 2001 avec trois autres pays - Lettonie, Lituanie et Slovaquie-, les négociations sur le volet agricole se poursuivent.

L'Union européenne souhaite que soient mises en place au plus vite des politiques agricoles convergentes avec les siennes , et que la période de référence qui servira à déterminer les quotas de production soit définie sur une base historique prenant en compte les résultats de la production sur la période 1995-1999.

Le dossier des terres agricoles a constitué un point sensible des négociations sur la libre circulation des capitaux, et a sûrement contribué à ralentir leur déroulement. Un certain nombre de pays candidats, craignant le rachat massif des terres agricoles par des investisseurs étrangers, ont demandé des périodes de transition.

Dans une position commune adoptée fin mai, les Etats membres sont finalement convenus d'offrir aux pays candidats qui le souhaitent la possibilité de restreindre la vente de leurs terres agricoles et forestières aux ressortissants communautaires pendant une période maximale de sept ans après leur adhésion. Une période de cinq ans est également accordée pour l'acquisition de résidences secondaires.

Enfin, il convient de souligner le retard pris dans la mise en oeuvre du programme spécial d'adhésion pour l'agriculture et le développement rural (SAPARD ), dont la gestion est théoriquement décentralisée auprès d'agences accréditées dans les pays candidats. Seules la Bulgarie -en mai 2001- et l'Estonie -en juin 2001- se sont pour l'instant vu confier la gestion de ce programme.

Quant à la question de l'impact de l'élargissement sur le financement de la PAC, elle ne devrait pas être évoquée avant 2004, année au cours de laquelle la Commission européenne soumettra des propositions pour les perspectives d'après 2006.

B. LES RELATIONS DE L'UNION EUROPÉENNE AVEC LES PAYS TIERS

a) L'Union européenne et l'Amérique latine

En juillet 2001, la Commission européenne a présenté une proposition de libéralisation des échanges commerciaux.

Les produits agroalimentaires représentent les deux tiers des exportations du MERCOSUR vers l'Union européenne. 60 % d'entre eux entrent déjà librement sur le marché européen. Cet accord vise à libéraliser les 40 % restants.

Il prévoit une libéralisation immédiate des échanges de produits tropicaux tels que les pamplemousses et les avocats, ainsi que des produits qui, comme les pommes, les poires ou encore les citrons, ne sont pas produits toute l'année par l'Union européenne.

La libéralisation des échanges d'autres produits est prévue selon des paliers établis à l'horizon de quatre, sept ou dix ans.

Cependant, les échanges de certains produits sensibles, tels que les céréales, le riz, l'huile d'olive, les produits laitiers ou les volailles, ne feront l'objet d'une libéralisation totale, mais de réductions de droits de douane dans le cadre de quotas.

Enfin les importations communautaires de vins et spiritueux, essentiellement en provenance d'Argentine et d'Uruguay, et qui représentent 60 millions d'euros par an, seraient libéralisées très progressivement, Bruxelles proposant de négocier un accord de reconnaissance mutuelle des appellations d'origine et des pratiques oenologiques.

Parallèlement, l'Union européenne a proposé au Chili une offre semblable de libéralisation des échanges sur dix ans, qui concerne cette fois 93% du commerce agricole.

Le principe de paliers différents selon les produits a également été retenu.

S'agissant du vin, dont le Chili est un très grand exportateur -les exportations chiliennes de vin à destination du marché communautaire s'élèvent chaque année à 240 millions d'euros. Un accord séparé sur la reconnaissance des appellations protégées et des pratiques oenologiques devrait également être conclu.

2. L'union européenne et les Balkans

L'Union européenne a pris, au cours de l'année 2001, plusieurs initiatives qui s'inscrivent dans son engagement de contribuer à la stabilisation dans les Balkans.

Elle a signé le 9 avril 2001 un accord de stabilisation et d'association avec la Macédoine, prévoyant une libéralisation progressive des échanges des bilatéraux, dans le but de parvenir au libre-échange à l'horizon 2011. Cet accord prévoit l'élimination des barrières tarifaires et contingentaires de l'Union européenne sur l'ensemble des produits agroalimentaires, sauf sur la viande de jeune bovin, le vin et les produits de la pêche. En contrepartie, la Macédoine s'engage à réduire ses restrictions quantitatives et à réduire progressivement ses droits à l'importation.

Un accord de même nature a été signé le 11 mai 2001 avec la Croatie.

Enfin, l'Union européenne a décidé le versement à la Serbie d'une aide de 20 millions d'euros, qui doit servir à la fourniture d'engrais, de fourrages et au financement d'une assistance technique.

C. LES NEGOCIATIONS DANS LE CADRE DE L'OMC

Depuis l'échec de la conférence ministérielle de Seattle, en décembre 1999, les négociations agricoles se poursuivent dans le cadre des sessions spéciales du comité de l'agriculture de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Cependant, ces négociations avaient peu de chance d'aboutir en dehors du lancement d'un nouveau cycle global de négociations, sur lequel a statué la quatrième conférence ministérielle de l'OMC, qui s'est tenue à Doha au Qatar, du 9 au 13 novembre 2001.

Lors d'une session de février 2001, ont commencé d'être examinées les propositions de négociations, au nombre de 44, déposées par les Etats ou groupes d'Etats, en vue d'établir un programme de pourparlers.

A cette occasion a été débattue la proposition globale de l'Union européenne , qui avait été approuvée en novembre 2000 par le Conseil des ministres agricoles.

Cette proposition tend à accepter de nouvelles diminutions des restitutions à l'exportation, sous réserve que les autres formes d'aides à l'exportation -crédit à l'exportation, abus d'aide alimentaire, entreprises commerciales d'Etat-, mises en oeuvre notamment par les Etats-Unis, soient aussi réglementées. Elle consent également des réductions supplémentaires du soutien interne , à condition que les aides dites de la « boîte bleue », liées à de programmes de limitation de la production, et celles de la « boîte verte », versées au titre de la multifonctionnalité , soient maintenues .

La proposition globale de l'Union européenne plaide en faveur de l'inclusion de sujets non commerciaux, comme la protection de l'environnement, le développement des zones rurales ou encore la sécurité alimentaire et la reconnaissance des indications géographiques protégées. Enfin, elle souhaite l'instauration d'un traitement spécial et différencié en faveur des pays en développement, par des préférences commerciales non réciproques.

Les réactions des différentes parties aux négociations ont été contrastées. La proposition européenne a été jugée trop timide par les pays du groupe de Cairns, rejoints par l'Inde et le Pakistan, opposés à toute forme d'aide ou de subvention.

L'examen de l'ensemble de ces propositions n'ayant pu être achevé lors de la session spéciale de février, il a dû être poursuivi au cours de celle de la session spéciale de mars 2001 , consacrée initialement à l'établissement d'un programme de négociations.

Une approche thématique a été retenue pour les prochaines réunions dans le cadre des sessions. Elle conduira à évoquer dix thèmes sélectionnés parmi ceux proposés par l'ensemble des participants. Ces thèmes sont :

- les subventions à l'exportation, en réponse à la forte demande des Etas-Unis et du groupe de Cairns ;

- la sécurité alimentaire, la sécurité sanitaire des aliments et le développement rural, dont la discussion est demandée par l'Union européenne ;

- les soutiens à la production ;

- les tarifs douaniers ;

- les crédits à l'exportation ;

- les entreprises commerciales étatiques ;

- les quotas tarifaires ;

- les restrictions à l'exportation.

Enfin, la session spéciale a prévu que, quelle que soit l'issue de la conférence ministérielle de Doha s'agissant du lancement d'un nouveau cycle, un examen de l'état d'avancement des négociations aurait lieu en mars 2002.

S'agissant du lancement d'un nouveau cycle de négociations multilatérales, les positions des différents pays ont quelque peu évolué depuis l'année dernière.

Il en est ainsi des Etats-Unis, au départ partisans d'un cycle restreint de négociations et aujourd'hui favorables à un cycle de négociations élargies, à l'instar de l'Union européenne. L'engagement des deux parties à lancer ce nouveau cycle a été consacré dans une déclaration commune lors du sommet euro-américain de Göteborg le 14 juin 2001.

Par ailleurs, la solidarité qui s'était manifestée à Seattle entre les Etats-Unis et le groupe de Cairns apparaît désormais beaucoup moins marquée, principalement en raison de l'augmentation récente des aides directes versées par les Etats-Unis à ses producteurs.

Le groupe de Cairns demande, quant à lui, une réduction drastique des subventions aux exportations et une suppression des soutiens internes. En outre, il souhaite que l'agriculture ne fasse plus l'objet d'un « traitement spécifique » dans les négociations multilatérales.

Les pays en développement souhaitent également plus d'ouverture des marchés des pays développés, en même temps que la possibilité de bénéficier de mesures transitoires supplémentaires, en particulier s'agissant des protections tarifaires, afin de pouvoir faire face à leurs problème d'autosuffisance alimentaire et de pauvreté rurale. Ils considèrent les préoccupations non commerciales, mis en avant par l'Union européenne, comme une forme de protectionnisme déguisé.

Le cadre des futures négociations agricoles dépendra du contenu de la déclaration adoptée à l'issue de la Conférence ministérielle de Doha.

A la différence des paragraphes relatifs aux autres secteurs de la négociation globale, le volet agricole du projet de déclaration ministériel présenté le 27 septembre 2001 par le Président du Conseil général de l'OMC était initialement peu développé.

Il ne se composait, en effet, que de sept têtes de chapitres relatives :

-  aux pourparlers en cours au sein du comité de l'agriculture ;

- aux objectifs à long terme des réformes ;

- aux objectifs et orientations générales en matière d'accès au marché, de concurrence à l'exportation et de soutien interne ;

- au traitement interne spécial et différencié pour les pays en développement ;

-  aux préoccupations non commerciales ;

- au calendrier ;

- et à l'organe de négociation.

A l'issue de réunions qui se sont déroulées en octobre, une première version du volet agricole a été rédigée en vue d'être soumise aux parties lors de la Conférence.

Retenant un objectif d'élimination totale des subventions à l'exportation et de réduction substantielle des soutiens internes, ce projet est apparu inacceptable tant pour l'Union européenne que pour la France. Il fait, en outre, une place insuffisante à la notion de multifonctionnalité, ainsi qu'à la protection des appellations géographiques.

Votre rapporteur pour avis tient à rappeler ses principales convictions à l'égard des négociations futures, qui rejoignent les positions exprimées par le Conseil de l'agriculture française (CAF) dans un document diffusé en octobre dernier :

- La France et l'Union européenne, grandes puissances exportatrices de produits agro-alimentaires, ont tout à gagner d'un renforcement des mécanismes de l'OMC, dans la mesure où il permettrait une meilleure régulation de la libre concurrence dans ce secteur ;

- la spécificité de l'agriculture dans les négociations multilatérales doit être respectée. Elle ne doit en aucun cas servir de monnaie d'échange dans les négociations qui concernent d'autres secteurs ;

- l'Union européenne a déjà fourni de gros efforts pour se mettre ne conformité avec les exigences du Gatt, puis de l'OMC : deux réformes de la PAC en moins d'une décennie ont été réalisées, qui ont conduit à des baisses de prix dans la plupart des secteurs et à la maîtrise de la production ;

- alors que, dans le même temps, les Etats-Unis n'ont cessé d'augmenter les aides distribuées à leurs agriculteurs et ont multiplié les mécanismes de soutien déguisés aux exportations.

S'agissant de la Conférence ministérielle de Doha, votre rapporteur pour avis considère qu'il ne faut pas accepter une déclaration sur l'agriculture qui fixerait des engagements trop précis. Il convient également de refuser toute disposition tendant à prévoir une discussion séparée des différents volets (accès au marché, soutien interne, concurrence à l'exportation et considérations non commerciales) de la négociation agricole.

CHAPITRE II -

LES CRÉDITS POUR 2002

I. ORIENTATION GENERALE

A. LES CREDITS DU MINISTERE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE

Les crédits (dépenses ordinaires et crédits de paiement) consacrés à l'agriculture au sein du projet de budget du ministère de l'agriculture et de la pêche s'élèvent pour 2002 à 5.075 millions d'euros, contre 5.078 millions d'euros pour 2001, soit une diminution apparente de seulement 0,08 %.

Cependant, la somme de 5.075 millions d'euros incluant les crédits -d'un montant total de 28,3 millions d'euros- provenant de la budgétisation d'une partie du Fonds national des Haras et des activités hippiques, le montant du budget de l'agriculture pour 2002 s'élève, en réalité, à 5.046,7 millions d'euros, ce qui représente, à structure constante, une baisse de 0,6 %.

En outre, si l'on tient compte de la hausse des prix (+2 %) constatée au cours des douze derniers mois, cette diminution s'établit à -2,6 % en termes réels.

Votre rapporteur pour avis ne peut que déplorer une telle baisse, à l'heure où l'agriculture française traverse les crises les plus graves.

Il tient également à faire observer que le budget de l'agriculture est le seul budget ministériel en diminution cette année, ce qui démontre que ce secteur n'est pas une priorité pour le Gouvernement.

1. Les dépenses ordinaires

Passant de 4.915,44 à 4.911,63 millions d'euros, les dépenses ordinaires diminuent de 0,08 %.

Parmi ces dotations, ce sont une fois de plus les dépenses de fonctionnement et de personnel qui progressent (+5,72 %), au détriment des interventions publiques (-3,52 %).

(en millions d'euros)

 

LFI 2001

PLF 2002

2002/2001 (en %)

Titre III - Moyens des services

 
 
 

Personnel

1508,43

1580,07

+ 4,75 %

Fonctionnement

321,04

354,09

+ 10,3 %

Total Titre III

1 829,47

1 934,16

+5,72 %

Titre IV - Interventions publiques

 
 
 

Action éducative

554,2

561,1

+1,25 %

Action économique

2517,45

2399,15

-4,7 %

Action sociale (hors BAPSA/AAH)

14,33

17,22

+20,15 %

Total Titre IV

3 085,98

2 977, 47

-3,52 %

Dépenses ordinaires

4 915, 44

4 911, 63

-0,08 %

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

2. Les dépenses en capital

Votre rapporteur pour avis constate à regret qu'après une augmentation de 13,7 % en crédits de paiement et de 35 % en autorisations de programme l'année dernière, les dépenses en capital diminuent pour 2002.

Pour 2002, elles s'élèvent à 191,04 millions d'euros en crédits de paiement, en baisse de 0,1 % et à 240,1 million d'euros en autorisations de programme, soit une diminution de 7,61 %.

(en millions d'euros)

 

LFI 2001

PLF 2002

2002/2001 (en %)

Tableau dépenses en capital (AP)

259,88

240,1

-7,61 %

Total dépenses en capital (CP)

191,23

191,04

-0,1 %

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

B. ENSEMBLE DES DÉPENSES PUBLIQUES BÉNÉFICIANT A L'AGRICULTURE

Le bleu budgétaire du ministère de l'agriculture et de la pêche comporte, en annexe, la liste de l'ensemble des dépenses publiques bénéficiant à l'agriculture.

(dépenses ordinaires + dépenses en capital (CP))

 

LFI 2001
(en milliers d'euros)

PLF 2002
(en milliers d'euros)

2002/2001 (en %)

Ministère de l'agriculture et de la pêche

 
 
 

. Budget général (hors pêche)

5 078,84

5 075,62

-0,08%

. BAPSA et subvention d'expertise au BAPSA et à l'AAM

11 283,36

11 680

+3,5%

. Comptes spéciaux du trésor

272,76

224,08

-17,85%

Total ministère de l'agriculture

16 634, 96

16 979, 7

+2,07%

Autres ministères

 
 
 

. Recherche : INRA, CEMAGREF

581, 68

594,58

+2,22%

. Intérieur : Décentralisation de l'enseignement agricole

58,56

60,53

+3,36%

. Emploi : décentralisation de l'apprentissage agricole

13,67

14,22

+4,02%

Total autres ministères

653, 91

669, 33

+2,36%

Estimation des dépenses agricoles de l'Union Européenne bénéficiant à la France

10 104

10 413,6

+3,06%

TOTAL

27 365, 04

28 035, 57

+2,45%

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

L'analyse de cet agrégat fait apparaître pour 2002 une augmentation de 2,45 % de l'ensemble des dépenses publiques en faveur de l'agriculture.

A la différence de la contribution du budget général du ministère de l'agriculture et de la pêche, qui diminue, la plupart des autres financements sont en progression, notamment ceux en provenance d'autres ministères (+2,36 %) ou de l'Union européenne (+ 3,06 %).

La forte diminution (-17,85 %) des crédits inscrits aux comptes spéciaux du Trésor rattachés au ministère de l'agriculture et de la pêche est imputable à la budgétisation partielle des dépenses du Fonds national des Haras et des activités hippiques.

II. LES PRIORITES DU GOUVERNEMENT

Les priorités affichées par le Gouvernement pour 2002 sont globalement les mêmes que l'année dernière. Elles s'articulent autour de quatre grands axes.

A. LE RENFORCEMENT DE LA SÉCURITÉ ET DE LA QUALITÉ DES PRODUITS

Présentés dans l'agrégat 12 (« sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation »), les crédits allouées à cette priorité s'établissent pour 2002 -hors dépenses d'équarrissage- à 388,5 millions d'euros , en augmentation de 12,1 %.

Cette progression permet d'augmenter, de 18 % les dépenses consacrées aux interventions économiques (146,19 millions d'euros) et de 8,8% les dépenses de fonctionnement (241,31 millions d'euros) dans des domaines tels que la protection des végétaux, la lutte contre les maladies animales, en particulier l'ESB, ou encore la promotion alimentaire.

Votre rapporteur pour avis ne s'étendra pas sur ces crédits, retracés dans le tableau ci-dessous, qui font, pour la plupart, l'objet d'une présentation détaillée par notre collègue Bernard Dussaut dans son rapport pour avis sur les industries agro-alimentaires.

CRÉDITS CONSACRÉS À LA SÉCURITÉ
ET QUALITÉ SANITAIRE DE L'ALIMENTATION

(en millions d'euros)



DESTINATION DES CRÉDITS

Crédits en LFI 2001

Crédits dans le PLF 2002

Evolution

Interventions économiques

Protection et contrôle sanitaire des végétaux

Sélection végétale

Lutte contre les maladies des animaux

Sélection animale et identification des animaux

Promotion de la qualité alimentaire

Promotion et contrôle de la qualité (dépenses en capital)

123,94

8,61

2,13

89,18

20,73

2,21

1,07

146,19

9,38

2,44

106,71

24,39

2,21

1,07

18,0 %

8,8 %

14,3 %

19,7 %

17,6 %

-

-

Moyens

Système intégré d'identification permanente et de traçabilité animales

Dépenses diverses d'analyse et de fonctionnement

AFSSA

Moyens en personnel

222,68

3,05


17,51

35,96

166,15

242,31

3,65

18,43

37,18

183,06

8,8 %

19,7 %


5,2 %

3,4 %

10,2 %

TOTAUX

346,62

388,5

12,1 %

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche

Il tient cependant à apporter quelques précisions. L'augmentation des crédits alloués à l'identification animale servira notamment à financer la mise en place du dispositif d'identification permanente des animaux (IGP), destiné à fournir un suivi de l'ensemble des mouvements d'animaux, ainsi qu'au renforcement du système d'identification des ovins, dont l'épisode français de fièvre aphteuse a souligné les lacunes.

Par ailleurs, les crédits en faveur de la sélection végétale, en hausse de 14,3 %, sont destinés au financement de la recherche publique et des actions, telles que la conservation des variétés ou l'amélioration des caractéristiques des semences et des plants, que celle-ci conduit en collaboration avec la recherche privée.

Ils permettent également le versement d'une contribution au programme français de génomique végétale, dit programme Génoplante, qui entreprend l'analyse des génomes pour les espèces d'intérêt agricole telles que le blé, le maïs, le colza, mais également le pois, la luzerne.

B. LA PROMOTION DE LA MULTIFONCTIONNALITÉ DE L'AGRICULTURE

Le montant des crédits destinés à l'agriculture multifonctionnelle s'établit à 752,74 millions d'euros, en augmentation de 2,6 %.

Parmi ces crédits, qui sont présentés dans l'agrégat 21 (« multifonctionnalité de l'agriculture»), le Gouvernement a souhaité mettre l'accent sur :

- les contrats territoriaux d'exploitation (CTE), dont les crédits (76,22 millions d'euros) augmentent de 25 % ;

- les moyens de fonctionnement du CNASEA , en progression de 23,1 %, à 48,8 millions d'euros ;

- les bâtiments d'élevage et la maîtrise des pollutions agricoles , dont les crédits atteignent 28,9 millions d'euros (+18,8 %) ;

- les aménagements fonciers, hydrauliques et les grands aménagements régionaux en progression (+9,1 %) à 20 millions d'euros ;

- le Fonds national de garantie des calamités agricoles , dont la dotation (10,7 millions d'euros) augmente de 40 %.

LA RELANCE DE L'ASSURANCE-RÉCOLTE

Le Fonds national de garantie des calamités agricoles indemnise les dommages non assurables en l'état actuel des techniques d'assurance et des possibilités de mutualisation des risques. La loi du 10 juillet 1964 instaurant le régime des calamités agricoles reconnaît cependant la supériorité économique du système de l'assurance-récolte, pour le développement de laquelle elle prévoit une incitation financière.

La dotation supplémentaire attribuée au FNGCA doit servir, selon le Gouvernement, à favoriser le développement de l'assurance des risques climatiques, en soutenant, dans un premier temps, l'expérimentation de contrats assurant contre le gel et la grêle dans le domaine de la viticulture et de l'arboriculture, ainsi que de contrats d'assurance contre les intempéries dans le secteur des grandes cultures.

Cette incitation à la mise en place d'un système d'assurance contre les risques climatiques devrait prendre la forme d'une prise en charge partielle des primes d'assurance pendant la montée en charge du dispositif.

Elle est nécessaire pour accélérer l'adhésion des producteurs et permettre d'atteindre une échelle de mutualisation des risques suffisante pour garantir l'autonomie financière de ces assurances à un coût acceptable pour les exploitants agricoles.

Prenant acte de cette volonté de développer une assurance-récolte fondée sur l'extension des garanties contre les risques climatiques, votre rapporteur pour avis plaide plus largement en faveur d'une réforme tendant à la mise en place d'une véritable assurance-revenu, qui liserait les revenus des bonnes et des mauvaises années.

Il convient de souligner qu'au delà de l'effet d'affichage, le Gouvernement ne confère pas un traitement prioritaire à l'ensemble des politiques qu'il a rassemblées, de manière au demeurant assez arbitraire, dans l'agrégat « multifonctionnalité de l'agriculture ».

Les dotations destinées aux agriculteurs en difficulté et endettés, les crédits des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), sont par exemple simplement reconduites. Les crédits consacrés aux préretraites et ceux en faveur de l'installation connaissent, quant à eux, une franche diminution.

CRÉDITS CONSACRÉS À LA MULTIFONCTIONNALITÉ DE L'AGRICULTURE
(HORS CHARGES DE BONIFICATION)

(en millions d'euros)



DESTINATION DES CRÉDITS

Crédits en LFI 2001

Crédits dans le PLF 2002

Evolution

Dépenses ordinaires

Contrats territoriaux d'exploitation agricoles

Programme agri-environnemental

Installation en agriculture

IVD - Préretraites et actions sociales

Fonds national de garantie contre les calamités agricoles

Fonctionnement CNASEA

SAFER - Fonctionnement

Forêt, animation rurale et intervention pour l'aménagement rural

ICHN et actions spécifiques en zones défavorisées

Haras nationaux et politique du cheval

688,71

60,98

88,42

87,92

121,81

7,62

39,64

7,62

9,40


197,17

20,87

694,14

76,22

88,42

79,72

82,57

10,67

48,78

7,69

9,58


197,23

45,99

0,8 %

25,0 %

0,0 %

- 9,3 %

- 32,2 %

40,0 %

23,1 %

0,9 %

1,9 %


0,0 %

120,3 %

Dépenses en capital

Bâtiments d'élevage et maîtrise des pollutions agricoles

Aménagement foncier, hydraulique et grands aménagements régionaux

Amélioration du cadre de vie et de développement rural

Haras nationaux et intervention en faveur de l'élevage et de l'utilisation du cheval

44,84

24,39


18,40

2,04

0,02

58,60

28,97


20,07

2,10

7,47

30,7 %

18,8 %


9,1 %

3,1 %

NS

TOTAUX

733,55

752,74

2,6 %

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche

C. LE SOUTIEN AUX FILIÈRES ET A LA RÉGULATION DES MARCHÉS

Correspondant à l'agrégat 23, les dépenses de soutien aux filières et de régulation des marchés s'élèvent pour 2002 à 818,09 millions d'euros , en progression de 4 % par rapport à l'année précédente.

Les actions réellement prioritaires dans cette enveloppe sont :

- les primes au maintien du troupeau de vaches allaitantes , dont les crédits s'élèvent à 794 millions d'euros, soit une progression de 29,3 %. Cette augmentation traduit l'attribution des aides directes versées aux éleveurs bovins ;

- la politique de la qualité , qui vous est présentée dans le cadre de l'avis sur les crédits des industries agro-alimentaires : crédits destinés à l'Institut national des appellations d'origine (INAO), en hausse de 4 % à 12,9 millions d'euros, crédits en faveur des signes de qualité et de l'agriculture biologique (+14,5 %) ;

- les primes d'orientation agricole , en augmentation de près de 15%, à 18,5 millions d'euros ;

- la gestion des aides versées dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) , dotée de 10,7 millions d'euros (+6 %).

Il convient de souligner que ces majorations se font notamment au détriment de l'aide alimentaire dont les crédits diminuent de 31,7 %, passant de 32 à 22 millions d'euros.

CRÉDITS CONSACRÉS AUX AIDES AUX PRODUITS
ET À LA RÉGULATION DES MARCHÉS

(en millions d'euros)



DESTINATION DES CRÉDITS

Crédits en LFI 2001

Crédits dans le PLF 2002


Evolution

Dépenses ordinaires

Primes au maintien du troupeau des vaches allaitantes

Offices d'intervention agricoles et leur agence centrale

Institut national des appellations d'origine (INAO)

Promotion et contrôle de la qualité : signes de qualité de l'agriculture biologique

Gestion des aides PAC

Aide alimentaire

Actions de promotion (SOPEXA)

Soutien à la production du sucre dans les DOM

Divers

763,10

137,66

180,67

12,42

1,68


10,09

32,07

24,39

57,93

6,18

794,01

178,00

480,89

12,92

1,92


10,69

21,92

24,39

58,00

5,26

4,0 %

29,3 %

0,0 %

4,0 %

14,5 %


6,0 %

- 31,7 %

0,0 %

0,1 %

- 14,8 %

Dépenses en capital (crédits de paiement)

POA


Abattoirs publics, action de restructuration et FRAII

23,61

16,12


7,49

24,09

18,51


18,43

2,0 %

14,8 %


- 25,5 %

TOTAUX

786,71

818,09

4,0 %

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche

D. L'EFFORT EN FAVEUR DE L'ENSEIGNEMENT ET DE LA RECHERCHE

D'un montant total de 1173,02 millions d'euros, les crédits alloués à la formation, à l'enseignement et à la recherche connaissent une progression de 2,2 %, nettement inférieure à celle constatée pour 2001, qui était de 5,5 %.

Un soutien est particulièrement accordé :

- à l'enseignement technique agricole , dont l'augmentation de crédits (896,8 millions d'euros en tout) devrait permettre la création de 50 emplois et l'augmentation des dépenses à caractère pédagogique ;

- à l'enseignement supérieur public , doté de 4 millions d'euros supplémentaires, en vue du recrutement de 20 nouveaux enseignants et ingénieurs.

A cet égard, votre rapporteur pour avis note que l'enseignement supérieur privé n'est une fois de plus pas à parité avec l'enseignement public, sa dotation n'augmentant que de 1,2 million d'euros.

Il s'en remet à la commission des affaires culturelles pour une analyse approfondie des crédits du secteur de l'enseignement agricole.

III. DES LACUNES REGRETTABLES

Votre rapporteur pour avis ne reviendra pas sur les crédits de la forêt qui subissent une diminution alors que le Gouvernement range la politique forestière parmi ses actions prioritaires : la Commission des affaires économiques a déjà exprimé sa désapprobation à l'égard de cette baisse lors de l'examen du rapport pour avis relatif au développement rural.

A. LES CREDITS EN FAVEUR DE L'INSTALLATION

Inscrits à la ligne budgétaire 44-41/21, les crédits destinés au versement de la dotation d'installation des jeunes agriculteurs (DJA) s'élèvent pour 2002 à 66,5 millions d'euros, soit 8,2 millions d'euros de moins que l'année précédente (-9,3 %). Selon le Gouvernement, cette enveloppe doit permettre le financement de 8000 installations en 2000. Il justifie cette diminution par la baisse du nombre de DJA distribuées l'année précédente, ainsi que par l'entrée en vigueur du cofinancement communautaire de cette mesure dans le cadre du plan de développement rural national.

D'un montant moins significatif, les autres soutiens à l'installation sont, quant à eux, reconduits. Il s'agit :

- des aides accordées sous la forme de prêts bonifiés ;

- des crédits du Fonds d'installation en agriculture, gérés par le CNASEA ;

- des crédits finançant les stages préparatoires à l'installation.

Votre rapporteur pour avis s'étonne, une fois de plus, que le Gouvernement considère la politique en faveur de l'installation comme l'une de ses priorités, alors qu'il ne cesse de diminuer les crédits qui lui sont consacrés.

B. LES CREDITS EN FAVEUR DE LA CESSATION D'ACTIVITE

Figurant dans le chapitre consacré à l'amélioration des structures agricoles, les crédits destinés à faciliter la cessation d'activité sont en diminution.

Il s'agit, d'une part, des crédits prévus pour les indemnités viagères de départ, inscrits à la ligne 44-41/11, qui passent de 80,8 à 51,3 millions d'euros, soit une diminution de 29,5 millions d'euros . Cette diminution s'explique par la résorption progressive du nombre d'IVD à verser, ce dispositif ayant pris fin en 1990.

Les crédits attribués à l'aide au départ, inscrits à la ligne 44-41/12, baissent également de 34,3 à 24,7 millions d'euros . Ils financent les préretraites agricoles mises en place par la loi du 31 décembre 1991, au titre des mesures d'accompagnement de la PAC, dont le régime s'éteint lui aussi progressivement, conformément à la loi du 1 er février 1995 de modernisation de l'agriculture.

Ils servent aussi, théoriquement, au versement des pré-retraites allouées dans le cadre d'un CTE-transmission. Il semble cependant que le succès de cette formule, instaurée pour insuffler un nouvel élan à la politique de l'installation, se fasse pour l'instant attendre.

Votre rapporteur pour avis regrette ces diminutions, pourtant prévues de longue date. Il lui semble, en effet, que dans un contexte marqué par un faible nombre de départs à la retraite, les pré-retraites constituent un instrument d'incitation à la transmission. Il convient, à cet égard, de rappeler que l'objectif initial des IVD était de favoriser la libération de terres agricoles au profit des jeunes candidats à l'installation.

En outre, les pré-retraites pourraient constituer l'un des éléments phares d'une politique d'accompagnement social en direction des secteurs agricoles en crise, comme l'élevage bovin et la viticulture. Votre rapporteur pour avis insiste notamment sur la nécessité de mettre en place de manière urgente une aide au départ des vignerons âgés actuellement touchés par la chute des ventes, en particulier dans le secteur des vins de table.

C. LES CREDITS EN FAVEUR DES AGRICULTEURS EN DIFFICULTE ET ENDETTES

Les dotations destinées aux agriculteurs en difficulté renvoient à deux dispositifs :

1. Le dispositif « agriculteurs en difficultés »

Il comprend deux volets, dont les crédits sont inscrits à deux lignes budgétaires différentes:

- la ligne 44-53/80, pour les crédits destinés au volet analyse/suivi des exploitations et plans de redressement ;

- la ligne 44-41/28, pour les crédits de l'aide à la réinsertion professionnelle.

Au cours de l'année 2000, le nombre de plans de redressement réalisés s'est élevé à 2674, alors que 770 aides à la réinsertion professionnelle ont été versées.

Pour 2002, les dotations à l'analyse/suivi des exploitations et aux plans de redressement sont reconduites à 13,72 millions d'euros . Les crédits d'aide à la réinsertion professionnelle sont également reconduits à 3,05 millions d'euros.

2. Le Fonds d'allègement des charges financières

Créé en 1990, le Fonds d'allègement des charges financières (FAC) était initialement géré par le Crédit agricole, qui consentait des allègements de charges financières aux agriculteurs, en contrepartie des produits financiers provenant de la collecte des dépôts de notaires en zone rurale.

Le décret n° 2000-1156 du 30 novembre 2000 ayant supprimé le droit de collecte du Crédit agricole, il a été décidé que le FAC serait désormais abondé par des ressources budgétaires.

En 2001, les aides ont été affectées en priorité à l'allègement des charges des exploitations du secteur bovin. Les exploitations retenues connaissent des difficultés financières tout en restant économiquement viables.

Pour 2002, la dotation du FAC, qui figure au chapitre 44-46, a été reconduite à 30,5 millions d'euros.

Votre rapporteur pour avis souligne l'insuffisance de cette enveloppe au regard de la durée et de la gravité des crises sectorielles qui frappent notre agriculture.

Il souhaite, en outre, qu'il soit remédié à la complexité et à la lenteur des procédures à suivre tant dans le cadre du FAC que dans celui du dispositif dit « agridiff ». Il faudrait ne pas perdre de vue la nécessité de verser rapidement les aides aux agriculteurs qui en ont un besoin urgent.

D. L'INSUFFISANCE DES DOTATIONS AUX OFFICES

Inscrite à la ligne budgétaire 44-53/10, l'enveloppe globale allouée aux offices subit une légère diminution, passant de 466,34 à 466,33 millions d'euros.

Il convient de souligner l'importance des missions remplies par les offices agricoles tant en matière de fonctionnement des marchés et d'organisation des producteurs qu'en termes d'adaptation structurelle des exploitations et des filières.

En outre, les offices jouent un rôle essentiel dans l'organisation des campagnes de promotion en faveur des produits agricoles et alimentaires. Dans le contexte d'un environnement international de plus en plus concurrentiel, il est nécessaire de leur donner les moyens d'accomplir leur mission.

Votre rapporteur pour avis aurait souhaité un effort budgétaire plus conséquent en faveur des offices agricoles.

*

* *

Sur proposition de son rapporteur pour avis, la Commission des Affaires économiques a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés à l'agriculture inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 13 novembre 2001, la Commission des Affaires économiques a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Marc Pastor sur les crédits consacrés à l'agriculture inscrits au projet de loi de finances pour 2002.

En réponse à M. Jean-Marc Pastor, qui souhaitait obtenir des précisions quant à l'éventualité d'une réforme de fond de la PAC, M. Gérard César, rapporteur pour avis, a, tout d'abord, précisé que cette possibilité avait été évoquée par certains Etats membres au printemps dernier.

M. Jean-Paul Emorine a insisté sur le caractère dramatique de la situation actuellement vécue par le monde de l'élevage, auquel ni le budget de l'Etat, ni la politique agricole commune ne semblaient plus offrir d'avenir. Il a souligné l'absence de perspective économique pour les jeunes agriculteurs qui venaient de s'installer après avoir consenti d'importants efforts de formation. Il a, enfin, mis en garde contre les conséquences d'une disparition de l'élevage en termes d'occupation de l'espace rural.

M. François Gerbaud a conforté les propos tenus par M. Jean-Paul Emorine.

M. Hilaire Flandre s'est inquiété de la diminution considérable du nombre d'installations, qui risquait d'entraîner une désertification d'une partie du territoire, estimant toutefois que cette diminution n'était pas imputable à l'insuffisance des aides, mais à l'absence de perspectives d'avenir. Il a également craint que la prise en compte, dans les statistiques, du stock de bovins invendus, ne gonfle de manière trompeuse leurs résultats s'agissant du revenu des éleveurs. Il a déploré que le rapport sur l'assurance-récolte, prévu par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, n'ait pas encore été transmis au Parlement.

M. Bernard Joly a considéré que seule la reprise de la consommation de viande bovine permettrait une sortie de crise.

En réponse, M. Gérard César, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il craignait que les aides directes annoncées ne soient versées tardivement aux éleveurs dès lors qu'une enquête devait préalablement être conduite. Il a également souligné que les moyens alloués par la PAC risquaient d'être réduits à l'avenir, notamment en raison de l'élargissement de l'Union européenne. Il a ensuite précisé que le nombre d'installations aidées était passé d'environ 10.000 en 1997 à 6.314 en 2000. A propos de l'assurance-récolte, il a rappelé que le ministre de l'agriculture avait déjà annoncé, l'année dernière, la publication imminente du rapport Babusiaux sur la gestion des risques en agriculture. Dans l'optique d'une reconquête de la consommation de viande bovine, il a souhaité que des moyens supplémentaires soient alloués à l'Office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL) et que celui-ci initie des campagnes de communication mettant davantage l'accent sur les garanties de la viande française en termes de qualité et de traçabilité.

M. Hilaire Flandre a souligné que la remontée du niveau de consommation passait également par une modération des marges prélevées par la grande distribution.

M. Patrick Lassourd a plaidé en faveur d'une réglementation du partage de la marge nette entre les différents maillons de la filière bovine, afin d'éviter qu'elle soit captée par les distributeurs, en particulier à travers le mécanisme dit de la « marge arrière ». Il a insisté sur la dimension politique du problème de l'avenir de l'élevage. Il a également souhaité l'adoption d'une définition économique de l'entreprise agricole.

M. Gérard Bailly a attiré l'attention sur les difficultés économiques rencontrées actuellement par les organisations de producteurs. Après avoir constaté l'effort financier insuffisant consenti en faveur des allègements de charges, il a insisté sur les pertes de revenus subies par les communes forestières du fait de la non-valorisation du bois.

M. Jean-Marc Pastor a abondé dans le sens de M. Hilaire Flandre s'agissant de la baisse tendancielle du nombre d'installations. Il a estimé qu'il faudrait, compte tenu de l'évolution du contexte agricole, avoir le courage de traiter les problèmes en suspens lors de la révision à mi-parcours de la politique agricole commune. Il a considéré les contrats territoriaux d'exploitation comme une forme de redistribution des aides européennes, traduisant la mise en place d'un nouveau modèle agricole en rupture avec la logique libérale. Toute notre agriculture ne peut, a-t-il ajouté, être régie de manière purement concurrentielle. Il a plaidé, à titre d'exemple, pour le maintien de l'encadrement du marché laitier par des quotas. Enfin, il a considéré que le projet de budget de l'agriculture s'inscrivait dans la poursuite de cette réflexion visant à offrir à l'agriculture une alternative à la pure logique libérale.

M. Gérard Le Cam a souligné que les crises récentes avaient contribué à l'aggravation de la situation de l'agriculture, dont les difficultés n'étaient toutefois pas imputables à la conduite d'une politique de gauche. Il a insisté sur la nécessité de réfléchir à la mise en place de prix rémunérateurs dans le domaine agricole, rappelant qu'il avait interrogé le ministre de l'agriculture et de la pêche sur ce point. Jugeant préoccupant le problème de l'installation des jeunes, il a fait part de son intention d'intervenir sur ce sujet lors de la discussion de la loi de finances.

En réponse, M. Gérard César, rapporteur pour avis, a indiqué que le groupe de travail sur la crise bovine se pencherait sur la question du partage des marges au sein de la filière. Il a fait observer que la fragilisation de l'organisation économique agricole risquait d'avoir des conséquences en termes d'emploi. Il a insisté sur l'insuffisance, dans ce contexte, des dotations allouées au Fonds d'allègement des charges financières (FAC) ainsi qu'au dispositif « agriculteurs en difficultés ». Il a indiqué que la commission allait également réfléchir, dans le cadre d'un groupe de travail, aux inflexions à apporter à la PAC lors de la révision à mi-parcours. Regrettant que les contrats territoriaux d'exploitation (CTE) soient souvent conclus dans le but de percevoir des aides, et qu'ils privilégient davantage les aspects environnementaux que la dimension économique, il a fait observer que la récente augmentation du nombre de contrats signés n'avait pu être obtenue que grâce à une simplification drastique de la réglementation applicable. Enfin, il a souligné que la question des prix rémunérateurs ne pourrait être réglée qu'au niveau européen.

M. Gérard Larcher, président, a souhaité que la commission formule des propositions précises sur les modifications à apporter à la PAC. Prenant l'exemple de la diminution significative du nombre d'installations en céréaliculture, il a indiqué que c'était bien un problème de revenu qui était en cause.

Sur proposition du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés à l'agriculture dans le projet de loi de finances pour 2002, le groupe socialiste se prononçant, quant à lui, en faveur de leur adoption, et le groupe communiste républicain et citoyen s'abstenant.



1 Synthèses n° 50-51, les comptes de l'agriculture.

2 « Santé animale : La lutte contre la fièvre aphteuse, du risque sanitaire à l'enjeu économique »-juin 2001

3 « Comment mieux positionner les vins français sur les marchés d'exportation », rapport de M. Jacques Berthomeau, Contrôleur général des offices, remis le 31 juillet 2001.


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