ARTICLE 10

Harmonisation du statut économique et fiscal des entreprises équestres

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser la nature du statut économique et fiscal des entreprises équestres dans le sens d'une simplification et d'une harmonisation avec le régime agricole.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN STATUT ÉCONOMIQUE ET FISCAL DES ENTREPRISES ÉQUESTRES CONDAMNÉ À ÉVOLUER

Les entreprises équestres sont soumises à des régimes différents sur le plan social, fiscal et économique.

A cet égard, lors de l'examen du présent article par l'Assemblée nationale, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a indiqué qu'« aujourd'hui, la situation est très complexe car les entraîneurs relèvent de régimes différents. Sur le plan social, leurs activités sont reconnues comme des activités agricoles et relèvent de la MSA 82 ( * ) . Sur le plan fiscal, ces activités génèrent - ou ne génèrent pas - des bénéfices agricoles suivant la proportion de chevaux issus de leur élevage. Sur le plan économique, seul l'élevage est considéré comme une activité agricole. Nous sommes dans un embrouillamini et une balkanisation totale de leur statut fiscal et social ».

En outre, avant l'entrée en vigueur de la loi de finances initiale pour 2004 83 ( * ) , la situation des éleveurs-entraîneurs était particulièrement complexe car ceux-ci étaient, en application de l'instruction fiscale du 4 juillet 2000, soumis au régime des bénéfices agricoles pour leurs activités d'élevage, tandis qu'ils restaient soumis au régime des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux pour leurs activités d'entraînement.

L'exposé des motifs du présent article relève, à cet égard, que cette situation était « source d'incompréhension et d'insécurité ».

En outre, il convient de souligner que le cheval est une production agricole où l'éleveur maîtrise encore l'amélioration génétique de son espèce. Les courses et les compétitions équestres sont des épreuves zootechniques qui permettent de sélectionner les futurs reproducteurs et de tester leurs produits. Pour cela, comme le souligne l'exposé des motifs du présent projet de loi, « le choix du statut agricole comme statut unique pour l'ensemble des activités de valorisation des équidés domestiques semble légitime ».

La filière cheval en quelques chiffres en 2004

* 27.700 chevaux de courses à l'entraînement (10.900 au galop / 16.800 au trot) ;

* 2.800 entraîneurs de chevaux de courses (1.000 au galop / 1.800 au trot) ;

* 5.390 centres équestres ;

* 1.800 fermes et gîtes équestres ;

* 447.000 licenciés à la fédération française d'équitation ;

* 53.800 emplois générés par les activités liées au cheval.

B. UNE PREMIÈRE ÉTAPE FISCALE AVEC LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2004

1. La réforme du statut fiscal des entreprises équestres

L'article 22 de la loi de finances initiale pour 2004 précitée, introduit à l'initiative de votre commission des finances, a procédé à la réforme du statut fiscal des entreprises équestres, en modifiant l'article 63 du code général des impôts afin de préciser que sont considérés « comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus qui proviennent des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, ainsi que ceux provenant de l'exploitation d'équidés adultes dans le cadre de loisirs à l'exclusion de ceux provenant des activités du spectacle ».

Cet article a, en outre, introduit un nouvel article 69 E au sein du code général des impôts afin de préciser que les exploitants qui exercent les activités précédemment mentionnées à l'article 63 du même code, sont soumis à un régime réel d'imposition (normal ou simplifié). En effet, le forfait agricole étant calculé par rapport à un bénéfice unitaire moyen fixé collectivement, il eût été matériellement impossible de calculer un bénéfice forfaitaire pour les exploitants nouvellement soumis, à compter du 1 er janvier 2004, au régime des bénéfices agricoles.

S'agissant du champ d'application de cette réforme du statut fiscal des entreprises équestres, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a indiqué, dans une réponse à une question écrite de notre collègue député Christian Jeanjean datée du 24 novembre 2003 84 ( * ) , que « les métiers liés à la valorisation du cheval seront dans le champ de l'activité agricole. Cependant, il n'est pas envisagé de dépasser cette définition élargie. Le risque serait en effet de rendre le lien avec l'agriculture excessivement ténu et de soumettre certaines activités à des règles inadaptées. La profession de marchand de cheval restera donc en dehors du champ de définition des activités agricoles ».

L'article 22 de la loi de finances pour 2004 précitée, modifiant les dispositions de l'article 63 du code général des impôts, inclut donc, dans son champ d'application, les centres équestres pour leur activité de préparation et d'entraînement des équidés (chiffre d'affaires provenant de l'enseignement, des promenades et de la prise en pension...) et exclut les propriétaires sans sol, intervenants ou non intervenants .

2. La mise en place d'une compensation aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) des conséquences de l'évolution du régime fiscal des entreprises équestres

L'évolution du statut fiscal des entreprises équestres, aussi souhaitable soit-elle, n'est pas sans conséquence sur les finances des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre sur le territoire desquels sont établies les entreprises équestres. En effet, la soumission au régime des bénéfices agricoles emporte automatiquement une exonération de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties.

L'article 22 de la loi de finances initiale pour 2004 précitée prévoit donc les modalités de la compensation financière aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) des conséquences de l'évolution du régime fiscal des entreprises équestres. Une telle compensation est indispensable car les pertes de recettes subies par les collectivités territoriales et les EPCI ne proviendraient pas de décisions de leurs assemblées délibérantes mais seraient un « effet secondaire » d'une réforme voulue par l'Etat.

Cet article précise, en outre, que les nouvelles dispositions de l'article 63 du code général des impôts s'appliquent pour la détermination des résultats des exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2004 mais qu'elles n'emportent d'effet, en matière d'impôts directs locaux, qu'à compter des impositions établies au titre de l'année 2005.

A compter de 2005 et jusqu'en 2009, l'Etat compense, chaque année, la perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe professionnelle résultant de la réforme du statut fiscal des entreprises équestres. Cette compensation est dégressive entre 2005 et 2009, et nulle à compter de 2009.

3. L'application d'un taux réduit de TVA aux activités des centres équestres depuis le 1 er janvier 2004

Dans un communiqué de presse daté du 22 janvier 2004, M. Alain Lambert, alors ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, a indiqué que seraient soumises au taux réduit de TVA agricole, dès le 1 er janvier 2004, celles des activités de préparation, d'entraînement et d'exploitation des équidés domestiques, offertes par les centres équestres. Sont notamment concernées leurs activités d'enseignement, de prise en pension ou de location de chevaux pour des promenades. En revanche, les activités qui conservent un caractère commercial, telles les activités de restauration ou d'hébergement des personnes, ne sont pas concernées.

Les cours ou leçons d'équitation demeurent exonérés en application de l'article L. 261-4 du code général des impôts lorsqu'ils sont dispensés sans le concours de salariés, par une personne physique rémunérée directement par ses élèves et qui ne dispose pas, pour l'exercice de son activité, de moyens d'exploitation autres que son savoir-faire.

Cette évolution attendue par les professionnels permet, en généralisant l'application du taux réduit de la TVA agricole aux différents intervenants de ce secteur d'activité, de créer les conditions d'un développement harmonisé de la filière et devrait faire prochainement l'objet de précisions par voie d'instruction administrative.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

A. LA CONFIRMATION DU STATUT FISCAL DES ENTREPRISES ÉQUESTRES

1. La rédaction initiale du présent article

Dans sa rédaction initiale, proposée avant l'adoption de la loi de finances initiale pour 2004 précitée, le II du présent article prévoyait de compléter l'article 63 du code général des impôts par une phrase précisant que « sont aussi considérées comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus qui proviennent des activités de préparation, d'entraînement et d'exploitation des équidés domestiques à l'exclusion de ceux provenant des activités du spectacle ».

2. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale

En raison de l'antériorité de l'adoption de l'article 22 de la loi de finances initiale pour 2004 précitée, l'Assemblée nationale a jugé nécessaire d'harmoniser les dispositions du présent article avec celles adoptées en loi de finances initiale pour 2004.

Toutefois, elle a adopté un amendement présenté par notre collègue député Jean-Claude Lemoine, sous-amendé par le gouvernement, visant à modifier la rédaction de l'article 63 du code général des impôts résultant des dispositions de l'article 22 de la loi de finances initiale pour 2004 précitée.

Désormais, l'article 63 du code général des impôts préciserait que sont considérés comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus qui proviennent des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation dans les activités autres que celles du spectacle , non plus les revenus qui proviennent des « activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, ainsi que ceux provenant de l'exploitation d'équidés adultes dans le cadre de loisirs », cette dernière expression étant trop imprécise.

Les activités visées recouvrent donc les activités d'élevage, d'entraînement pour les sports équestres ou les courses, de dressage de chevaux, d'utilisation de chevaux pour le débardage du bois ou la traction hippomobile.

A cet égard, lors de l'examen du présent article à l'Assemblée nationale, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a indiqué que « la volonté du gouvernement est de simplifier et d'harmoniser les conditions d'exercice des activités d'entraînement des chevaux de course et non de modifier le statut des propriétaires des chevaux de course, qui conserveront leur statut actuel ».

B. L'HARMONISATION DU STATUT ÉCONOMIQUE DES ENTREPRISES ÉQUESTRES

1. La rédaction initiale du présent article

Dans sa rédaction initiale, proposée avant l'adoption de la loi de finances initiale pour 2004 précitée, le I du présent article prévoyait de compléter l'article L. 311-1 du code rural par une phrase précisant que sont réputées agricoles les activités de préparation, d'entraînement et d'exploitation des équidés domestiques dans des activités autres que celles du spectacle.

2. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale

Dans un souci d'harmonisation avec les dispositions de l'article 63 du code général des impôts issues de l'adoption de l'article 22 de la loi de finances initiale pour 2004, modifiées par l'amendement précité de notre collègue député Jean-Claude Lemoine, sous-amendé par le gouvernement, l'Assemblée nationale a modifié la rédaction initiale du I du présent article afin de préciser, désormais, que sont réputées agricoles « les activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l'exclusion des activités du spectacle ».

Les activités visées recouvrent donc les activités d'élevage, d'entraînement pour les sports équestres ou les courses, de dressage de chevaux, d'utilisation de chevaux pour le débardage du bois ou la traction hippomobile.

C. L'ENTRÉE EN VIGUEUR DES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Le III du présent article prévoit que les dispositions du II s'appliquent pour la détermination des résultats des exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2004.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur pour avis estime que la réforme du statut économique et fiscal des entreprises équestres était nécessaire afin de permettre à cette profession d'accéder à l'harmonisation des conditions économiques, fiscales et sociales de l'exercice de ses activités . Les entraîneurs de chevaux de course et les centres équestres aujourd'hui présents sur le territoire français devraient pouvoir bénéficier, grâce aux dispositions du présent article, de la plupart des aides agricoles, notamment en matière d'installation, et accéder à la propriété foncière. Le régime fiscal des bénéfices agricoles permettra à ces exploitants d'être exonérés de taxe professionnelle ainsi que des parts régionales et départementales de la taxe sur les propriétés foncières bâties.

Votre rapporteur pour avis souhaite, en outre, rappeler que l'article 22 de la loi de finances initiale pour 2004 précitée, introduit sous forme d'article additionnel à l'initiative de votre commission des finances, avait déjà opéré la réforme du statut fiscal des entreprises équestres, tout en prévoyant une compensation aux collectivités territoriales des conséquences financières de cette réforme, en termes de pertes de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties.

A cet égard, la rédaction du quatrième alinéa de l'article 63 du code général des impôts issue du vote de la loi de finances initiale pour 2004 précitée est apparue trop imprécise aux yeux de nos collègues députés et a donc fait l'objet d'une modification par le présent article. Votre rapporteur pour avis approuve ces modifications.

Toutefois, il apparaît nécessaire de préciser dans le présent article qu'un mécanisme de compensation aux collectivités territoriales existe en vertu des dispositions de l'article 22 de la loi de finances initiale pour 2004 précitée et qu'il s'appliquera à compter des impositions établies au titre de l'année 2005. Votre rapporteur pour avis vous proposera un amendement en ce sens .

D'après les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, le coût de cette réforme devrait s'élever à quelques millions d'euros pour compenser l'exonération de taxe professionnelle, tandis que les aides agricoles supplémentaires devraient représenter près de 2 millions d'euros.

Décision de la commission : votre commission émet un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

* 82 Mutualité sociale agricole.

* 83 Loi n° 2003-1311 du 31 décembre 2003.

* 84 Réponse publiée dans le Journal officiel « Questions » de l'Assemblée nationale, 23 mars 2004, page 2294.

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