CONCLUSION

Les crédits relevant du nucléaire, de l'espace et des services communs bénéficieront en 2004 d'un niveau très satisfaisant, conforme pour la deuxième année consécutive aux prescriptions de la loi de programmation militaire.

La cohérence de la modernisation des forces nucléaires sera préservée. L'effort maintenu dans le domaine spatial assure l'arrivée sans retard d'une nouvelle génération de satellites plus performants. Une politique plus active de recherche est entreprise grâce à la mise au point de démonstrateurs préfigurant nos équipements futurs. Enfin, dans le cadre de la consolidation de la professionnalisation, le service de santé des armées commence désormais à recueillir l'attention qu'il mérite.

Après le changement de cap opéré l'an dernier, la deuxième étape du redressement des crédits d'équipement militaire pourra être réalisée en 2004. Ce rattrapage était indispensable pour retrouver le niveau de ressources compatible avec la réalisation du modèle d'armée défini pour 2015.

Pour cet ensemble de raisons, votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur les crédits de la défense pour 2004.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport pour avis lors de sa séance du 26 novembre 2004.

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Xavier de Villepin a souligné les difficultés que rencontre le Parlement pour mesurer la réalité de l'effort de recherche et développement, compte tenu de la multiplicité des modes de comptabilisation compliquant l'interprétation des données. Il lui a également paru souhaitable d'intégrer dans l'analyse l'effort de recherche conduit par les entreprises. M. Xavier de Villepin a ensuite évoqué la menace terroriste et la protection des populations face au risque biologique et chimique. Il s'est demandé dans quelle mesure le renforcement du budget de la défense permettrait de prendre en compte cette menace. Enfin, il s'est interrogé sur les évolutions de la politique américaine à l'égard du nucléaire militaire, évoquant notamment la mise au point d'armes de faible puissance. Il a demandé si les Etats-Unis demeuraient fermement engagés dans leur programme de simulation et si la coopération avec la France se poursuivait dans ce domaine.

M. Christian de La Malène, se référant à la faible participation européenne sur le programme Hélios II, s'est réjoui de constater que des accords de coopération avaient pu être conclus avec l'Italie et l'Allemagne. Approuvant les observations du rapporteur pour avis sur la dissuasion nucléaire, M. Christian de La Malène s'est interrogé sur la pertinence du modèle d'armée 2015 compte tenu des évolutions du contexte international et des menaces, en particulier du terrorisme. Il a estimé nécessaire d'approfondir les réflexions en ce domaine, afin de s'adapter en permanence aux évolutions du monde.

M. Didier Boulaud a indiqué que les membres du groupe socialiste n'approuveraient pas le budget de la défense pour 2004. Il a déploré le niveau insuffisant des crédits consacrés au domaine spatial, en soulignant qu'ils ne représenteraient que 3 % du budget d'équipement sur l'actuelle loi de programmation, contre 3,8 % lors de la précédente. Il a également jugé inquiétante la diminution de 6 % en 2004 des crédits d'études-amont. Il a constaté que le niveau très important des crédits de la dissuasion nucléaire, très fortement augmentés depuis trois ans, produisent un effet d'éviction au détriment d'autres actions indispensables, comme la recherche ou les programmes spatiaux. Soulignant que la progression des crédits de la dissuasion était liée à la modernisation de nos forces nucléaires, il a déploré qu'aucun débat préalable n'ait été conduit à ce sujet devant la représentation nationale. Il a de même jugé indispensable de débattre plus largement d'éventuelles évolutions de notre doctrine.

Mme Hélène Luc a précisé que le groupe communiste républicain et citoyen n'approuverait pas le budget de la défense, son augmentation, après celle intervenue en 2003, s'effectuant au détriment de la politique sociale, de l'éducation et de la recherche. Elle a en outre regretté que ce budget privilégie l'équipement au détriment des personnels. Elle s'est prononcée contre l'augmentation des crédits du nucléaire, estimant que la préservation de la paix dans le monde passait par une lutte contre les inégalités et l'aide au développement, et non par une course aux armes de destruction massive. Elle a enfin évoqué la restructuration de GIAT-Industries, regrettant que le ministre de la défense ait récemment refusé de recevoir une délégation de parlementaires concernés par ce dossier.

M. Jean-Yves Autexier a approuvé la position du rapporteur pour avis sur la dissuasion nucléaire et souligné la nécessité de préserver une posture de stricte suffisance constituant une garantie ultime de sécurité, grâce à la seule force indépendante en Europe. Il a estimé que les réponses au terrorisme étaient très largement autres que militaires, le développement de ce risque n'atténuant en rien les autres menaces, dont celle de la prolifération des armes de destruction massive, qui justifie le maintien d'une force de dissuasion. S'inquiétant de la multiplication des opérations extérieures dévoreuses de moyens, il a rappelé que la mission première de la défense était d'assurer la protection du territoire national et que la dissuasion jouait à ce titre un rôle irremplaçable. Soulignant la nécessité de garantir la crédibilité absolue de nos forces nucléaires, il s'est demandé si les moyens de simulation y contribueraient totalement. Constatant que le traité d'interdiction complète des essais nucléaires n'était pas entré en vigueur et que les Etats-Unis ne l'avaient pas ratifié, il s'est interrogé sur la fragilité de la position de la France, qui a supprimé ses moyens d'expérimentation et s'en est totalement remise à la simulation.

M. Jacques Peyrat a rappelé qu'il y a une quinzaine d'années déjà, les services de renseignement se plaignaient de l'insuffisance en personnels maîtrisant les langues utiles à leurs activités. Il a déploré que cette lacune n'ait pas été comblée, et plus généralement que les moyens des services de renseignement n'aient toujours pas été portés au niveau nécessaire, surtout dans le contexte de la montée de la menace terroriste.

M. André Dulait, président, a précisé à ce propos que l'effort de recrutement de locuteurs de langues rares impliquait en amont une prise en compte de ce besoin dans les formations universitaires.

M. Jean-Guy Branger a souligné la nécessité de procéder à une analyse plus approfondie des crédits de recherche et développement, auxquels des rapports spécifiques avaient pu être consacrés par le passé.

A la suite de ces observations, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- la loi de programmation a prévu un relèvement de 18 % de l'effort de recherche et de technologie de 2002 à 2008 ; il est vrai qu'il est difficile d'analyser l'évolution des crédits, compte tenu de l'hétérogénéité des agrégats retenus ; à la suite des interrogations émises par de nombreux membres de la commission, il serait nécessaire que le gouvernement puisse apporter des éclairages lors de la séance publique ;

- le risque d'attaques biologiques ou chimiques est pris en compte par le ministère de la défense essentiellement sous l'angle de la protection des forces déployées en opérations ; la protection des populations contre de telles attaques exige une attention beaucoup plus soutenue mais elle relève d'une approche interministérielle, coordonnée sous l'égide du secrétariat général de la défense nationale, et implique également le ministère de l'intérieur et celui de la santé ;

- les Etats-Unis engagent des études sur la mise au point d'armes nucléaires de faible puissance et à forte capacité de pénétration en vue de la destruction d'objectifs durcis et profondément enterrés ; ils poursuivent leur programme de simulation, sur lequel la coopération avec la France n'a pas été affectée, mais si la décision était prise de lancer le développement d'armes nouvelles, la reprise d'essais nucléaires pourrait être envisagée ;

- le recours aux moyens de simulation doit s'appuyer sur l'ensemble des données recueillies lors de la dernière campagne d'essais nucléaires réalisée par la France en 1995 ;

- les grandes lignes de la modernisation de nos forces nucléaires ont été définies en 1996 et débattues lors du vote de la loi de programmation militaire 1997-2002 ; elles n'ont pas été remises en cause par les gouvernements qui se sont succédé depuis lors ;

- il est vrai que le modèle d'armée 2015 a été défini en 1996 mais, d'une part, nombre d'analyses sur lesquelles il se fondait demeurent valables et, d'autre part, il fait l'objet d'adaptations continues ; la loi de programmation militaire 2003-2008 a ainsi intégré des compléments sur la sécurité intérieure, la défense antimissiles ou les capacités de frappe de précision à longue distance ; l'approfondissement de la réflexion stratégique demeure toutefois nécessaire ; elle pourrait passer par un nouveau Livre blanc et s'appuyer sur la stratégie européenne de sécurité élaborée sous l'égide du Haut représentant pour la politique européenne de sécurité commune, M. Solana ;

- à la difficulté pour les services de renseignement de recruter des spécialistes en langues rares s'ajoute celle résultant du déplacement géographique de leurs centres d'intérêt ; l'Afghanistan, le Pakistan ou les pays situés à leur périphérie ne faisaient pas l'objet de la même priorité il y a une dizaine d'années ; le renforcement des moyens humains et techniques des services de renseignement doit être davantage pris en compte.

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La commission a ensuite procédé au vote sur l'ensemble des crédits de la défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 2004.

M. Serge Vinçon, s'exprimant au nom du groupe UMP, a qualifié de courageux le budget de la défense pour 2004, dans la mesure où il permet de respecter pour la deuxième année consécutive la loi de programmation militaire, dans un contexte économique et financier particulièrement difficile. Il a considéré que le redressement des crédits de la défense engagé en 2003 et confirmé en 2004 était indispensable compte tenu de l'érosion qui avait marqué la période précédente et qui s'était traduite par une détérioration du niveau opérationnel des forces armées. S'agissant de la dissuasion nucléaire, il a estimé que sa modernisation était nécessaire et que dans l'environnement international actuel, il ne fallait pas porter atteinte à une fonction de notre outil de défense qui touche à l'essentiel. Au-delà de l'effort réalisé sur les équipements classiques, il s'est félicité de l'entrée en service en 2004 de deux nouveaux satellites, Syracuse III et Hélios II, qui amélioreront très significativement nos capacités. Il a souligné la contradiction consistant à contester à la fois la restructuration de certaines entreprises de défense et la hausse du budget d'équipement, qui se traduit pour ces mêmes entreprises par des commandes supplémentaires. En conclusion, il a indiqué que le groupe UMP approuvait le budget de la défense pour 2004.

La commission, à sa majorité, a alors émis un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi de finances 2004.

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