Avis n° 76 (2004-2005) de M. Alain GÉRARD , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 25 novembre 2004

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N° 76

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 2004

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2005 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME II

PÊCHE

Par M. Alain GÉRARD,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Émorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Hérisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Christian Gaudin, Jean Pépin, Bruno Sido, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean Besson, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Yves Coquelle, Roland Courteau, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Mme Michelle Demessine, MM. Marcel Deneux, Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, André Ferrand, Alain Fouché, François Gerbaud, Alain Gérard, Charles Ginésy, Georges Ginoux, Adrien Giraud, Mme Adeline Gousseau, MM. Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Mmes Sandrine Hurel, Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Paul Natali, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Daniel Soulage, Michel Teston, Yannick Texier, Pierre-Yvon Trémel, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1800 , 1863 à 1868 et T.A. 345

Sénat : 73 et 74 (annexe n° 3 ) (2004-2005)

Lois de finances.

SOMMAIRE

Pages

INTRODUCTION 5

I. LE PROJET DE BUDGET DES PÊCHES MARITIMES ET DE L'AQUACULTURE 7

A. LA PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS 7

1. Un budget globalement en baisse 7

2. Une présentation expérimentale dans le cadre de la LOLF 7

B. LES ORIENTATIONS PRIORITAIRES DU GOUVERNEMENT 9

1. La poursuite du plan de modernisation de la flotte de pêche 9

2. Le renforcement des organisations de producteurs 11

3. L'augmentation des moyens de contrôle des pêches 11

4. La reconduction des moyens destinés à assurer la qualité sanitaire des milieux et des produits aquatiques 13

II. LA RÉFORME DE LA POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE ET SES SUITES 13

A. LE CONTENU DE LA RÉFORME 13

1. La politique commune de la pêche avant réforme 13

2. Le contexte de la réforme 14

3. Les mesures adoptées 15

4. La position française 16

5. Les conséquences de la réforme sur la pêche française 17

B. LES ÉVOLUTIONS ACTUELLES 18

1. L'amélioration de la « gouvernance » 18

2. La révision du régime de pêche en Méditerranée 19

3. Le développement des accords de pêche avec les Etats côtiers 20

III. LA SITUATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE 21

A. UNE CRISE CONJONCTURELLE AGGRAVÉE PAR DES FAIBLESSES STRUCTURELLES 21

1. Une conjoncture difficile pour le monde de la pêche 21

a) Un infléchissement de la consommation des ménages 21

b) Une hausse du prix du gazole pesant sur la situation financière des exploitations 21

c) Une évolution des revenus inquiétante 23

2. Des problèmes structurels persistants 23

a) Une flotte vieillissante en constante diminution 23

b) Un secteur difficile en termes d'emploi 24

c) Une dégradation des ventes en France et à l'export 25

B. DES MESURES PONCTUELLES DEVANT ÊTRE SUIVIES DE RÉFORME À LONG TERME 25

1. La mise en place de dispositifs d'urgence par le Gouvernement 25

2. De nécessaires réformes structurelles à plus long terme 28

a) Le renforcement de l'attractivité du secteur 28

b) La modernisation des équipements et des méthodes de pêche 29

c) Un soutien réaffirmé à la promotion des produits de la mer 30

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

L'exercice 2003-2004 restera marqué pour les pêcheurs par une grave crise due à l'augmentation intense et continue des cours du pétrole et à ses effets, tant directs (hausse du prix du gazole) qu'indirects (inflation du prix des accessoires dérivés du pétrole), sur leurs comptes d'exploitation et leurs revenus.

Ces difficultés, que l'on espère ponctuelles, se trouvent renforcées par les incertitudes tant conjoncturelles (stagnation de la demande, déficit du solde extérieur en produits de la mer) que structurelles (diminution de la flotte, vieillissement des équipements, pénurie de main-d'oeuvre) auxquelles se trouve aujourd'hui confrontée la profession.

Faisant preuve de réactivité, le Gouvernement a pris toute une série de mesures visant à aider le secteur à traverser cette « mini crise pétrolière » et s'inscrivant dans une politique plus globale cherchant à en renforcer l'attractivité.

Au niveau européen, l'actualité reste dominée par la mise en oeuvre, depuis son adoption en 2002, de la réforme de la politique commune de la pêche, qui se traduira à brève échéance par la suppression de toute aide publique à la construction ou à la modernisation de navires.

Si la France est parvenue à en amodier le contenu dans un sens plus favorable, elle devra être en mesure d'ici quelques mois d'en respecter les dispositions tout en préservant l'avenir de ses pêcheurs.

Dans ce contexte, les crédits que le projet de loi de finances pour 2005 prévoit de consacrer à la gestion durable des pêches maritimes et de l'aquaculture sont en diminution non négligeable.

La rationalité de leur répartition devrait toutefois permettre de poursuivre les priorités d'action que sont la mise en place du plan de modernisation de la pêche, le renforcement des organisations de producteurs, l'augmentation des moyens de contrôle et la pérennisation des moyens destinés à assurer la qualité sanitaire des milieux et produits aquatiques.

I. LE PROJET DE BUDGET DES PÊCHES MARITIMES ET DE L'AQUACULTURE

A. LA PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS

1. Un budget globalement en baisse

Le tableau ci-dessous présente les crédits « pêche » de la loi de finances pour 2005, regroupés dans l'agrégat « gestion durable des pêches maritimes et de l'aquaculture ». Ils s'élèvent cette année à 32,4 millions d'euros environ, contre 34,3 l'année passée, soit une diminution de 5,7 % . Cette baisse intervient alors que ces crédits avaient connu, pour l'exercice 2003-2004, une diminution de 9,5 % à structure constante 1 ( * ) .

Il doit être toutefois noté que si les dépenses ordinaires sont en baisse sensible (-12,5 %), les dépenses en capital , qui représentent le support financier des investissements publics, connaissent en revanche une importante augmentation (+36,1 %) . Il faut par ailleurs préciser que l'agrégat présenté ci-dessous ne rend pas compte de l'intégralité des crédits alloués à la pêche, s'agissant notamment des dotations prévues dans le plan de modernisation de la pêche.

On observera enfin que la disparition des taxes parafiscales, depuis le 1 er janvier 2004, a concerné directement l'Office interprofessionnel des produits de la mer (OFIMER) et les comités des pêches maritimes et de l'aquaculture. Le financement du premier est assuré désormais, à due concurrence, par une taxe fiscale affectée. Quant aux derniers, il a été décidé de leur affecter le montant des cotisations professionnelles dues par les pêcheurs.

2. Une présentation expérimentale dans le cadre de la LOLF

Sur un plan plus formel, l'exercice 2004-2005 marque une étape vers la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), qui devrait permettre une présentation plus souple et plus claire du budget de l'Etat. En l'espèce, l'ensemble des crédits de la pêche et de l'aquaculture fait l'objet d'une globalisation expérimentale , ce qui permet d'assurer leur fongibilité et de mesurer plus précisément l'efficacité de leur emploi.

A compter du prochain exercice, les crédits de la pêche relèveront de la mission ministérielle « agriculture, pêche et affaires rurales » 2 ( * ) . Ils seront intégrés, au sein de celle-ci, dans le premier programme, consacré à la « gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement rural » 3 ( * ) , au sein d'une action intitulée « gestion durable des pêches maritimes et de l'aquaculture » . Cette action sera elle-même composée de trois « sous-actions » : « soutien au développement économique durable des pêches maritimes et de l'aquaculture », « soutien au revenu des professionnels » et « gestion durable des ressources halieutiques ».

Cette action regroupera les moyens permettant, selon la formulation retenue par le ministère, « d'assurer la pérennité et la rentabilité économique des entreprises de pêche et d'aquaculture grâce à une gestion durable de la ressource halieutique et à un suivi de la qualité des milieux aquatiques », ainsi que « de préserver la présence des entreprises sur l'ensemble du littoral dans un souci d'aménagement du territoire et de prise en compte de la dimension sociale de ces activités ».

Les indicateurs qui permettront de déterminer le degré de réalisation de ces objectifs et de piloter l'action correspondante seront , d'une part, l'état biologique des ressources halieutiques exploitées par les navires français, et d'autre part, l'indice de concentration géographique des capacités de pêche .

Votre rapporteur pour avis se félicite de la mise en oeuvre -expérimentale cette année- de cette réforme budgétaire tant attendue, qui devrait permettre au Parlement de mieux exercer ses fonctions de contrôle, notamment pour ce qui est de l'utilisation des crédits de la pêche. Il met à cet égard l'accent sur la nécessaire fiabilité et précision des indicateurs retenus, tant ceux-ci constitueront le moyen privilégié de déterminer l'efficience de l'utilisation des crédits.

LFI

PLF

Variation

2004

2005

DEPENSES ORDINAIRES

Chapitre 36-22

Article 14 : IFREMER et muséum d'histoire naturelle

1 527 859

1 523 946

-0,26%

Chapitre 37-11

Article 70 : assistance technique et communication

531 500

630 237

18,58%

Chapitre 44-36

Article 20 : pêche et aquaculture

8 250 000

8 747 470

6,03%

Article 30 : office interprofessionnel des produits de la mer

10 000 000

8 483 000

-15,17%

Total chapitre 44-36

18 250 000

17 230 470

-5,59%

Chapitre 44-42

Article 30 : prêts à la pêche - charges de bonification

10 500 000

7 584 347

-27,77%

Total des dépenses ordinaires

30 809 359

26 969 000

-12,46%

DEPENSES EN CAPITAL

Chapitre 64-36

Article 10 : transformation et commercialisation des produits de la mer (CP)

3 500 000

5 389 000

53,97%

Article 10 : transformation et commercialisation des produits de la mer (AP)

4 500 000

5 500 000

22,22%

Total des dépenses en capital

8 000 000

10 889 000

36,11%

TOTAL GÉNÉRAL

34 309 359

32 358 000

-5,69%

B. LES ORIENTATIONS PRIORITAIRES DU GOUVERNEMENT

1. La poursuite du plan de modernisation de la flotte de pêche

Annoncé en juillet 2003 par le ministre en charge de l'agriculture, le plan de modernisation de la flotte de pêche française s'inscrit dans le cadre de la réforme de la politique commune de la pêche (PCP) décidée à Bruxelles en décembre 2002 et comporte deux types de mesures.

? La première catégorie de mesures a trait au renouvellement et à la modernisation des navires de pêches , par le biais d'un cofinancement Union européenne-Etat-collectivités territoriales, pour un montant total pouvant atteindre 60 millions d'euros.

En contrepartie de son engagement à réduire de 3 % ses capacités de pêche en métropole d'ici le 31 décembre 2004 , la France a conservé la possibilité de maintenir les engagements financiers de l'Instrument financier de la pêche (IFOP), c'est-à-dire d'attribuer des aides publiques au renouvellement et à la modernisation de sa flotte. Ainsi, les aides à la construction pourront être délivrées jusqu'au 31 décembre 2004 et celles à la modernisation jusqu'au 31 décembre 2006 .

Ce dispositif devrait permettre, selon le ministère, de construire plus de 250 nouveaux navires et d'en moderniser plus de 100 existants d'ici la fin de l'année 2006. Seront privilégiés les investissements destinés à améliorer la sécurité des équipages, leurs conditions de travail et la qualité de la pêche.

Afin que soit assuré le financement de ces nouvelles unités, l'Etat a ouvert, pour l'exercice 2004-2005, une enveloppe de 5,4 millions d'euros en crédits de paiement et de 5,5 millions d'euros en autorisation de programme . Ces crédits, qui sont en substantielle augmentation par rapport à la précédente loi de finances (de respectivement 45 % et 22,2 %), viendront s'ajouter aux crédits communautaires et à la participation des collectivités territoriales.

Signe d'une meilleure gestion de ces crédits, leur taux de consommation s'est nettement amélioré depuis l'année passée. Au 1 er septembre de cette année, il était en effet de 58,6 % pour les crédits de paiement et de 62,3 % pour les autorisations de programme. Compte tenu du retard pris par la mise en place du nouveau système comptable, le ministère en charge de l'agriculture estime que le taux de consommation au 31 décembre de cette année devrait être proche de 100 %.

? La seconde catégorie de mesures vise à ajuster les capacités de pêche en fonction des ressources halieutiques , au moyen d'un cofinancement à parité Union européenne - Etat, à hauteur de 30 millions d'euros. Ces crédits sont destinés à financer les primes à l'arrêt définitif allouées aux pêcheurs qui en font la demande. Ils visent ainsi à favoriser la sortie de flotte des navires les plus vétustes, qui sont également les plus dangereux, ainsi que ceux dont l'activité porte sur des espèces pour lesquelles les niveaux de capture doivent être réduits.

Un bilan de l'application de ce plan de sortie de flotte établi par le ministère au 31 juillet de cette année fait état de 179 demandes d'aides, qui ont donné lieu à la démolition des navires pour 160 d'entre eux, à un transfert d'activité dans 17 cas et à la constitution de sociétés mixtes pour les 2 derniers dossiers. Dans ce contexte, la France respecte déjà depuis le 1 er août de cette année l'objectif d'une réduction supplémentaire de 3 % de sa flotte de pêche fixé à l'échéance du 31 décembre 2005.

Des mesures d'accompagnement social ont été mises en oeuvre parallèlement aux plans successifs de sortie de flotte initiés en 1991 et reconduits depuis. Presque totalement financées par l'Etat mais restant d'un emploi très limité, elles permettent d'assurer aux marins licenciés pour motif économique à la suite d'une sortie de flotte un revenu de remplacement s'ils sont âgés de plus de 50 ans ou une allocation complémentaire de ressources.

2. Le renforcement des organisations de producteurs

La limitation du volume des captures, due tant aux restrictions en termes de quotas imposées par la règlementation européenne qu'à la raréfaction des ressources halieutiques, contraint les pêcheurs à penser l'amélioration de leurs revenus en termes de valorisation des pêches plus que d'augmentation des captures.

C'est à ce titre qu'intervient l' OFIMER , établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) créé en 1998 et soutenant des programmes d'amélioration de la qualité, d'information du consommateur et de promotion des produits.

Ont pu ainsi être engagées des actions visant notamment à :

- améliorer la connaissance et le fonctionnement des marchés en confortant le rôle des organisations de producteurs ;

- moderniser les outils de commercialisation et de promotion des produits de la mer par des aides aux investissements réalisés dans les criées et soutenir la modernisation de l'aval de la filière ainsi que du secteur de l'aquaculture ;

- valoriser la production halieutique et aquacole à travers le lancement d'opérations collectives de recherche, d'expérimentation et d'innovation, ainsi qu'à travers l'incitation aux actions professionnelles permettant l'amélioration de la qualité, de la traçabilité et de l'identification des produits de la mer et de l'aquaculture.

8,5 millions d'euros ont été affectés à cet organisme pour 2005, soit une dotation en recul de 15,2 % . Intervenant après une baisse de 9,1 % l'année passée, cette diminution s'explique, selon le ministère, par un ajustement aux besoins réels constatés depuis plusieurs années et par une anticipation d'une plus forte mobilisation des fonds européens au profit des organisations de producteurs. Votre commission insiste, cette année encore, sur l'importance des missions de l'OFIMER et la nécessité d'assurer en conséquence la pérennité de son financement.

3. L'augmentation des moyens de contrôle des pêches

? La subvention des organismes publics d'encadrement

Inscrits à l'article 14 du chapitre 36-22 et s'élevant pour 2005 à 1,52 million d'euros , les crédits alloués aux établissements publics subventionnés sont stables par rapport à l'exercice précédent.

Ils représentent tout d'abord, pour un montant de 526.000 euros, la participation financière de la direction des pêches maritimes et de l'aquaculture (DPMA) au recueil de données statistiques pour la pêche effectué par différents établissements publics sous convention avec l'Etat :

- l' Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER). Il bénéficie d'une subvention de l'Etat à hauteur de 510.000 euros en vue de répondre à nos obligations communautaires en termes de recueil, de validation et de traitement des données statistiques des captures. Durant l'exercice 2003-2004, l'IFREMER a mené quatre grands types d'activités : la recherche dans les domaines de l'aquaculture, de l'halieutique et des fonds marins ; la surveillance et la production d'avis sur les usages des mers côtières et la perturbation des écosystèmes ; le développement technologique et enfin la coopération internationale ;

- le Muséum d'histoire naturelle . Doté à hauteur de 8.000 euros, il intervient dans l'océan Indien en recueillant des données constituant la base scientifique à partir de laquelle sont établis régulièrement les totaux admissibles de capture (TAC) et quotas dans la zone des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) ;

- l' Institut de recherche et de développement (IRD). Doté également à hauteur de 8.000 euros, il fournit les statistiques de capture des navires thoniers français dans l'océan Atlantique et dans l'océan Indien.

D'autre part, les crédits inscrits à l'article 14 du chapitre 36-22 représentent, pour un montant de 997.946 euros, la participation de la DPMA au fonctionnement du dispositif national de référence et de suivi sanitaire des coquillages.

? La mise en oeuvre des missions de contrôle

Les missions de contrôle des pêches sont devenues prééminentes dans le cadre de la PCP. En effet, la règlementation communautaire impose aux Etats membres des seuils maximaux de capture variant selon les espèces. Afin d'assurer leur respect, elle leur fait obligation d'embarquer des observateurs à bord des navires exploitant des stocks faisant l'objet de mesures techniques spécifiques. Ainsi, des moratoires ont été institués et des recueils de données biologiques imposés dans le cadre de la pêche de certains grands migrateurs. De même, doivent être surveillés les navires pêchant les stocks d'eaux profondes, particulièrement fragilisés.

Cette politique de contrôle de l'activité des navires devrait d'ailleurs se trouver renforcée dans les années à venir du fait de la dégradation biologique de certains stocks halieutiques, obligeant les Etats membres à conduire des actions beaucoup plus complètes et rigoureuses que par le passé. Elaborée et suivie par la mission du contrôle des pêches de la DPMA, cette politique est appliquée par ses services déconcentrés.

L'ensemble des crédits correspondants, regroupés dans l'article 70 du chapitre 37-11, est en forte augmentation pour le prochain exercice puisqu'ils gagnent 18,6 % pour s'établir à 630.237 euros . Cet accroissement, qui correspond à un signal particulièrement fort du Gouvernement en faveur d'un renforcement de notre politique de contrôle des pêches, doit être d'autant plus souligné qu'il intervient après une très forte augmentation de ces crédits (+146 %) lors du dernier exercice budgétaire.

Ce choix est parfaitement en phase avec la position de la France lors de la réforme de la PCP, qui consistait à stigmatiser l'insuffisante fermeté dans l'application et le contrôle des réglementations communautaires comme cause de la disproportion existant aujourd'hui entre les capacités de capture et les ressources halieutiques disponibles.

Cette dotation globale se répartit plus finement en deux enveloppes. La principale, dotée de 500.000 euros, est destinée à financer le contrôle des pêches proprement dit. La seconde, dotée de 130.237 euros, constitue la contre partie nationale des crédits d'assistance IFOP. Elle sert plus particulièrement au cofinancement avec l'Union européenne d'actions d'évaluation, de gestion, d'information et de communication du programme IFOP.

4. La reconduction des moyens destinés à assurer la qualité sanitaire des milieux et des produits aquatiques

La qualité sanitaire des milieux et des produits marins est un enjeu croissant. Les normes environnementales, qu'elles soient d'origine communautaire ou nationale, sont en effet de plus en plus contraignantes en ce domaine. La sensibilité du consommateur à la qualité des produits est devenue par ailleurs extrême. En outre, la rentabilité des entreprises aquacoles est aujourd'hui largement dépendante de la qualité sanitaire des milieux.

Aussi le Gouvernement a t-il décidé de pérenniser les moyens budgétaires substantiels destinés au suivi de la qualité sanitaire des milieux et des produits conchylicoles et piscicoles.

Est ainsi reconduite (+0,3 %) l'enveloppe de 997.946 euros destinée au financement du dispositif national de référence et de suivi sanitaire des coquillages, pris en charge respectivement par :

- le Laboratoire national de référence (LNR). Mis en place en 2003 et bénéficiant pour le prochain exercice d'une subvention publique de 250.000 euros, il a pour mission de coordonner, à tous les stades de la production et de la mise en marché, les activités de l'ensemble des laboratoires nationaux chargés des analyses bactériologiques et virales des coquillages de pêche et d'élevage dans le cadre des contrôles exercés par l'administration, ainsi que d'organiser les essais comparatifs entre ces laboratoires ;

- le Réseau de suivi sanitaire des coquillages (REPHY). Doté à hauteur de 747.946 euros, il permet de suivre les contaminations microbiologiques des coquillages, les contaminations par les biotoxiques et les contaminations chimiques, et ceci à un double niveau : celui des zones de production qui font l'objet d'un classement de salubrité et d'une surveillance particulière, d'une part ; celui de l'expédition et de la mise sur le marché des coquillages considérés comme des denrées et dont la qualité sanitaire est contrôlée de manière spécifique, d'autre part.

II. LA RÉFORME DE LA POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE ET SES SUITES

A. LE CONTENU DE LA RÉFORME

1. La politique commune de la pêche avant réforme

Si les jalons de la PCP ont été posés dès les années 70 en ce qui concerne les structures et les marchés, l'« Europe bleue » a véritablement pris naissance le 25 janvier 1983 avec l'adoption d'un règlement de base instaurant un régime communautaire de la pêche et de l'aquaculture , aujourd'hui entièrement intégré. Quatre volets peuvent être distingués au sein de la PCP :

- la gestion de la ressource . Elle repose sur le principe de liberté d'accès aux eaux et aux ressources, encadré cependant par des règles permettant de garantir un équilibre durable entre les ressources et leur exploitation, à travers la définition des TAC, de mesures techniques de conservation et de dispositifs de contrôle ;

- la commercialisation des produits . La PCP s'est fixée, en la matière différents objectifs, tels que le soutien des revenus des pêcheurs, la stabilisation du marché ou encore la régulation d'une offre de produits de qualité. Pour parvenir à les atteindre, elle s'est dotée de divers instruments comme les normes communes de commercialisation des produits, le système de prix communs et un régime unique d'échange avec les pays tiers ;

- le soutien structurel . Des subventions publiques, cofinancées par un fonds communautaire (l'IFOP) sur une base pluriannuelle, permettent notamment d'adapter les capacités de la flotte de pêche aux ressources halieutiques disponibles et de moderniser les équipements de l'ensemble de la filière pêche ;

- le volet externe . Il se traduit par la présence de l'Union européenne au sein des enceintes internationales en charge de la gestion des ressources halieutiques et par la conclusion d'accords de pêche avec des pays tiers afin de permettre aux navires communautaires d'accéder à leurs zones économiques exclusives.

2. Le contexte de la réforme

Le règlement (CEE) 3760/92 du 20 décembre 1992 instituant un régime communautaire de la pêche et de l'aquaculture prévoyait que la Commission présenterait au Parlement et au Conseil, le 31 décembre 2002 au plus tard, un rapport sur la situation de la pêche dans l'Union européenne et sur la mise en oeuvre dudit règlement. Sur la base de ce rapport, le Conseil déciderait, avant le 31 décembre 2002, de tout ajustement nécessaire à la politique commune des pêches.

C'est sur cette base que la Commission a publié, en mars 2001, un Livre vert mettant en évidence les problèmes auxquels se trouvait confrontée la politique communautaire conduite en matière de pêche depuis une vingtaine d'années :

- état alarmant de nombreux stocks halieutiques sur un plan biologique ;

- surcapacité des flottes de pêche au regard de la ressource disponible ;

- médiocre rentabilité des entreprises et diminution de l'emploi ;

- fermeté insuffisante dans l'application et le contrôle du dispositif.

Partant de ce constat, la Commission a élaboré un projet de réforme de la PCP qu'elle a publié en mai 2002 et qui était censé répondre à ces problèmes de la façon la plus rapide et la plus générale possible.

3. Les mesures adoptées

A l'issue de négociations très serrées, marquées par l'adoption de nombreux amendements, le Conseil des ministres a adopté en décembre 2002 les trois projets de règlement que la Commission avait présentés quelques mois plus tôt.

Le premier concerne la conservation et l'exploitation durable des ressources halieutiques . Il introduit un nouvel instrument de régulation des captures en concurrence avec le système des TAC et des quotas : l'« effort de pêche », c'est-à-dire la durée d'activité des navires.

Il s'applique obligatoirement pour les stocks dont l'état biologique justifie un plan de reconstitution. Ces plans sont en cours d'élaboration progressive pour les espèces dont la biomasse se situe très en deçà du seuil limite scientifiquement admis. Ils font appel à une gamme très large d'instruments tant en matière de régulation des captures (TAC, quotas, effort de pêche ...) que de mesures techniques (maillage, cantonnement ...). Trois stocks (cabillaud, merlu et sole) ont pour l'instant été identifiés pour faire l'objet de tels plans, en ce qui concerne les pêcheurs français.

L'effort de pêche constitue en revanche un instrument facultatif , en complément des TAC et des quotas, pour les stocks non soumis à un plan de reconstitution. Ces derniers feront l'objet de plans de gestion pluriannuels visant à limiter les variations d'une année à l'autre des possibilités de pêche et à établir le niveau des TAC sur la base d'objectifs de gestion à long terme adoptés par le Conseil.

Ces dispositifs rénovés de gestion de la ressource s'accompagnent d'une politique de contrôle plus rigoureuse et plus coopérative entre les différents Etats membres, source d'une gestion plus durable des ressources et d'une plus grande égalité de traitement des pêcheurs, quelque soit leur nationalité.

Les deuxième et troisième projets de règlement adoptés modifient dans deux directions le règlement (CE) 2712/99 du 17 décembre 1999 définissant les modalités et conditions des actions structurelles de la Communauté dans le secteur de la pêche.

Ils suppriment :

- l'ensemble des aides publiques à la construction des navires de pêche à partir du 1 er janvier 2005 ;

- les plans d'orientation pluriannuels (POP) et la segmentation des flottilles qui y était rattachée. L'encadrement de la flotte de chaque Etat membre se fait désormais globalement, les niveaux de référence (en kilowatts et unités de tonnage brut) établis au 1 er janvier 2003 constituant des limites infranchissables, réduites automatiquement du montant des capacités de sorties avec aides publiques.

En outre, afin d'accompagner socialement les plans de reconstitution, le troisième règlement autorise les Etats membres à majorer de 20 % les primes maximales de sortie de flotte pour les navires qui verraient leur activité réduite de plus de 25 %.

Ces trois premiers textes ont par ailleurs été complétés par la publication par la Commission de documents supplémentaires concernant l'aquaculture, la pêche en méditerranée, les avis scientifiques et la politique de contrôle.

4. La position française

Dès le Livre vert de la Commission présenté, le Gouvernement français avait fait connaître, lors du Conseil des ministres de juin 2002, ses plus grandes réserves sur le projet de réforme.

La France avait certes reconnu que le diagnostic de la Commission était juste, tant il est vrai que le secteur de la pêche se caractérise dans l'Union européenne par d'importantes surcapacités au regard des ressources halieutiques disponibles, tout en considérant que cette disproportion provenait d'un certain laxisme dans l'application et le contrôle des règlements.

Le Gouvernement s'était toutefois alarmé du déséquilibre existant dans le projet de réforme entre l'objectif -légitime- de protection de la ressource et les dimensions sociale, économique et territoriale de la pêche. Il avait également reproché à la Commission de s'être montrée « provocante » vis-à-vis des professionnels concernés et de vouloir faire preuve d'une trop grande brutalité dans la mise en oeuvre des solutions proposées.

En parvenant à rallier à elle les pays du sud de l'Europe (Espagne, Portugal, Italie et Grèce) ainsi que l'Irlande, la France a réussi à maintenir jusqu'au bout de la négociation une forte « minorité de blocage » qui lui a permis de préserver ses intérêts en faisant en sorte que :

- les règles de gestion des stocks halieutiques reconnaissent le principe de la pluriannualité et la distinction des stocks réellement en difficulté sur le plan biologique de ceux connaissant une situation satisfaisante ;

- le transfert de compétences du Conseil vers la Commission en matière de fixation des autorisations de capture et des mesures techniques soit rejeté du fait du caractère éminemment politique de ces décisions ;

- la date du 1 er janvier 2003 soit abandonnée au profit du 1 er janvier 2005 pour la suppression des aides publiques, tant nationales que communautaires, à la construction et à la modernisation des navires de pêche ;

- les besoins spécifiques ressentis dans les départements d'Outre-Mer, ainsi que ceux exprimés dans les pêcheries méditerranéennes, soient pris en considération.

5. Les conséquences de la réforme sur la pêche française

La restructuration de la flotte de pêche française en cours et à venir n'est pas seulement la conséquence de la réforme de la PCP. Elle trouve en effet son origine dans une réalité économique et biologique que notre pays partage avec bon nombre d'Etats membres : une surcapacité structurelle des équipements de pêche par rapport à la disponibilité des ressources halieutiques. Aussi le plan ambitieux de modernisation de la flotte de pêche lancé par le Gouvernement vise t-il autant à remédier à cet état de fait qu'à transposer en droit interne la réforme européenne.

Afin de tirer le meilleur parti de cette nécessaire restructuration, le Gouvernement a incité à la sortie de flotte des navires pêchant principalement sur les stocks pour lesquels notre pays dispose des marges de manoeuvre les plus faibles en termes de quotas (cabillaud, merlu, baudroie, sole et langoustine). Cette politique permettra en outre à nos pêcheurs d'alléger les contraintes découlant de la mise en place des schémas d'effort de pêche prévus dans les plans de reconstitution.

Il reste cependant évident que la suppression, à terme, des aides publiques, tant nationales que communautaires, à la construction et à la modernisation des navires de pêche -principale nouveauté introduite par la réforme de la PCP- aura des effets structurels importants dans un pays comme la France où la tradition interventionniste est extrêmement prégnante. Si des inquiétudes sont exprimées à ce sujet chez les professionnels de la pêche, peut-être ces mesures inciteront-elles au moins ces derniers à éviter de coûteux surinvestissements dans un contexte de raréfaction des ressources halieutiques.

S'agissant de la gestion des ressources , la mise en place des plans de gestion et de reconstitution permettra de disposer en la matière d'une vision à moyen et long terme, au lieu d'enfermer Commission et Conseil dans des négociations annuelles souvent centrées sur le court terme. Ils obligeront par ailleurs le Conseil à clarifier les objectifs de gestion de la ressource sous-jacents aux règles de fixation des TAC. Ainsi, pour chaque stock, les objectifs de gestion établiront clairement le niveau de biomasse et le taux d'exploitation qu'il serait souhaitable de maintenir en vue d'une exploitation durable de la ressource.

Parallèlement à cette clarification des objectifs, va se trouver accrue la concertation des professionnels du secteur à travers les conseils consultatifs régionaux , instances créées afin de recueillir l'avis des acteurs concernés dans le cadre de la préparation des prises de décision communautaires. Les professionnels français devraient ainsi pouvoir s'approprier davantage les éléments de la PCP réformée et s'impliquer plus encore dans les procédures de discussion et de décision.

B. LES ÉVOLUTIONS ACTUELLES

1. L'amélioration de la « gouvernance »

Afin de remédier aux critiques qui ont été émises quant au manque de concertation entre les différents acteurs impliqués dans l'élaboration ou la mise en oeuvre de la PCP, le règlement (CE) 2371/2002 du Conseil relatif à la conservation et à l'exploitation des ressources halieutiques dans le cadre de la PCP a prévu la création de conseils consultatifs régionaux (CCR). Ayant pour vocation de renforcer les échanges entre professionnels, administrations et scientifiques, ils seront un lieu de dialogue privilégié non seulement sur les avis scientifiques mais aussi, plus généralement, sur les mesures de gestion adoptées dans le cadre de la PCP.

Lors du Conseil des ministres « pêche » du 24 mai 2004, ont été énoncées les principales règles relatives à l'établissement des CCR .

Seront créés sept conseils recouvrant l'ensemble des eaux européennes, se réunissant publiquement et bénéficiant de financements communautaires. Composés d'une assemblée générale et d'un comité exécutif comportant aux 2/3 des représentants du secteur de la pêche et pour 1/3 des représentants d'autres groupes d'intérêt concernés par la PCP, ils pourront associer à leurs travaux des personnalités extérieures telles que des scientifiques, des représentants des administrations nationales ou communautaires, voire même des représentants de pays tiers ou d'organisations régionales de pêche.

Chargés d'étudier les problèmes des pêcheurs, ils pourront débattre et donner des avis sur tout sujet y ayant trait, et notamment sur l'état des ressources halieutiques et les mesures de gestion qu'il rend nécessaire. Un débat s'est engagé récemment sur le point de savoir si leurs compétences seraient uniquement de nature consultative ou bien si elles évolueraient vers un pouvoir de gestion.

La France est aujourd'hui très impliquée dans la création de ces conseils. Votre rapporteur pour avis soutient entièrement ce projet, à condition que soit toutefois garantie sa pérennité en termes de financement et tranchée la question de la nature des compétences des conseils.

2. La révision du régime de pêche en Méditerranée

Après avoir longtemps échappé à la PCP, puisque n'y étaient applicables que les volets concernant la politique structurelle et l'organisation commune des marchés, la pêche en Méditerranée est devenue un enjeu pour l'Union européenne au milieu des années 90 . Suite à l'adoption du règlement du Conseil (CE) 1626/94 du 27 juin 1994 instituant diverses mesures techniques d'encadrement de la pêche dans ce secteur, la Commission a reçu du Conseil mandat pour initier un « régime harmonisé de conservation et de gestion des ressources halieutiques à l'échelle méditerranéenne ».

Elle a donc organisé, en 1994 et en 1996, deux conférences diplomatiques sur le sujet, qui ont conclu à la nécessité d'utiliser les cadres multilatéraux de coopération existants, et notamment la Commission générale des pêches pour la Méditerranée et la mer Noire (CGPM), organisation dépendant de l'Organisation des Nations Unies pour l'agriculture et l'alimentation (OAA/FAO) et qui regroupe la totalité des Etats riverains de Méditerranée ainsi que la Commission européenne.

L'organisation commune de la pêche en Méditerranée comporte aujourd'hui plusieurs volets :

- la gestion de la ressource . Parallèlement à la poursuite depuis 1994 de l'harmonisation des mesures techniques au niveau communautaire et du contrôle des activités de pêche, la CGPM s'est progressivement émancipée de sa tutelle onusienne en se dotant de responsabilités accrues concernant la gestion des ressources halieutiques et, depuis cette année, d'une autonomie budgétaire ;

- les échanges commerciaux . La politique commune de pêche en Méditerranée fait partie intégrante, depuis 1995, du partenariat euro-méditerranéen, qui prévoit la création d'ici 2010 d'une zone de libre échange entre les deux rives. Il convient cependant de noter que les pays du bassin méditerranéen bénéficient déjà, à travers de nombreux accords préférentiels, d'un très large accès au marché communautaire ;

- la gestion de la flotte . La flotte méditerranéenne est éligible dans son ensemble au plan de modernisation annoncé en juillet 2003 par le ministre en charge de l'agriculture, suite à la réforme de la PCP. Afin de garantir la préservation des équilibres entre les différentes flottilles en Méditerranée, le régime des licences existant a été maintenu.

L'actualité la plus récente de la PCP en Méditerranée est marquée par la discussion de la proposition de règlement du Conseil concernant des mesures de gestion pour l'exploitation durable des ressources halieutiques en Méditerranée et modifiant les règlements (CE) 2847/93 et (CE) 973/2001. Présentée par la Commission, elle reprend sur de nombreux points sa communication du 9 octobre 2002 établissant un plan d'action communautaire pour la conservation et l'exploitation durable des ressources halieutiques en Méditerranée dans le cadre de la PCP, qui vise globalement à opérer une refonte de la règlementation technique en vigueur en Méditerranée.

Parmi les principales mesures, qui ont pour nombre d'entre elles rencontré de fortes résistances, on notera la possibilité de créer des zones protégées nationales ou communautaires, l'augmentation du maillage des filets ou encore l'interdiction d'utiliser des filets de fond ou des filets flottants ancrés pour la capture de certaines espèces. En outre, la Commission propose le principe de règles auxquelles il peut être possible de déroger dans le cas où un plan de gestion encadrant la pêche est mis en oeuvre.

3. Le développement des accords de pêche avec les Etats côtiers

Dans le cadre de sa politique internationale en matière de pêches maritimes, l'Union européenne a conclu 23 accords de pêche avec des pays tiers permettant à près de 500 navires communautaires d'exploiter des espèces à forte valeur (crustacés, poissons de fond, thonidés ...) dans les eaux des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), mais aussi de pays nordiques. Ces accords consistent soit en des échanges de quotas entre l'Union et les pays tiers, soit en des compensations financières octroyées par l'Union en contrepartie d'autorisations de pêche pour la flotte communautaire dans les zones économiques exclusives (ZEE) des pays tiers.

L'impact de ces accords sur la ressource a été largement pris en compte. Pour les accords « nord », les TAC sont déterminés unilatéralement ou conjointement par les parties suite aux recommandations scientifiques établies par le Conseil international pour l'exploitation de la mer en vue de permettre une pêche durable. Pour les accords « sud », la situation des stocks halieutiques fait l'objet d'évaluations scientifiques, les capacités de capture allouées à l'Union européenne par les pays partenaires étant constituées des quantités qu'ils ne pêchent pas.

Suite aux conclusions du Conseil des ministres « pêche » de juillet 2004, l'Union européenne va progressivement transformer ces accords afin d'en faire les instruments d'un partenariat dans le domaine des pêches. De nombreux accords ont été cette année paraphés (Tanzanie, Micronésie, îles Salomon), renégociés (Comores, Angola, Seychelles) ou prorogés (Cap vert) par l'Union.

Les accords « nord » sont largement dominés par l'accord avec la Norvège, qui totalise plus de 73 % des captures réalisées dans leur cadre. Les principaux Etats membres prenant part à ces accords sont le Danemark, l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Espagne. Un accord avec la Russie est en cours de négociation. Les accords « sud » sont dominés par la Mauritanie, la Guinée Bissau et le Sénégal en raison de l'accès obtenu pour les ressources à forte valeur ajoutée ou transformées avec une forte valeur ajoutée. Ils intéressent surtout l'Espagne et, dans une moindre mesure, le Portugal, les Pays-Bas et l'Italie.

La France bénéficie de nombreux accords, qu'ils soient « nord » ou « sud » . S'agissant des accords « nord », et plus particulièrement de l'accord avec la Norvège, qui est le principal en volume, la France a obtenu que soit réduit le déficit qu'elle connaissait depuis quelques années en termes de rapport quotas cédés / quotas obtenus. Concernant les accords « sud », la France est surtout intéressée par les accords dits « thoniers », qui s'étendent aux pays d'Afrique riverains de l'océan Atlantique et de l'océan Indien. Le principal instrument pour notre pays dans ces régions est l'accord conclu avec les Seychelles, en raison de l'importance de la zone géographique pour les captures des thoniers français.

III. LA SITUATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE

A. UNE CRISE CONJONCTURELLE AGGRAVÉE PAR DES FAIBLESSES STRUCTURELLES

1. Une conjoncture difficile pour le monde de la pêche

a) Un infléchissement de la consommation des ménages

La consommation totale des produits de la mer en France s'élève à 2 millions de tonnes, soit une consommation de 31 kilogrammes équivalents entiers par habitant et par an. Les deux tiers environ des achats on lieu en grands magasins et supermarchés, le reste auprès des grossistes et des poissonniers de détail.

Si les dépenses globales des français dans ce secteur se stabilisent à 4 milliards d'euros, cette stabilité résulte en réalité d'une baisse des quantités achetées compensée par une augmentation de leur prix . Cette augmentation des prix de détail confirme la tendance observée sur le marché depuis plusieurs années. En revanche, la baisse des volumes d'achat enregistrée depuis cette année rompt avec la hausse observée depuis le début des années 2000.

Le marché des produits de la pêche et de l'aquaculture transformés (produits traiteurs et saurisserie, produits surgelés, conserves de poisson), plus spécifiquement, subit une évolution comparable. Leur consommation s'infléchit en effet pour se situer en dessous des 300.000 tonnes. Mais grâce à l'augmentation du prix moyen des produits, la valeur totale des achats progresse de 1 % pour atteindre 2,7 milliards d'euros.

b) Une hausse du prix du gazole pesant sur la situation financière des exploitations

La pêche française est marquée par une grande hétérogénéité des conditions d'exploitation des navires tenant, entre autres, aux modes de propriété, aux types de navires et aux lieux de pêche et de débarquement. Après avoir connu une crise brutale en 1992-94 liée à la dévaluation compétitive de nos principaux clients et fournisseurs, le secteur de la pêche a vu sa situation s'améliorer depuis le milieu des années 90 en raison du redressement des cours.

Ce redressement reste toutefois extrêmement fragile, du fait notamment des incertitudes que font peser sur le résultat d'exploitation l'évolution du pétrole. Le volume très important de gazole consommé par les marins-pêcheurs -a fortiori pour la pêche hauturière, qui requiert de puissants chalutiers 4 ( * ) - constitue en effet l'un des postes essentiels de leurs charges financières , puisqu'il figure en deuxième ou troisième position, après le poste des personnels et celui de l'entretien et des réparations. Une étude réalisée voici peu 5 ( * ) montrait ainsi que le ratio carburant/chiffres d'affaires s'étageait de 6 pour les fileyeurs (12 - 24 mètres) en Atlantique à 21 pour les chalutiers de fond (24 - 30 mètres).

Le carburant faisant partie des frais communs, il est retiré des recettes de ventes au retour de la pêche avant de faire le partage entre matelots et armateurs. Les effets de cet alourdissement des charges sont d'autant plus sévères que la structuration du marché des produits de la mer rend très délicate sa répercussion sur les prix des produits vendus. D'autre part, l'augmentation du prix du pétrole s'étend aux matériels de synthèse qui en sont dérivés, tels que les caisses de polystyrène, ce type de fournitures représentant jusqu'à 10 % des frais généraux.

Sont particulièrement touchées par les hausses brutales du prix du gazole les petites exploitations, qui n'ont pas suffisamment de surface financière pour être en mesure de les absorber. Ainsi en est-il, notamment, de la pêche méditerranéenne, qui se caractérise par sa grande atomisation. Elle comporte en effet 3.300 pêcheurs pour 1.700 bateaux, dont une grande part, mesurant moins de 12 mètres, est destinée à la petite pêche côtière.

L'évolution des cours du pétrole ces dernières années est marquée par de nombreux pics, dont les répercussions ont été chaque fois immédiates sur les résultats d'exploitation des pêcheurs français . La forte hausse du prix du carburant au cours de l'année 2000 a ainsi brutalement interrompu le redressement du secteur de la pêche amorcé depuis le milieu des années 90, obligeant même de nombreux armateurs à mettre à quai leurs navires et débarquer leurs équipages, ce qui a entraîné cette même année de vifs mouvements sociaux et le blocage généralisé des ports.

De la même façon, la reprise du marché enregistrée depuis 2001 se trouve compromise par la très forte augmentation du prix du gazole, amorcée au premier semestre 2003 et s'amplifiant cette année. Liée à la flambée du prix du baril de pétrole (+50 % depuis le début de l'année 2004, +168 % depuis le début de l'année 2002), cette hausse historique pèse lourdement sur les comptes d'exploitation des entreprises du secteur et pourrait avoir des conséquences irrémédiables si elle se poursuivait.

c) Une évolution des revenus inquiétante

Le niveau de revenu des professionnels de la pêche est directement lié à la rentabilité des entreprises, laquelle dépend des deux facteurs précédemment évoqués : le volume des ventes et le niveau des charges d'exploitation.

Or, l'évolution du premier de ces deux paramètres - le chiffre d'affaires - est marquée par une forte augmentation -de l'ordre de 38 % pour la pêche fraîche et de 31 % pour la pêche congelée- entre 1995 et 2003. Cette hausse a été suivie d'une baisse -de respectivement 1,9 % et 6,3 %- au cours de l'exercice 2003, baisse qui devrait se trouver confirmée au cours de l'année 2004.

Quant au second paramètre - les charges d'exploitation -, il a évolué de façon procyclique ces dernières années, au rythme de la hausse des cours du baril précédemment évoquée. Ces charges se sont en effet accrues une première fois au cours de l'année 2000, aboutissant à la mise en place par le Gouvernement d'un plan global pour la pêche. Les mesures qu'il comportait avaient permis d'atténuer les surcoûts des entreprises pour les années 2001 et 2002, durant lesquelles le cours du pétrole s'était stabilisé. Or, la nouvelle et importante hausse du prix du carburant depuis le début de l'année 2003 est venue peser à nouveau sur les comptes d'exploitation.

L'évolution du revenu des pêcheurs , conjonction de ces deux paramètres, a logiquement suivi leur évolution croisée : après la violente crise de la pêche du début des années 90, qui avait causé la baisse spectaculaire des revenus des pêcheurs, ceux-ci se sont progressivement redressés depuis le milieu des années 90 jusqu'à l'année 2003 où ils ont recommencé à s'infléchir, cette baisse devant se confirmer pour l'année 2004.

Dans cette optique, la situation à court terme du secteur -très fragilisé- dépendra largement de l'évolution à venir des cours du carburant. Si ces derniers continuaient à augmenter, cela aurait sans doute des implications très diverses en termes de revenus selon les types de pêche pratiquées, les arts traînants (chaluts, dragues) étant naturellement beaucoup plus sensibles à la variable carburant que les arts dormants (filets, casiers, lignes).

2. Des problèmes structurels persistants

a) Une flotte vieillissante en constante diminution

? Au 1 er janvier 2004 , la flotte de pêche française métropolitaine comptait 5.695 navires totalisant une puissance de 891.249 kilowatts , parmi lesquels 1.149 de pêche industrielle et semi-industrielle (plus de 25 mètres), 2.469 de pêche artisanale et hauturière (de 12 à 25 mètres) et 2.077 de petite pêche côtière (moins de 12 mètres).

Ces chiffres sont en légère diminution par rapport à ceux du 1 er janvier 2003 (5.712 navires, soit une baisse de 0,3 %), et surtout, à plus longue échelle, par rapport à ceux du 1 er janvier 1984 (11.660 navires, soit une baisse de 51 %). Cette baisse tendancielle a été accentuée par la politique européenne d'encouragement à la sortie de flotte.

S'agissant de la répartition géographique, la Bretagne concentre près de 40 % de la puissance totale des navires , tandis que la façade méditerranéenne en rassemble 19 %, chacune des autres régions de la façade Manche-Atlantique n'en totalisant que 5 % (Haute-Normandie, Poitou-Charentes, Aquitaine) à 10 % (Nord Pas-de-Calais, Picardie, Basse-Normandie, Pays de la Loire).

? Parallèlement à sa réduction quantitative, la flotte de pêche française rencontre des problèmes liés à son évolution qualitative. Est ici en cause le vieillissement relatif de la flotte découlant notamment des contraintes communautaires imposées par le programme d'orientation pluriannuel (POP), mais aussi du coût élevé des investissements en matériel dans un secteur où la majorité des exploitations est constituée de microentreprises.

Par ailleurs, le vieillissement général des populations maritimes et les difficultés de recrutement parmi les jeunes ne sont pas sans poser de problèmes en termes de productivité.

b) Un secteur difficile en termes d'emploi

En 2003 , la pêche maritime comptait 25.897 marins 6 ( * ) (métropole et DOM). Depuis 1997, le secteur a été marqué par la perte de 1.054 emplois, soit une baisse de 3,9 % sur l'ensemble de la période. Ce recul doit certes être relativisé dans la mesure où l'emploi maritime a moins diminué durant ces 6 années qu'au cours de chacune des années de 1990 à 1995.

S'agissant de la répartition entre les différents types de navigation, la petite pêche , traditionnellement dominante, reste le principal secteur employeur de main d'oeuvre maritime (43,3 % des effectifs). La pêche au large, la conchyliculture petite pêche et la pêche côtière ont des poids sensiblement équivalents (16 à 19 %), la grande pêche restant minoritaire.

S'agissant de la répartition géographique, la Bretagne concentre un peu moins d'un tiers des effectifs totaux (28,8 %), suivie par les façades Nord-Normandie (18,4 %) et de Poitou-Charentes-Aquitaine (17,7 %), de la Méditerranée (13,4 %), des DOM (12,5 %) et de la région Pays de la Loire (8,9 %).

Plus généralement, le secteur de la pêche se caractérise par une pénurie de main-d'oeuvre . Cette carence, illustrée par le recours à de la main d'oeuvre étrangère, est particulièrement marquée sur certains segments de flottille, tel que celui de la pêche semi-industrielle.

En outre, constitue une spécificité du secteur de la pêche en matière d'emploi un taux limité d'inscription des chômeurs à l'ANPE, du entre autres à la non affiliation de ce secteur à l'assurance chômage des ASSEDIC et au faible recours des entreprises artisanales au réseau de l'ANPE.

c) Une dégradation des ventes en France et à l'export

? S'agissant de la commercialisation sur le territoire national, le chiffre d'affaires des ventes des pêches maritimes métropolitaines avoisine, en 2003, 1,15 milliard d'euros , confirmant la progression continue initiée en 2000. Ce chiffre cache toutefois d'inquiétantes tendances.

Tout d'abord, les quantités mises en vente dans les criées baissent pour la deuxième année consécutive de 2 %. La stabilité de la valeur des ventes en criée n'est due qu'à l'augmentation du prix moyen des produits, qui a été de 2 % en 2003 après 4 % en 2002. D'autre part, les premiers chiffres connus pour l'année 2004 font état d'un recul des quantités vendues de 12 %. En dépit de la hausse de 11 % du prix moyen, la valeur des ventes affiche une baisse de 2 %.

? Au point de vue du commerce extérieur, l'année 2003 a connu une baisse en valeur des importations ainsi qu'un recul , moins marqué, des exportations . Toujours très fortement négatif, le solde a légèrement diminué à 2,15 milliards d'euros.

Si les ventes à l'étranger de poisson entier congelé, de préparations et conserves de poisson ainsi que, dans une moindre mesure, de crustacés et de mollusques ont augmenté cette même année, on constate en revanche une forte baisse des ventes de poisson entier frais réfrigéré, de chairs et filets et de poissons séchés, salés et fumés.

L'Espagne et l'Italie restent de loin nos meilleurs clients (44,3 % de nos exportations à eux deux), devant la Belgique et l'Allemagne. S'agissant de nos fournisseurs, le Royaume-Uni est largement en tête, devant la Norvège et l'Espagne.

B. DES MESURES PONCTUELLES DEVANT ÊTRE SUIVIES DE RÉFORME À LONG TERME

1. La mise en place de dispositifs d'urgence par le Gouvernement

La poursuite de la hausse du cours du pétrole jusqu'à des niveaux records et ses conséquences objectives sur la rentabilité des entreprises, mais aussi la crainte envers des actions de mécontentement envisagées par les professionnels les plus affectées, ont incité les pouvoirs publics à mettre en place des mesures d'urgence afin de venir en aide aux secteurs les plus touchés.

? Le 18 juin, le ministre en charge de l'agriculture avait déjà annoncé une série de mesures en faveur des pêcheurs :

- autorisation pour le Crédit maritime d'octroyer un prêt bonifié de 3 millions d'euros afin d'acquérir, sur le marché des produits dérivés, une option permettant de se garantir contre une hausse excessive du prix du gazole. Ce prêt bonifié induit un coût budgétaire pour l'Etat de 1,65 million d'euros ;

- reports au cas par cas de cotisations patronales dues à l'Etablissement national des invalides de la marine (ENIM), à partir de l'examen d'éléments objectifs liés au compte d'exploitation des armements et pour une durée maximale de six mois ;

- examen par le Gouvernement des possibilités d'abonder les crédits alloués aux caisses chômage intempéries.

? Ces mesures n'ayant eu qu'un effet limité au regard de l'aggravation de la conjoncture, le ministre a annoncé le 26 août de nouvelles mesures dont les modalités pratiques seraient à définir après consultation des autorités européennes :

- mise en oeuvre d'opérations de promotion des produits de la mer, en privilégiant l'action des organisations de producteurs dont le renforcement est une priorité. 300.000 euros ont été mobilisés à cet effet par l'OFIMER ;

- renforcement des contrôles sur l'origine et la traçabilité des produits afin de veiller à maintenir une concurrence loyale dans le commerce des poissons ;

- réalisation, en liaison avec les collectivités territoriales, d'un audit relatif à la rationalisation des charges portuaires.

? La poursuite de la hausse du prix du gazole au mois de septembre a provoqué de fortes inquiétudes dans la profession, dont les conditions d'exploitation sont devenues extrêmement délicates. Plusieurs ports de pêche, en Méditerranée notamment, ont alors été bloqués par des exploitants qui ont ainsi immobilisé plusieurs milliers de navires.

Reçus le 5 octobre par le ministre en charge de l'agriculture, les professionnels du secteur ont obtenu la mise en place d'un dispositif d'urgence devant leur permettre d'affronter cette « mini crise » pétrolière. Mis au point par les ministères en charge de l'agriculture et de l'économie et annoncé le même jour, il consiste en trois mesures dont l'application sera suivie en concertation avec le Comité national des pêches.

Les mesures d'aide aux pêcheurs annoncées par le ministère en charge de l'agriculture le 5 octobre 2004

1. Une mesure d'aide immédiate aux entreprises les plus en difficulté, sous forme d'allègement de frais financiers . Elle sera dotée, dans un premier temps, d'un million d'euros et sera abondée en tant que de besoin.

La mise en oeuvre de cette mesure sera confiée aux services des directions des affaires maritimes, en liaison avec les préfets de départements, et associera le Crédit maritime et les représentants professionnels.

Les pêcheurs confrontés à des difficultés de trésorerie pourront obtenir auprès de l'ENIM et des services fiscaux un report de leurs charges sociales et fiscales après un examen au cas par cas de la situation de leur entreprise.

2. La mise en place rapide d'un système d'assurance carburant . A cet effet, une avance remboursable de 15 millions d'euros sera mise par l'Etat à la disposition de la filière pour aider au financement de produits d'assurance spécialisés. Il s'agit d'un système d'assurance contre les variations de prix au-delà d'un prix hors taxe de 27 centimes d'euro.

En outre, les cotisations versées par les marins pêcheurs pour alimenter ce fonds de prévention des aléas seront déductibles de leur revenu.

3. Des aménagements importants, applicables à partir des revenus 2004, au régime fiscal des marins pêcheurs travaillant en-dehors des eaux territoriales . Cette mesure, décidée en accord avec le ministère en charge de l'économie, répondrait à une demande récurrente des organisations professionnelles depuis plusieurs années et permettrait également, au-delà de son aspect ponctuel, de renforcer l'attractivité de la profession.

Les pêcheurs souhaitent à cet égard pouvoir bénéficier, au même titre que certaines professions travaillant en haute mer (tels que les salariés des plates-formes off-shore), de l'exonération fiscale pour les marins ayant plus de 183 jours de mer par an prévue par le II de l'article 81 A du Code général des impôts. Cette mesure d'exonération, dont le coût est en cours d'estimation, pourrait n'être que partielle et concernerait la pêche hauturière ainsi que la pêche à plus de 12 miles 7 ( * ) des côtes.

Si les mesures spécifiques aux pêcheurs, qui se chiffrent en dizaines de millions d'euros et dont votre commission se félicite, sont loin des 200 millions d'euros demandés par la profession, elles devraient cependant lui permettre de faire face à l'augmentation brutale du prix du gazole, du moins si le cours du pétrole se stabilise. Dans le cas contraire, le ministre en charge de l'agriculture avait envisagé la mise en place d'un dispositif communautaire favorisant les aides publiques au secteur de la pêche.

Or, la Commission européenne, interrogée sur la faisabilité d'un tel dispositif par le Gouvernement, a explicitement récusé tout projet en ce sens. Le commissaire européen en charge de l'agriculture, Franz Fischler, a en effet considéré que les possibilités en matière d'octroi d'aides, très restreintes, ne pouvaient être envisagées qu'en cas de « conséquences sociales » ou dans le cadre d'un plan de restructuration assorti de réductions des capacités de flotte tel que celui actuellement mis en oeuvre.

2. De nécessaires réformes structurelles à plus long terme

a) Le renforcement de l'attractivité du secteur

L'image relativement négative véhiculée par le secteur de la pêche -auquel le grand public ne s'intéresse souvent que par les crises et les actions sociales qu'il subit- doit être revalorisée afin de mettre en avant les atouts des professions de la mer. Malgré la baisse constante du nombre de marins-pêcheurs, le secteur des pêches maritimes est confronté en effet depuis plusieurs années à d'importantes difficultés de recrutement, les jeunes semblant moins intéressés à se former au métier et plus enclins à le quitter prématurément.

Cette situation a conduit l'administration des gens de mer à lancer, en juin 2001 , avec la profession, un contrat d'études prospectives (CEP) sur le secteur afin d'analyser l'origine de ces difficultés. A ainsi été mis en lumière le fait que la population de marins formés, en croissance constante depuis une dizaine d'années et atteignant désormais 1.200 personnes par an, n'est plus suffisante pour pallier les cessations d'activité anticipées. Une réforme du dispositif de formation, initiale comme continue, était donc devenue nécessaire.

Initiée en 2002 et commençant à être mise en oeuvre depuis le mois de septembre de cette année, cette réforme sera complétée et coordonnée avec les cursus de formation de marine marchande. Elle vise à faciliter le recrutement de publics diversifiés et à améliorer l'attrait de la filière pour les jeunes.

Elle repose sur un certain nombres de mesures parmi lesquelles :

- la réforme du certificat d'initiation nautique (CIN) et la création d'un brevet de premier niveau. Un groupe de travail mis en place au mois de septembre étudie actuellement le résultat des expérimentations de CIN par alternance menées cette année, avant d'en proposer une réforme ainsi que la création du brevet de premier niveau ;

- l'extension de la procédure de validation des acquis de l'expérience (VAE). Reconnue comme voie d'accès pleine et entière au même titre que les formations classiques, elle a commencé en 2003 et sera progressivement étendue cette année, jusqu'à une éventuelle généralisation à tous les niveaux de brevets ;

- la mise en place de deux baccalauréats professionnels . Ces deux diplômes, l'un d'« électromécanicien marine » et l'autre de « conduite et de gestion d'entreprises maritimes », communs aux secteurs de la pêche et de la marine marchande, seront normalement mis en place à la rentrée 2005 ;

- le développement de l'apprentissage et de l'alternance . Relancé à la demande des professionnels, il devrait leur permettre de s'impliquer directement dans la formation et l'insertion des marins, en utilisant notamment à leur propre profit des fonds jusqu'alors mobilisés pour partie à d'autres secteurs ;

- la mise en place du contrat de professionnalisation . Elle sera effective dès l'entrée en vigueur de la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie.

Votre rapporteur pour avis se félicite de la mise en oeuvre de cette réforme, qui devrait accroître notablement l'attractivité du secteur auprès de la main d'oeuvre potentielle . Elle rappelle également que la formation et l'apprentissage ne sont qu'un moyen d'atteindre cet objectif, auquel contribuent également les divers dispositifs d'aide et de soutien aux pêcheurs 8 ( * ) . Elle rappelle aussi que l'amélioration des conditions de travail et de sécurité doit être un objectif prioritaire en vue de renforcer l'attrait du secteur.

b) La modernisation des équipements et des méthodes de pêche

L'amélioration de la productivité des navires et de l'efficacité des systèmes de pêche et de commercialisation « au frais » peut constituer un moyen de pallier la diminution progressive de la flotte de pêche , afin de gagner en intensité ce qui sera perdu en extensivité. Plusieurs mesures visant à introduire les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) dans le secteur de la pêche ont ainsi été prises ces dernières années.

Ainsi, les pouvoirs publics ont soutenu financièrement, grâce à l'intervention de l'OFIMER et de l`IFOP, l'informatisation de l'ensemble des halles à marée . Les 41 criées françaises sont aujourd'hui toutes informatisées et transmettent régulièrement leurs données de vente au réseau inter criées (RIC), qui les centralise.

D'autre part, la quasi totalité des navires hauturiers a bénéficié d'aides publiques nationales (distribuées par l'OFIMER) et communautaires (dans le cadre du programme européen PESCA 1994-1999) afin de s'équiper en instruments de communication bord terre par satellite , en vue de mieux orienter la production lors du débarquement des captures.

Le bilan de ce programme est apparu contrasté : s'il a contribué à une plus grande intégration des NTIC au sein des navires, ses objectifs n'ont pas été atteints en termes d'annonces anticipées des apports. Au vu de ces résultats, les pouvoirs publics cherchent davantage à faire évoluer le comportement des acteurs en incitant la profession à mieux utiliser ces outils pour la régulation du marché. Les discussions actuelles sur le renforcement du rôle des organisations de producteurs devraient notamment y contribuer.

Au-delà des seules NTIC, le soutien technique et financier à la modernisation des méthodes et équipements dans le secteur de la pêche doit être poursuivi, afin que nos navires soient en mesure d'affronter au mieux la concurrence étrangère. Cette évolution doit, bien évidemment, se faire en partenariat avec la recherche, dont les débouchés pratiques peuvent être fondamentaux pour un secteur comme la pêche. Ainsi, l'actualité montre combien la mise au point de moteurs de navires moins « énergivores » serait profitable à la profession, en termes économiques comme environnementaux.

c) Un soutien réaffirmé à la promotion des produits de la mer

Il paraîtrait souhaitable d'intensifier les campagnes de promotion des produits de la mer , qu'elles soient générales ou par secteur, en prenant soin de « cibler » au mieux les publics et de tenir compte de l'évolution de leurs attentes . Le secteur de la pêche souffre sans doute, en effet, d'un insuffisant « affichage » par rapport à un secteur proche tel que l'agriculture. Or, il pourrait aisément faire la promotion des atouts des produits de la mer, en mettant en avant aussi bien leur diversité que les notions de plaisir ou de santé, tant sur les médias que dans des salons spécialisés ou sur les points de vente.

A cet égard, et de façon plus générale, il pourrait être intéressant de s'inspirer des recommandations formulées par le Conseil national de la consommation (CNC) dans l'avis relatif à la filière « marée » qu'il a adopté en décembre 2001. Mis en place en 2000, le groupe de travail dont est issu ce rapport a débattu de nombreux sujets propres à valoriser auprès des consommateurs l'ensemble des produits de la mer : nouveaux modes de production, étiquetage des produits, conditions de distribution, signes officiels de qualité ...

De façon synthétique, les préconisations de ce rapport étaient, entre autres :

- l'organisation d'un dialogue entre consommateurs et professionnels ;

- le développement des signes officiels de qualité ;

- la généralisation des guides de bonnes pratiques d'hygiène ;

- le respect d'un étiquetage informant convenablement le consommateur.

Si ces recommandations paraissaient fort à même de redynamiser la filière, les suites qui y ont été données n'ont malheureusement pu, à ce jour, être examinées par le CNC. Il conviendrait donc d'établir un bilan de leur application, en fonction duquel le conseil pourrait formuler des préconisations actualisées . Ce travail pourrait être effectué en coordination avec l'OFIMER, qui a pour mission de soutenir les programmes d'action mis en oeuvre par les professionnels en vue de valoriser les produits français auprès des professionnels.

*

* *

Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, la commission des affaires économiques et du plan a donné un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la pêche maritime et à l'aquaculture dans le projet de loi de finances pour 2005.

* 1 C'est-à-dire en ne tenant pas compte, dans la présentation du budget au titre de l'exercice 2003-2004, de la dotation correspondant à l'article 30 du chapitre 44-42, issue d'un transfert de gestion de la direction du Trésor vers le ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (MAAPAR).

* 2 Les trois autres missions du ministère, de nature interministérielle, sont les suivantes : « enseignement scolaire », « recherche et enseignement supérieur » et « sécurité sanitaire ».

* 3 Les trois autres programmes de cette mission ministérielle concernent les thèmes suivants : « valorisation des produits, orientation et régulation des marchés », « forêt » et « soutien des politiques de l'agriculture ».

* 4 Un chalutier prenant la mer deux semaines consomme entre 24.000 et 32.000 litres de gazole.

* 5 Etude réalisée par le Laboratoire d'économie de Nantes (LEN) et le Centre d'observation et de recherche sur les ressources aquatiques et les industries du littoral (CORAIL) sur un échantillon de navires français en 2001 et 2002.

* 6 Français ou originaires de l'Union européenne, ayant navigué au moins un jour à la pêche au cours de l'année 2003.

* 7 Soit 19,3 kilomètres.

* 8 Tels que le système « Sofipêches », l'abattement de 50 % sur le bénéfice pour les jeunes pêcheurs, l'octroi d'aide par l'IFOP ou encore la mise à disposition de prêts bonifiés pour l'accès à la propriété.

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