C. UN VOLONTARIAT À RECONNAÎTRE ET À DÉVELOPPER

1. Régulariser la situation des volontaires existants

En dépit de l'absence de statut adapté, des personnes volontaires exercent déjà, en France, une collaboration désintéressée avec des associations à temps plein, pour quelques mois ou quelques années.

Or, leur qualification juridique est incertaine et varie au gré des litiges dont les tribunaux sont saisis. De plus, les volontaires ne bénéficient pas d'une véritable protection sociale ni de la prise en compte de leur engagement dans le calcul des droits à la retraite.

a) Une insécurité nocive pour les associations, passibles de sanctions pénales et de lourds redressements mettant en péril un équilibre financier souvent précaire

La plupart des associations fournissent aux volontaires une indemnité, un logis et les repas. La perception de cette indemnité, qui dénaturerait le caractère désintéressé de la collaboration, a motivé des requalifications en salariat par les inspecteurs du travail ou les contrôleurs des Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), redressements confirmés par certaines cours d'appel.

Les Compagnons bâtisseurs, qui appartiennent à la Coordination pour le travail volontaire des jeunes (Cotravaux) 14 ( * ) , qui regroupe douze associations agissant en France et à l'étranger pour promouvoir le volontariat dans les domaines de l'action sociale, de l'animation, l'aménagement, le patrimoine et la protection de l'environnement, en ont ainsi été victimes. Ils interviennent de douze à vingt-quatre mois sur des projets d'habitat social auprès et avec des familles défavorisées. Les Compagnons bâtisseurs de Bretagne sont actuellement pendants devant la Cour de cassation.

Les Compagnons de la communauté d'Emmaüs ont également été qualifiés de salariés en 1998 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, avant que la Cour de cassation ne revienne en 2001 sur cette qualification

En revanche, les accompagnateurs de la Croix-Rouge française ont été qualifiés en 1999 par la cour d'appel de Paris de « collaborateurs bénévoles permanents ».

Des poursuites pénales ont par ailleurs été engagées à l'encontre de responsables de la fédération de l'Arche, qui rassemble en France vingt-cinq associations accueillant en communauté un millier de personnes handicapées mentales. Ses 250 volontaires reçoivent un pécule, sont nourris, logés, bénéficient d'une protection sociale, et ont signé un « contrat d'appartenance » actant leur démarche volontaire limitée dans la durée, reconnaissant aux parties un droit de rupture réciproque à effet immédiat.

Ce régime, pourtant reconnu par la direction des relations du travail en 1981 et 1996 et par la direction de la sécurité sociale en 1983, a été remis en cause par l'inspection du travail. Seize des vingt-six communautés de l'Arche ont ainsi fait l'objet de contrôles en 2002 et 2003, donnant lieu à huit procès-verbaux pour travail dissimulé. Le président de la communauté de l'Arche de Lyon a ainsi été condamné en novembre 2004 à une amende de 1.500 euros avec sursis pour emploi de travailleurs étrangers en situation irrégulière 15 ( * ) et de 3.000 euros pour travail dissimulé. Le président de la communauté de Dieppe est en instance de jugement pour recours abusif au contrat à durée indéterminée et non paiement du salaire minimum.

Rappelons en effet que l'employeur ayant recours au travail dissimulé est passible de sanctions pénales . Les personnes physiques peuvent être condamnées à trois ans d'emprisonnement et à 45.000 euros d'amende (article L. 362-3 du code travail) assortis de peines complémentaires. Pour les personnes morales (article L. 362-6 du code du travail), le taux maximal de l'amende peut être porté au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques. En outre, le salarié dissimulé a la possibilité de réclamer devant le conseil de prud'hommes le rétablissement de ses droits : bulletins de paie, rémunération au montant légal ou conventionnel applicable, accomplissement des formalités et versement des cotisations éludées, ainsi que des dommages et intérêts.

L'Arche s'est depuis placée sous le statut du volontariat de cohésion sociale et de solidarité institué par la loi du 14 mars 2000, tout comme l'association Unis-cité à partir de 2003.

Néanmoins, de nombreuses associations demeurent en dehors de ce cadre, tout comme leurs volontaires.

* 14 Notamment « solidarités jeunesses », qui permet à des groupes internationaux de volontaires d'accompagner pendant six à neuf mois des personnes en insertion ou en formation, et « jeunesse et reconstruction », qui coordonne en France les échanges de la fédération internationale ICYE ( International Cultural Youth Exchange ).

* 15 S'agissant de personnes disposant d'un titre permettant le séjour en France mais non l'exercice d'une activité salariée.

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