Projet de loi de finances pour 2002 - Tome XXI : Technologies de l'information et poste

HERISSON (Pierre)

AVIS 89 - TOME XXI (2001-2002) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES

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Table des matières




N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XXI

TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION ET POSTE

Par M. Pierre HÉRISSON,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Gérard Larcher, président ; Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Jean-Marc Pastor, Mme Odette Terrade, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Patrick Lassourd, Bernard Piras, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut, André Ferrand, Hilaire Flandre, François Fortassin, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kerguéris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 12 ) (2001-2002)


Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Cette année encore, la présentation budgétaire rend peu lisibles les crédits que l'Etat consacre au secteur de la poste et des technologies de l'information, rassemblés, pour partie, dans un agrégat hétéroclite consacré à « l'action sur l'environnement et le développement de la compétitivité des entreprises » , auxquels s'ajoutent les crédits des administrations en charge des postes et télécommunications, fondus dans l'enveloppe globale des moyens du ministère, ceux consacrés au réseau national de recherche en télécommunications, ainsi que les dotations figurant au budget des charges communes et destinées à payer les pensions des agents retraités de France Télécom, et, pour une partie, de La Poste. Au total, on peut estimer l'enveloppe « poste et technologies de l'information » à 438 millions d'euros, en faible augmentation par rapport à l'an passé.

Mais plus que de l'évolution des seuls crédits que l'Etat consacre à ces secteurs d'activité, c'est plus globalement de leur avenir que votre rapporteur pour avis a souhaité faire le centre de sa réflexion.

En matière postale
, l'adoption, au Conseil télécommunications du 15 octobre dernier, d'une position commune des Quinze États membres de la communauté sur le calendrier de la libéralisation du marché postal d'ici à 2009 ne fait qu'aviver l'urgence des choix politiques à opérer, en France, pour assurer l'avenir de La Poste, dans un environnement au bouleversement désormais programmé. Au delà de la seule négociation du futur contrat de plan de l'établissement -qui a, déjà, pris du retard-, votre commission continue à demander qu'un débat législatif sur une loi d'orientation postale permette enfin de trancher, par un débat démocratique, les questions décisives que sont, par exemple, le statut de l'opérateur national ou le financement des missions d'intérêt général qu'il exerce.

Bien que ses usages continuent de se diffuser dans la société, le secteur des technologies de l'information traverse , quant à lui, une crise aussi soudaine que brutale. Après avoir été porté aux nues, il est entraîné dans des turbulences, notamment boursières, qui fragilisent, en Europe, des opérateurs historiques hier considérés comme invincibles. Les modalités et le calendrier de l'introduction de la téléphonie mobile de troisième génération, l'UMTS, portent une lourde part de responsabilité dans cette situation. Votre commission soutient la baisse, tardive mais enfin réaliste, des montants des licences en France, proposée par le Gouvernement à l'article 17 du projet de loi de finances. Toutefois, elle se préoccupe de la question de la couverture territoriale programmée par les cahiers des charges de ces licences, question soigneusement passée sous silence par le Gouvernement.

D'une manière générale, la commission des affaires économiques s'inquiète du creusement d'un « fossé numérique » entre zones urbaines et zones faiblement peuplées du territoire en matière de téléphonie mobile comme de haut débit, dont le comblement conduit, inévitablement, à terme, à faire porter la charge financière des investissements nécessaires sur les collectivités locales concernées . Cette « péréquation inversée » (les collectivités les plus « pauvres » devant payer pour l'accès à des services de communication que les opérateurs déploient gratuitement au sein des collectivités les plus « riches » car les plus denses) tend d'ailleurs à se généraliser, sous l'impulsion de l'Etat, qui, avec les aides qu'il octroie, sur le principe d'un co-financement, invite les collectivités à assumer une part toujours plus importante du financement. Par ailleurs, la lenteur de mise en oeuvre du « dégroupage » de la boucle locale 1( * ) ralentit la diffusion territoriale de la technologie à haut débit « ADSL », tandis que ses conditions financières en restreindront probablement l'application, une fois encore, aux zones les plus rentables car les plus denses.

Enfin, votre commission s'interroge sur la volonté du Gouvernement d'inscrire à l'ordre du jour des assemblées la discussion du projet de loi sur la société de l'information , dont elle a déjà, au cours de précédents débats, indiqué qu'elle souhaitait être saisie au fond. En effet, outre le fait que ce projet de loi n'est pas encore inscrit au programme de travail prévisionnel de l'Assemblée nationale, plusieurs de ses dispositions ont déjà été « recyclées », par amendements du Gouvernement, dans d'autres projets de loi 2( * ) , donnant la désagréable impression d'un « découpage par appartement » qui handicape ses chances d'être, un jour, discuté. Le Sénat s'est déjà maintes fois insurgé contre cette méthode législative qui, en « saucissonnant » les questions, empêche l'émergence de réflexions globales. Votre commission reprend, bien entendu, cette préoccupation à son compte s'agissant du projet de loi sur la société de l'information.

Pour ces motifs, et sur la proposition de son rapporteur pour avis, votre commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la poste et aux technologies de l'information dans le projet de loi de finances pour 2002.

CHAPITRE IER -

LE PROJET DE LOI DE FINANCES

A. DES CRÉDITS PEU IDENTIFIABLES ET DISPERSÉS

1. Des dotations noyées au sein d'un agrégat budgétaire composite

Alors que la poste et les technologies de l'information faisaient l'objet d'un ministère à part entière dans le précédent Gouvernement, aussi bien que d'une section budgétaire distincte, la réorganisation administrative et financière du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a conduit :

- dans un premier temps à la constitution d'un agrégat « Poste et télécommunications » au sein du fascicule budgétaire des crédits de l'industrie ;

- puis, dans un deuxième temps, à l'inclusion de ces crédits au sein d'un agrégat composite, dénommé, dans le projet de loi de finances pour 2000 « Action sur l'environnement des entreprises et modernisation des PMI » ; rebaptisé, dans les projets de loi de finances pour 2001 et 2002, « Action sur l'environnement et le développement de la compétitivité des entreprises ».

Cet agrégat « thématique », n° 23, est pour le moins disparate puisqu'il regroupe des crédits très divers :

- crédits de formation (écoles des mines, ENSCI, Supélec et groupe des écoles de télécommunications) ;

- crédits de promotion de la qualité et de normalisation (normalisation, certification, métrologie, actions de l'AFNOR, du Bureau national de la métrologie...) ;

- crédits des structures d'« appui à la compétitivité industrielle » (création d'entreprise, développement de la productique, prévention des risques industriels) ;

- et, enfin, les crédits relatifs au « contrôle et à la régulation du secteur postal et des télécommunications ».

Cette composante de l'agrégat n° 23 inclut :

- les crédits de l'ART 3( * ) et de l'ANF 4( * ) ;

- les crédits de la cellule postes et télécommunications de la Polynésie française, de la Nouvelle-Calédonie et de Mayotte ;

- les contributions aux organisations internationales dans le secteur postal et des télécommunications (UIT 5( * ) et UPU 6( * ) ) ;

- la subvention à l'association des utilisateurs du téléphone et des télécommunications ;

- la subvention à La Poste au titre du transport postal de la presse et les moyens du Médiateur du service universel postal chargé de traiter les litiges avec les usagers.

2. D'autres dotations dispersées au sein du budget de l'Etat

Il faut noter que cet agrégat n° 23 ne comprend pas les moyens de l'administration centrale, et notamment de la DIGITIP 7( * ) du ministère de l'industrie, qui sont en partie dévolus aux secteurs postal et des télécommunications, crédits indissociables de l'ensemble de ceux du ministère de l'économie et des finances dans la nouvelle présentation budgétaire, non plus que la subvention à la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications (qui figure à l'article 33 du chapitre 34-98, dans l'agrégat 31 « Administration générale et dotations communes », pour un montant de 241 235 euros).

En outre, le budget des charges communes prévoit des crédits destinés à payer les pensions des retraités de La Poste et de France Télécom , conformément à la loi du 26 juillet 1996 pour l'opérateur de télécommunications, qui a définitivement réglé la question du financement des retraites, et, pour l'opérateur postal, à la solution provisoire mise au point par l'article 8 du contrat de plan. Le montant total de ces crédits s'élève à 4,0 milliards d'euros 8( * ) , (soit 26,6 milliards de francs) pour 2002 , dont 2,5 milliards d'euros pour les retraités de La Poste et 1,5 milliard d'euros pour ceux de France Télécom.

Comme cela est développé au chapitre II du présent rapport, votre commission s'inquiète de l'évolution des charges de retraites postales d'ici à 5 ans et souhaite que le Gouvernement s'attache à trouver en la matière une solution satisfaisante pour La Poste.

Enfin, les crédits budgétaires du ministère de l'industrie relatifs au réseau national de recherche en télécommunications (RNRT) figurent à l'agrégat 22 du fascicule « Economie, finances et industrie » (au sein du chapitre budgétaire 66-01). Ces crédits, qui ne sont pas non plus individualisés, sont complétés par des dotations en provenance du ministère de la recherche. Depuis 1998, 94,6 millions d'€ ont été affectés à ces opérations par le ministère de l'industrie, dont 12 millions 9( * ) en 2001. L'ordre de grandeur devrait être le même pour 2002.

Des crédits de soutien au développement des nouvelles technologies de l'information sont également disséminés entre plusieurs agrégats du fascicule « Economie, finances et industrie ». En réponse aux questions de votre rapporteur quant à leur montant exact, le Gouvernement a répondu que « seul l'arbitrage du Ministre, rendu fin 2001 ou début 2002, permettra d'arrêter la programmation de ces crédits ». Bel exemple de transparence budgétaire !

Cet éclatement, de même que la globalisation des enveloppes, altèrent la lisibilité des crédits de l'Etat destinés au secteur des postes et technologies de l'information.

B. UNE ENVELOPPE GLOBALE DE 438 MILLIONS D'EUROS

Pour présenter une analyse pluriannuelle des crédits de ce secteur, votre rapporteur pour avis reconstitue, artificiellement, l'ancien agrégat « Poste et télécommunications », qui avait le mérite de présenter de façon cohérente les actions de l'Etat en faveur de ce secteur. Cette reconstitution donne le « budget » ci-après :

CRÉDITS POSTE ET TÉLÉCOMMUNICATIONS EN DO + CP
EN EUROS


Chapitre

Intitulé

Crédits votés LFI 2001

Crédits demandés PLF 2002

Variation LFI 2001/PLF 2002

37-06

ART

Rémunérations

Fonctionnement

TOTAL

8.501.968

6.895.535

15.397.503

9.105.667

7.047.984

16.153.651

+ 7,1 %

+ 2,2 %

+ 4,9 %

36-10 art. 71

63-04 art 10

ANF

Fonctionnement

Equipement

TOTAL

26.465.149

8.232.000

34.697.149

27.288.373

5.183.000

32.471.373

+ 3,1 %

-37,0 %

- 6,4  %

36-10 art 72 et 73

43-01 art. 30

GET 10( * )

ENSPTT (solde de tout compte)

79.197.267

320 143

89.868.698

304.898

+ 13,5 %

- 4,7 %

nb : dernière année d'existence de l'Ecole

44-80 art 60

Aide au transport postal de la presse

289.653.133

289.653.133

0 %

41-10 art 40

Subvention aux organisations internationales

8.059.218

8.059.218

0 %

41-10 art 10

Organismes P&T d'outre-mer

952.806

952.806

0 %

44-80 art 40

Subvention association d'utilisateurs

52 442

52 442

0 %

34-98 art 15

Médiateur postal (nouveau)

-

304.898

ns

TOTAL

 

428 329 661

437 821 117

ns

Ces chiffres appellent quelques brefs commentaires :

L'aide au transport postal de la presse (289 millions d'euros, soit 1,9 milliards de francs) représente les 2/3 du total. Ce montant, inchangé, est conforme aux engagements pris par l'Etat dans le contrat de plan. Il n'assure toutefois pas la couverture totale des frais de cette activité , dont une large part demeure assumée par La Poste (cf. chapitre II du présent rapport) ;

Les crédits consacrés à la formation augmentent, mais les moyens dégagés ne semblent pas suffisants, compte tenu des objectifs très ambitieux assignés au Groupement des écoles de télécommunications : ce dernier doit accroître significativement son effort de recherche et augmenter son nombre de diplômés annuels de 1.000 à 1.500 d'ici à 2005. Aussi ses besoins nouveaux sont-ils estimés à environ 15 millions d'euros (100 millions de francs), alors que le projet de loi de finances n'augmente sa dotation que de 10 millions d'euros ;

Les crédits demandés pour l'ART s'élèvent à 16 millions d'euros, en progression de 4,9 %. Toutefois, cette augmentation est sans commune mesure avec l'accroissement des missions de l'autorité et les enjeux de la régulation dans le secteur des télécommunications, qui se traduit par une technicité croissante des décisions à adopter et une progression très importante de leur nombre.

L'homologue britannique de l'ART, l'OFTEL, dispose de 200 collaborateurs (136 à l'ART) et d'un budget, qui a augmenté de 80 % en cinq ans, de 30 millions d'euros, soit deux fois plus que l'ART. Le RegTP allemand (également en charge, il est vrai, des questions postales) emploie 220 personnes. Le régulateur danois dispose de 191 emplois et d'un budget de 20 millions d'euros, le régulateur irlandais a 95 agents et 20 millions d'euros de budget, de même que les régulateurs belge et suédois.

Rapporté au nombre d'habitants, le budget de l'ART est un des plus faible des régulateurs européens des télécommunications : ce ratio est, en effet, de 1,75 franc par an et par habitant, contre 2,25 francs en Espagne, 2,95 francs en Italie et 3,51 francs en Grande Bretagne.

Ces chiffres apparaissent peu en rapport avec l'ambition du législateur lors de la création de l'ART par la loi de réglementation des télécommunications.

Une remarque similaire pourrait être faite pour la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications.

C. L'ARTICLE 17 DU PROJET DE LOI DE FINANCES : LE PRIX DES LICENCES UMTS

Un article de la première partie du projet de loi de finances concerne plus particulièrement le secteur des télécommunications. Il s'agit de l'article 17 qui, depuis sa modification par un amendement du Gouvernement lors de la discussion à l'Assemblée nationale, concerne le prix des licences UMTS.

L'article 36 de la loi de finances pour 2001 est modifié et de nouvelles conditions financières sont désormais fixées pour les redevances liées à l'utilisation des fréquences UMTS :

Un « ticket d'entrée », ou part fixe, d'un montant de 619.209.795,27 euros, est versé le 30 septembre de l'année de délivrance de l'autorisation ou lors de cette délivrance si celle-ci intervient postérieurement au 30 septembre. Cette somme équivaut à la première échéance du système précédent. Elle a déjà été versée par Orange et SFR le 30 septembre 2001.

Une « part variable », est versée annuellement, calculée en pourcentage du chiffre d'affaires réalisé au titre de l'utilisation desdites fréquences. Il est prévu que le taux de cette part variable et les modalités de son calcul, notamment la définition du chiffre d'affaires pris en compte, seront précisés dans les cahiers des charges annexés aux autorisations (édictés par un arrêté ministériel).

Enfin, par dérogation aux règles générales de durée des licences, et notamment au I de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, les autorisations d'établissement et d'exploitation des réseaux mobiles de troisième génération sont délivrées pour une durée de vingt ans , contre 15 ans dans les autres cas.

Cet article appelle trois commentaires :

Baisser le prix des licences est une bonne décision , qui n'a que trop tardé. Pour être réellement bénéfique à l'ensemble du secteur, elle devrait s'accompagner d'une démarche similaire de la part des autres Etats de l'Union européenne. Regrettons seulement qu'il ait fallu au Gouvernement un « bras de fer » médiatique avec l'un des opérateurs pour décider enfin d'une mesure de bon sens compte tenu des conditions du marché ;

Laisser au pouvoir réglementaire le soin de fixer la « part variable » est politiquement peu satisfaisant, la procédure employée ayant d'ores et déjà trop exclu le Parlement ;

Ne pas avoir saisi cette occasion pour programmer une extension des exigences de couverture territoriale est, au sens de votre commission, une erreur. Dans un contexte où le prix des licences était exorbitant, il était difficile de demander aux opérateurs une couverture trop large du territoire, compte tenu des coûts importants en résultant. Mais, dès lors que ce prix est significativement diminué, il apparaît possible d'inciter à une couverture accrue.

Comme le détaillera le chapitre III ci-après, l'expérience de téléphonie mobile de 2 e génération a, en effet, montré que si la concurrence était le moteur le plus dynamique pour inciter les opérateurs à aller au-delà de leurs obligations de couverture, elle trouvait toutefois sa limite, laissant durablement perdurer des « zones d'ombre », non couvertes.

CHAPITRE II -

LA POSTE FACE À L'OUVERTURE PROGRAMMÉE A LA CONCURRENCE

I. DES RÉSULTATS FLÉCHISSANTS

A. UNE CROISSANCE DU COURRIER ET DES COLIS PEU ENTHOUSIASMANTE

1. Le courrier : croissance ralentie et dégradation de la qualité

a) Une croissance ralentie

Les dernières données de trafic consolidées dont dispose la direction du courrier de La Poste concernent les flux de trafic de l'exercice 2000. Le tableau suivant détaille ces évolutions :

TRAFIC POSTAL DE 1998 À 2000 (1)

En millions d'objets, dépôts en métropole

1998

1999

2000

Evol 99/2000

TOTAL

25 563,2

25 845,5

26 199,9

1,4%

CORRESPONDANCES

11 819,9

11 823,0

11 862,2

0,3%

Lettres < 20g, CPU, AR

5 408,2

5 429,0

5 455,0

0,5%

Lettres>20g, Distingo

1 289,1

1 359,5

1 397,8

2,8%

Lettre rec.

180,0

180,3

186,0

3,2%

Ecopli, CNPU, franchises

4 942,6

4 854,2

4 823,4

-0,6%

PRESSE (franchises incluses)

2 111,6

2 091,2

2 069,8

-1,0%

COLIS

287,2

286,5

292,5

2,1%

PROSPECTION COMMERCIALE

11 344,3

11 644,8

11 975,4

2,8%

Catalogues (tarifs spéciaux, guichet)

77,9

78,1

85,6

9,5%

Gamme Postimpact

4 088,2

4 251,8

4 377,4

3,0%

Gamme Postcontact

7 056,4

7 177,4

7 392,3

3,0%

Annuaires à distribution spéciale

31,4

20,1

6,5

-67,4%

Postréponse

90,3

117,4

113,6

-3,2%

Source : La Poste

(1) L'évolution des méthodes statistiques nécessite de reconstituer les séries par « lissage », ce qui peut expliquer de légers écarts avec les chiffres communiqués en 2000 pour les années 1998 et 1999.

Ce tableau fait apparaître les évolutions suivantes :

Une croissance modérée du trafic global depuis 1998 (et même sur la période 1994-2000, de l'ordre de 1,8 %). En effet, la croissance du trafic postal, dynamique en 1997 et 1998 (+3,5 %) a, depuis, nettement ralenti. Elle n'est plus que de 1,4 % en 2000 , du fait de la stabilisation du trafic de correspondances depuis 2 ans (+0,3 %).

Une croissance « tirée » par la prospection commerciale -adressée et non adressée-, dont le volume a dépassé pour la première fois le trafic des correspondances, mais selon un rythme de croissance bien supérieur : +3,67 % par an en moyenne sur la période 1994-2001, contre +0,8 % seulement pour la correspondance. Longtemps dynamisé par la publicité non adressée (Postcontact), avec un taux de croissance supérieur à 10 % jusqu'en 1995, le trafic de la prospection commerciale connaît aujourd'hui une évolution plus contrastée, qui résulte de l'arrivée à maturité de ce marché. D'où de moindres perspectives de croissance (3 % en 2000). Ceci s'explique d'abord par l'évolution des stratégies de communication des grands clients « traditionnels » (grands annonceurs, grande distribution) d'un média « de conquête » (caractérisé par la publicité non adressée), vers des stratégies de fidélisation (tournées vers la publicité adressée). Cela s'explique ensuite par le niveau de saturation atteint par la distribution des publicités non adressées dans certaines zones.

Inversement, le principal trafic de courrier publicitaire adressé (Postimpact), après avoir connu une croissance annuelle moyenne de 2,6 % sur la période 1994-2000, connaît un regain d'intérêt et enregistre une croissance de 3 % en 2000.

Cette inversion de tendance est significative des évolutions attendues au cours des prochaines années : La Poste considère que le marketing direct adressé , média clé des stratégies de fidélisation des annonceurs, constituera le moteur de croissance du courrier. Ainsi, si La Poste mise sur une croissance moyenne du chiffre d'affaires d'environ 2,2 % sur la période 1998-2002 (à conditions inchangées), cette croissance devrait essentiellement être portée par la croissance du trafic et du chiffre d'affaires provenant du courrier publicitaire adressé, avec un taux moyen d'environ 6 % par an.

La quasi stagnation du trafic des correspondances s'explique, quant à elle, surtout par celle des lettres de moins de 20 g, qui représentent le plus gros flux de courrier adressé. Après une période de reprise, liée à l'absorption des pertes de 1995, l'inflexion s'est produite en 1999, date à laquelle le trafic des lettres de moins de 20 g est resté stable. Si cette croissance plus lente des trafics de courrier de transaction s'observe dans l'ensemble des pays industrialisés, notamment en Europe, il existe en France des déterminants pour partie spécifiques :

- le développement de la carte Vitale, dont on estime qu'elle fait perdre à La Poste près de 400 millions de plis par an, soit plus de 152,4 millions d'€ (~1 milliard de francs) par an ;

- la rationalisation des dépenses des entreprises, parmi lesquelles figure le courrier ;

- la raréfaction des échanges des particuliers ;

- le développement des nouvelles technologies (Internet, procédures télé- relevées telles que TVA, fiscalité, formulaires administratifs...) ;

- le développement du prélèvement automatique opéré par les grands facturiers et les administrations.

b) Des indicateurs de qualité dégradés

Les résultats des mesures de la qualité du courrier en 2000 sont en général inférieurs à ceux de 1999 et en dessous des objectifs fixés par le contrat de plan, comme l'indique le tableau ci-dessous :

MESURES DES DÉLAIS D'ACHEMINEMENT * POSTAUX

Catégories de courrier

Source

2000

Objectifs internes

Lettre tous flux confondus en J+1

SOFRES

73,5 %

80,4 %

Lettre CEDEX tous flux confondus J+1

SOFRES

72,6 %

80,8 %

Lettre intra-

départementale en J+1

SOFRES

86,4 %

89,7 %

Lettre en nombre J+2

Research International

89,0 %

94,7 %

Ecopli en nombre J+4

tous flux confondus

Research International

87,9 %

93,5 %

Publicité adressée POSTIMPACT à J+7

Research International

86,4 %

93,7 %

(*) Mesure de bout-en-bout : mesure du délai d'acheminement du moment où l'institut de mesure confie sa lettre au réseau postal (avant l'heure limite de dépôt) jusqu'au moment où la lettre est remise à l'institut de mesure destinataire.

Parmi les causes de cette dégradation, on peut citer la mise en oeuvre des accords relatifs à l'aménagement et à la réduction du temps de travail , à côté des difficultés rencontrées par l'Aéropostale, à cause d'une part d'une immobilisation pour réparation de la flotte et, d'autre part, de mouvements sociaux chez les pilotes.

2. Les colis et la logistique : FEDEX et les alliances méditerranéennes

Le chiffre d'affaires « colis et logistique » a progressé de 15,9 % en 2000. En vue de représenter 10 % du marché européen des colis, La Poste a procédé à des acquisitions (comme cela était détaillé dans le rapport pour avis de l'an dernier) lui permettant d'atteindre les chiffres de 37 % de part de marché en France, 11 % en Allemagne, 6 % au Royaume-Uni et 2 % au Benelux. En outre, elle a conclu une alliance commerciale avec Fedex et s'est alliée aux postes espagnoles et italiennes.

a) L'accord avec la poste espagnole

Les postes française et espagnole sont associées, depuis 1999, au travers d'une société commune détenue à 50/50, « Chronopost Espana », spécialisée dans le trafic express domestique et international. Elle réalise un chiffre d'affaires de 62 millions d'euros, dont 11 % à l'international (mais ne représente que 5,8 % du marché espagnol, contre un objectif de 15 % en 2003). Plusieurs pistes de développement sont envisagées : outre des acquisitions sur le marché espagnol du colis et de la logistique, le cadre de coopération actuel pourrait être modifié :

- Correos prendrait le contrôle majoritaire de la société, via une augmentation de capital ;

- un nouveau pacte d'actionnaires régirait les relations entre les deux postes et la société prendrait le nom de son futur produit domestique : Chrono Express. Aux côtés de ses activités domestiques, elle commercialiserait des produits internationaux express et rapides, en utilisant sous licence les noms proposés par GeoPost (Chronopost International, DPD) ;

- en contrepartie, Correos serait susceptible d'entrer dans l'ensemble GeoPost.

b) L'accord avec la poste italienne

Les postes française et italienne ont conclu un accord-cadre de coopération en matière de colis express et rapide, signé le 1 er juin 2001, dont l'objectif est de renforcer la coopération à court terme entre les deux postes dans le domaine des colis en particulier, et de créer les conditions à long terme pour un développement conjoint des activités colis. Il pose les principes d'une coopération opérationnelle et d'un accord capitalistique de participations croisées :

- entrée de GeoPost au capital de SDA participazioni, actionnaire de la société de colis rapides Bartolini (correspondant de DPD en Italie) ;

- entrée de Poste Italiane au capital de GeoPost.

L'accord cadre est signé pour une durée de 5 ans, renouvelable. Il prévoit la possibilité d'étendre le champ de la coopération entre les deux postes à d'autres activités telles que la logistique, le courrier et les services financiers.

c) L'accord avec Federal Express

La Poste a conclu un contrat de prestations de services avec Fedex, sur la base de prestations réciproques à des conditions tarifaires librement consenties. Outre la France, le contrat actuel couvre aussi la Belgique et permet à GeoPost de devenir l'agent de FEDEX dans les autres territoires européens, dès lors que le réseau GeoPOst est en capacité d'effectuer cette prestation de services.

Il ne s'agit toutefois que d'une alliance commerciale qui, pour stratégique qu'elle soit, n'a pas la pérennité d'une alliance capitalistique.

B. DES SERVICES FINANCIERS EN VOIE DE MARGINALISATION ?

1. Un quart du chiffre d'affaires et une croissance de 6 %

a) Un produit net bancaire de 3,7 milliards d'euros

Le produit net bancaire des services financiers de La Poste s'élève, en 2000, à 3,7 milliards d'euros, en progression de 6 % par rapport à 1999. Il représente un quart du chiffre d'affaires total de La Poste.

Le niveau total des encours a été porté à 186 milliards d'euros au 31/12/2000, en progression de 4,9% par rapport à 1999.

Le tableau ci-dessous détaille les principaux résultats des activités financières de La Poste :

ACTIVITÉ DES CLIENTÈLES FINANCIÈRES DE LA POSTE

(en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

Rémunération sur les fonds des CCP

1 202

1 207

1 270

1 345

Rémunération de l'épargne et des placements

1 379

1 445

1 591

1 725

Rémunération CNE (livrets A et B)

652

677

670

646

Autres produits d'épargne

726

768

921

1 078

Autres produits

606

620

619

623

Services rendus à l'Etat

150

138

92

34

Droits et commissions

457

482

527

589

Total produits des Services Financiers

3 187

3 272

3 480

3 693

Source : La Poste

Ce tableau appelle les commentaires suivants :

Depuis le 7 avril 2000, et conformément aux dispositions du contrat d'objectifs et de progrès portant contrat de plan entre l'Etat et La Poste, les avoirs créditeurs des titulaires des comptes-chèques postaux , ne sont plus intégralement versés au Trésor. Votre Commission des Affaires économiques s'en était vivement félicitée.

Une partie de ces fonds sont investis par la filiale EFIPOSTE de La Poste en titres sans risque. La rémunération sur la collecte des comptes-chèques postaux correspond donc désormais, pour une part, à la rémunération accordée à La Poste par l'Etat pour la collecte des fonds et la tenue des comptes chèques postaux, et pour le restant, à la contribution d'EFIPOSTE.

La rémunération sur la collecte de la Caisse nationale d'épargne (CNE) correspond à la rémunération accordée à La Poste par la Caisse des Dépôts et Consignations pour la gestion des Livrets A et B.

La rémunération sur les autres produits d'épargne correspond :

- à la rémunération accordée par la Caisse des Dépôts et Consignations pour la gestion des produits d'épargne-logement, d'épargne populaire, du Codevi et du livret Jeunes (depuis 1996) ;

- aux rémunérations des activités des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), c'est-à-dire aux rémunérations accordées par les organismes tiers pour la gestion des opérations de clientèle ;

- aux rémunérations des activités d'assurance réalisées avec la Caisse nationale de prévoyance (CNP) et qui font l'objet d'un engagement contractuel.

Enfin, la rémunération des services rendus à l'Etat correspond à la rémunération accordée à La Poste pour la gestion des comptes chèques postaux des comptables publics.

b) Des positions consolidées

La croissance économique en 2000 (+ 3,2 %), soutenue par la demande intérieure, a conduit les ménages à maintenir un niveau de liquidités élevé sur leurs comptes-chèques postaux. Les avoirs moyens rémunérés atteignent ainsi 27 milliards d'euros, en progression de 5,3 % par rapport à 1999.

La rémunération des livrets A et B diminue de 3,6 % par rapport à 1999. Bien que l'annonce en juin 2000 d'un relèvement des taux de 0,75 point sur le livret A ait permis de freiner le mouvement de décollecte, ce résultat traduit l'impact de la baisse du taux de rémunération servi aux déposants (- 0,75 points) intervenue au mois d'août 1999. Le taux de commissionnement des Livrets A et B est fixé à 1,5 % pour la période 1998-2001.

Les produits (produit net bancaire) liés à l'épargne, hors livrets A et B, progressent de 21 %, du fait des bonnes performances réalisées notamment sur l'épargne logement, l'assurance-vie, le LEP 11( * ) , le Livret Jeune et les OPCVM :

- l'encours du LEP atteint près de 10 milliards d'euros, en progression de 6,8 % ;

- l'encours sur les Livrets Jeunes atteint 0,9 milliard d'euros, soit une progression de 1,7 % ;

- malgré les fluctuations boursières, le placement des OPCVM et FCP (fonds communs de placement) a dépassé 18 milliards d'euros d'encours, soit une progression de 11 % par rapport à 1999. La collecte nette progresse de 52 %.

Au total, la collecte nette globale (épargne + dépôts à vue) a progressé en 2000 de 13,5 %.

Par ailleurs, en matière de réalisation de crédits immobiliers avec épargne préalable (les seuls qu'elle puisse offrir), La Poste a progressé de près de 18 %, avec 3,7 milliards d'euros de crédits nouveaux.

En conclusion, ce développement commercial soutenu, conduit dans la perspective d'une réorientation des produits d'épargne liquide vers les produits d'épargne stable (50 % des encours gérés), a permis à La Poste de se positionner sur des marchés où elle était peu présente (OPCVM, crédits) et de consolider la structure de ses autres encours.

Au total, les parts de marchés de La Poste sur ces différents segments sont détaillés dans le tableau ci-dessous :

PARTS DE MARCHÉS * DE LA POSTE

En pourcentage

1996

1997

1998

1999

2000

Dépôts à vue

11,1

10,5

10,2

9,7

9,4

Livret A

35,5

35,4

35,3

35,7

36,3

Autres livrets

9,5

9,9

10,4

10,9

11,2

Epargne Logement

8,2

8,8

9,5

10,2

10,8

OPCVM

5,1

4,3

3,7

3,6

3,6

Assurance vie

7,2

7,5

7,7

7,8

7,7

*Les séries ont été revue revues et actualisées en fonction de diverses corrections apportées par la Banque de France.

Source : La Poste

c) Un rôle social réaffirmé

Mais au-delà de ce panorama chiffré, votre commission souligne une réalité récemment confirmée par une étude du Conseil national du crédit et du titre : le rôle social des services financiers de La Poste. Cette étude dont les résultats ont été publiés au mois de septembre, indique que 98 % des 5,5 millions de personnes ne disposant que des minima sociaux pour vivre ont un compte bancaire ou postal. Ces personnes représentent un peu moins de 10 % de la population française. La quasi-totalité des personnes interrogées aurait accès au service bancaire de base (compte, carte de retrait, relevé d'identité bancaire, paiement à distance gratuits).

En outre, l'étude précise que 21 % des personnes interrogées qui ont un compte de dépôts l'ont ouvert à La Poste (contre seulement 4 % des Français en général), ce qui confirme le rôle social très important des services financiers de La Poste.

Au delà de ce rôle social, La Poste a vocation à être un des grands acteurs français des services financiers, avec une gamme de produits destinés à tous les publics.

2. Une gamme incomplète

L'article 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications prévoyait que La Poste avait notamment pour objet d'offrir « tous produits d'assurance ».

Le contrat d'objectifs et de progrès portant contrat de plan entre l'Etat et La Poste pour la période 1998/2001 prévoyait la diversification des services financiers de La Poste dans l'assurance des personnes , mais pas dans l'assurance-dommages.

Pour ce faire, La Poste a organisé un réseau de filiales : alors que la filiale SOPASSURE était créée avec les Caisses d'épargne pour mettre en oeuvre leur participation dans la CNP, que SOGEPOSTE était mise sur pied avec la Caisse des dépôts pour la gestion des activités OPCVM de La Poste, ASSURPOSTE, filiale de La Poste et de la CNP, créée en 1998 pour porter la gamme des produits de prévoyance de La Poste, démarrait en 2000 ses activités. Avec Assurposte, La Poste a pour objectif de mettre à la disposition du réseau des produits simples et grand public. Ainsi, « Complétys Santé » répond à un vrai besoin et élargit le champ de l'assurance-santé : 50 % des clients n'avaient pas de couverture complémentaire santé avant d'y souscrire. Sa commercialisation est en cours de généralisation. De nouveaux produits de prévoyance ont été lancés en 2000, permettant d'assurer la protection de la famille contre les conséquences financières d'un décès accidentel (Prémunys Accident) ou la prise en charge du financement des obsèques (Résolys Obsèques).

La Poste entend poursuivre, avec Assurposte, le développement de son offre dans ce domaine.

Comme elle a déjà eu l'occasion de l'affirmer, votre commission souhaite que le contrat de plan en cours de discussion soit l'occasion d'appliquer la loi de 1990 en matière de services financiers. Outre la question de l'assurance-dommages, beaucoup considèrent que la question de l'offre, par La Poste, de crédits à la consommation et immobiliers, sans épargne préalable, doit être posée, pour compléter la gramme des services financiers postaux.

3. Quelle place pour La Poste dans « l'Alliance » Caisse des dépôts-Ecureuil ?

En juin dernier, les dirigeants de l'établissement public Caisse des dépôts et consignations (CDC) et du groupe mutualiste des Caisses d'Epargne ont annoncé la création de « l'Alliance » , société commune devant aboutir à la constitution, avant la fin de l'année 2001, du 3 ème établissement bancaire français , juste devant la Société générale mais loin derrière le Crédit Agricole et BNP Paribas. Le nouvel ensemble compte 48.000 personnes, représente 16,6 milliards d'euros de fonds propres pour un produit net bancaire agrégé de 10 milliards d'euros. Cette opération a été présentée, à juste titre, par le ministre de l'économie comme un « projet majeur » puisqu'il crée une banque globale présente dans tous les métiers et proposant une offre complète à tous les types de clientèle.

Compte-tenu notamment des participations respectives de ces établissements dans la CNP, la question de l'intégration de La Poste au nouvel ensemble est, de fait, posée.

Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a affirmé que cette restructuration en cours du pôle financier public et semi-public avait « vocation à se poursuivre ». Les liens qui unissent La Poste à la Caisse des dépôts et aux Caisses d'Epargne, rappelés ci-dessus, sont nombreux. Le rapprochement entre la Caisse des Dépôts et les Caisses d'Epargne n'est donc pas, en théorie, pour le Gouvernement, exclusif de partenariats futurs avec La Poste.

Toutefois, force est de constater que, malgré ces propos rassurants, et en l'absence d'une réflexion portant, notamment, sur le statut des services financiers, La Poste est aujourd'hui exclue de ce rapprochement. Faute d'un partenariat industriel solide pour la production de ses services financiers, ces derniers risquent -on peut en tous cas le craindre- d'être durablement fragilisés par cet isolement.

C. UN RÉSULTAT FINANCIER DÉGRADÉ

1. Un effondrement de la rentabilité en 2000

La rentabilité de La Poste, déjà inférieure à celle de ses concurrents, s'est fortement dégradée en 2000, comme le montre le tableau suivant :

CHIFFRE D'AFFAIRES ET RÉSULTAT DE LA POSTE
(en millions de francs et d'euros)

 

1999

2000

 

Francs

(Euros)

Francs

(Euros)

Résultat d'exploitation

3 931

 

2 778

 

Résultat financier

(897)

 

(639)

 

Résultat courant

3 034

 

2 139

 

Résultat net avant impôt

1 980

 

1 052

 

Résultat net après impôt

1 269

283

781

139

Si le chiffre d'affaires courrier a progressé, entre 1999 et 2000, de 1,4 %, le chiffre d'affaires colis progressant de 15,9 % et le produit net bancaire s'accroissant de 8 %, le résultat d'exploitation du groupe ne s'élève quant à lui plus qu'à 420 millions d'euros en 2000 (soit une diminution de 29 % par rapport à 1999). Cette forte détérioration est essentiellement liée au coût du passage aux 35 heures et à la tension observée sur les prix dans des secteurs essentiels à l'activité de la poste (transports notamment), qui ont très fortement pesé sur les charges de consommations intermédiaires.

Le résultat financier est de -141 millions d'euros en 2000, soit une amélioration de 30 millions d'euros par rapport à 1999 (+17,7 %), qui résulte de la hausse des produits d'intérêts liés aux comptes à terme ainsi que de la réduction de l'encours et du coût de la dette obligataire. Par ailleurs, le résultat financier de la maison mère s'est également amélioré de 39 millions d'euros.

La quote-part de résultat des sociétés mises en équivalence passe de 87 millions d'euros en 1999 à 94 millions d'euros, et correspond principalement à la quote-part de résultat de la Caisse Nationale de Prévoyance. Le résultat courant avant impôt du groupe La Poste diminue de 148 millions d'euros et s'élève à 338 millions d'euros.

Le résultat exceptionnel, négatif de 206 millions d'euros, est constitué principalement des charges relatives à la mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail , ainsi que des dotations aux provisions dans le cadre du passage à l'euro.

Avant impôt sur les sociétés, le résultat est de 132 millions d'euros. Après déduction de l'impôt sur les sociétés, le résultat net consolidé est de 144 millions d'euros. Le résultat net part du groupe est ramené à 139 millions d'euros , contre 283 millions d'euros en 1999, soit une diminution de 38,5 %.

Le tableau ci-dessous résume les chiffres les plus significatifs :

EVOLUTION DES PRINCIPAUX SOLDES INTERMÉDIAIRES
DE GESTION DU GROUPE
(en millions de francs)

 

1999

2000

Evolution

Excédent bout d'exploitation (EBE) (1)

8 056

5 861

-27 %

Chiffre d'affaires (2)

93 054
(15 315 millions d'euros)

95 485
(16 020 millions d'euros)

+2,6 %

(1)/(2) EBE en % du chiffre d'affaires

8,7 %

6,1 %

-2,6 points

Résultat net (3)

1 269
(283 millions d'euros)

781
(139 millions d'euros)

-38,5 %

(3)/(2) Résultat en % du chiffre d'affaires

1,3 %

1,2 %

-0,1 point

Source : La Poste

Ces chiffres montrent, s'il en était besoin, le poids très lourd pour La Poste du passage aux 35 heures sans aide de l'Etat.

2. Une année 2001 probablement difficile

Il est vraisemblable que l'année 2001 poursuive et amplifie les tendances observées en 2000, tassement de la croissance et dérapage des charges risquant de dégrader encore la rentabilité et les résultats postaux. Ainsi, les comptes semestriels font déjà apparaître un « retard » de 200 millions de francs sur le chiffre d'affaires courrier, avant même tout ralentissement lié aux suites des attentats.

II. DES INTERROGATIONS PERSISTANTES

Sans revenir trop longuement sur un sujet maintes fois exploré par votre commission, celui des charges d'intérêt général supportées, sans compensation intégrale, par La Poste, votre rapporteur estime toutefois utile, à la veille de la négociation du nouveau contrat de plan et de l'ouverture à la concurrence, de rappeler brièvement les masses financières en jeu.

A. LA « BOMBE À RETARDEMENT » DES CHARGES DE RETRAITES

1. Une évolution temporairement neutralisée

En vertu de la loi précitée de 1990, La Poste assure la prise en charge intégrale des dépenses de pensions de ses agents.

Compte tenu de la démographie de ses effectifs et du nombre de pensionnés, les prévisions réalisées dans le cadre des travaux préparatoires au contrat de plan pour la période 1998/2001 ont mis en évidence une tendance à un accroissement important des charges de retraite supportées par La Poste pour ses fonctionnaires (contribution complémentaire employeur au titre des pensions et charges de compensation). Le montant prévisionnel de l'accroissement annuel des charges que La Poste aurait eu à supporter sur la période a ainsi été estimé entre 53,3 et 76,2 millions d'euros par an.

Aussi, le contrat d'objectif et de progrès portant contrat de plan entre l'Etat et La Poste pour la période 1998/2001 a prévu de neutraliser cette dérive du coût des pensions et de stabiliser leur montant en francs constants au niveau de 1997.

Conformément à cette disposition, le montant des charges définitives de retraite supportées par La Poste au titre de 1997 a fait l'objet chaque année d'une actualisation prenant en compte l'évolution constatée des prix à la consommation hors tabac en moyenne annuelle, soit :

- +0,6 % en 1998 (chiffre INSEE définitif) ;

- +0,5 % en 1999 (chiffre INSEE définitif) ;

- +1,6 % en 2000 (chiffre INSEE définitif) ;

- +1,2 % en 2001 (hypothèse d'inflation retenue par le projet de loi de finances pour 2001).

Le tableau ci-dessous détaille les flux financiers en résultant.

EVOLUTION DE LA PRISE EN CHARGE DES PENSIONS DES POSTIERS

 

1997

1998

1999

2000

Prévision pour 2001

(M€)

(M€)

(M€)

(M€)

(M€)

(1) Dépense prévisionnelle de pensions notifiée par le Ministère Economie, Finances, Industrie

2 064

2 163

2 236

2 334

2 394

(2) Solde de régularisation de l'exercice notifié par le Ministère Economie, Finances, Industrie

12,88

- 1,07

19,06

2,13

 

(3) Cotisations salariales pensions civiles

364

362

363

363

364

(4) Contribution complémentaire à la charge de

La Poste au titre des pensions= (1)+(2)-(3)

1 713

1 800

1 893

1 973

2 031

(5) Dépense prévisionnelle de compensation démographique vieillesse et de compensation spécifique vieillesse notifiée par le Ministère Economie, Finances, Industrie

247

165

112

13

- 9

(6) Solde de régularisation de l'exercice notifié par le Ministère Economie, Finances, Industrie

-15

-8

-39

-

-

(7) Solde de régularisation estimé par La Poste

-

-

-

12

-

(8) Charge de retraite employeur

= (4)+(5)+(6)+(7)

1 945

1 957

1 966

1 998

2 022

Evolution annuelle en %

-

0,60%

0,50%

1,60%

1,20%

Source : Secrétariat d'Etat à l'industrie

2. Une menace persistante pour le moyen terme

Mais les prévisions d'évolution des dépenses de pensions à horizon 2015 demeurent particulièrement préoccupantes :

CHARGES DE RETRAITES DE LA POSTE À L'HORIZON 2015

 

2000

2005

2010

2015

Nombre de retraités

164 381

189 516

220 597

244 998

Nombre de cotisants

242 763

232 763

222 763

212 763

Montant des prestations versées aux retraités (en millions d'euros constants).

2 248

2 577

3 020

3 392

Source : La Poste

A compter de 2010, le régime des retraites postal comptera plus de retraités que de cotisants . Soulignons que les engagements de retraite relatifs aux droits acquis par les agents fonctionnaires actifs et retraités ne font pas l'objet d'une comptabilisation au bilan de La Poste sous forme de provisions.

Pour ce qui est des perspectives jusqu'en 2005, même à ce terme rapproché, les ratios semblent peu soutenables pour les comptes postaux :

LA DÉFORMATION OU RATIO TRAITEMENTS/PENSIONS D'ICI À 2005

 

2000

2005

Nombre de retraités

164 381

189 516

Nombre de cotisants

242 763

232 763

Total des prestations versées

2 248 M€

2 577 M€

Masse des traitements

4 663 M€

4 509 M€

Ratio prestations/traitements

48,20%

57,10%

Source : La Poste

En 2000, La Poste a supporté au titre des charges de retraite un taux de contribution implicite employeur équivalent à 42,8 % de la masse des traitements versés à ses agents fonctionnaires: 1.998 millions d'euros, rapportés aux 4.598 millions d'euros de traitements versés aux agents fonctionnaires.

Pour la même année, les charges obligatoires supportées par les entreprises du secteur privé au titre des retraites se situent autour de 14,3 % de la totalité des salaires versés . Compte tenu des différences existant notamment en matière d'assiettes de cotisation et de modalités de répartition des charges entre employeurs et salariés dans le régime des pensions civiles et militaires dont relèvent les agents fonctionnaires de La Poste et dans les régimes obligatoires de retraite (régime général d'assurance vieillesse+régimes de retraite complémentaire) dont relèvent les salariés des autres entreprises du secteur postal, ces taux respectifs de contribution retraite ne peuvent pas toutefois faire l'objet d'une comparaison directe.

En revanche, le taux de contribution implicite employeur de 42,8% supporté en 1999 par La Poste au titre des retraites peut être utilement rapproché du taux de la contribution employeur retraite à caractère libératoire mis à la charge de France Télécom en vertu de la loi portant création de l'entreprise nationale France Télécom de juillet 1996, et qui est précisément calculé de manière à égaliser les niveaux de charges sociales et fiscales obligatoires assises sur les salaires entre France Télécom et les autres entreprises relevant du droit commun des prestations sociales pour les risques qui sont communs aux salariés de droit commun et aux fonctionnaires de l'Etat.

Pour 1999, ce taux a été fixé à 36,7 %. La contribution exigée de La Poste au titre des retraites se situe donc 6 points au-dessus de la cotisation libératoire appliquée à France Télécom .

B. LE TRANSPORT POSTAL DE LA PRESSE : DES ACCORDS À RENÉGOCIER

Le transport et la distribution de la presse constituent en application de l'article 2 de la loi précitée du 2 juillet 1990 un service obligatoire, que La Poste exerce dans le respect des dispositions des articles 2, 3 et 6 de son cahier des charges.

Depuis 1991 et conformément à l'article 38 du cahier des charges de la Poste, l'Etat participe à la prise en charge du coût du service obligatoire du transport et de l'acheminement de la presse. Le cahier des charges précise notamment que « les sujétions particulières, supportées par La Poste à raison du régime d'acheminement et de distribution de la presse mentionné à l'article 6 du présent cahier des charges font l'objet d'une juste compensation financière ».

Malgré cette disposition, une contribution importante reste, in fine, à la charge de La Poste. Aussi, le contrat d'objectif et de progrès valable de 1991 à 2001 a précisé que l'Etat améliorait sa participation à la couverture du coût de cette activité pour La Poste. La contribution annuelle de l'Etat au titre de l'aide au transport postal de presse, qui avait été réduite à 1.850 millions de francs (282,03 millions d'euros) pour 1998 et 1999 (contre 1.900 millions de francs en 1997) a été rétablie à 1.900 millions de francs (289,65 millions d'euros) en 2000, 2001 et 2002.

Les accords dit « Galmot » conclus le 4 juillet 1996 ont permis de fixer un nouveau cadre relationnel entre l'Etat, La Poste et la presse jusqu'à la fin 2001. Ces accords « donnant-donnant » avaient notamment pour objectif d'assurer un financement plus équilibré du transport postal de presse, alors qu'une mission des inspections générales avait évalué à 28% le taux de couverture par La Poste de ses coûts en 1993, et d'offrir à la presse un cadre favorable à son développement, grâce à une souplesse accrue du cadre réglementaire fixé pour l'accès aux tarifs du transport postal de presse et à un meilleur contrôle de la qualité de ce transport.

Le tableau ci-après donne l'évaluation du partage du coût du transport postal de la presse entre l'Etat, la Poste et la presse depuis 1998 :

PARTAGE DU COÛT DU SERVICE OBLIGATOIRE
DU TRANSPORT POSTAL DE PRESSE
(ÉVALUATIONS PROVISOIRES) :

(millions d'euros)

1998

1999

2000

Coût global

1 132

1 137

1 143

Recettes (presse)

372

396

419

Contribution de l'Etat

282

282

290

Contribution de La Poste
(en % du total)

478
(42 %)

459
(40 %)

434
(38 %)

Source : La Poste. Chiffres excluant la presse administrative et internationale.

Votre commission déplore que la lenteur de mise en oeuvre de la comptabilité analytique de La Poste ne permette pas de disposer de chiffres incontestables pour le bilan de la mise en oeuvre des accords Galmot et leur renégociation.

En effet, 2001 étant la dernière année d'application du contrat de plan ainsi que des accords « Galmot », leur renégociation doit s'ouvrir. Il s'agit d'un autre chantier important pour La Poste.

C. L'INSUFFISANTE COMPENSATION DU COÛT DE L'AMÉNAGEMENT POSTAL DU TERRITOIRE

Faute d'une compensation suffisante, par l'Etat, des missions d'aménagement postal du territoire, les transferts de charge vers les collectivités locales du coût du maintien de la présence postale sont de plus en plus fréquents.

Votre rapporteur ne s'étendra pas sur ce sujet central, souvent approfondi par notre Commission des Affaires économiques, pour lequel il renvoie aux constats et propositions des rapports de votre commission ces quatre dernières années sur les sujets postaux 12( * ) .

Le chiffre de 3,5 milliards de francs (534 millions d'euros) de « non optimisation économique » du réseau postal pour des motifs d'animation territoriale n'est plus guère contesté.

En face, l'abattement de 85 % consenti, en contrepartie, à La Poste sur la taxe professionnelle ne représente plus guère que 271 millions d'euros en 2001 , contre 281 millions en 1999, compte tenu de la réforme de la taxe professionnelle.

Rappelons en la matière que la taxe professionnelle de La Poste, dans une moindre mesure, et, surtout, de France Télécom, demeure affectée à l'Etat, et non aux collectivités locales. S'agissant d'un impôt local, votre commission s'est déjà maintes fois insurgée contre cet état de fait, que le Gouvernement s'est engagé, année après année, pour France Télécom à modifier, sans que des mesures concrètes ne viennent appliquer cette « bonne volonté » maintes fois affichée.

III. UN HORIZON : LA CONCURRENCE

A. UN PROCESSUS ENTAMÉ EN 1989

1. Un processus continu depuis 15 ans

Le secteur postal n'est que tardivement entré dans le champ des préoccupations des instances communautaires : la poste n'est en effet pas mentionnée dans le traité de Rome. Le développement et la transformation de ce secteur et l'apparition de nouveaux segments de marché, concurrentiels et à plus forte valeur ajoutée, ont progressivement appelé une intervention au niveau européen.

Cette intervention a d'abord été contentieuse 13( * ) : elle a, dans un premier temps, concerné le respect, dans le secteur postal, des règles de concurrence posées par le Traité instituant la communauté européenne.

Après toute une série de décisions dans les années 1980 et 1990, un célèbre arrêt de la Cour de Justice sur l'étendue du monopole postal en Belgique 14( * ) considérait d'ailleurs, en 1993, que les dispositions du Traité en matière de concurrence « permet[tent] aux Etats membres de conférer à des entreprises qu'ils chargent de la gestion de services d'intérêt économique général, des droits exclusifs qui peuvent faire obstacle à l'application des règles du traité sur la concurrence, dans la mesure où des restrictions à la concurrence, voire une exclusion de toute concurrence, de la part d'autres opérateurs économiques, sont nécessaires pour assurer l'accomplissement de la mission particulière qui a été impartie aux entreprises chargées des droits exclusifs ».

Cette décision, importante, a ainsi posé, en droit communautaire, les fondements de la reconnaissance du service public (notamment postal) et de la nécessité d'assurer son financement par un monopole sur certaines activités.

2. Deux étapes décisives : le Conseil informel d'Antibes en 1989 et le « Livre vert postal » en 1992

C'est en 1989, sous présidence française de la Communauté, au Conseil informel d'Antibes, qu'est lancé le débat européen sur le secteur postal . M. Paul Quilès, alors ministre français en charge du secteur postal, préparait à cette époque la réforme de l'administration des P et T, qui allait conduire, avec l'adoption de la loi précitée du 2 juillet 1990 sur l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, à la séparation de La Poste et de France Télécom, qui, d'administration de l'Etat, sont devenus deux établissements publics.

L'objectif fixé en 1989 était la définition d'un cadre réglementaire européen en matière postale .

La Commission européenne a publié, en juin 1992, une communication 15( * ) intitulée : « Livre vert sur le développement du marché unique des services postaux », document d'orientation destiné à organiser le débat sur les propositions législatives communautaires.

Ce document, qui donnait l'analyse de la Commission sur l'état du secteur postal européen, proposait également une politique que cette dernière considérait comme opportun de mener. Partant du constat que « le principe politique le plus fondamental est le besoin d'assurer la poursuite du service universel et donc de garantir que la mission de service public qui incombe aux administrations postales s'exerce dans de bonnes conditions économiques et financières », le Livre vert :

- excluait la libéralisation complète comme le maintien du statu quo (synonyme, aux yeux de la Commission, d'une absence d'harmonisation européenne et donc de marché unique postal) ;

- proposait une solution « d'équilibre », combinant ouverture accrue du marché et renforcement du service universel, via le maintien sous monopole d'un portefeuille de services (les services « réservés ») destinés à en assurer le financement . La Commission indiquait ainsi que « cette option part du principe qu'en vue d'assurer le service universel, il est nécessaire d'apporter certaines restrictions au marché libre. (...) L'objectif d'un service universel peut justifier l'établissement d'un ensemble de services réservés, lesquels aideraient à garantir la viabilité financière du réseau du service universel »

Notons-le au passage : c'est dans le secteur postal qu'est, pour la première fois, apparue en droit communautaire la notion de « service universel », déclinaison européenne de la notion française de service public.

3. Le sommet de Dublin de 1996 et une directive du 15 décembre 1997 qui laissait le temps de l'adaptation

Après la publication de « lignes directrices pour le développement des services postaux communautaires » en 1993, le Conseil, par une résolution du 7 février 1994, a fixé les objectifs de la future réglementation postale : garantir la fourniture, à l'échelon communautaire, d'un service universel de qualité accessible à tous ; assurer sa viabilité économique en définissant un secteur réservé à son prestataire qui soit suffisamment large ; concilier libéralisation graduelle et garantie du service universel.

La Commission a, dans cette perspective, publié en 1995 une proposition de directive dont l'adoption relevait de la procédure de la codécision, et un projet de communication sur l'application des règles de concurrence au secteur postal. Ces propositions allaient au delà de ce que le Sénat considérait comme souhaitable pour le marché postal communautaire.

Aussi votre commission s'était-elle saisie de ce projet de directive, et avait-elle adopté une résolution 16( * ) , devenue résolution du Sénat à l'issue de sa discussion en séance publique le 21 mai 1996. Dans cette résolution, le Sénat soutenait la définition proposée pour le service universel postal, demandait une modération de l'ouverture à la concurrence proposée par la Commission, souhaitait que la date de révision de cette directive soit repoussée et que cette révision s'effectue dans le cadre de le procédure de la codécision.

Le Gouvernement de l'époque avait d'ailleurs obtenu de nos partenaires européens une ouverture suffisamment mesurée pour laisser à notre opérateur postal le temps de l'adaptation.

C'est, d'abord, lors de Conseils des ministres tenus en juin 1995, sous présidence française, et mars 1996, que des avancées significatives avaient été obtenues de nos partenaires, puis, grâce à l'intervention décisive des Chefs d'Etat français et allemand, au sommet de Dublin, en décembre 1996, qu'un compromis politique fut élaboré, permettant d'aboutir à une position commune préfigurant la directive du 15 décembre 1 997.

Au total, ce texte consacre un large périmètre de services réservés et n'ouvre donc que faiblement le marché postal européen à la concurrence, sans toutefois porter préjudice au droit des Etats membres à accélérer, s'ils le souhaitent, la libéralisation -ce que sept d'entre eux ont, à des degrés divers, déjà fait-.

PRINCIPALES DISPOSITIONS DE LA DIRECTIVE 97/67

La directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service17( * ) (dénommée « directive postale ») a défini les caractéristiques du service postal universel que doivent garantir tous les Etats membres, établi des normes de qualité pour les services transfrontaliers, ainsi que des principes tarifaires et de transparence des comptes.

Les limites maximales communes des services que les Etats membres peuvent réserver au(x) prestataire(s) du service universel dans la mesure où le maintien du service universel l'exige sont fixées à 350 grammes et cinq fois le tarif normal pour un envoi du premier échelon de poids.

La directive fixe également des principes devant régir les procédures d'autorisation de la prestation de services postaux non réservés, de même que la séparation des compétences réglementaires et des fonctions opérationnelles dans le secteur postal.

La directive postale fixe ensuite un calendrier pour la poursuite du processus d'ouverture des marchés postaux à la concurrence :

- la Commission devait présenter, pour le 31 décembre 1998, une proposition concernant la poursuite progressive et contrôlée de l'ouverture du marché postal, en vue notamment de libéraliser le courrier transfrontière et le publipostage et de revoir à nouveau les limites de prix et de poids ;

- le Conseil et le Parlement devaient se prononcer sur cette proposition avant le 1er janvier 2000 ;

- les mesures décidées devaient entrer en vigueur le 1er janvier 2003.

L'ouverture à la concurrence requise par la directive 97/67 est faible : la Commission européenne a chiffré à 3 % la part du courrier soumise à la concurrence du fait de la directive.

Il faut, en outre, garder à l'esprit que La Poste exerce déjà une part importante de son activité dans le secteur concurrentiel , qu'il s'agisse des services financiers ou de l'activité « colis ».

Dans le cadre de la directive actuellement en vigueur, les services « réservés » (exerçables sous monopole) représenteraient, d'après la Commission, 70 % du chiffre d'affaire postal . Appliqué au chiffre d'affaire postal du groupe La Poste, ce ratio amène à considérer que 47 milliards de francs de chiffre d'affaires sont aujourd'hui sous monopole, soit environ la moitié du chiffre d'affaires total du groupe.

La directive de 1997 offrait une occasion idéale de préparer l'opérateur à la concurrence, avec une ouverture encore modérée à la concurrence, mais une perspective de libéralisation accrue incitant à l'adaptation. La plupart de nos voisins européens l'ont compris. En France, votre commission réclame depuis 1997 des réformes dont aucune n'a été, à ce jour, amorcée.

4. La deuxième directive postale : vers une libéralisation totale ?

a) La proposition initiale de la Commission du 20 mai 2000

Conformément au processus prévu par la directive postale de 1997, mais avec quelques mois de retard, la Commission européenne a établi le 20 mai 2000 une proposition de directive, modifiant 6 articles de la directive 97/67/CE du 15 décembre 1997 :

- l'article 2 sur les définitions terminologiques,

- l'article 7 sur les services réservés,

- l'article 9 sur les conditions d'accès au marché non réservé,

- l'article 12 sur les principes de tarification du service universel,

- l'article 19 sur le règlement des litiges,

- l'article 27 sur la durée d'application de la directive.

Sans préjudice de la liberté des Etats-membres à libéraliser plus rapidement leur marché, le dispositif proposé consistait en une poursuite de l'ouverture à la concurrence, en deux étapes.

La première, qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2003, consistait en un abaissement général des limites de poids et de prix actuelles pour les services qui peuvent continuer à être réservés (c'est-à-dire exercés sous monopole). Parallèlement, toutes les limites de poids et de prix auraient été supprimées en ce qui concernait le courrier transfrontalier sortant et le courrier express. En outre, des « services spéciaux » auraient été définis, qui ne pouvaient entrer dans le périmètre des services réservés .

L'étape ultérieure, pour laquelle la décision aurait du intervenir au 31 décembre 2005 au plus tard, aurait pris effet au 1er janvier 2007 ; il s'agissait d'une nouvelle restriction des droits exclusifs encore accordés aux prestataires du service universel, conservés dans la seule mesure où cela est strictement nécessaire au maintien du service universel. L'ampleur de cette nouvelle avancée aurait du être déterminée par le Parlement européen et le Conseil le 31 décembre 2005 au plus tard, sur proposition de la Commission, présentée avant le 31 décembre 2004 .

b) La position du Parlement européen le 11 décembre 2000

Le Parlement européen s'est prononcé en séance plénière le 11 décembre 2000 sur la proposition de directive, adoptée dans le cadre de la procédure de codécision . De façon assez inattendue pour le Commissaire européen concerné, et à l'initiative du député anglais Brian Simpson (PSE), alors que les propositions du rapporteur de la commission saisie au fond, le député Markus Ferber (PPE, Allemagne), soutenaient globalement celles de la Commission européenne, le Parlement européen a adopté une série d'amendements demandant notamment :

- la suppression de la notion de services spéciaux ;

- la fixation de nouvelles limites, plus larges, de poids et de prix des services réservés à 150 grammes et quatre fois le tarif de base ;

- la suppression de l'étape de libéralisation de 2007 tout en demandant à la Commission européenne de présenter une évaluation de l'état du secteur postal avant le 31 décembre 2003 ;

- le report au 31 décembre 2004 de la date limite de transposition de la nouvelle directive ;

- la prise en compte des différences géographiques et du coût, variable, du service universel selon les configurations géographiques de chaque Etat membre ;

- la mise en valeur du principe d'adaptation du service universel aux évolutions technologiques.

c) La résolution du Sénat votée le 14 décembre 2000

A l'issue d'un débat de qualité, en commission comme en séance publique, le Sénat a, quant à lui, adopté, le 14 décembre dernier, une résolution sur la proposition de directive de le Commission, qui partait du constat suivant :

- la poursuite de la construction d'un marché communautaire unifié des services postaux a été approuvée par la France, en mars 2000, au Conseil européen qui a réuni les chefs d'Etat et de gouvernement à Lisbonne ;

- l'Union européenne reconnaît désormais la place des services d'intérêt général et leur rôle dans la promotion de la cohésion sociale et territoriale ;

- un marché postal unifié est de nature à favoriser la modernisation de l'économie française et à offrir de nouvelles opportunités à La Poste ;

- mais le processus ainsi engagé doit, au travers du service universel postal institué par l'Union européenne, garantir la pérennité des principes du service public postal, notamment la péréquation tarifaire et l'adaptabilité des missions ;

- or, cette pérennité ne saurait être garantie si la viabilité économique de La Poste, opérateur public du service public, n'est pas assurée . Le Gouvernement français n'a, pourtant, depuis 1997, engagé à La Poste aucune des réformes de structure nécessitées par la libéralisation programmée au niveau européen .

C'est pour l'ensemble de ces raisons que votre commission considérait que, si elle était retenue en l'état, la proposition de directive de la Commission pourrait menacer l'équilibre financier de La Poste, car celle-ci supporte encore, en propre, le coût de missions d'intérêt général ne pouvant plus être financées par les seuls revenus de ses activités . C'est dans ce contexte, et non par refus idéologique de la concurrence, à son sens pleinement compatible avec un service public de qualité, que la résolution du Sénat demandait au Conseil, que :

- les services réservés aux prestataires de service universel englobent les envois de correspondance intérieure et les envois de correspondance transfrontière sortante qui sont soit d'un poids inférieur à 150 grammes, soit d'un prix inférieur à trois fois le tarif public applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie la plus rapide ;

- les services spéciaux soient clairement définis comme des services à haute valeur ajoutée n'interdisant d'aucune façon l'adaptabilité du service universel et son possible élargissement à des prestations tendant à se banaliser au fur et à mesure de l'évolution du secteur postal.

d) La position commune du Conseil du 15 octobre 2001

Contrairement aux propos optimistes de M. Christian Pierret devant votre commission quelques jours auparavant, le Conseil des ministres n'est pas parvenu à l'accord que souhaitait la présidence française le 22 décembre 2000, qui aurait été proche du vote du Parlement européen.

Les négociations se sont donc poursuivies sous présidence suédoise et ont abouti sous présidence belge du Conseil, nettement plus favorable à la libéralisation que la présidence française.

Une nouvelle proposition a été présentée par la Commission le 21 mars 2001, ne retenant qu'une partie (11 sur 47) des amendements votés par les députés européens, la Commission rejetant les amendements les plus importants (portant sur les services spéciaux, le périmètre du domaine réservé et le calendrier de révision de la directive).

Le Conseil européen de Stockholm du 23 et 24 mars 2001 a demandé au Conseil et au Parlement européen d'adopter la directive sur les services postaux avant la fin 2001, ce à quoi la présidence belge a oeuvré.

C'est ainsi que le Conseil « Télécom » du 15 octobre dernier a abouti à un accord politique , à la majorité qualifiée, avec le vote contraire de la délégation néerlandaise et l'abstention de la délégation finlandaise, sur une position commune sur la proposition modifiée de directive modifiant la directive 97/67/CE.

L'accord porte sur une libéralisation en trois étapes : 2003, 2006 et l'« étape décisive » en 2009. Pour ce qui est de l' « étape décisive » , la Commission procèdera à une étude prospective destinée à évaluer, pour chaque Etat membre, les incidences de l'achèvement du marché intérieur des services postaux sur le service universel. Sur la base des conclusions de cette étude, la Commission présentera, avant le 31 décembre 2006, un rapport au Parlement européen et au Conseil assorti d'une proposition confirmant, le cas échéant, la date de 2009 pour « l'achèvement » (selon les termes du relevé de conclusions du Conseil) du marché intérieur des services postaux, ou « définissant une autre étape » à la lumière des conclusions de l'étude .

L'échéancier de libéralisation -repris ci-après- prévoit une décision du Parlement européen et du Conseil, conformément à la procédure de codécision, avant la fin de 2007 pour confirmer « l'étape décisive » de libéralisation.

CALENDRIER DE LA LIBÉRALISATION POSTALE

 

Courrier ordinaire

Publipostage

Courrier transfrontalière sortant

01/01/2003

Services réservés :

100 g/3 x tarif de base

Services réservés :

100 g/3 x tarif de base

Services réservés :

0 g excepté dans les cas visés ci-dessous (*) (max.100 g)

01/01/2006

Services réservés :

50 g/2,5 x tarif de base

Services réservés :

50 g/2,5 x tarif de base

Services réservés :

0 g excepté dans les cas visés ci-dessous (*) (max.50 g)

30/06/2006

Etude prospective de la Commission (évaluation des incidences que l'achèvement du marché intérieur des services postaux pourrait avoir sur le service universel dans chaque Etat membre)

31/12/2007

Décision du Parlement européen et du Conseil confirmant l'étape décisive

01/01/2009

Etape décisive

(*) Dans les cas où cela est nécessaire pour assurer la prestation du service universel, par exemple, quand certaines activités postales ont déjà été libéralisées ou à cause des caractéristiques spécifiques propres aux services postaux dans un Etat membre.

Cette position commune appelle deux commentaires :

Dans le court terme, une large enveloppe de services réservés est préservée, comme le demandait la délégation française. Toutefois, ce « répit » dans le rythme de la libéralisation ne vaut que s'il est utilisé pour engager une modernisation du cadre d'activité postal.

Dans le moyen terme, et c'est une différence de taille par rapport à la proposition initiale de la Commission, l'horizon de la libéralisation totale est désormais implicitement affiché , même si les négociations ont finalement permis d'exclure toute automaticité de l'« étape décisive », dont le contenu exact n'est pas défini. N'oublions pas qu'un groupe de délégations était favorable au fait de fixer une date automatique de libéralisation totale (de préférence 2009). Cette inscription de « l'étape décisive » dans le texte de la proposition de directive marque indiscutablement la progression de leur thèse au sein du Conseil.

La proposition de directive doit encore être soumise en deuxième lecture au Parlement européen.

B. QUELLE ADAPTATION A LA CONCURRENCE ?

1. Respecter enfin les engagements de 1997

Malgré l'opportunisme du Gouvernement en cette matière, profitant de multiples « véhicules législatifs 18( * ) » pour transposer -sans bruit- la directive postale de 1997, au moins deux points importants de cette directive n'ont toujours pas été transposés en droit français ou réellement mis en pratique.

a) Les modalités de la régulation postale

L'article 22 de la directive impose la désignation d'autorité(s) réglementaire(s) nationale(s) pour le secteur postal, « juridiquement distinctes et fonctionnellement indépendantes » des opérateurs postaux.

La Commission européenne a mis en demeure la France, par lettre du 3 août 2000, de se conformer aux obligations de la directive, considérant que, de par ses tâches, le Ministère de l'économie et des finances ne peut être considéré comme fonctionnellement indépendant de l'opérateur postal public La Poste. En effet, elle estime qu'un même ministre ne peut à la fois exercer la fonction d'autorité réglementaire nationale et la fonction de tutelle d'un opérateur postal.

Toutefois, la Commission souligne qu'elle n'impose pas de définition du statut d'une ou plusieurs autorités réglementaires nationales, qui peuvent être une autorité publique ou une entité indépendante désignée à cet effet, cette définition relevant de la compétence de l'Etat membre (considérant 39 de la directive postale). De même, il ne s'agit pas pour la Commission de contester le régime de la propriété d'un opérateur postal en France, notamment le cas où l'Etat est totalement ou partiellement propriétaire de l'opérateur postal chargé du service universel. Le droit européen est, en vertu du traité, neutre à cet égard.

Dans leur réponse, les autorités françaises estiment au contraire que la réglementation nationale assure une séparation des fonctions de réglementation et d'exploitation postale, en particulier depuis la mise en place d'un « médiateur du service universel postal ».

Votre Commission des Affaires économiques n'en est pas convaincue.

b) La clarification de la comptabilité du prestataire de service universel

Les obligations comptables fixées par l'article 14 de la directive sont essentielles : elles visent en effet à rendre transparents les coûts des différents services et à rendre vérifiable le fait que des subventions croisées du secteur réservé au secteur non réservé ne se produisent pas.

La transparence comptable, c'est la clé de la confiance de la Commission européenne et des concurrents dans le comportement du prestataire du service universel. C'est donc la condition de l'absence de remise en cause non seulement des services réservés, mais aussi de services concurrentiels vitaux à son activité, tels que les services financiers. C'est enfin, le meilleur moyen de déterminer le coût réel du service universel.

Or, La Poste ne respecte pas toujours ses obligations en la matière.


Depuis 1996, La Poste établit un compte analytique des branches du courrier et des services financiers : ce compte identifie également les charges du réseau postal et les charges de structure de La Poste, avant leur répartition sur les deux métiers. Pour établir cette comptabilité par métiers, La Poste a mis en place un dispositif de recueil des données comptables et des statistiques de production. Les charges de La Poste sont extraites de la comptabilité générale et classées par nature en une centaine de postes ; elles sont ensuite ventilées en 450.000 centres d'analyse correspondant, en général, à un secteur d'activité d'un établissement (ex : tri courrier en bureau de poste).

En 1998, cet outil a connu une amélioration méthodologique importante puisqu'il a distingué un troisième métier correspondant aux activités « colis » de La Poste.

En 1999, des affinements supplémentaires ont été mis en oeuvre, dans le sens d'une plus grande identification des charges imputables directement aux métiers, d'une amélioration des clés de ventilation et d'une meilleure répartition du résultat financier.

Toutefois, la Cour des Comptes, dans un rapport particulier relatif à la comptabilité analytique de La Poste, tout en soulignant que le système actuel de recueil des données, particulièrement détaillé, ne faisait pas l'objet de critiques fondamentales, a présenté les limites de la méthode employée par La Poste et indiqué les pistes à développer.

La Cour rappelle que la comptabilité analytique doit satisfaire à deux objectifs : répondre aux exigences réglementaires de transparence des coûts qui sont posées aux niveaux national et européen et procurer, à tous les échelons de l'entreprise, un instrument d'aide à la gestion et au pilotage. Tout en soulignant la potentialité des outils développés par La Poste, notamment en matière de calcul de coûts, la Cour a constaté que ce deuxième objectif n'était que partiellement atteint. En outre, le secteur postal étant caractérisé par l'importance des coûts mutualisés entre produits, la Cour souligne l'incertitude liée à l'imputation des charges indirectes .

La Poste a, depuis, fait le choix de développer, depuis plusieurs mois, une méthode alternative à celle des coûts complets, reposant sur le principe d'une comptabilité par activités (tri, distribution, guichet, ...) dont les coûts sont ensuite répartis sur les produits, selon un principe dit de « coûts incrémentaux ».

Un groupe de travail, rassemblant des représentants de différents services du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et La Poste a été constitué sur ce sujet. Son programme de travail comporte l'examen successif des différents points de méthode (objectifs du système comptable, comparaison internationale, principes de répartition des charges des grandes étapes du processus de production : distribution, tri, transport, réseau, structure...).

Parallèlement, les exigences imposées à La Poste ont été formalisées sur le plan réglementaire, par le décret du 8 février 2001 modifiant l'article 33 du cahier des charges de La Poste, qui impose à cette dernière une « tenue de comptes séparés pour chacun des services dont l'exclusivité lui est réservée d'une part, et pour les autres services, d'autre part, en isolant parmi ces derniers, ceux qui relèvent de l'offre de service universel et ceux qui relèvent de ses activités financières ».

Sur le plan opérationnel, les ministres ont demandé à La Poste, qui s'y est engagée, de produire des comptes analytiques sur le nouveau modèle avant la fin de l'année 2001.

Pourtant, et votre Commission des Affaires économiques le déplore, la mise en place de cette nouvelle compatibilité analytique semble n'avancer qu'à pas de fourmis .

2. Préparer La Poste par une loi d'orientation postale

Depuis la publication du rapport d'information précité, rédigé par le Président Gérard Larcher « Sauver la Poste : devoir politique, impératif économique 19( * ) », en octobre 1997, votre commission ne cesse de réclamer la discussion d'une grande loi d'orientation postale, qui assure l'avenir de La Poste et intègre les évolutions rendues nécessaires par l'évolution du secteur, aussi bien que par le droit communautaire.

Le Gouvernement s'était, un temps, engagé à cette discussion.

Ainsi, au compte rendu des débats de l'Assemblée nationale du 2 février 1999, lors de la discussion du projet de loi d'orientation d'aménagement du territoire, figurent les propos suivants du ministre chargé de la poste, tenus au sujet de l'amendement de transposition de la directive postale déposé par le Gouvernement (réitérés au Sénat le 25 mars 1999) :

« La Commission supérieure du service public a été consultée sur ce texte (...). Nous comprenons sa préoccupation, (...) que je sais partagée sur tous ces bancs, que puisse être examiné par le Parlement un projet d'ensemble se rapportant à ces questions du service public de La Poste.

« C'est pourquoi, comme je l'ai indiqué à la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, j'ai proposé au premier ministre que le Gouvernement dépose, dans les prochains mois, un projet de loi qui donnera aux activités postales un cadre juridique complet et qui confortera ainsi la lisibilité d'ensemble de notre réglementation relative au service public. Il permettra, par ailleurs, de débattre largement -je pense que nous en avons besoin- du service public, de sa modernisation, de son encouragement par les pouvoirs publics et par le Gouvernement ».

On sait bien qu'il n'en a rien été, le Gouvernement demandant au contraire au Parlement de l'habiliter à finir de transposer par voie d'ordonnance la directive postale de 1997, ce qui lui fut finalement refusé par le Parlement, à l'initiative de la commission des lois, saisie au fond de ce texte, de votre commission, saisie pour avis 1 et de son rapporteur, notre collègue Ladislas Poniatowski.

Votre Commission des Affaires économiques estime en effet, depuis plus de quatre ans, qu'une loi d'orientation postale est nécessaire pour assurer l'avenir de La Poste et tracer son chemin dans un nouvel environnement libéralisé. Elle doit aborder sans tabous les questions essentielles : statut de l'entreprise et garanties pour son personnel, prise en charge des retraites, services financiers, aménagement postal du territoire, compensation des missions d'intérêt général.

Sans doute ce sujet sera-t-il un des enjeux de la prochaine législature.

CHAPITRE III -

LES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
DANS LA TOURMENTE

I. DE FORTES TURBULENCES MALGRÉ UN NET DÉVELOPPEMENT DES USAGES

A. UN NET DÉVELOPPEMENT DES USAGES

1. Des signaux positifs

a) L'observatoire des marchés de télécommunications

La demande de services de télécommunications reste soutenue, comme le montre la cinquième édition de l'enquête trimestrielle de l'ART, portant sur le 1 er trimestre  2001, menée auprès de 85 opérateurs.

Cette étude, récemment publiée, indique qu'en France, les opérateurs de télécommunications génèrent un chiffre d'affaires auprès des clients finals de 8 milliards d'euros, soit 2,3 % du PIB français, contre 2,1 % un an plus tôt . En termes de minutes, le marché des télécommunications enregistre une hausse évaluée, en moyenne glissante annuelle, à 6,8 %.

En ce qui concerne la téléphonie mobile , le chiffre d'affaires de ce segment représente, au 1 er trimestre 2001, 29,3 % du chiffre d'affaires total du marché des télécommunications, en progression de trois points par rapport au 1 er trimestre 2000.

La synthèse des résultats de cette étude est reproduite ci-dessous :

OBSERVATOIRE DES MARCHÉS DE L'ART
(chiffres d'affaires en millions d'euros)

 

1er trim. 2000

2è trim. 2000

3è trim. 2000

4è trim. 2000

1er trim. 2001

Variation sur un trimestre

Variation en glissement

Téléphonie fixe

3 872

3 765

3 741

3 835

3 956

+3,2 %

+0,6 %

Fourniture d'accès Internet

20

29

39

40

64

+60 %

+34,4 %

Téléphonie mobile

1 877

1 983

2 133

2 242

2 347

+4,7 %

+5,7 %

Ensemble téléphonie et Internet

5 769

5 777

5 913

6 115

6 367

+4,1 %

+2,5 %

Services avancés

435

422

448

435

432

-0,7%

-0,2%

Liaisons louées

432

448

584

568

600

+5,6%

+8,3%

Transport de données

121

146

144

136

175

+28,7%

+9,9%

Renseignements, annuaires et publicité

105

115

78

100

87

-13,0%

-4,5%

Terminaux et équipements

250

321

379

665

340

-48,9%

+5,6%

Hébergement et gestion de centres d'appels

7

21

16

12

8

-33,3%

+1,8%

Ensemble du marché

7 119

7 250

7 563

8 031

8 009

-0,3%

+3,0%

Source : ART

b) Le tableau de bord de l'innovation

Le tableau de bord de l'innovation est un indicateur périodiquement publié par le Secrétariat d'Etat à l'industrie, qui synthétise l'ensemble des données de la nouvelle économie : nouveaux investisseurs, nouvelles technologiques, nouveaux usages...

La dernière version du tableau de bord, parue en avril 2001, donne des signaux très encourageants quant au développement des usages.

Elle montre ainsi qu'au cours du second semestre 2000, la progression du nombre d'internautes en France s'est accentuée. Le seuil de huit millions d'utilisateurs de l'internet (à domicile, sur le lieu de travail ou dans un autre lieu public) aurait été atteint. Selon les sondages de l'Eurobaromètre (Commission européenne), le pourcentage des ménages disposant d'un accès à l'Internet à domicile serait passé en France de 13 % à 19 % entre mars et octobre 2000. Ce dernier pourcentage restant inférieur à ceux atteints au Royaume-Uni (41 %), en Allemagne (27 %) et en Italie (23 %).

NOMBRE D'INTERNAUTES
(en millions)

Erreur ! Liaison incorrecte.

Source : tableau de bord de l'innovation

Le nombre d'ordinateurs hôtes (sous « .fr ») connectés à Internet a augmenté en France légèrement plus rapidement (+58 %) durant l'été 2000, que la moyenne des autres pays de l'Union Européenne (+44 %). Il s'agit toutefois d'un indicateur partiel, en l'absence de calcul officiel intégrant les machines sous « .com » relevant de la France.

NOMBRE D'ORDINATEURS HÔTES EN FRANCE
(en millions)

Source : tableau de bord de l'innovation

Le taux de pénétration de la téléphonie mobile , avec 34,6 millions d'abonnés en septembre 2001 (soit plus d'abonnements mobiles que de lignes téléphoniques fixes) a atteint 57,6 % de la population . Au 31 décembre 2000, il était de 49,4 %, un taux inférieur à celui des Allemands (58,7 %) à la même date, alors qu'au début de l'année 2000, il était encore supérieur (34,3 %) à celui des Allemands (28,6 %).

NOMBRE DE CLIENTS DU TÉLÉPHONE MOBILE
(en millions)

% taux de croissance

-- Taux de diffusion en % sur la base d'une population française de 60,1 millions de personnes (recensement 1998)

Source : Art

Les ventes de micro-ordinateurs aux entreprises et aux ménages ont atteint 3,9 millions d'unités en 2000, soit une progression de 4 % par rapport à 1999. Au cours du second semestre 2000, plus de 2,2 millions de micro-ordinateurs ont été vendus en France (+2 % par rapport au second semestre 1999). Dans ce total, les ventes de micro-ordinateurs au grand public (près de 0,7 million d'unités) progressent de 1,7 % seulement par rapport au second semestre 1999, reflétant un ralentissement de la demande.

Entre mai 1999 et mai 2000, l'équipement des ménages en micro-informatique a continué de progresser. Le parc d'ordinateurs possédés par les ménages en France, s'est élevé à 7,5 millions d'unités (y.c les portables), soit une augmentation de plus de plus de 18 % par rapport à 1'année 1999. Ainsi, 27 % des ménages résidant en France possèdent un ordinateur à leur résidence principale. Ce niveau d'équipement informatique des ménages reste largement inférieur aux taux constatés en Allemagne (47 %), aux Etats-Unis (56 %) et en Suède (76 % ) pour l'année 2000.

2. Un acquis à développer : le service universel des télécommunications

a) Contenu et coût du service universel

La loi de réglementation des télécommunications du 26 juillet 1996 affirme le principe du maintien d'un service public des télécommunications et organise la compatibilité de sa fourniture avec les objectifs de pleine concurrence. Elle en a ainsi précisé le contenu. Le service universel des télécommunications en est la principale composante, à côté des services obligatoires et des services d'intérêt général. France Télécom est l'opérateur public chargé, par la loi, du service universel.

Le service universel est défini comme la fourniture à tous d'un service téléphonique de qualité à prix abordable. Il assure l'acheminement gratuit des appels d'urgence, la fourniture d'un service de renseignements et d'un annuaire d'abonnés sous forme imprimée et électronique. Il garantit la desserte du territoire en cabines téléphoniques sur le domaine public. Le service universel prévoit des conditions tarifaires et techniques spécifiques, adaptées aux personnes qui rencontrent des difficultés d'accès au service téléphonique en raison de leur handicap ou de leur faible revenu. Son financement est partagé entre les opérateurs.

Le coût du service universel comporte cinq composantes :

le coût lié au déséquilibre de la structure courante des tarifs de France Télécom : cette composante, transitoire, couvre la phase de rééquilibrage des tarifs de France Télécom par rapport à ses coûts, déséquilibre supportable en situation de monopole mais incompatible avec la concurrence. Cette composante, nulle depuis le 1er janvier 2000, était auparavant partagée -comme tous les autres coûts- entre les opérateurs à l'exception des opérateurs mobiles, exemptés en contrepartie d'engagements de couverture du territoire ;

le coût de la péréquation géographique , c'est-à-dire celui lié à la desserte du territoire et à l'accès de tous au téléphone à un même prix sur l'ensemble du territoire ;

les tarifs sociaux : il s'agit de la charge liée à l'obligation de fournir une offre de tarifs particuliers, destinée à certaines catégories de personnes, en raison notamment de leur faible niveau de revenu ou de leur handicap. A noter que leur mise en place est récente ;

la desserte du territoire en cabines téléphoniques ;

l'annuaire universel et le service de renseignements correspondant, qui n'ont toutefois pas encore vu le jour.

Le coût net du service universel des télécommunications est calculé par l'ART, puis constaté par le ministre. Il est notamment basé sur l'utilisation d'un modèle permettant de connaître le coût de la péréquation géographique, à partir de celui de la desserte des zones non rentables mais aussi de celui des abonnés non rentables dans les zones rentables. Ce modèle reflète le comportement d'un opérateur qui développerait un réseau téléphonique, à partir des zones les plus rentables, supposées être celles de plus forte densité démographique . Pour chaque catégorie de zones locales, un coût net apparaît dès lors que le coût supplémentaire encouru par l'opérateur pour desservir cette catégorie est supérieur aux recettes directes et indirectes retirées de la desserte de cette catégorie de zones locales.

La loi a prévu que le coût de la prestation de service universel, qui est supporté par France Télécom, soit partagé et financé de manière équitable entre l'ensemble des opérateurs de télécommunications et financé au prorata de leur trafic.

Le coût net prévisionnel du service universel des télécommunications a été évalué par l'Autorité de régulation des télécommunications à 430,21 millions d'euros pour 2000 et à 415,72 millions d'euros pour 2001, se décomposant de la manière suivante :

COÛT NET DU SERVICE UNIVERSEL EN 2000 ET 2001
(MONTANTS PRÉVISIONNELS)

en millions d'euros

2000

2001

Péréquation géographique

220,44

229,28

Autres obligations de service universel

209,77

186,44

TOTAL

430,21

415,72

D'après les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, pour la dernière année liquidée (1999), si France Télécom, unique prestataire du service universel, est bien le seul opérateur créditeur du fonds de service universel géré par la Caisse des dépôts, les 78 opérateurs débiteurs recensés par le fonds apparaissent pour une contribution qui s'échelonne, en fonction de leur part dans le trafic total, de 0 à 434 millions d'euros.

b) Quelle évolution pour le service universel des télécommunications ?

Le législateur a prévu, en 1996, que le contenu du service universel des télécommunications soit, le cas échéant, complété au cours du temps. L'article L. 35-7 du code des postes et télécommunications inséré par cette loi a même précisé le mécanisme devant conduire à l'extension du champ du service universel. Votre commission y avait d'ailleurs particulièrement veillé.

La loi indique ainsi que, « au moins une fois tous les quatre ans » -formulation destinée à donner une date butoir tout en préservant la possibilité d'agir avant ce terme-, le Gouvernement dépose au Parlement un rapport sur l'application du chapitre du code des postes et télécommunications consacré au service universel des télécommunications. Il est précisé que ce rapport peut proposer d'étendre le champ du service universel , en fonction des besoins de la société et de l'évolution des technologies.

La loi a donc fixé un rendez-vous très précis pour faire évoluer le service universel des télécommunications. Votre commission déplore que le Gouvernement n'ait d'ailleurs pas respecté l'échéance de juillet 2000 fixée par le législateur pour le dépôt dudit rapport 20( * ) , dont la rédaction est pourtant achevée 21( * ) .

Par ailleurs, votre commission est particulièrement attentive aux discussions en cours au niveau européen, dans le cadre de la révision du « paquet » de directives sur les télécommunications. Des huit textes en discussion, c'est, en particulier, le projet de directive concernant le service universel et les droits des utilisateurs à l'égard des réseaux et services de communications électroniques qui retient son attention.

Le Conseil des ministres du 27 juin 2001 a permis l'adoption d'un accord politique entre les quinze sur cette directive. Les discussions ont principalement porté sur les mesures particulières en faveur des utilisateurs défavorisés, le caractère abordable des tarifs, le réexamen de la portée du service universel, les obligations de diffuser, le financement des obligations de service universel et les contrôles réglementaires concernant les services.

Dans le cadre du réexamen de cette directive, il est ultérieurement prévu que l'extension du champ du service universel devra être étudiée, notamment en terme de mobilité et de débits plus élevés.

Votre commission regrette que la France n'ait pas obtenu de vos partenaires un élargissement plus immédiat du service universel .

3. Deux freins à lever : le dégroupage et l'accès forfaitaire illimité à Internet

a) La laborieuse mise en oeuvre du dégroupage

Présenté il y a plus de deux ans par le Gouvernement comme une réforme majeure pour faire entrer la France dans la société de l'information, le « dégroupage de la boucle locale » 22( * ) , après des péripéties 23( * ) rappelées l'an dernier par votre rapporteur pour avis entre si péniblement en oeuvre que seuls quelques opérateurs persistent à être candidats au terme de négociations qui s'apparentent à un véritable parcours du combattant.

A tel point que l'ART tient désormais, sur son site Internet, un « tableau de bord du dégroupage » sur l'état d'avancement de sa mise en oeuvre opérationnelle.

On peut y lire qu'« au 20 octobre 2001 » , c'est à dire deux ans après la décision du gouvernement de le mettre en oeuvre, le « dégroupage commence à entrer en phase commerciale : le déploiement des opérateurs dans les sites de France Télécom a commencé et le dégroupage concret de lignes d'abonnés démarre ». L'Autorité précise pudiquement qu'elle « travaille avec les acteurs concernés pour résoudre les problèmes encore en suspens afin de permettre un dégroupage effectif ».

Seuls neuf opérateurs sont désormais candidats au dégroupage, contre plus de trente lorsque la décision de mettre en oeuvre cette procédure parachevant l'ouverture à la concurrence avait été annoncée. Parmi eux, seuls cinq ont réellement signé une convention de dégroupage avec France Télécom , leur permettant d'entrer en phase de commercialisation d'une offre de dégroupage, compte tenu des conditions tarifaires et techniques proposées. L'offre de référence de France Télécom du 16 juillet 2001, base actuelle de la mise en oeuvre du dégroupage, après plusieurs mises en demeures du régulateur sur des offres précédentes, a en effet été vivement critiquée par certains candidats au dégroupage.

Votre commission regrette que les conditions (techniques, opérationnelles et financières) du dégroupage restreignent, de fait, son déploiement aux zones les plus rentables et donc aux grandes agglomérations.

Les opérateurs vont ainsi être conduits, inévitablement, à des arbitrages privilégiant les zones les plus denses au détriment de l'aménagement du territoire. Il ressort des données de l'ART que les premières salles de co-localisation, par exemple, ont été commandées en régions parisienne, lyonnaise et marseillaise, comme le montre le graphique ci-dessous :

SALLES DE CO-LOCALISATION COMMANDÉES AU 20 OCTOBRE 2001

Source : Art

b) L'impasse de l'interconnexion forfaitaire illimitée à Internet

Un des moyens les plus puissants pour diffuser l'usage d'Internet est de proposer des forfaits dits « illimités », c'est-à-dire des « abonnements tout compris » dont le prix est indépendant de la durée de la connexion. Cette formule a été expérimentée en France avec le lancement, en août 2000, d'offres forfaitaires illimitées (99 francs par mois tout compris pour 2 ans d'abonnement, 199 francs par mois pour des engagements résiliables à la demande). Non viables économiquement dans les conditions actuelles d'interconnexion entre opérateurs, et ayant donné lieu à des problèmes de saturation technique, ces offres ont été retirées du marché.

Au cours de ces derniers mois, le Gouvernement, le régulateur et plusieurs acteurs économiques se sont prononcés en faveur du système d'interconnexion Forfaitaire illimitée (IFI) permettant la mise en oeuvre de ce type de forfaits, dans des conditions économiquement viables.

Le 11 janvier dernier, par exemple, le Premier ministre se prononçait en faveur de cette solution lors de ses voeux à la presse, tandis que le secrétaire d'Etat à l'industrie précisait le même jour : « les internautes pourront ainsi bénéficier d'offres forfaitaires illimitées à Internet dès l'été prochain, à des tarifs inférieurs à 200 francs par mois ».

France Télécom a ainsi été « invitée » à présenter une offre d'interconnexion à la capacité (et non la durée) au niveau de ses commutateurs d'abonnés . Or, les fournisseurs d'accès à Internet estiment que ces tarifs d'interconnexion forfaitaire ne sont pas orientés vers les coûts et font valoir qu'ils sont jusqu'à 75 % plus élevés que les tarifs équivalents proposés au Royaume-Uni.

Le secrétaire d'Etat à l'industrie a eu beau affirmer, lors de son audition devant votre commission, avoir demandé à l'ART « d'étudier les solutions permettant de parvenir à une offre d'accès illimité à moins de 200 francs », le dossier reste, pour l'instant, au point mort, aucune offre de ce type n'étant proposée.

Votre Commission des Affaires économiques souhaite vivement que de nouvelles conditions tarifaires permettent la relance de la dynamique des offres illimitées pour le grand public.

B. DE FORTES TURBULENCES

1. Un retournement particulièrement brutal

Depuis le début de l'année 2000, le contexte boursier a été très chahuté, caractérisé par des cours d'actions très volatils, en particulier dans le secteur des télécommunications et des technologies de l'information.

Au premier trimestre 2000, les valeurs dites « TMT » (Technologies Médias Télécoms) ont connu un fort engouement , lié principalement aux perspectives de croissance de ce secteur. Cette effervescence a été suivie d'une désaffection accentuée , qui s'explique, en partie, par l'ampleur des investissements financiers (compte tenu du prix exorbitant des licences) et opérationnels à consentir, notamment pour l'UMTS.

L'« éclatement de la bulle Internet » a surtout affecté les entreprises les plus fragiles, qui comptaient sur des multiples de capitalisation très élevés pour financer leur développement, et en particulier celles qui étaient engagées dans une fuite en avant, vendant à perte pour se constituer un portefeuille de clients important le plus rapidement possible, dans l'espoir d'une revente, avec forte plus-value, de leur activité. Mais ce retournement brutal n'a pas frappé que les sociétés de la « nouvelle économie ». Il a eu également de fortes répercussions sur les sociétés du secteur des télécommunications, ce dernier devenant, en outre, avec la défaveur soudaine de l'UMTS, un secteur « à risque ».

La « gestion » -si l'on peut dire !- du dossier « UMTS » par la Commission européenne et les procédures d'enchères anglaises et allemandes portent une lourde part de responsabilité en la matière.

Sans trop s'étendre sur un constat bien connu, votre rapporteur souhaite toutefois reproduire ci-après un tableau éloquent, publié sur le site Internet du Financial Times 24( * ) , et qui chiffre à 436.000 le nombre des suppressions d'emplois (par licenciements et non renouvellement d'emplois) dans le secteur des télécommunications depuis le début de l'année 2001 :

SUPPRESSIONS D'EMPLOIS DANS LES TÉLÉCOMMUNICATIONS
DEPUIS LE 1 ER JANVIER 2001

SOCIETES

NOMBRE D'EMPLOIS SUPPRIMÉS

Nortel Networks

49 000

Lucent Technologies

44 910

Motorola

39 000

China Unicom

34 478

Alcatel

33 000

Ericsson

22 000

Solectron

20 700

Siemens

17 000

JDS Uniphase

16 000

Corning

12 000

Philips

11 570

ADC

9 500

Cisco Systems

8 500

Matsushita

8 000

Worldcom Group

8 000

Marconi

7 000

KPN

6 800

Sprint

6 000

Agere Systems

6 000

British Telecommunications

6 000

3Com

6 000

Cable and Wireless

5 500

NTL

5 000

Qwest

4 000

France Telecom

3 000

BellSouth

3 000

Elcoteq

3 000

Celestica

2 900

Molex

2 500

Epcos

2 190

Level 3 Communications

2 150

Oki Electric

2 100

McleodUSA

2 075

Conexant Systems

2 075

Global Crossing

2 000

Mitsubishi Electric

2 000

Tellabs

2 000

Winstar

2 000

Flextronics

1 500

ECI Telecom

1 400

Nokia

1 250

Covad Communications

1 200

Sonera

1 000

Vodafone

960

Northpoint

948

Teligent

900

Atlantic Telecom

895

Japan Telecom

850

360networks

800

Optus

700

Exodus Communications

675

Gemplus

567

Excite@Home

500

Zarlink (formerly Mitel)

430

Comverse Technology

400

Pacific Century Cyberworks

340

Openwave

300

Network Access Solutions

295

Bookham Technology

250

Corvis

250

Globalstar

175

Vitesse Semiconductor

150

Juniper Networks

104

Orchestream

94

TOTAL

435 881

Source : Financial Times (mise à jour du 2 novembre 2001)

L'évolution des cours de, respectivement, France Télécom et Wanadoo, sommairement retracée dans le graphique ci-dessous, est, elle aussi, particulièrement éloquente :

EVOLUTION DES COURS DE FRANCE TÉLÉCOM ET WANADOO
(en euros
)

Nombre d'opérateurs européens se sont trouvés particulièrement déstabilisés par cette situation, au premier rang desquels BT, KPN, Deutsche Telekom, mais aussi France Télécom.

2. France Télécom fragilisé malgré une hausse d'activité

a) Une bonne tenue de l'activité et des résultats

Dans ce contexte, les résultats consolidés du groupe France Télécom du premier semestre 2001, rendus publics le 5 septembre dernier, font pourtant état d'un chiffre d'affaires consolidé des six premiers mois en forte progression (à 20,4 milliards d'euros, soit une progression de 33,3 %) en raison du fort développement des mobiles, de l'Internet et de l'international, et de la consolidation, pour la première fois sur six mois, d'Orange Royaume-Uni et d'Orange Suisse. A taux de change, périmètre et méthode de consolidation constants, le chiffres d'affaires augmente de 7,9 % (contre 7,7 % au premier semestre 2000).

Un tiers de l'activité de France Télécom est désormais réalisé à l'international. Le chiffre d'affaires contributif d'Orange progresse de 122,4 % et représente un tiers du chiffre d'affaires consolidé. Le chiffre d'affaires contributif de Wanadoo progresse de près de 50 %.

L'EBITDA (résultat opérationnel courant avant amortissement) du groupe, à 6,1 milliards d'euros, progresse de 14 %. Le résultat net part du groupe s'élève à 1,95 milliards au 1 er semestre 2001. La comparaison avec le premier semestre 2000 n'est toutefois pas significative (en raison de l'importante plus-value de cession de Telmex, qui s'élevait à 2,6 milliards d'euros).

Les premiers résultats du troisième trimestre de 2001 confirment cette bonne tenue.

Le chiffre d'affaires consolidé de France Télécom au 30 septembre 2001 s'élève à 31,6 milliards d'euros, en progression de 31,9 % par rapport à l'année précédente . La croissance de l'activité de France Télécom au 30 septembre 2001 demeure supérieure à la croissance annuelle réalisée en 2000 (+23,7 %). Le nombre de clients de France Télécom est également en progression. Il s'établit, au 30 septembre 2001, à 88 millions contre 71 millions à la fin septembre 2000, soit une augmentation de 24 % en un an.

La croissance du chiffre d'affaires consolidé correspond au développement des activités à l'international, dont le chiffre d'affaires à la fin septembre 2001 est en progression de 106,4 %. Avec l'intégration d'Equant depuis le 1 er juillet 2001, la part des activités à l'international sur le chiffre d'affaires total atteint 38,2 % au troisième trimestre et s'établit à 35,2 % du chiffre d'affaires total du groupe France Télécom sur les neuf premiers mois de 2001, contre 25,8 % en 2000.

A périmètre et taux de change constants, la croissance à la fin septembre 2001 s'élève à +7,3 % . Elle correspond, pour l'essentiel, à la poursuite du développement des services mobiles et des activités liées à l'Internet pour le grand public et les entreprises.

Si l'activité continue de croître, c'est le niveau d'endettement de l'opérateur qui a, en grande partie, entraîné à la baisse son cours de bourse, dégradé sa cotation par les agences de « rating » et fait sortir France Télécom de l'indice de la bourse de Francfort des valeurs vedettes du secteur.

b) Le « boulet » de la dette

L'endettement net du groupe atteint, en effet, au 30 juin 2001, la somme impressionnante de 64,9 milliards d'euros.

Le niveau d'endettement de France Télécom a connu une croissance de 46 milliards d'euros en 2000. Les raisons principales en sont la réalisation de l'important programme d'investissements financiers réalisés dans le cadre de la stratégie de développement international du groupe (dont l'acquisition d'Orange, la prise de contrôle totale de Global One, les prises de participation dans TPSA et dans Mobilcom en Allemagne) ainsi que le coût des licences UMTS, en France, mais aussi dans le reste de l'Europe.

L'objectif de l'opérateur est de réduire l'endettement de 20 à 30 milliards d'Euros d'ici à 2003, de façon qu'il ne représente plus, alors, que 2 ans à 2 ans et demi d'excédent brut d'exploitation. Plusieurs leviers de réduction de l'endettement sont envisagés :

- la croissance des résultats de l'entreprise et du « cash flow » libre ;

- la cession d'actifs non stratégiques (pour 15 à 20 milliards) ;

- la remise sur le marché des 100 millions d'actions nouvelles créées pour acheter Orange à Vodafone. Cette remise sur le marché se fera en plusieurs opérations qui s'étaleront sur les 2 prochaines années. L'objectif est de récolter 7 à 10 milliards d'euros.

La réussite de cette stratégie de désendettement, que les analystes ont, dans un premier temps, remise en cause, est toutefois fortement conditionnée par l'évolution de l'environnement notamment boursier.

En 2001, une première étape de réduction de la dette sera effectuée. D'ores et déjà, France Télécom a cédé 2,5 milliards d'euros d'actifs (500 millions de KPN Orange, 1 milliard de Sema et 1 milliard de Noos) et vient de finaliser la cession de sa participation dans Sprint pour 1,9 milliard d'euros. Au total, environ 4,5 milliards d'euros auront été cédés au premier semestre 2001.

Le programme de cessions prévoit également 3 à 5 milliards d'euros de cessions dans le domaine de l'immobilier, dont 2 à 3 milliards d'euros cette année, suivant une procédure d'enchères qui devrait transférer une bonne partie du parc immobilier de France Télécom à un consortium regroupant notamment la Caisse des dépôts et consignations et Goldman Sachs. Enfin, la recherche d'un acquéreur est en cours pour lui céder la participation détenue dans le capital de ST Microelectronics, pour un montant visé de 3,5 milliards d'euros.

II. UNE LUTTE À RENFORCER CONTRE LA FRACTURE NUMÉRIQUE TERRITORIALE

A. LA COUVERTURE TERRITORIALE EN TÉLÉPHONIE MOBILE

1. La téléphonie mobile de 2ème génération (GSM)

a) Les limites du seul jeu de marché

La concurrence est un levier puissant de diffusion territoriale. Ainsi, alors qu'en 1995, les abonnés à la téléphonie mobile n'étaient qu'au nombre de 1,3 millions, l'ouverture du 3 ème réseau en 1996, en avivant la concurrence, a stimulé la diffusion de la téléphonie mobile. Le jeu de la concurrence a été le principal moteur de l'extension des réseaux et de la baisse des prix. L'augmentation de la pénétration des services a, en effet, rendu rentable la couverture des zones qui ne l'étaient pas à un moindre niveau de développement du marché.

Par ailleurs, la couverture territoriale proposée constituant un argument de vente décisif, les opérateurs, du fait de la concurrence, ont été incités à couvrir des zones géographiques non rentable. Les opérateurs sont donc rapidement allés, en matière de couverture, au-delà des obligations contenues dans leur cahier des charges.

Pourtant, ce processus semble avoir trouvé sa limite, et laisse subsister d'importantes « zones d'ombre », non couvertes, sur le territoire national, qui s'ajoutent, dans certains endroits « couverts » à des déficiences en terme de qualité de service.

Prévoyant que la logique du marché buterait, à terme, sur le coût élevé de la couverture du dernier « décile » du territoire le moins rentable économiquement, la loi de réglementation des télécommunications du 26 juillet 1996 avait prévu un dispositif très complet (voir supra) pour parfaire la couverture territoriale en téléphonie mobile, reposant sur un bilan de couverture territoriale que le Gouvernement devait remettre au Parlement au plus tard en juillet 2000.

Votre commission n'a pas manqué de rappeler le Gouvernement à cette obligation, sans succès jusqu'à l'été dernier. Déposé avec un an de retard, ce rapport, enfin publié, a établi un état des lieux de la couverture du territoire et réalisé une analyse économique des zones restant à couvrir. Il montre que :

- 91,6 % du territoire métropolitain est couvert par au moins un réseau mobile GSM ;

- 46.000 km² ne sont couverts par aucun réseau (soit 8,4 % du territoire) ;

- moins de 390.000 personnes (soit moins de 0,7 % de la population) n'ont pas accès à un service mobile sur leur lieu de résidence ;

- 1.480 communes ne disposent pas d'une couverture effective de leur centre ;

- l'hypothèse d'une couverture à 100 % du territoire par un seul réseau représenterait un investissement d'environ 2,6 milliards de francs . Notons qu'avec des accords d'itinérance locale, ce coût pourrait être abaissé à 1,4 milliard de francs.

Compte tenu des coûts à engager et de la faible rentabilité des investissements, le rapport du Gouvernement indique que la dynamique concurrentielle qui a conduit les opérateurs mobiles à déployer fortement leurs réseaux de télécommunications ces dernières années, ne permettra pas d'amélioration sensible de la couverture du territoire au-delà du point d'équilibre actuellement atteint.

Les « zones » d'ombres apparaissent en rouge sur la carte ci-après :

b) Une extension pourtant programmée dès 1996

Outre un bilan territorial de la couverture, la loi précitée de 1996 prévoyait, déjà, la mise en oeuvre de moyens de mutualisation des investissements entre les opérateurs pour parfaire la couverture territoriale au delà du point « d'équilibre » du marché :

COUVERTURE TERRITORIALE EN GSM : EXTRAIT DE LA LOI DE 1996

Article L. 35-7 du code des P. et T : « au moins une fois tous les quatre ans à compter de la date de publication de la présente loi, un rapport sur l'application du présent chapitre, remis par le Gouvernement au Parlement [...]. Le premier rapport remis en application de l'alinéa précédent comporte un bilan de la couverture du territoire par les réseaux de radiotéléphonie mobile. Il propose les modifications nécessaires à apporter au présent chapitre pour assurer, à un terme rapproché, la couverture des zones faiblement peuplées du territoire, ainsi que des routes nationales et des autres axes routiers principaux, par au moins un service de radiotéléphonie mobile terrestre ou satellitaire. Il précise également les moyens nécessaires pour atteindre cet objectif dans le respect du principe d'égalité de concurrence entre opérateurs, notamment les modalités d'un investissement commun aux opérateurs ou d'une combinaison des différentes technologies disponibles dans les zones à faible densité de population non couvertes à la date de remise du rapport »

Ainsi, le législateur a pris le soin, dès 1996, de définir une méthodologie pour l'extension de cette couverture, que le Gouvernement était invité à mettre en oeuvre au plus tard à partir de juillet 2000.

Déjà esquissées dans la loi de 1996, les modalités pratiques de la réalisation de l'objectif d'une couverture complète sont désormais identifiées. Techniquement, deux solutions se dégagent, qui peuvent d'ailleurs être combinées :

- une mutualisation des coûts par mise en commun des moyens d'infrastructure passifs . Sont concernés principalement : le génie civil, la recherche et la négociation de site, le coût des pylônes et des redevances, le raccordement électrique et l'exploitation correspondante. Dans ce cas, les opérateurs étendent leur couverture sur l'ensemble des zones à couvrir et n'acceptent chacun que leurs propres clients ;

- « l'itinérance locale ». Il s'agit de l'installation d'un seul des trois réseaux sur une zone non couverte, ce réseau acceptant toutefois les clients des autres opérateurs et permettant une compatibilité de service.

c) Une mise en oeuvre contestable : le CIADT du 9 juillet

Ce n'est que lors du Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 9 juillet dernier, à Limoges, que le Gouvernement a fait part de ses intentions en matière de couverture territoriale.

Le Gouvernement y a, en effet, annoncé l'achèvement de la couverture territoriale en téléphonie mobile d'ici 3 ans. Mais il s'est bien gardé d'y apparaître comme le principal financeur.

Comme l'indique le relevé de conclusions du CIADT, le Gouvernement a décidé la mise en place d'un dispositif de « soutien public à l'investissement des collectivités locales et des opérateurs » pour la construction de stations de base équipées de téléphonie mobile . Cet engagement vise à assurer dans les trois prochaines années la couverture de l'ensemble des lieux de vie permanents et occasionnels (sites touristiques) et des axes de transport prioritaires .

Sont concernés notamment les 1.480 centres de villages qui ne sont aujourd'hui couverts par aucun réseau de télécommunications mobiles.

Par ailleurs, le Gouvernement indiquait avoir obtenu un accord des trois opérateurs mobiles pour la mise en place d'un système d'itinérance locale dans les zones à couvrir, qui conduira à déployer pour chaque zone concernée un réseau unique, accessible aux abonnés des trois opérateurs mobiles et permettra ainsi de réduire considérablement le coût d'extension de la couverture envisagée.

Le coût global est estimé à 1,4 milliard de francs sur le territoire métropolitain , dont le Gouvernement estime, dans le relevé de conclusions du CIADT, qu'ils devraient être répartis de la façon suivante : 400 millions de francs pour les opérateurs et 500 millions de francs de crédits d'Etat afin de participer, selon les termes du relevé de conclusions « sur une base paritaire , aux investissements pour la construction des stations de base équipées, que décideraient les collectivités locales qui auront fait connaître leurs objectifs de couverture avant la fin 2001 ».

S'agissant des départements d'Outre-mer, le Gouvernement, estimant que la fin, en 2000, du monopole de fait qui y caractérisait le marché de la téléphonie mobile, va permettre une extension de la couverture et une amélioration des conditions tarifaires, a décidé de s'en tenir à l'engagement d'« étude devant déboucher sur l'établissement d'un rapport avant la fin de l'année 2001 sur les conditions du développement de la couverture en téléphonie mobile outre-mer ».

Votre commission regrette très vivement que les conclusions du CIADT aient prévu que les collectivités locales soient sollicitées à hauteur de 500 millions de francs pour la mise en oeuvre de ce plan de rattrapage, soit autant que l'Etat, et plus que les opérateurs de télécommunications. Les collectivités concernées sont pourtant les moins « riches » de notre territoire. Là où une péréquation nationale aurait été nécessaire, le Gouvernement renforce, au contraire, les inégalités.

Si l'Ile-de-France fut couverte sans monnaie débourser par les collectivités concernées, c'est dans le massif central, en Lozère, ou en Corrèze, par exemple, qu'il faudra fait appel au contribuable local !

Ajoutons toutefois que, comme le ministre l'a annoncé à la commission lors de son audition, deux opérateurs se seraient engagés à débourser 100 millions d'euros chacun pour accélérer ce plan de couverture qui serait, en définitive, achevé d'ici 2 ans au lieu de 3.

Le ministre a indiqué que cet effort financier supplémentaire permettrait d'« améliorer la couverture territoriale des réseaux dans le cadre des mesures du CIADT et d'autres opérations », dans le cadre d'« opérations d'extension, de densification et d'amélioration de la qualité du réseau dans les zones rurales » 25( * ) .

Rien n'indique toutefois que la facture à la charge des collectivités locales s'en trouvera diminuée. En outre, il semble bien que les opérateurs concernés comptent mettre cet investissement à la charge de l'amélioration de leur réseau en général (densification en zones urbaines comprise) et non exclusivement à la couverture des zones « d'ombre ».

2. La troisième génération (UMTS)

a) Une promesse non tenue de consultation du Parlement

Craignant que ce scénario ne se reproduise avec la téléphonie mobile de troisième génération, le Parlement avait exigé du Gouvernement, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2001, d'être préalablement consulté sur les obligations de couverture fixées par les cahiers des charges des licences de téléphonie mobile de troisième génération. M. Christian Pierret s'y était personnellement engagé, lors de son audition devant votre Commission des Affaires économiques, à la demande de votre rapporteur pour avis.

Or, en juillet dernier, les cahiers des charges furent publiés au Journal Officiel sans que le Parlement soit consulté. Chacun jugera du respect de la représentation nationale que manifeste une « omission » aussi grossière.

b) Des cahiers des charges peu ambitieux en termes de couverture territoriale

Les cahiers des charges des licences de téléphonie mobile de troisième génération fixent des obligations de couverture en termes de population métropolitaine et non de couverture territoriale, pourtant plus significative, s'agissant de services mobiles. Ces obligations sont détaillées ci-après :

OBLIGATIONS DU CAHIER DES CHARGES D'ORANGE
(couverture en % de la population métropolitaine)

 

2003

2006

2009

Services de voix

58 %

94 %

> 98 %

Services de données à 144 kbits/s.

58 %

94 %

> 98 %

Services de données à 348 kbits/s.

7 %

13 %

17 %

OBLIGATIONS DU CAHIER DES CHARGES DE SFR
(couverture en % de la population métropolitaine)

 

2003

2006

2009

Services de voix

75 %

98,9 %

99,3 %

Services de données à 144 kbits/s

75 %

98,9 %

99,3 %

Services de données à 348 kbits/s (en ascendant seulement)

71 %

97,5 %

98,2 %

Ces chiffres sont relativement peu ambitieux (17 % de la population en 2009 pour France Télécom, et 98,2 % de la population -soit environ 80 % du territoire- pour SFR en transmission ascendante seulement) pour le transport des données à plus haut débit, principal apport de l'UMTS par rapport aux réseaux GSM actuels.

En outre, votre commission craint que les opérateurs titulaires d'une licence de téléphonie de troisième génération cessent d'investir dans l'équipement de leur réseau GSM, pour accélérer artificiellement la translation de leur clientèle vers la troisième génération. L'échéance de 2006 pour le « basculement » d'un type de réseau sur l'autre semble raisonnable. Une échéance plus rapprochée apparaîtrait en revanche comme prématurée.

B. UN INÉGAL ACCÈS AU HAUT DÉBIT

L'accès au « haut débit » est devenu un atout d'attractivité économique décisif pour les territoires. Or, comme le confirment les travaux les plus récents sur ce sujet, et notamment un rapport du Conseil Economique et Social (de juin 2001) ou de l'Observatoire des télécommunications dans la ville (rapport de juin 2001), laissé à la seule dynamique du marché, l'essor du haut débit conduirait, à l'échéance de 2005, à une polarisation territoriale accrue , une part significative de la population (20 à 25 % selon les estimations) et des territoires n'ayant aucun accès au haut débit à des conditions économiquement viables.

Plusieurs leviers d'action existent pour lutter contre cette fracture numérique territoriale. Mais ils sont diversement exploités.

1. Les « infrastructures passives » des collectivités locales : une question enfin résolue

a) Un regrettable faux départ

Depuis plusieurs années, de nombreuses collectivités territoriales se sont trouvées confrontées à une absence d'offres permettant, pour les entreprises désireuses de s'implanter ou existantes, voire pour elles-mêmes, soit de réduire le prix des communications soit de répondre, dans des conditions raisonnables, aux besoins d'accès à des services de télécommunications à haut débit.

Aussi ont-elles pris des initiatives en matière d'équipement de leur territoire en infrastructures de télécommunications « passives » -infrastructures dites de « fibres noires »- installées par elles mais destinées à être exploitées par des opérateurs de télécommunications. Le principe de telles initiatives, reconnu légitime par la Commission européenne, le Conseil de la Concurrence et l'Autorité de régulation des télécommunications, avait d'ailleurs été avalisé par une conférence de presse du Premier ministre dès le 19 janvier 1999.

Afin de sécuriser juridiquement ces initiatives , qui n'étaient pas explicitement prévues par le code des collectivités locales, le Sénat avait, lors des débats sur le projet de loi d'aménagement du territoire en 1999, proposé un dispositif législatif consacrant et encadrant cette intervention -il était en particulier bien précisé que les collectivités ne pourraient remplir elles-mêmes les fonctions d'opérateur-. Les propositions, pourtant équilibrées, du Sénat se sont malheureusement heurtées, malgré le dépôt, par le Gouvernement, d'un amendement voisin, à l'hostilité de certains députés, l'Assemblée nationale adoptant finalement un texte si confus et restrictif que la nouvelle liberté offerte aux collectivités locales pouvait être considérée comme un faux semblant. Ainsi l'ART constatait-elle dans son rapport annuel de 1999 que « les débats qui ont précédé et suivi l'adoption de ce texte ont bien montré qu'il reflète encore une réticence de principe qui ne trouve pas nécessairement son origine dans le souci de la concurrence et de l'ouverture du marché. Paradoxalement la procédure définie par la loi pour mettre en oeuvre le principe affirmé risque ainsi d'apparaître aux élus soucieux de répondre aux besoins de leurs administrés comme une restriction du champ de leurs intervention s. C'est en tout état de cause ce qui ressort des propositions formulées en novembre 1999 par l'Avicam 26( * ) , le Sipperec 27( * ) et deux grandes agglomérations françaises. Leur objectif est de bénéficier d'un cadre souple leur permettant d'exercer leur mission d'aménagement du territoire en limitant au maximum le risque de recours contentieux. Ce dispositif, dont l'interprétation est complexe, mérite assurément d'être précisé, dans le souci d'apporter une visibilité et une sécurité juridiques plus grandes aux collectivités territoriales ».

Cette analyse confirmait largement ce que le Sénat avait annoncé et dénoncé dès l'adoption de ces dispositions par les députés.

L'article L.1511-6 du code général des collectivités territoriales prévoyait en effet : « la mise en oeuvre d'une procé dure » (non définie) « de publicité permettant de constater la carence et d'évaluer les besoins des opérateurs » et limitait à une période de huit ans la durée d'amortissement des investissements prise en compte pour évaluer le prix de la location (contre plus du double en général dans le secteur privé).

Se rangeant à cette analyse, le Gouvernement prévoyait d'ailleurs la modification de cet article dans le projet de loi sur la société de l'information, déposé en juin 2001 à l'Assemblée nationale, mais non encore inscrit à l'ordre du jour.

b) Une mesure finalement intégrée dans une loi « fourre-tout »

Changeant subitement son fusil d'épaule, le Gouvernement a finalement purement et simplement « importé », par amendement, ce dispositif législatif dans un texte « fourre-tout » intitulé « diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel » 28( * ) où on retrouve pêle-mêle le covoiturage, la convention UNEDIC, le fonds de réserve des retraites, le code de la mutualité, le régime des droits d'auteur, ainsi que diverses dispositions portant sur l'enseignement supérieur, la jeunesse et les sports.

Si votre commission se félicite de l'amélioration du dispositif qu'elle avait, quant à elle, préconisée depuis 1999, elle souhaite toutefois que la participation des collectivités locales au déploiement de infrastructures à haut débit, désormais reconnue par la loi, ne serve pas de prétexte à un transfert de charges vers ces dernières et à un désengagement des autres partenaires (opérateurs et, dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire, Etat).

Aucun recensement exhaustif des investissements réalisés par les collectivités locales en matière de télécommunications n'est disponible. La Caisse des Dépôts et Consignations a toutefois répertorié en juillet 2001 plus de 160 projets de collectivités locales destinés à favoriser le développement des réseaux numériques à haut débit en France dans les zones les moins bien desservies et les a répartis en 68 projets de construction d'infrastructures et 94 projets de service.

c) Une action « d'accompagnement » de l'Etat

Lors du CIADT précité du 9 juillet 2001, le Gouvernement a décidé de mettre en place un dispositif de soutien à ces projets territoriaux et mandaté en ce sens la Caisse des Dépôts et Consignations. Ce soutien se traduira par un « accompagnement » en investissement , sur les fonds propres de la Caisse à des dépôts et Consignations, à hauteur de 230 millions d'euros sur 5 ans. De plus, les prêts à taux préférentiel sur 30 ans peuvent être accordés aux collectivités locales, en cofinancement avec les établissements de crédit, à l'intérieur d'une enveloppe de 1,5 milliard d'euros. Par ailleurs, l'utilisation du réseau de transport d'électricité comme support d'infrastructures de télécommunications doit faire l'objet d'expérimentations.

Là encore, l'Etat n'intervient qu'en accompagnement des collectivités, pour créer un « effet de levier » de ses financements, à charge pour les collectivités de mobiliser les crédits complémentaires.

2. Le retard au démarrage de la « boucle locale radio »

L'accès à Internet à haut débit peut également se faire par l'installation de réseaux de « boucle locale radio » (BLR) utilisant la technologie hertzienne.

Le tableau suivant détaille les licences obtenues par chaque opérateur BLR :

LICENCES « BLR » PAR OPÉRATEURS ET PAR RÉGIONS

Nom du candidat

Licences obtenues

Belgacom France

9 licences : Auvergne, Bretagne, Champagne-Ardenne, Nord-Pas-de-Calais, Basse-Normandie, Franche-Comté, Haute-Normandie, Pays de la Loire, Picardie

BLR Services

11 licences : Alsace, Auvergne, Bourgogne, Centre, Corse, Languedoc-Roussillon, Limousin, Lorraine, Midi-Pyrénées, PACA, Rhône-Alpes

Broadnet France

15 licences : Alsace, Aquitaine, Bretagne, Centre, Corse, Ile-de-France, Languedoc-Roussillon, Lorraine, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Pays de la Loire, Picardie, Poitou-Charentes, PACA, Rhône-Alpes

Cegetel Caraïbes

2 licences : Guadeloupe, Martinique

Cegetel La Réunion

1 licence : La Réunion

FirstMark Communications

1 licence : Métropole

Fortel

1 licence : Métropole

LandTel France

7 licences : Aquitaine, Bourgogne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Ile-de-France, Limousin, Poitou-Charentes

XTS Network Caraïbes

3 licences : Guadeloupe, Guyane, Martinique

XTS Network Océan Indien

1 licence : La Réunion

Media Overseas

1 licence : Guyane

Source : ART

Mais l'ouverture des services de boucle locale radio au cours du premier semestre 2001 n'a concerné qu'un nombre limité d'opérateurs compte tenu de la forte dégradation des perspectives du secteur et du contexte financier qui a fortement handicapé les opérateurs. En effet, sur cette période, seuls FirstMark Communications, Belgacom, Altitude Telecom, BLR Services et Broadnet ont démarré leur activité. La défaillance d'actionnaires (retrait d'UPC du capital de Fortel, faillite de Teligent propriétaire à 40 % de BLR Services) ont fortement pesé sur les déploiements. Or, Fortel était titulaire d'une licence nationale et BLR Services était autorisé à développer son réseau dans 11 régions. Ces deux sociétés sont passées à présent sous le contrôle de LDCom et vendront désormais leurs services de boucle locale radio à d'autres opérateurs.

FirstMark Communications, qui détient une licence nationale, a développé son offre de BLR successivement à Nantes, Lyon, Strasbourg, en Seine Saint-Denis, dans les XVIIème et XIXème arrondissements de Paris, à Lille et à Marseille. Avant la fin de l'année 2001, FirstMark Communications devrait être présent dans 40 unités urbaines situées dans 18 régions. Belgacom a lancé son réseau de BLR dans le Nord et l'Ouest de la France, desservant ainsi 7 régions. L'Auvergne et la Franche-Comté devraient être concernées à leur tour en décembre prochain. Altitude Telecom s'est implanté rapidement en Haute et Basse Normandie. BLR services a démarré son activité à Lyon en avril 2001 et Broadnet a lancé ses services à Paris en juin dernier.

Ces plans de déploiement sont décevants par rapport aux espoirs suscités par la BCR, notamment pour les entreprises implantées dans les villes petites et moyennes.

3. Le déploiement de l'ADSL freiné par l'enlisement du dégroupage

L'« ADSL » 29( * ) est une technologie qui permet, au moyen d'un équipement complémentaire de cette infrastructure, d'avoir accès à Internet à haut débit sur le réseau téléphonique commuté.

Compte tenu du retard dans la mise en oeuvre du dégroupage, rappelé ci-dessus, le déploiement de l'ADSL sur le territoire est actuellement réalisé par un seul opérateur : France Télécom.

Au-delà des chiffres de couverture volontaristes annoncés par cet opérateur, une récente étude, dont les résultats sont repris dans le rapport précité du Conseil économique et social 30( * ) , apporte un éclairage plus réaliste et moins enthousiasmant sur la diffusion territoriale de ce service.

Cette étude, réalisée par le cabinet « Tactis », détaille par département la couverture potentielle de la population française en ADSL en mai 2001. Cette cartographie a été établie à partir des données fournies par France Télécom en janvier 2001, recoupées avec les chiffres du recensement de 1999. Elle tient compte des contraintes propres à l'ADSL et des paramètres qui déterminent sa diffusion (distance par rapport au répartiteur ; qualité du réseau ; diamètre des câbles en cuivre utilisés) qui amènent à considérer qu'une population déclarée couverte ne l'est en réalité qu'à 85 % environ.

Cette étude estime qu'en mai 2001, 22 millions de Français (soit 9 millions de foyers) peuvent réellement bénéficier de cette technologie.

Les départements de la région parisienne, de la région Rhône-Alpes et certains départements comme les Alpes maritimes sont les mieux couverts en pourcentage de population. Parmi les départements les plus mal desservis figurent notamment les Alpes de Haute Provence, l'Ariège, la Corrèze, la Haute-Loire, la Lozère et la Meuse.


Ce constat renforce encore la crainte du creusement du « fossé numérique » entre zones urbaines et zones faiblement peuplées.

Par ailleurs, si France Télécom annonce que 65 % de la population sera couverte fin 2001, la couverture ne représentera pas 65 % en termes de territoire, compte tenu du poids démographique des grandes villes.

Sur la proposition de son rapporteur pour avis, votre commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la poste et aux technologies de l'information dans le projet de loi de finances pour 2002.


1 Voir la définition au chapitre III du présent rapport

2 Loi portant diverses dispositions d'ordre social, économique et culturel et loi sur la sécurité quotidienne

3 Autorité de régulation des télécommunications.

4 Agence nationale des fréquences.

5 Union internationale des télécommunications

6 Union postale universelle

7 Direction générale de l'industrie, des technologies de l'information et des postes.

8 Chapitre 32-97, article 30

9 Il s'agit des crédits réellement notifiés aux attributaires

10 Groupement des écoles de télécommunications.

11 Livret d'épargne populaire.

12 Voir notamment : « Sauver La Poste », rapport d'information de M. Gérard Larcher, n° 42, Sénat 1996-1997.

13 Voir notamment les décisions 90/16 du 20 décembre 1989, Courrier rapide aux Pays Bas ; 90/456 du 1 er août 1990 Courrier rapide international en Espagne, l'arrêt du 12 février 1992 de la CJCE Pays Bas c/ Commission

14 CJCE 19 mai 1993, Paul Corbeau, aff 320/91

15 COM (91) 476 final

16 Voir sur ces points les rapports n°s 346 et 397 de votre rapporteur, au nom de la Commission des Affaires économiques, Sénat 1995-1996.

17 JO L 15 du 21.1.1998, p. 14

18 Loi d'orientation, d'aménagement et de développement durable du territoire du 25 juin 1999 ; loi autorisant la transposition des directives communautaires par ordonnance, projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier...

19 Sénat n° 42, 1996-1997.

20 Le rapport déposé au Parlement faisant le bilan de la couverture territoriale de la téléphonie mobile au titre de l'article L. 35-7 du code des postes et télécommunications, doit être complété d'une deuxième partie sur le service universel.

21 Il fut même un temps disponible sur le site Internet du Journal « Les Echos ».

22 Permettant un accès direct à l'abonné pour des opérateurs autres que France Télécom.

23 Et notamment le dépôt puis le retrait d'un amendement législatif du Gouvernement au projet de loi portant nouvelles régulations économiques, laissant finalement la place à la parution d'un décret.

24 www.ft.com.

25 Déclaration à l'Assemblée nationale le 19 octobre 2001.

26 Association des villes câblées

27 Syndicat intercommunal de la périphérie de Paris pour l'électricité et les réseaux de communication.

28 Loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001.

29 Asynchronous digital subscriber line.

30 « Hauts débits, mobiles : quelle couverture territoriale ? »


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