2. L'évaluation des pratiques professionnelles médicales
L'article 8 du présent projet de loi, dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, vise à insérer dans le code de la sécurité sociale un nouvel article L. 164-2-1 obligeant les médecins exerçant à titre libéral ou exerçant dans un établissement de santé ou dans un centre de santé à participer régulièrement à des actions d'évaluation et d'amélioration de la qualité de leur pratique professionnelle dans le cadre de dispositifs prévus à l'article L. 1414-3 du code de la santé publique, à savoir les actions mises en oeuvre par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) avec la coopération des Unions régionales des médecins libéraux (URML), ou de dispositifs agréés dans des condition fixées par décret.
Lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a souligné que « l'évaluation des pratiques professionnelles est une des conditions de l'amélioration de la qualité des soins délivrés aux patients. Il est donc proposé de rendre obligatoire cette formation médicale continue ».
Cet article ne précise toutefois pas la périodicité à laquelle ces médecins sont tenus de participer à ces actions d'évaluation et d'amélioration de la qualité de leur pratique professionnelle. Il ne prévoit pas non plus de mécanisme de sanction en cas de non-participation des médecins à ces actions. Il ne comporte donc aucune dimension contraignante susceptible de permettre un réel développement de cette évaluation des pratiques professionnelles médicales .
A cet égard, le ministre de la santé et de la protection sociale a précisé lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale : « le dispositif ne prévoit pas de sanction directe si l'obligation n'est pas respectée. Toutefois, les sanctions prévues par l'article 13 du projet de loi pourraient théoriquement être utilisées. Par ailleurs, l'article 9 dispose que les caisses pourront informer les assurés sur le respect par leurs médecins de leurs obligations d'évaluation ».
Les modalités actuelles d'évaluation des pratiques professionnelles
L'évaluation des pratiques professionnelles médicales peut être individuelle ou collective.
Les Unions régionales des médecins libéraux (URML) sont des acteurs de l'évaluation des comportements et pratiques professionnelles. Leurs missions ont été définies par la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993 relatives aux relations entre les professions de santé et l'assurance maladie. L'ordonnance n° 344-96 du 24 avril 1996 et le décret n° 99-1130 du 28 décembre 1999 relatif à l'évaluation des pratiques professionnelles et à l'analyse de l'évolution des dépenses médicales confirment et précisent l'organisation locale de l'évaluation des pratiques médicales.
Selon les termes de ce décret, l'évaluation individuelle des pratiques professionnelles vise à améliorer la qualité des soins en permettant à chaque praticien de disposer d'une appréciation et de recommandations formulées par ses pairs, sur la qualité de ses pratiques en matière de prévention, de diagnostic et de thérapeutique. Dans cette perspective, elle permet de promouvoir le respect de la plus stricte économie compatible avec la qualité et l'efficacité des soins. Dans ce cadre, un médecin volontaire est visité par un ou deux confrères évaluateurs.
L'évaluation collective des pratiques vise, quant à elle, à améliorer la qualité des soins en permettant à chaque praticien de confronter ses pratiques à celles de ses confrères ou aux référentiels des pratiques élaborées ou validées par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES). Les dossiers anonymisés des patients sont étudiés par un groupe d'évaluateurs.
Les acteurs de l'évaluation des pratiques sont nombreux : l'ANAES et les URML jouent un rôle central mais les sociétés savantes, les syndicats et l'Ordre des médecins participent également à ce processus.
Il n'existe toutefois aucune articulation formalisée entre ces procédures d'évaluation et la formation continue des médecins.
Les médecins sont seulement tenus de se former dans le cadre de la formation professionnelle continue prévue par l'article L. 4133-1 du code de la santé publique actuellement en cours de modification par l'article 51 du projet de loi de santé publique.
Le rythme de l'évaluation des pratiques professionnelles médicales est aujourd'hui particulièrement lent. Si les URML et l'ANAES se sont engagées à évaluer les pratiques professionnelles de 10.000 médecins libéraux d'ici à moins de deux ans, la Cour des comptes ne faisait état, en mars 2003, que de moins de 180 médecins évalués.
En outre, lors de l'examen du présent projet de loi à l'Assemblée nationale, M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a indiqué que le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie avait souligné que le dispositif d'évaluation des pratiques n'avait fait pas fait l'objet d'une mise en oeuvre généralisée. Il a précisé qu'entre le lancement du processus et la fin de décembre 2003, 281 médecins évaluateurs avaient été habilités par l'ANAES, dont l'objectif est d'en habiliter 169 de plus au titre de 2004. A ce jour, 500 médecins ont été évalués ou sont en cours d'évaluation.