CHAPITRE TROIS

L'AMÉLIORATION INCONTOURNABLE DE LA GOUVERNANCE DU SYSTÈME DE SANTÉ ET DE LA QUALITÉ DE L'OFFRE DE SOINS

I. LA RÉFORME DE L'ORGANISATION DE L'ASSURANCE MALADIE

A. LA CRÉATION DE LA HAUTE AUTORITÉ DE SANTÉ (HAS)

L'article 19 du présent projet de loi, qui vise à créer la Haute autorité de santé, autorité indépendante à compétence scientifique, est le premier article du titre II du présent projet de loi contenant les « dispositions relatives à l'organisation de l'assurance maladie ».

La création de la Haute autorité de santé (HAS) constitue en effet un élément central de la nouvelle organisation institutionnelle de l'assurance maladie et de la réforme du pilotage de notre système de santé proposée par le gouvernement.

Le I de l'article 19 du présent projet de loi vise à insérer, après le chapitre 1 er du titre IV du livre 1 er du code de la sécurité sociale, un chapitre 1 er bis composé de huit nouveaux articles L. 161-37 à L. 161-44.

1. Statut et missions de la nouvelle HAS

a) Le statut juridique de la HAS

La rédaction proposée par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-37 dispose que la Haute autorité de santé est une autorité publique indépendante à caractère scientifique dotée de la personnalité morale .

La notion d'autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale est issue de la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière dont les dispositions du chapitre 1 er du titre 1 er créent l'Autorité des marchés financiers définie à l'article L. 621-1 du code monétaire et financier, comme une « autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale ».

Le statut d'autorité publique indépendante permet donc à la Haute autorité de santé d'être dotée de la personnalité morale et de disposer d'une réelle autonomie fonctionnelle et financière.

En outre, comme l'ensemble des autorités administratives indépendantes (AAI), la HAS constitue un organisme spécialisé placé en dehors des structures administratives traditionnelles et non soumis à un pouvoir hiérarchique. En effet, selon le rapport public du Conseil d'Etat de 2001 consacré aux autorités administratives indépendantes, les AAI peuvent être définies comme des organismes administratifs, qui agissent au nom de l'Etat et disposent d'un réel pouvoir, sans pour autant relever de l'autorité du gouvernement.

b) Les missions de la HAS

La rédaction proposée pour le nouvel article L. 161-37 du code de la sécurité sociale précise que la Haute autorité de santé est chargée de deux missions :

- procéder à l'évaluation périodique du service attendu des produits , actes ou prestations de santé et du service qu'ils rendent, et contribuer par ses avis à l'élaboration des décisions relatives à l'inscription, au remboursement et à la prise en charge par l'assurance maladie des produits, actes ou prestations de santé ainsi qu'aux conditions particulières de prise en charge des soins dispensés aux personnes atteintes d'une affection de longue durée ;

- veiller à l'élaboration et à la diffusion des guides de bon usage des soins ou de bonne pratique, et contribuer à l'information des professionnels de santé et du public dans ces domaines.

D'après l'exposé des motifs de cet article, « l'action de la Haute autorité permettra ainsi de généraliser un dispositif d'évaluation qui n'existe en pratique aujourd'hui que pour le médicament et les dispositifs médicaux ».

La HAS devra ainsi, par le biais de son expertise scientifique indépendante, éclairer les choix du pouvoir réglementaire dans le domaine du remboursement et veiller à la diffusion de référentiels directement utilisables par les professionnels de santé dans le cadre de leur pratique quotidienne.

Ainsi que l'a précisé M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, la HAS ne se verra pas confier de pouvoirs de décision mais devra « donner son avis sur l'utilité médicale des produits et des actes qui font une demande d'admission au remboursement. Après, l'Etat reste le garant de la décision finale en matière de définition du périmètre remboursable ».

En outre, le quatrième alinéa du texte proposé par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-37 du code de la sécurité sociale dispose que, dans l'exercice de ses missions, la Haute autorité tient compte des objectifs pluriannuels de la politique de santé publique. Suite à l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement de la commission spéciale avec l'avis favorable du gouvernement, cet alinéa ne mentionne plus « le cadrage pluriannuel des dépenses d'assurance maladie ». En effet, comme l'a souligné notre collègue député Yves Bur, président de la commission spéciale, il s'agit « d'affirmer que les décisions concernant le niveau de remboursement doivent rester strictement une prérogative de l'Etat. La Haute autorité doit rester une instance scientifique. C'est pourquoi nous proposons de supprimer toute référence au cadrage pluriannuel des dépenses d'assurance maladie ».

L'Assemblée nationale a également adopté un amendement de la commission spéciale avec l'avis favorable du gouvernement visant à préciser que la Haute autorité établit un rapport annuel d'activité adressé au Parlement et au gouvernement avant le 1 er juillet, qui porte notamment sur les travaux des commissions spécialisées de la Haute autorité ainsi que sur les actions d'information mises en oeuvre par la HAS. Ainsi que l'a souligné notre collègue député Yves Bur, président de la commission spéciale, « ce rapport remplacera deux autres rapports d'activité, celui de la commission de la transparence et celui de la commission d'évaluation des produits et prestations ».

Enfin, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de la commission spéciale avec l'avis favorable du gouvernement précisant que les décisions et communications de la HAS sont transmises sans délai à la Conférence nationale de santé. Il s'agit par là d'assurer le partage des travaux de la Haute autorité dans un souci de démocratie et de transparence .

2. L'exercice de ses compétences par la nouvelle HAS

La rédaction proposée par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-38 du code de la sécurité sociale dispose que la HAS peut procéder, à tout moment, à l'évaluation du service attendu d'un produit, d'un acte ou d'une prestation de santé ou du service qu'ils rendent.

La HAS peut également être consultée, notamment par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) grâce à un amendement de la commission spéciale adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du gouvernement, sur le bien-fondé et les conditions de remboursement d'un ensemble de soins ou d'une catégorie de produits ou prestations, et, le cas échéant, des protocoles de soins les associant, cette dernière référence résultant là encore d'un amendement proposé par la commission spéciale et adopté avec l'avis favorable du gouvernement.

Afin d'exercer au mieux ses compétences, il est également précisé que la HAS peut demander aux entreprises, établissements, organismes et professionnels concernés de lui transmettre toutes les informations nécessaires, après les avoir rendues anonymes.

En outre, sans préjudice des mesures prises par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) dans le cadre de ses missions de sécurité sanitaire, la HAS fixe les orientations en vue de l'élaboration et de la diffusions des recommandations de bonne pratique de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) et de l'AFSSAPS.

Pour lui permettre d'exercer pleinement ses missions, il est proposé de permettre à la HAS :

- de saisir l'AFSSAPS de toute demande d'examen de la publicité pour un produit de santé diffusée auprès des professions de santé ;

- de disposer des informations transmises par les caisses d'assurance maladie et l'Institut des données de santé, créé par l'article 35 du présent projet de loi, après les avoir rendues anonymes et dans le respect des règles relatives à la transmission et au traitement des données à caractère personnel.

Par ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 38 ( * ) avait créé un Fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique (FOPIM) à destination des professionnels de santé. Ce fonds est actuellement géré par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS).

En application de l'article 4001-1 du code de la santé publique, ce fonds finance ou participe au financement d'actions d'information et de communication en matière de bon usage des produits de santé et de stratégie thérapeutique, notamment de prescription et de dispensation médicamenteuse.

Ses ressources sont constituées par une fraction de la contribution des entreprises de préparation de médicaments prévue aux articles L. 245-1 à L. 245-6 du code de la sécurité sociale, déterminée par arrêté dans la limite d'un plafond de 10 %.

Dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2003, la Cour des comptes avait relevé que les actions visant à rationaliser les prescriptions par la formation et l'information demeuraient limitées et que le FOPIM n'avait pas encore réellement commencé à fonctionner.

L'article 20 du présent projet de loi propose la suppression des dispositions du code de la sécurité sociale relatives au FOPIM « à compter d'une date fixée par décret en Conseil d'Etat et au plus tard le 1 er janvier 2005 ». Il est précisé qu'à compter de cette date, la Haute autorité de santé succède à l'AFSSAPS dans ses droits et obligations au titre de ce fonds.Cette évolution paraît cohérente avec les dispositions de l'article 19 du présent projet de loi, qui confie à la Haute autorité de santé la mission de veiller à l'élaboration des guides de bon usage des soins ou de bonne pratique, de procéder à leur diffusion et de contribuer à l'information des professionnels de santé et du public dans ces domaines.

3. L'organisation interne de la nouvelle HAS

La rédaction proposée par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-39 du code de la sécurité sociale dispose que la HAS comprend un collège et des commissions spécialisées présidées par un membre du collège auxquelles elle peut déléguer certaines de ses attributions.

a) Les commissions spécialisées de la HAS

La HAS comprend des commissions spécialisées présidées par un membre du collège et auxquelles certaines de ses missions peuvent être déléguées. Ces commissions sont :

- la commission mentionnée à l'article L. 5123-3 du code de la santé publique, à savoir la commission chargée d'établir la liste des produits agréés, c'est-à-dire la liste des produits utilisés par les collectivités publiques et qui sont admis au remboursement ;

- la commission mentionnée à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, à savoir la commission d'évaluation des produits et prestations, « dont le secrétariat est assuré par l'AFSSAPS » dans la rédaction actuelle des dispositions du code de la sécurité sociale mais qui devrait être transféré à la HAS en vertu des dispositions de l'article 20 du présent projet de loi ;

- les autres commissions créées par la haute autorité, qui en fixe la composition et les règles de fonctionnement.

b) La composition du collège de la HAS
(1) Le mode de désignation des membres du collège

La rédaction proposée pour le nouvel article L. 161-40 du code de la sécurité sociale dispose que le collège de la HAS sera composé de huit membres choisis en raison de leurs qualifications et de leur expérience dans les domaines de compétence de la Haute autorité.

Le mode de désignation des membres du collège répond à un souci d'indépendance et d'impartialité. Ainsi, deux membres seront désignés par le Président de la République, deux par le Président du Sénat, deux par le Président de l'Assemblée nationale, deux par le président du Conseil économique et social.

Ces membres seront nommés par décret du Président de la République. Le président du collège sera nommé dans les mêmes conditions parmi ses membres.

(2) La durée du mandat des membres du collège

Il est précisé que la durée du mandat des membres du collège est de six ans, renouvelable une fois.

En cas de vacance d'un siège du collège pour quelque cause que ce soit, il sera procédé à son remplacement pour la durée du mandat à courir. Un mandat exercé pendant moins de deux ans ne sera pas pris en compte pour l'application de cette règle de renouvellement.

Le collège sera renouvelé par moitié tous les trois ans.

En outre, le II de l'article 19 du présent projet de loi précise que lors de la première constitution de la Haute autorité de santé, sont désignés par tirage au sort, à l'exception du président, quatre membres dont les mandats prendront fin à l'issue d'un délai de trois ans.

c) Les services administratifs de la HAS

La rédaction proposée par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-41 du code de la sécurité sociale prévoit que la HAS disposera de services placés sous l'autorité d'un directeur nommé, après avis du collège, par le président de celui-ci.

Il est également prévu que sur proposition du directeur, le collège fixe le règlement intérieur des services et le cadre général des rémunérations applicables au personnel des services de la haute autorité. En outre, le président du collège représente la Haute autorité en justice et dans tous les actes de la vie civile. Il peut donner mandat à cet effet au directeur.

Le personnel de la HAS pourra être composé d'agents contractuels de droit public, de salariés de droit privé ainsi que d'agents de droit privé régis soit par les conventions collectives applicables au personnel des organismes de sécurité sociale, soit par un statut fixé par décret. En outre, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, des agents publics pourront être placés auprès de la Haute autorité dans une position prévue par le statut qui les régit.

Par ailleurs, il est précisé que les dispositions du code du travail concernant les délégués du personnel, l'exercice du droit syndical, les comités d'entreprise et les comités d'hygiène et de sécurité s'appliquent au personnel de la Haute autorité mais pourront être adaptées par décret en Conseil d'Etat, dès lors que le requièrent les conditions de travail spécifiques à la HAS et les différentes catégories de personnel qu'elle emploie.

d) Les règles déontologiques applicables aux membres et au personnel de la HAS

La rédaction proposée par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-42 du code de la sécurité sociale prévoit que les membres de la HAS, les personnes qui apportent leur concours ou qui collaborent occasionnellement à ses travaux ainsi que le personnel de ses services sont soumis aux règles déontologiques strictes édictées par le code de la santé publique.

Ces règles, définies par l'article L. 5323-4 du code précité, portent notamment sur le secret et la discrétion professionnels, l'interdiction de traiter une question dans laquelle ils auraient un intérêt direct ou indirect ou encore, à leur entrée en fonction, l'établissement d'une déclaration faisant état de leurs relations avec les entreprises ou établissements donc les produits entrent dans le champ de compétence de la Haute autorité.

Toutefois, ces dispositions peuvent faire l'objet, par décret en Conseil d'Etat, d'adaptations rendues nécessaires par les missions, l'organisation ou le fonctionnement de la Haute autorité.

4. Le principe d'autonomie financière de la nouvelle HAS

La rédaction proposée par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-43 du code de la sécurité sociale institue le principe d'autonomie financière de la HAS et définit les ressources de son budget, arrêté par le collège sur proposition du directeur.

Il est précisé que les ressources de la Haute autorité seront constituées notamment par :

- des subventions de l'Etat ;

- une dotation globale versée par les organismes d'assurance maladie dans des conditions prévues par l'article L. 174-2 du code de la sécurité sociale ;

- le produit des redevances pour services rendus, dont les montants sont déterminés sur proposition du directeur par le collège ;

- une fraction du 10 % du produit des contributions des entreprises de préparation de médicaments et des fabricants ou distributeurs de dispositifs médicaux, prévues aux articles L. 245-1 à L. 245-6 du code de la sécurité sociale ;

- le montant des taxes d'inscription au remboursement des médicaments et des dispositifs médicaux, prévue par les articles L. 5123-5 et L. 5211-5 du code de la santé publique ;

- des produits divers, des dons et legs.

5. Les conditions d'application

La rédaction proposée par l'article 19 du présent projet de loi pour le nouvel article L. 161-44 du code de la sécurité sociale prévoit que les modalités d'application des dispositions relatives à la HAS seront fixées par décret en Conseil d'Etat, notamment les conditions dans lesquelles la HAS procède aux évaluations et émet les avis mentionnés à l'article L. 161-37 ainsi que les critères d'évaluation des produits, actes ou prestations de santé.

6. Un outil privilégié de la nouvelle organisation du système de soins

a) Une institution recommandée par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie

Préconisée par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ainsi que la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie, la création de la Haute autorité de santé consacre la nécessité d'une institution indispensable à l'amélioration de la qualité des soins.

(1) Les lacunes actuelles en matière d'évaluation médicale des produits et actes médicaux inscrits au remboursement d'une part, de diffusion des référentiels médicaux et des recommandations de bonnes pratiques, d'autre part

La définition d'admission au remboursement des médicaments, dispositifs médicaux, actes de biologie médicale ou actes professionnels relève aujourd'hui des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale .

S'agissant des médicaments, la liste des spécialités remboursables est arrêtée après avis de la commission de la transparence en application de l'article R. 163-4 du code de la sécurité sociale. Gérée par l'AFSSAPS, cette commission dispose aujourd'hui d'une réelle expertise technique.

La commission d'évaluation des produits et prestations (CEPP), chargée de proposer la liste des dispositifs médicaux admis au remboursement, est, quant à elle, composée d'experts mais également de représentants des organismes d'assurance maladie et des représentants des fabricants et des distributeurs.

Les inscriptions au remboursement des actes de soins et d'analyse doivent en principe être précédés des avis respectifs de la commission permanente de la nomenclature des actes professionnels et de la commission de nomenclature des actes de biologie, les ministres n'étant toutefois pas tenus de les saisir.

L'élaboration et le suivi de référentiels médicaux et de recommandations de bonne pratique sont aujourd'hui essentiellement confiés à l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) et à l'AFSSAPS.

Toutefois, comme l'a souligné le rapport du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, « lorsque les référentiels existent, ils sont loin d'être uniformément appliqués », en raison de la diffusion insuffisante des référentiels mais aussi de la complexité de l'information disponible. En outre, il n'existe pas de recommandations de bonnes pratiques dans certains domaines, telles les prescriptions d'arrêt de travail par exemple.

(2) La nécessité de créer une institution « centralisatrice » et indépendante

Si la définition du périmètre du remboursable reste pour l'essentiel une compétence de l'Etat, la HAS aura pour objectif d'évaluer l'utilité médicale de l'ensemble des actes médicaux, prestations et produits de santé pris en charge par l'assurance maladie, et de promouvoir la qualité des pratiques professionnelles et le bon usage des soins dans notre système de santé.

Ainsi que l'a rappelé M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, « le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie avait observé qu'il manquait une cohérence d'ensemble dans la fabrication et la diffusion de référentiels de bonne pratique. Nous réparons cette lacune avec la Haute autorité ».

En outre, s'agissant de la procédure d'avis précédant la décision d'inscription ministérielle au remboursement des actes de soins, des médicaments et des dispositifs médicaux, le rapport du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie souligne que, la manière la plus récente d'envisager les choses s'agissant de la nature de l'expertise préalable à l'inscription « semble privilégier l'impartialité scientifique : ce ne sont pas ceux qui exécuteront l'acte ou le produiront, ceux qui le prescriront, ou ceux qui en contrôleront l'exécution et la prescription qui se prononcent sur l'opportunité de l'inscription au remboursement ».

Il convient toutefois de noter que, d'une part, la connaissance de la pratique effective est un élément important lorsqu'il s'agit d'introduire un acte nouveau, ou de proposer une cotation nouvelle, c'est-à-dire une modification de la hiérarchie des actes, d'autre part, l'opportunité d'une inscription ne peut se décider exclusivement a priori . C'est dans la durée, et donc dans la pratique concrète que se dégagent les meilleurs éléments d'appréciation . L'autorité qui décide de l'inscription doit pouvoir décider du maintien de l'inscription sur la foi d'un avis des observateurs des conditions réelles de l'utilisation des produits.

La création de la Haute autorité de santé par l'article 19 du présent projet de loi répond à ce double objectif d'impartialité scientifique et de détention d'une information fiable provenant des acteurs du système.

b) Des interrogations de principe

Si votre rapporteur pour avis accueille très favorablement la création de cette nouvelle institution, qui permettra de rationaliser la diffusion des référentiels de bonnes pratiques auprès des professionnels de santé et d'évaluer l'utilité médicale de l'ensemble des actes médicaux, prestations et produits de santé pris en charge par l'assurance maladie dans le but d'une meilleure définition du périmètre de soins remboursables, il souhaite toutefois souligner quelques points de nature à nuancer cette position.

(1) L'opportunité du recours à une autorité publique indépendante

Tout d'abord, la question de l'opportunité de créer une nouvelle « autorité publique indépendante » se pose au regard notamment des principes définis par le Conseil d'Etat comme devant gouverner les règles d'organisation et de fonctionnement de ces autorités, lorsque leur création est justifiée.

Dans son rapport public de 2001 précité sur les autorités administratives indépendantes, le Conseil d'Etat a en effet formulé divers principes devant encadrer la création de nouvelles AAI. Si le rapport n'écarte pas l'idée de la création de nouvelles AAI, il s'astreint à définir le cadre dans lequel de telles créations sont susceptibles d'intervenir, à savoir le respect des règles suivantes :

- s'assurer de la nécessité du recours à une AAI plutôt qu'à une autre solution institutionnelle ;

- exclure l'attribution d'un pouvoir de décision à une AAI dans certains domaines, tels ceux mettant en jeu les responsabilités régaliennes de l'Etat ou nécessitant une démarche interministérielle ;

- dès lors qu'une AAI est chargée d'une mission de régulation, lui donner les pouvoirs qu'implique nécessairement cette mission ;

- prévoir un réexamen périodique du bien fondé du maintien de l'AAI.

Dans son rapport précité, le Conseil d'Etat souligne à cet égard que, « lorsqu'il ne s'agit que d'assurer dans tel ou tel secteur une capacité d'expertise, d'évaluation, d'appréciation totalement indépendante et impartiale, il n'est pas impossible d'instituer une telle capacité au sein d'une structure restant sous le contrôle ou la tutelle du gouvernement. Certains choix déjà opérés en ce sens dans le secteur de la santé illustrent parfaitement cette voie intermédiaire. Notamment, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), qui est un établissement public, à ce titre soumis à tutelle, dispose d'une capacité d'expertise scientifique propre et reconnue qui lui permet, sans que son impartialité soit mise en cause, d'éclairer le gouvernement dans les choix qu'il doit opérer. Cette formule préserve donc la capacité de décision et d'arbitrage du gouvernement, sans le priver de l'expertise indépendante dont il a besoin ».

Votre rapporteur pour avis considère toutefois que le recours à la création d'une nouvelle autorité publique indépendante manifeste la volonté du gouvernement d'affirmer résolument l'indépendance de cette nouvelle structure. Si les avis émis par la HAS ne sont assortis d'aucune forme de contrainte juridique, il n'en reste pas moins que son statut d'autorité publique indépendante lui permettra de se positionner de manière autonome vis-à-vis du pouvoir exécutif .

(2) L'impact budgétaire du dispositif proposé

La nouvelle Haute autorité de santé disposera de l'autonomie financière et son budget sera notamment constitué de subventions de l'Etat.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, le budget annuel total de la HAS devrait être de l'ordre de 20 millions d'euros, en coût de fonctionnement, hors gros investissements initiaux (investissement immobilier notamment). Sur ces 20 millions d'euros, l'Etat devrait prendre à sa charge, sous forme de subventions, le tiers du budget . Si l'on soustrait à cette participation, la part du financement anciennement versé à l'AFSSAPS et transféré à la HAS, le surplus net pour l'Etat de la mise en place et du fonctionnement de cette nouvelle autorité publique indépendante devrait s'élever à quelque 5 millions d'euros annuels.

En outre, le personnel de la haute autorité, de l'ordre de 150 personnes au total, sera composé notamment d'agents contractuels de droits publics et, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, des agents publics placés auprès de la haute autorité.

* 38 Loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000.

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