Avis n° 80 (2006-2007) de M. Claude LISE , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 23 novembre 2006

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N° 80

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2006

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2007 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME IV

OUTRE-MER

Par M. Claude LISE

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Herisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Christian Gaudin, Jean Pépin, Bruno Sido, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Yves Coquelle, Roland Courteau, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Mme Michelle Demessine, M.  Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, André Ferrand, Alain Fouché, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Adrien Giraud, Mme Adeline Gousseau, MM. Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Mme Sandrine Hurel, M. Charles Josselin, Mme Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Daniel Soulage, Michel Teston, Yannick Texier, Jean-Pierre Vial.

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Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 3341 , 3363 à 3368 et T.A. 619

Sénat : 77 et 78 (annexe n° 17 ) (2006-2007)

Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

En attendant leur modification annoncée par la loi de finances rectificative pour 2006 et après la minoration de crédits adoptée par l'Assemblée nationale, les crédits de la mission « Outre-mer » inscrits dans le projet de loi de finances soumis au Sénat, s'établissent à environ 1,95 milliard d'euros en crédits de paiement, en légère baisse par rapport à 2006.

S'ils ne représentent qu'une fraction de la dépense publique consacrée aux départements et collectivités d'outre-mer, ils comportent les dotations des politiques pour lesquelles la spécificité des problèmes posés justifie leur gestion directe par le ministère de l'outre-mer, notamment l'emploi et le logement, deux secteurs cruciaux pour le développement économique et social des départements et collectivités d'outre-mer et sur lesquels sera centré le présent avis.

En ce qui concerne le soutien à l'emploi et à l'activité économique, on peut regretter, outre la régression des crédits (-5 %), les déficiences constatées cette année en matière de pilotage, de contrôle et d'évaluation des dispositifs les plus nécessaires à la compensation des handicaps qui affectent l'économie ultramarine, tel celui des exonérations de charges sociales.

Votre rapporteur pour avis souhaite donc que les travaux de la commission nationale d'évaluation de la loi de programme pour l'outre-mer 1 ( * ) permettent d'affiner et de mieux cibler ces dispositifs, qui devraient selon lui s'inscrire dans une véritable stratégie de développement tendant à valoriser les potentialités des départements et collectivités d'outre-mer. Ils devraient en effet devenir de véritables « interfaces actives » favorisant les échanges de technologies et de savoir-faire entre, d'une part, les régions dont ils sont proches et, d'autre part, la France et l'Europe.

En ce qui concerne le logement qui est, outre-mer plus encore qu'en métropole, une priorité sociale et économique et qui est dans une situation très difficile, votre rapporteur pour avis s'inquiète de l'adéquation des solutions proposées ou envisagées pour remédier à des problèmes de financement dont une mission d'audit de modernisation et le contrôle budgétaire récemment effectué par le rapporteur spécial de la commission des Finances du Sénat, M. Henri Torre, ont révélé toute la gravité.

*

* *

I. LES MOYENS DE LA MISSION ET LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE L'OUTRE-MER

Si l'estimation du montant total en 2007 des dépenses publiques affectées à l'outre-mer fait apparaître, en euros courants, une légère augmentation des crédits de paiement, les crédits de la mission « Outre-mer » sont en revanche en baisse.

Dans un contexte financier extrêmement contraint, qui nécessite un effort d'optimisation de la dépense mais qui constitue aussi une puissante incitation à la baisse des crédits et au désengagement de l'Etat, votre rapporteur pour avis s'inquiète des interrogations que suscitent le pilotage, le suivi et l'évaluation des interventions publiques outre-mer.

A. L'ÉVOLUTION DES MOYENS

1. Les moyens financiers

Les dotations de la mission « Outre-mer » représentent à peine le sixième des crédits budgétaires affectés aux départements et des collectivités d'outre-mer.

En 2007, selon les documents budgétaires, le total des dépenses publiques en faveur des départements et des collectivités d'outre-mer devrait s'élever, en autorisations d'engagement (AE) , à 12,30 milliards d'euros , contre 12,38 milliards d'euros en 2006 ( -0,6 % ) et, en crédits de paiement (CP) , à 12,41 milliards d'euros , soit une augmentation, en chiffres courants, de 4,6 % par rapport à 2006 (11,86 milliards d'euros).

En crédits de paiement, l'ensemble des crédits budgétaires consacrés à l'outre-mer ne représente que 3,6 % des dépenses totales du budget général de l'État.

a) Les moyens affectés à la mission « Outre-mer »

Les crédits budgétaires devraient représenter en 2007 :

- 2,03 milliards d'euros en autorisations d'engagement , soit 0,6 % du montant total des autorisations d'engagement du budget général, en baisse de 14 % par rapport aux crédits ouverts par la loi de finances initiale pour 2006 (2,36 milliards d'euros).

- 1,96 milliard d'euros en crédits de paiement , soit 0,6 % également du montant total des crédits de paiement du budget général, en baisse de 1,5 % par rapport aux crédits ouverts par la loi de finances initiale pour 2006 (1,99 milliard d'euros).

- Lors de la seconde délibération à l'Assemblée nationale, les crédits de la mission « Outre-mer » ont été minorés de 10,7 millions d'euros en AE et en CP afin de financer des ouvertures de crédits.

La répartition par titre des crédits de paiement fait apparaître la prédominance des dépenses d'intervention du titre 6 (89 %) par rapport aux autres catégories de dépenses : moins de 8 % pour les dépenses de personnel, 2,5 % pour les dépenses de fonctionnement et 0,8 % pour les dépenses d'investissement.

A ces crédits devraient s'ajouter 4,63 millions d'euros de fonds de concours , dont le montant est évalué pour 2007 à un niveau inférieur de plus de moitié aux recettes qui étaient attendues pour 2006 (10,08 millions d'euros).

Enfin, les dépenses fiscales associées aux programmes 138 (Emploi outre-mer) et 123 (Conditions de vie outre-mer), sont évaluées respectivement, pour 2007, à 409 et 2 104 millions d'euros.

b) La répartition des crédits de la mission « Outre-mer »

Le tableau ci-après indique la répartition par programme et par action des crédits de la mission « Outre-mer », ainsi que leur évolution par rapport aux dotations ouvertes par la loi de finances initiale pour 2006.

Sous réserve des développements que le présent rapport consacrera aux politiques de l'emploi (programme 138) et du logement (programme 123, action 01), ce tableau peut appeler les commentaires suivants :

- les comparaisons chiffrées d'une année sur l'autre ne sont, contrairement aux années précédentes, que marginalement affectées par des modifications de périmètre : les crédits prévus pour 2007 sont cependant diminués d'une part par le transfert au ministère de la santé de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) des collectivités d'outre-mer (22,66 M€) et, d'autre part, par la correction d'une surévaluation des crédits destinés au compte d'affectation spéciale « Pensions » pour le service militaire adapté (12,14 M€) ;

- au sein du programme « Conditions de vie outre-mer », la ventilation des crédits 2006 entre les actions a été modifiée, 2,2 M€ en AE et en CP ayant été transférés de l'action « action sociale » à l'action « logement », dont les crédits ont ainsi été portés à 270 M€ en AE et 173 M€ en CP ;

- les crédits votés en LFI ont été abondée, en CP, par des reports de 13,6 M€ et par l'ouverture de 30 M€ de crédits au titre de l'épidémie de chikungunya à La Réunion. En revanche, les crédits disponibles ont été affectés par 2,7 M€ d'annulations, et par la mise en réserve de 18,4 M€ en janvier, de 13 M€ du fait de la surestimation des crédits du CAS « Pensions », de 0,1 % des dépenses de personnel liées aux programmes « Emploi outre-mer » et « Intégration et valorisation de l'outre-mer ».

RÉPARTITION ET ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT
DE LA MISSION « OUTRE-MER »

( en millions d'euros )

Programmes et actions

CP ouverts
en 2006

CP demandés pour 2007

Evolution

138 Emploi outre-mer

1 219,25

1 158,33

- 5 %

01. Abaissement du coût du travail et dialogue social

882,59

838,44

- 5 %

02. Mesures d'insertion et aides directes à l'emploi

336,65

319,89

- 5 %

123 Conditions de vie outre-mer

410,28

392,18

- 4 %

01. Logement

170,81

175,75

+ 3 %

02. Aménagement du territoire

93,58

101

+ 8 %

03. Continuité territoriale

52,57

54,03

+ 3 %

04. Sanitaire et social

89,45

58,40

- 35 %

05. Culture, jeunesse et sports

3,86

3

- 22 %

160 Intégration et valorisation de l'outre-mer

361,34

412,43

+ 14 %

01. Collectivités territoriales

268,15

313,28

+ 17 %

02. Coopération régionale

3,18

3

- 6 %

03. Soutien et état-major

90

96,15

+ 7 %

2. Les moyens en personnel

Les moyens en personnels demandés pour 2007 au titre de la mission « Outre-mer » représentent 4.895 emplois en équivalent temps plein travaillé (ETPT), ce chiffre incluant 2.900 ETPT correspondants aux volontaires du service militaire adapté (SMA) en formation.

Les moyens en personnel du ministère de l'outre-mer sont inscrits à l'action « soutien état-major » du programme 160. Ils totalisent 1.180 emplois en équivalent temps plein travaillé, soit 5 de moins qu'en 2006, cette variation nette résultant de 6 suppressions au titre du non remplacement d'un départ à la retraite sur deux, et d'un transfert d'emploi du ministère de l'équipement à l'administration centrale.

A ces moyens s'ajoutent ceux inscrits au programme « emploi outre-mer » au titre du SMA soit, hors volontaires du SMA, 815 emplois en ETPT, dont 734 fonctionnaires et contractuels militaires.

B. LES INTERROGATIONS PORTANT SUR LA CONDUITE, LE SUIVI ET L'ÉVALUATION DE L'ACTION DE L'ÉTAT OUTRE-MER

Les développements consacrés au ministère de l'outre-mer par le Rapport public 2005 de la Cour des comptes portent un jugement sévère sur la coordination de l'action de l'Etat outre-mer et sur l'absence d'évaluation de cette action, jugement largement corroboré par les rapports des missions d'audit de modernisation qui ont été menées cette année et par l'avis du Conseil économique et social sur l'évaluation de la loi de programme pour l'outre-mer (LOPOM).

Votre rapporteur pour avis espère obtenir des précisions sur les mesures envisagées pour remédier aux insuffisances constatées, afin de satisfaire aux objectifs de la LOLF et de garantir que soient atteints les résultats en termes de croissance économique et de création d'emplois attendus de l'application de la loi de programme de 2003. Il regrette par ailleurs que la mise en oeuvre de la LOLF ne se soit pas traduite -bien au contraire- par une amélioration de l'information du Parlement.

1. Le constat dressé par la Cour des comptes

La Cour des comptes relève que « jusqu'à présent le ministère de l'outre-mer n'a pas exercé la plénitude de la mission dont il est investi, faute, semble-t-il, d'une réelle volonté politique de le doter des moyens appropriés et d'avoir fait le choix entre une logique de mission et une logique de gestion ». Elle dresse, en trois points, un constat sans appel :

- la mission de coordination du ministère est mal assurée, notamment parce que la plupart des grands ministères disposent, pour leurs interventions hors de la métropole, de structures ou d'opérateurs dotés de crédits propres ;

- l'administration centrale du ministère n'est pas en mesure d'exercer ses missions en raison tant de son « incapacité à maîtriser la fonction juridique », rendue particulièrement importante par la réforme constitutionnelle de 2003, que de l'insuffisance de ses moyens administratifs et humains ;

- cette situation rend « difficile, sinon impossible, d'évaluer les politiques engagées » : la Cour des comptes souligne notamment la nécessité d'une « réflexion approfondie sur les lacunes de la fonction d'information », à défaut de laquelle l'application de la LOLF risque d'être « inopérante », la Cour estimant, ce qui est grave, que le ministère de l'outre-mer n'est pas en mesure de renseigner les indicateurs de performance.

Dans le même sens, le Conseil économique et social juge nécessaire la mise en place de mécanismes d'évaluation de l'application de la loi de 2003, et d'abord d'un appareil statistique plus homogène et adapté aux besoins de cette évaluation. Quant aux missions d'audit de modernisation, elles ont relevé l'insuffisance de pilotage des actions de l'État, la mission chargée de l'évaluation du dispositif d'exonération de charges sociales soulignant en particulier les insuffisances de l'appareil statistique, qui ne tient pas compte des spécificités de la réglementation, le caractère lacunaire des informations relatives aux emplois et « l'inexistence » de la politique de contrôle.

2. Les mesures annoncées par le ministère de l'outre-mer

a) Le projet de réorganisation du ministère

En réponse à une question de votre rapporteur pour avis, le ministère de l'outre-mer a indiqué qu'il étudiait actuellement un projet de réorganisation de son administration centrale, les textes correspondants devant être publiés avant la fin de cette année.

Ce projet porte sur la création d'un secrétariat général qui aura autorité sur les deux directions du ministère, la direction des affaires politiques, administratives et financières (DAPAF) et la direction des affaires économiques, sociales et culturelles (DAESC). Sont en outre prévues la création d'un service juridique et, au sein de la DAPAF, celle d'une sous-direction de l'évaluation, de la synthèse, de la prospective et du contrôle de gestion.

Il est précisé que cette réforme sera effectuée sans création d'emplois. Elle se traduit dans le projet de budget pour 2007 par une prévision de dépense de 200.000 € couvrant les requalifications d'emplois correspondant à la création d'un poste de secrétaire général, d'un poste de chef de service et d'un poste de sous-directeur.

b) L'audit de modernisation sur le pilotage de la dépense de l'État outre-mer

En se référant au rapport public annuel de la Cour des comptes, le ministère de l'économie et des finances a lancé au mois d'octobre 2006 un audit de modernisation sur le pilotage de la dépense de l'État outre-mer.

Relevant l'absence d'un outil de suivi des dépenses de l'État outre-mer adapté au nouveau cadre de la LOLF, il assigne comme objectif à cet audit la mise en place d'un outil spécifique de suivi et de pilotage de l'action de l'État outre-mer, « sous l'angle financier comme sous l'angle de la performance ».

Il est précisé que les travaux de la mission d'audit devront chercher à s'inscrire dans la perspective du projet CHORUS, dont on rappellera que le démarrage est attendu en 2009.

c) La nécessité de veiller aussi à l'information du Parlement

Votre rapporteur pour avis demandera au gouvernement de lui apporter des précisions sur la réorganisation envisagée des services du ministère de l'outre-mer et sur les mesures qui pourront être prises, avant même la mise en oeuvre de CHORUS, pour améliorer le suivi et l'évaluation des actions menées outre-mer.

Mais il souligne que l'application de la LOLF doit aussi permettre d'améliorer l'information et les moyens de contrôle du Parlement. A cet égard, il est regrettable que la loi de finances rectificative pour 2005 ait supprimé, à l'initiative de l'Assemblée nationale, les deux annexes « jaunes » consacrées aux départements et régions et aux collectivités d'outre-mer.

Prévus par la loi de finances pour 1969, ces documents, dont le contenu avait été considérablement enrichi en application de dispositions introduites dans la loi de finances pour 2004 à l'initiative de la commission des Finances du Sénat, comportaient des informations détaillées et extrêmement pertinentes sur l'action des différents ministères et sur l'application des législations spécifiques à l'outre-mer.

Le « document de politique transversale » qui est censé les remplacer a un contenu informatif nettement moins riche, et ne porte au surplus que sur une fraction des missions et programmes concourant à l'action de l'Etat outre-mer.

Votre commission vous proposera donc un amendement tendant à intégrer dans le nouveau document de politique transversale les informations qui figuraient dans les « jaunes » concernant l'outre-mer.

*

* *

II. L'EMPLOI ET LE SOUTIEN DE L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE

L'indicateur de la demande d'emploi a poursuivi en 2005 sa diminution régulière dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon passant de 22,8 % à la fin de 2004 à 22,2 % à la fin de 2005 2 ( * ) .

En dépit des progrès réalisés, et notamment de la croissance régulière, selon les chiffres de l'UNEDIC, de l'emploi salarié (+2,4 % en 2004 comme en 2005) -moyenne qui recouvre toutefois des évolutions très diverses- le soutien à l'activité économique et à la création d'emplois demeure une priorité majeure outre-mer, pour des raisons à la fois démographiques et économiques :

- la jeunesse de la population, qui se traduit chaque année par de très nombreuses arrivées sur le marché du travail ;

- la pression migratoire dans certains départements ou collectivités (Mayotte, Guyane. Guadeloupe) ;

- les surcoûts liés à l'éloignement et à l'insularité ;

- le différentiel en termes de coût du travail avec les pays avoisinants.

Ainsi, pour prendre l'exemple de La Réunion, cité par l'avis du Conseil économique et social, 3.000 à 3.500 emplois sont créés chaque année, mais il en faudrait 8 à 10.000 pour résorber le chômage.

Il convient également de rappeler que le nombre des allocataires du RMI continue de progresser : selon les documents budgétaires, il atteignait, au 30 juin 2006, 391.598 personnes pour l'ensemble de l'outre-mer (dont plus de 155.000 dans les DOM) soit près de 22,2 % de la population ultramarine, contre 4,2 % en métropole.

Pour 2007, les moyens consacrés à la politique de l'emploi, inscrits au programme 138 « Emploi Outre-mer » s'élèveront en crédits de paiement à 1.158,33 millions d'euros (59 % du total des crédits de paiement de la mission) en baisse de 5 % par rapport à 2006 (1.219,25 millions d'euros). Les dépenses fiscales associées au programme sont quant à elles évaluées à 409 millions d'euros en 2007, contre 402 en 2006.

A. LES CRÉDITS CONSACRÉS À L'ABAISSEMENT DU COÛT DU TRAVAIL ET AU DIALOGUE SOCIAL

Les mesures en faveur de l'emploi financées sur l'action 01 du programme 138 recouvrent, outre les exonérations de charges sociales permettant d'abaisser le coût du travail dans les DOM et à Saint-Pierre et Miquelon, divers dispositifs de soutien à la création d'entreprises et d'emplois bénéficiant aux départements et collectivités d'Outre-mer.

Cette action comporte également, à hauteur de 231.749 € en crédits de paiement, des « aides à la structuration du dialogue social » (dotées de 200.000 € en loi de finances initiale pour 2006), destinées à la formation des partenaires sociaux en vue de l'amélioration des pratiques de négociation collective, ainsi qu'un crédit de 273.548 € (200.000 € en 2006), destiné à l'accompagnement et à l'évaluation des mesures mises en oeuvre au titre de l'action.

1. Le dispositif d'exonération des charges patronales de sécurité sociale

L'essentiel des crédits demandés au titre de l'action seront consacrés au remboursement des exonérations de charges sociales prévues par la loi de programme pour l'Outre-mer du 21 juillet 2003 et applicables dans les quatre DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Sans anticiper sur l'issue des travaux de la commission nationale d'évaluation de la LOPOM, votre rapporteur pour avis évoquera, à l'occasion de l'examen de ces crédits, les analyses et les propositions formulées par l'avis du Conseil économique et social sur l'évaluation de la LOPOM et par le rapport de la mission d'audit de modernisation sur l'évaluation du dispositif d'exonérations de charges sociales spécifique à l'Outre-mer.

a) L'évolution des dépenses et l'évaluation des effets du dispositif sur l'emploi

Le rappel du dispositif

Le dispositif mis en place par la loi de programme, qui reprend et amplifie celui prévu par la loi d'orientation pour l'Outre-mer 3 ( * ) , s'applique dans les quatre DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Il a pour objet d'abaisser le coût du travail et d'améliorer la compétitivité des entreprises les plus exposées à la concurrence ou aux handicaps qui affectent l'économie ultramarine.

A cette fin il prévoit une exonération des charges patronales de sécurité sociale bénéficiant :

- à toutes les TPE de moins de 11 salariés, dans la limite de 1,3 SMIC, cette exonération continuant à bénéficier à leurs 10 premiers salariés lorsqu'elles viennent à dépasser cet effectif. Dans le secteur du BTP, cette exonération bénéficie aux entreprises de 50 salariés au plus et est réduite de 50 % pour les entreprises occupant plus de 50 salariés ;

- aux entreprises de transport maritime ou aérien desservant l'Outre-mer, pour l'ensemble de leurs effectifs et dans la limite de 1,3 SMIC ;

- aux entreprises des « secteurs éligibles » 4 ( * ) pour l'ensemble de leurs effectifs et dans la limite de 1,4 SMIC ;

- aux entreprises des secteurs du tourisme, de la restauration de tourisme classée et de l'hôtellerie, pour l'ensemble de leurs effectifs et dans la limite de 1,5 SMIC.

L'évolution des dépenses

La dotation inscrite au PLF 2007 au titre du remboursement des exonérations de cotisations patronales s'élève à 823 millions d'euros (830 millions d'euros en LFI 2006 modifiée). Elle doit couvrir le coût des exonérations « loi de programme » mais aussi celui des exonérations correspondant aux contrats d'accès à l'emploi (CAE) et de retour à l'emploi (CRE), aucune indication n'étant fournie quant aux coûts respectifs de ces trois dispositifs. Selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, la diminution en 2007 du montant de cette dotation tiendrait compte d'une recommandation du rapport d'audit « qui table sur une amélioration du recouvrement des cotisations ».

En l'absence d'informations permettant de reconstituer le mode de computation du montant estimé des exonérations de cotisations patronales imputables à la LOPOM pour l'année 2005, votre rapporteur pour avis se contentera de juxtaposer les différents chiffres qu'il a pu rassembler :

- 789 millions d'euros selon le ministère de l'Outre-mer (source ACOSS, résultats provisoires) ;

- 802 millions d'euros selon le rapport de la mission d'audit de modernisation ;

- 833 millions d'euros pour le total des exonérations accordées au titre de la LOOM et de la LOPOM, selon l'avis du Conseil économique et social (estimations communiquées par le ministère de l'Outre-mer).

L'évaluation des résultats

Selon les indications fournies à votre rapporteur pour avis par le ministère de l'Outre-mer, 36.970 entreprises, dont presque 91 % de moins de 11 salariés, étaient concernées à la fin de 2005 par le dispositif d'exonération « LOPOM », qui permet d'obtenir en moyenne une baisse de 29 % du coût du travail. Selon le rapport de la mission d'audit, le champ d'application de ce dispositif s'étendrait aux 3/4 des établissements hors administration et à plus de 180.000 salariés, soit 62 % des emplois dans le secteur concurrentiel.

Comme le relèvent l'avis du CES et le rapport de la mission d'audit, il est difficile d'évaluer les résultats d'un dispositif qui n'est que récemment entré en vigueur, et d'en distinguer les effets propres de ceux induits par d'autres aides -ou d'autres facteurs pouvant influer sur le niveau d'emploi.

Votre rapporteur pour avis juge cependant important que ces deux études s'accordent pour souligner la nécessité de dispositifs spécifiques à l'outre-mer et celle de préserver la « visibilité » nécessaire aux chefs d'entreprise en évitant de bouleverser l'économie du système ou de remettre en cause l'engagement pluriannuel contenu dans la loi de programme.

Il relève également que sont pris en compte :

- l'intérêt d'un dispositif qui, n'étant pas limité aux bas salaires, peut faciliter le recrutement, difficile en outre-mer, de personnels d'encadrement ;

- les résultats « globalement positifs » de la politique d'abaissement du coût du travail sur la situation ultramarine de l'emploi, le Conseil économique et social relevant en particulier à cet égard la baisse du chômage, les taux de créations d'emplois et le solde net des créations d'entreprises -3.000 à 3.500 par an- créations qui ont fortement progressé en 2004 et 2005 ;

- ses effets également positifs sur le maintien de l'emploi ;

- son impact important sur la réduction du travail clandestin.

b) Les préconisations du Conseil économique et social et de la mission d'audit de modernisation

Il appartiendra naturellement à la commission nationale d'évaluation de tirer les conclusions des travaux du Conseil économique et social et du rapport de la mission d'audit.

A ce stade de la réflexion, votre rapporteur pour avis se bornera donc à relever quelques convergences au niveau des constats et à présenter certaines des propositions formulées qui peuvent constituer des bases de réflexion.

Les constats

La faiblesse du pilotage, les insuffisances dans la collecte des données, l'absence de mesures de contrôle et de système d'évaluation sont relevées aussi bien par la mission d'audit que par le Conseil économique et social.

Il est également constaté que les « effets de seuil » que la LOPOM s'était cependant efforcée de lisser perdurent : la mission d'audit comme le CES soulignent la tendance des entreprises à limiter leurs effectifs ou à créer des filiales pour optimiser les exonérations dont elles peuvent bénéficier.

La mission d'audit note ainsi qu'en Guyane l'effet du seuil de 11 salariés est parfois considéré comme un frein à la restructuration et au développement de l'économie ; le Conseil économique et social insiste quant à lui sur les conséquences négatives dans le secteur du BTP du seuil de 50 salariés, qui incite à la multiplication de « petites unités » qui sont dans l'incapacité de répondre seules aux appels d'offres concernant les grands chantiers et il observe qu'à La Réunion le nombre des entreprises de BTP de plus de 50 salariés est passé entre 2002 et 2005 de 26 à 18.

Enfin, le système est jugé insuffisamment sélectif, ce qui en particulier limite son efficacité dans les secteurs les plus exposés.

Les préconisations

Les recommandations formulées par la mission d'audit pour améliorer les conditions de l'évaluation des exonérations de charges sociales contiennent des éléments intéressants notamment en ce qui concerne :

- la collecte des données relatives aux effectifs exonérés : il pourrait être envisagé de doter les caisses générales de sécurité sociale de moyens propres à obtenir un meilleur respect des obligations de déclaration des effectifs concernés, à condition naturellement qu'aucune suspension des exonérations ne puisse intervenir hors du cadre d'une procédure « graduée » comportant plusieurs étapes (avertissement, mise en en demeure...) ;

- l'analyse économique du champ des exonérations et celle de la masse salariale pourraient être améliorées en développant la collaboration entre l'INSEE et l'ACOSS, et l'exploitation statistique des déclarations annuelles des salaires ;

- le pilotage du dispositif : les recommandations portent à cet égard sur les échanges d'informations entre les organismes publics, sur le renforcement de la coopération interministérielle pour améliorer le suivi des exonérations et permettre l'élaboration d'outils d'évaluation.

En ce qui concerne les améliorations possibles du dispositif , l'avis du Conseil économique et social propose également des pistes intéressantes :

- il avance, sous réserve d'une étude de son coût financier, l'idée d'une exonération des charges uniforme pour toutes les entreprises sur la base des 10 premiers salariés, ou des 50 premiers salariés dans le BTP ;

- il préconise l'octroi d'exonérations plus favorables pour les secteurs très exposés, dont la définition pourrait être affinée en fonction du marché ou de la situation spécifique de chaque département d'outre-mer, ou pour les TPE ou les entreprises artisanales s'organisant en groupements.

2. Les dispositifs favorisant la création d'emplois et d'entreprises

Ces dispositifs devraient être dotés en 2007 de près de 15 millions d'euros en crédits de paiement, dont le « bleu » donne une répartition indicative, eu égard à la fongibilité des crédits.

a) Le projet initiative jeune (PIJ) création d'entreprise

Il est prévu d'affecter l'essentiel des crédits, soit 12 millions d'euros (12,6 millions d'euros en 2006) au dispositif « projet initiative jeune (PIJ) création d'entreprise », qui permet d'accorder une aide financière aux jeunes de moins de 30 ans ou aux bénéficiaires d'emplois jeunes arrivant au terme de leur contrat qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise.

Entre le 1 er janvier et le 1 er août 2006, cette mesure a bénéficié à 930 jeunes, dont 10 étaient originaires de Mayotte.

b) Les primes à la création d'emplois

Les primes à la création d'emplois dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon

Une dotation de 1,12 million d'euros en crédits de paiement avait été prévue en 2006 pour le financement de ces primes, qui sont versées à l'employeur. Elle est portée pour 2007 à 1,64 million d'euros. Elle a bénéficié, en 2005, à 366 jeunes pour un montant total de 0,8 million d'euros.

Les primes à la création d'emplois à Mayotte

Créé par la loi de programme du 21 juillet 2003, ce dispositif, mis en place en 2004, s'adresse aux entreprises souhaitant recruter un jeune de moins de 26 ans. Il sera doté en 2007 de 0,23 million d'euros. En 2005, il a bénéficié à 20 jeunes mahorais pour une dépense de 10.950 €.

Les primes à la création d'emplois à Wallis-et-Futuna

Cette mesure a également été prévue par la loi de programme de 2003 pour encourager la création d'emplois dans le secteur privé ; elle a pour contrepartie une aide dégressive versée sur trois ans aux entreprises. Le montant des crédits pour 2007 s'élève à 80.000 € (20.000 € en 2005 et 30.000 € en 2006).

c) Les mesures de restructuration en faveur des entreprises en difficulté

Les crédits prévus à ce titre ont pour objet, notamment dans le cadre des plans sociaux, de financer des actions de retour à l'emploi ou de reconversion professionnelle. Ils devraient s'élever en 2007 à 945.000 €.

B. LES DISPOSITIFS D'AIDE À L'INSERTION ET LES AIDES DIRECTES À L'EMPLOI

Les crédits de l'action 02 du programme 138 -319,89 millions d'euros en CP, en baisse de 5 %- se répartissent entre :

- les crédits d'intervention consacrés aux différentes aides à l'insertion et à l'emploi (197,74 millions d'euros) ;

- les dotations du service militaire adapté (113,89 millions d'euros) ;

- la subvention (8,17 millions d'euros) à l'agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer (ANT), qui met en oeuvre deux dispositifs d'aide à la qualification en mobilité, la formation individualisée mobilité (FIM) et le projet initiative jeune (PIJ) mobilité ;

- un crédit de 80.869 € affecté à l'évaluation des dispositifs mis en oeuvre.

1. Les dispositifs d'insertion et d'aide à l'emploi

Ils regroupent des mesures d'insertion professionnelle des publics les plus fragilisés, qui relèvent soit de dispositifs nationaux (contrat d'accompagnement dans l'emploi - CAE), soit de dispositifs spécifiques au ministère de l'outre-mer.

Les crédits prévus pour 2007 devraient permettre de financer 25.000 contrats aidés sur le budget de la mission, auxquels s'ajouteront, comme l'an dernier, des contrats relevant du ministère de l'emploi, dont notamment des contrats d'avenir et 14.000 contrats d'accès à l'emploi.

Votre rapporteur pour avis souligne que, dans le cadre du contrat d'avenir, l'aide versée à l'employeur, d'un montant égal à l'allocation de RMI à taux plein versée à une personne seule, est -contrairement à l'interprétation communément admise par les présidents de conseils généraux- entièrement supportée par le département lorsque le bénéficiaire du contrat était allocataire du RMI, ce qui crée une charge très lourde, en particulier pour les départements d'outre-mer, qui n'ont que très peu de ressources et où les titulaires du RMI sont très nombreux.

L'Assemblée nationale a adopté à l'initiative du gouvernement un amendement au projet de loi de finances prévoyant une participation de l'Etat à la prise en charge de l'aide à l'employeur. Il est cependant à craindre que le montant de cette participation, qui sera fixé par décret et dont l'exposé des motifs de l'amendement indiquait qu'il devrait correspondre au forfait logement (12 % de l'allocation à taux plein), ne suffise pas à permettre le développement du contrat d'avenir dans les DOM.

a) Les contrats aidés dans le secteur marchand

Ils comprennent :

- le contrat d'accès à l'emploi en secteur marchand (CAE-DOM) : 2.750 nouveaux contrats devraient être conclus en 2007 au coût unitaire de 3.920 € ;

- le congé solidarité (CS), dispositif spécifique qui permet d'accorder une préretraite à des salariés de 55 ans ou plus en contrepartie d'embauches en nombre équivalent de jeunes de moins de 30 ans. Ce dispositif devait arriver à expiration au 31 décembre 2006 : un amendement du gouvernement adopté par l'Assemblée nationale propose de le prolonger d'un an, mais dans des conditions nettement plus restrictives, en abaissant la contribution de l'Etat de 60 à 50 % et en restreignant son champ d'application. Cette mesure serait financée par un redéploiement de crédits (5 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP) ;

- l'allocation de retour à l'activité (ARA), réservé aux bénéficiaires du RMI, de l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation de parent isolé : 700 nouveaux contrats pourraient être financés en 2007 (coût unitaire : 6.329 €) ;

- à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, les stages de formation et d'insertion professionnelle (SFIP) : 100 nouveaux stages sont prévus en 2007 ;

- le soutien à l'emploi de jeunes diplômés (SEJD) destiné à faciliter leur recrutement, applicable dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon et qui ne connaît qu'un succès limité : 15 mesures nouvelles sont prévues pour 2007.

b) Les contrats aidés dans le secteur non marchand

Ils recouvrent :

- le contrat d'accompagnement dans l'emploi (CAE), qui a remplacé depuis le 1 er janvier 2006, sauf à Mayotte, le contrat emploi-solidarité (CES) et le contrat emploi consolidé (CEC) : 1.500 nouveaux CAE sont prévus pour 2007, au coût unitaire de 3.025 € ;

- le contrat d'insertion par l'activité (CIA), réservé aux allocataires du RMI et géré par l'Agence départementale d'insertion (ADI) : 3.500 nouveaux contrats sont prévus ;

- le dispositif spécifique de sortie des contrats emplois jeunes ;

- les chantiers de développement local (CDL), actions de formation qui concernent Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis-et-Futuna ;

- les « jeunes stagiaires du développement » (JSD), dispositif d'aide à l'insertion des jeunes de Nouvelle-Calédonie.

c) Les aides à la qualification professionnelle et à l'adaptation à l'emploi

Ces aides comportent, d'une part, les actions « cadre avenir » permettant la formation en métropole de cadres originaires de Nouvelle-Calédonie et des îles Wallis-et-Futuna, et des actions de formation professionnelle menée à Mayotte et à Wallis-et-Futuna.

Le tableau ci-après retrace l'évolution du nombre des contrats aidés financés par le ministère de l'Outre-mer.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE CONTRATS AIDÉS FINANCÉS PAR LE MINISTÈRE DE L'OUTRE-MER

2000

2001

2002

2003

2004

2005

CES

39 229

37 640

35 749

35 161

31 530

25 523

CEC

3 062

3 620

3 949

2 545

2 341

1 602

CIA

15 000

19 000

15 000

14 852

14 511

14 012

CAE-DOM

7 445

5 032

4 477

4 709

5 014

5 052

Emplois-Jeunes

2 808

1 441

983

-

-

-

PIJ

-

2 355

3 507

4 009

4 719

4 969

ARA

-

-

1 413

1 697

1 714

1 685

SEJD

-

-

-

-

23

49

Congé solidarité

-

-

-

552

426

612

Primes

-

-

-

282

203

366

Prime jeunes Mayotte

-

-

-

-

-

20

TOTAL

67 544

69 088

65 080

63 807

60 481

53 890

Source : ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, ANPE et ministère de l'outre-mer.

2. Le service militaire adapté (SMA)

Le service militaire adapté, qui a « fait école » en métropole, forme chaque année environ 3.000 volontaires (2.900 ETPT), garçons et filles, à qui il permet de suivre des formations certifiantes conduisant à des qualifications de niveau V (CAP éducation nationale, CAP agricole...), des formations pré-certifiantes (obtention d'un module de formation) ou des formations préprofessionnelles et d'insertion : 37 filières sont ainsi offertes dans des secteurs très divers (BTP, métiers de l'agriculture et de la pêche, mécanique, restauration, activités touristiques et sportives, transport routier...)

Présent dans les DOM, en Polynésie française, à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie, le SMA forme également à Périgueux des stagiaires des DOM et des COM aux métiers du tourisme.

Le taux d'insertion des volontaires du SMA est actuellement voisin de 70 % (71,20 % en 2005) : l'indicateur de performance correspondant prévoit de porter ce taux à 80 % en 2010, « cible » que le projet annuel de performance pour 2006 prévoyait d'atteindre dès 2008.

Les crédits affectés au SMA en 2007 s'élèveront à 113,89 millions d'euros.

C. LE SOUTIEN AUX INVESTISSEMENTS

Les dépenses fiscales associées au programme 138 portent sur des exonérations ou réductions d'impôt permettant, comme les exonérations de cotisations sociales, de compenser au moins partiellement les handicaps de compétitivité liés aux surcoûts que subissent les entreprises ultramarines.

Mais le dispositif de défiscalisation des investissements est aussi tout à fait essentiel au développement de l'activité économique et de l'emploi outre-mer. Il permet en effet de mobiliser des capacités de financement qui n'existent pas sur place 5 ( * ) et qui sont indispensables pour créer ou maintenir des emplois mais aussi pour moderniser et développer l'outil de production.

On doit d'ailleurs regretter, à cet égard, que l'évaluation des « dépenses fiscales », comme d'ailleurs celle des « dépenses sociales », ne soient pas complétées par une évaluation des recettes engendrées par les créations d'emplois et le développement de l'activité économique qu'elles permettent de financer.

1. L'évolution de l'application du dispositif de défiscalisation

a) L'évolution du montant des investissements agréés

Les chiffres relatifs aux investissements agréés en 2005 font apparaître une diminution :

- du nombre des dossiers agréés (- 20 %) par rapport à 2004, le nombre des demandes étant en revanche resté stable (- 1 %) ;

- du montant total des investissements aidés : 497,4 millions d'euros en 2005, soit une baisse de 37 % par rapport à 2004 (791,5 millions d'euros) et de 23 % par rapport à 2003 (646,8 millions d'euros), la diminution enregistrée par rapport à 2004 doit toutefois être relativisée, les montants enregistrés au titre de cette année ayant été exceptionnellement élevés.

b) Les créations d'emplois

Le nombre d'emplois directs -abstraction faite, par conséquent, des emplois maintenus ou des créations d'emplois induites- que les promoteurs des projets agréés se sont engagés à créer est également en diminution : il s'élèverait à 896 emplois en équivalent temps plein, contre 1897 en 2004 et 1.742 en 2003.

Les créations les plus nombreuses sont prévues dans les secteurs des transports (200), dans l'industrie (166) et dans le bâtiment (159).

2. La répartition sectorielle et géographique des investissements aidés

a) La répartition sectorielle

Les seuls secteurs dans lesquels le montant des investissements aidés augmente sont le logement (108,8 millions d'euros) et les télécommunications (29 millions d'euros). La définition d'un nouveau secteur de la transformation fait aussi apparaître une progression des secteurs cumulés de l'agriculture et de la transformation de produits agricoles (38 millions d'euros au total).

Les secteurs des transports (126 millions d'euros), des énergies nouvelles (88 millions d'euros) et de l'industrie (58 millions d'euros) restent parmi les premiers bénéficiaires des aides, mais le montant des investissements est néanmoins en nette diminution : par rapport à 2003, cette diminution est de 9 % dans les transports, de 36 % dans les énergies nouvelles et de 52 % dans l'industrie.

Enfin, dans les autres secteurs, les baisses les plus importantes sont enregistrées dans les secteurs de l'hôtellerie et de la pêche. On notera par ailleurs qu'il n'y a eu, en 2005, aucun investissement agréé dans le secteur des services informatiques.

b) La répartition géographique

Le tableau ci-après indique l'évolution par rapport à 2003 et 2004, de la répartition entre les départements et collectivités d'outre-mer du montant des investissements aidés.

La proportion du nombre des projets agréés concernant les départements d'outre-mer reste à peu près constante (79 % en 2005, 78 % en 2004) et représente 51 % des investissements.

On constate que la baisse des investissements touche tous les départements et collectivités d'outre-mer, La Réunion, parmi les premiers, et la Polynésie, parmi les secondes, demeurant les plus « attractives ». On doit également relever qu'aucun investissement n'a été réalisé en 2005 à Saint-Pierre-et-Miquelon.

EVOLUTION DE LA RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES INVESTISSEMENTS AGRÉÉS

(en millions d'euros)

2003

2004

2005

Evolution

2005/2003

2005/2004

Guadeloupe

101

89

63

- 38 %

- 29 %

Guyane

30

29

20

- 35 %

- 32 %

Martinique

96

131

77

- 20 %

- 41 %

Réunion

159

216

123

- 23 %

- 43 %

Polynésie

167

241

178

+ 7 %

- 26 %

Nouvelle Calédonie

87

60

33

- 62 %

- 45 %

St Pierre et Miquelon

1

7

0

- 100 %

- 100 %

Mayotte

5

9

3

- 42 %

- 66 %

Wallis et Futuna

1

11

1

- 5 %

- 94 %

Total

646,8

791,5

497,4

- 23 %

- 37 %

*

* *

III. LE LOGEMENT

Les moyens consacrés à la politique du logement, qui sont ceux de l'ancienne « ligne budgétaire unique » (LBU) gérée depuis 1998 par le ministère chargé de l'outre-mer, figurent à l'action 01 du programme 123 « Conditions de vie outre-mer ».

Votre rapporteur pour avis avait consacré l'an dernier son avis sur le budget 2006 à la politique du logement outre-mer, qui doit, comme celle de l'emploi, faire face à des difficultés spécifiques :

- l'insuffisance de l'offre, en particulier dans le secteur du logement social et très social, qui reste inadaptée à l'augmentation continue de la demande résultant de la croissance démographique, de la « décohabitation », du vieillissement de la population (aux Antilles) et de la pression migratoire ;

- l'importance de l'habitat insalubre et la prolifération de « l'habitat spontané » ;

- les risques sismiques et climatiques ;

- la rareté et la cherté du foncier, dues à des contraintes physiques mais aussi aux effets pervers de la défiscalisation.

Depuis, le rapport de la mission d'audit de modernisation sur la politique du logement social outre-mer mandatée par le ministère de l'économie et des finances et le contrôle budgétaire de l'efficacité des politiques du logement outre-mer effectuée par le rapporteur spécial de la commission des Finances du Sénat, notre collègue Henri Torre, ont révélé toute la gravité de la situation.

Pour le court terme, votre rapporteur pour avis constate, avec regret, que face à un constat accablant, les réponses apportées par le projet de budget, en dépit des mesures supplémentaires annoncées par le Premier ministre lors de son récent déplacement en Guadeloupe, ne paraissent pas être à la mesure du problème.

A plus long terme, les solutions envisagées ne sont pas non plus très convaincantes.

A. LE CONSTAT DRESSÉ PAR LA MISSION D'AUDIT SUR LE LOGEMENT SOCIAL

La mission d'audit de modernisation sur la politique du logement social outre-mer a dressé un constat accablant de la gestion des crédits de la LBU et des effets pervers de la défiscalisation des investissements dans le secteur du logement. Elle propose en outre une évaluation du besoin de financement public du logement social qui s'écarte assez largement des moyens actuels.

1. La gestion des moyens budgétaires

Le rapport de la mission porte un jugement sévère, qui confirme d'ailleurs les analyses des élus d'outre-mer, sur la gestion de la contrainte budgétaire « par la réduction drastique des seuls crédits de paiement ». Il relève que la méthode suivie, qui consiste à « faire le grand écart » entre un niveau élevé des autorisations d'engagement, censé satisfaire l'outre-mer, et un niveau insuffisant de crédits de paiement, qui satisfait la direction du budget, « ne saurait tenir lieu de politique ».

La mission constate qu'il en est résulté un reste à payer sur le total des opérations en cours qu'elle a chiffré, au 31 décembre 2005, à près de 800 millions d'euros. Sur la base de cette estimation, elle évalue à un montant de l'ordre de 450 à 500 millions d'euros par an les financements à trouver sur les trois années 2006, 2007 et 2008.

Quant au retard de paiement, c'est-à-dire les factures reçues et validées mais non payées, son montant était estimé à la même date à 60 millions d'euros par le ministère de l'outre-mer. Selon les chiffres donnés par le Premier ministre en Guadeloupe, il atteindrait 113 millions d'euros au 31 décembre 2006.

La mission insiste sur les difficultés que crée la dette de l'Etat pour les opérateurs et le BTP, notamment pour « les petites entreprises et artisans employés à la réhabilitation de logements individuels et les structures associatives » et souligne que « le crédit de l'État s'en trouve gravement affecté ». Elle estime donc nécessaire un règlement sans délai de la dette fournisseur de l'Etat.

2. Les effets pervers de la défiscalisation

La mission d'audit note que « les dispositifs de défiscalisation, s'ils ont incontestablement permis de créer des emplois, n'ont, à ce jour, pas permis de produire du logement social », ce qui n'est pas surprenant, et qu'ils ont « engendré des effets défavorables sur le marché du logement ».

Elle remarque que la défiscalisation bénéficiant aux personnes physiques (réduction de l'impôt sur le revenu) permet le financement de tous les types de logements, mais qu'elle s'est orientée principalement vers les secteurs intermédiaire et libre. Quant à la défiscalisation bénéficiant aux sociétés, elle ne concerne que le secteur intermédiaire mais porte sur un volume d'investissement beaucoup plus faible.

Tout en soulignant la difficulté d'évaluer les effets de la défiscalisation sur l'impôt sur le revenu, qui n'est que rarement soumise à un accord préalable et qui ne fait par ailleurs l'objet d'aucun enregistrement statistique, la mission considère que les opérations de défiscalisation créent « un effet d'éviction majeur » à l'égard des opérations de logement social :

- en contribuant à la raréfaction du foncier et à son renchérissement ;

- en mobilisant les entreprises du BTP, qui « ne répondent plus que difficilement aux appels d'offres des opérateurs sociaux ».

Au total, tout en reconnaissant que l'investissement défiscalisé dans le secteur du logement a pu, à La Réunion par exemple, avoir, comme le « Robien » en métropole, un effet sur la stabilisation du niveau des loyers, la mission conclut que cet investissement, plus coûteux au demeurant pour l'Etat que la dépense budgétaire, « relève davantage d'un comportement patrimonial, porté par des investisseurs et des promoteurs métropolitains ou ultramarins, que d'un objectif de développement d'un parc de logements adaptés aux besoins des DOM ».

3. L'évaluation des besoins de financement

La mission relève la nécessité d'une évaluation plus précise des besoins, cette évaluation variant entre 50 et 90.000 logements 6 ( * ) .

En se fondant sur le taux de logements sociaux par habitant qui devrait résulter en métropole de l'application du plan de cohésion sociale, soit environ 7.500 logements locatifs sociaux pour 100.000 habitants, la mission estime qu'il faudrait, pour atteindre le même ratio dans les DOM (où il est actuellement environ d'environ 6.000/100.000), accroître le parc de 27.000 logements, sachant que ce chiffre est inférieur aux besoins, en raison de la forte proportion de la population des DOM pouvant prétendre à un logement social. Mais le rythme annuel moyen de production a été, sur les six dernières années, d'environ 4.200 logements autorisés.

En tenant compte d'une extension outre-mer du plan de cohésion sociale, elle parvient à une estimation d'un besoin de financement public annuel de 307 millions d'euros sur cinq ans, soit 37 millions de plus que les moyens d'engagement en 2005 et 2006, en se fondant sur les hypothèses suivantes :

- la production annuelle de 5.400 logements locatifs sociaux environ, permettant de réaliser sur cinq ans l'extension aux DOM et à Mayotte du volet logement du plan de cohésion sociale ;

- la production annuelle de 1.650 logements en accession sociale et la réhabilitation de 5.000 autres logements ;

- la prise en charge d'une aide à la surcharge foncière.

Le tableau ci-après résume ces estimations.

EVALUATION DES BESOINS DE FINANCEMENT ANNUELS D'UN PLAN DE COHÉSION
SOCIALE ÉTENDU AUX DOM (Y COMPRIS MAYOTTE)

Nombre

Aide publique moyenne nécessaire
par logement
(en €)

Besoin de
financement public
(en M€)

Locatif social

5 400

25 000

135

Accession sociale

1 650

25 500

42

Réhabilitation : propriétaires occupants

3 000

10 000

30

propriétaires privés-bailleurs

1 000

15 000

15

parc social

1 000

6 000

6

Intervention publique dans zones RHI

/

/

25

Aide à la surcharge foncière des 5.400 logements locatifs sociaux

5 400

10 000

54

TOTAL

307

Source : mission d'audit de modernisation sur la politique du logement social outre-mer.

B. LE PROJET DE BUDGET POUR 2007

Selon une procédure dérogatoire, les crédits de l'action 01 seront modifiés par la loi de finances rectificative pour 2006 qui, outre qu'elle dégagera des moyens supplémentaires contribuant au règlement de la dette de l'État exigible à la fin de 2006, comportera des crédits destinés à être reportés en 2007 pour amorcer l'extension à l'outre-mer du volet logement du plan de cohésion sociale.

1. Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2007

Ils s'élèvent à 220,75 millions d'euros en AE et 175,75 millions d'euros en CP , soit une évolution de loi de finances à loi de finances de -17,5 % en AE et de +3 % en CP 7 ( * ) .

Selon les documents budgétaires, les crédits de paiement pour 2007 doivent bénéficier :

- pour 67,3 millions d'euros aux ménages, dont 40,94 millions d'euros au titre des aides à l'accession à la propriété (1.780 logements) ; 33,6 millions d'euros au titre de l'amélioration de l'habitat privé (2.140 logements) ; 1 million d'euros pour les aides attribuées, en Guadeloupe et en Martinique, à l'acquisition de terrains dans la zone des 50 pas géométriques ;

- pour 73,9 millions d'euros aux bailleurs sociaux, au titre des subventions à la construction et la réhabilitation de logements (66,2 millions d'euros pour la construction de 3.600 logements et 7,7 millions d'euros pour la réhabilitation de 1.520 logements) ;

- pour 34,5 millions d'euros aux collectivités territoriales, au titre de la contribution de l'Etat à la résorption de l'habitat insalubre.

2. La traduction des engagements du Premier ministre et les crédits inscrits en loi de finances rectificative pour 2006

Les engagements pris en octobre dernier par le Premier ministre portaient, d'une part, sur l'apurement à la fin de mars 2007 de la dette de l'État exigible en 2006 (113 millions d'euros) et, d'autre part, sur l'application outre-mer du plan de cohésion sociale, grâce au dégagement de 120 millions d'euros supplémentaires sur trois ans, dont 60 millions en 2007.

a) L'apurement de la dette de l'État

Lors du débat à l'Assemblée nationale sur le budget de l'outre-mer, le ministre de l'outre-mer a indiqué que 60 millions d'euros étaient prévus à ce titre, dont :

- une avance de 30 millions de la Caisse des dépôts et consignations : cette avance a été versée en juillet 2006 et son remboursement a été imputé sur la part (250 M€) attribuée à la CDC de la « contribution exceptionnelle » prélevée sur les fonds propres des sociétés anonymes de crédit immobilier (SACI) 8 ( * ) ;

- deux transferts en provenance de la réserve gouvernementale d'un montant total de 18 millions d'euros ;

- un crédit de 12 millions d'euros inscrit en loi de finances rectificative.

Il reste donc un solde de 53 millions d'euros à financer.

b) Les crédits destinés à l'application du plan de cohésion sociale

Le ministre de l'outre-mer a indiqué que seraient prévus en loi de finances rectificative 60 millions d'euros en autorisations d'engagement et 13 millions en crédits de paiement, qui seront reportés sur les crédits pour 2007 de la mission « Outre-mer ».

On observera :

- que cette répartition ne va pas dans le sens de la réduction de l'écart entre AE et CP dénoncé par la mission d'audit ;

- que les crédits de paiement pour 2007 seront ainsi portés à 188,75 millions d'euros, soit une augmentation de 9,1 % par rapport aux crédits disponibles en 2006, ce qui n'est pas considérable, surtout s'il faut prélever sur ce montant le règlement du solde de la dette de l'État.

C. LE FINANCEMENT FUTUR ET LA GESTION DE LA POLITIQUE DU LOGEMENT SOCIAL OUTRE-MER

Les indications données à l'Assemblée nationale par le ministre de l'outre-mer sur le financement futur de la politique du logement social outre-mer soulèvent quelques interrogations. Il apparaît en outre nécessaire que soient apportées, lors du débat au Sénat, des précisions sur l'organisation, au niveau gouvernemental, de la conduite de la politique du logement outre-mer, qui a été évoquée par le Premier ministre lors de son déplacement en Guadeloupe.

1. La recherche de financements complémentaires

Pour « desserrer la pression sur la ligne budgétaire unique », c'est-à-dire pour dégager des moyens de financement complémentaires du logement social outre-mer, le ministre a envisagé, d'une part, une réorientation vers le secteur social de la défiscalisation des investissements dans le logement et, d'autre part, un réexamen des conditions d'intervention outre-mer de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) et du « 1 % logement ».

Elles s'inscrivent dans la ligne des préconisations de la mission d'audit de modernisation, qui apparaissent malheureusement moins convaincantes que le diagnostic qu'elle a établi.

a) L'orientation de la défiscalisation vers le logement social

Le ministre de l'outre-mer a indiqué qu'il attendait de la commission nationale d'évaluation qu'elle fasse des propositions d'orientation de la défiscalisation vers le logement social, notant que « la contribution budgétaire (devait) être complétée grâce à un apport de l'épargne des ménages par le biais de l'aide fiscale redéployée ».

La tâche ainsi confiée à la commission nationale d'évaluation n'est pas aisée, car si l'idée d'un « basculement » de la défiscalisation vers le logement social, avancée par la mission d'audit de modernisation, est en elle-même intéressante, on peut s'interroger sur le financement que l'on peut en attendre.

Une idée intéressante

La mission d'audit propose de « recentrer la défiscalisation comme un moyen de financement privilégié des politiques publiques du logement ».

Les mesures qu'elle recommande à cet effet tendraient principalement :

- à réserver le taux le plus élevé (50 %) de défiscalisation à l'impôt sur le revenu aux investissements dans le secteur locatif social et très social ;

- à réduire « significativement » le taux de défiscalisation accordé aux programmes intermédiaires, à supprimer la défiscalisation des opérations de locatif libre non intégrées à un programme mixte et celle de l'accession à la propriété ;

- à généraliser l'exigence d'un agrément ;

- à encadrer la répartition de « l'aide fiscale » de manière à ce que le dispositif bénéficie essentiellement à l'opérateur : la mission estime à cet égard souhaitable que l'avantage fiscal puisse être rétrocédé à hauteur de 70 à 75 % à l'opérateur qui exploitera le bien au terme de la période légale de détention par les investisseurs.

Par ailleurs, la mission suggère que soient étudiées :

- la suppression des avantages de taux consentis aux opérations réalisées en zone urbaine sensible et aux équipements d'économies d'énergie, générateurs de surcoûts importants ;

- la question de l'exclusion du coût du foncier du prix de revient défiscalisable ;

- la durée des engagements de location, actuellement inférieure à celle prévue par les dispositifs « Robien ».

Un résultat incertain

Selon le « plan de financement » simulé par la mission d'audit, la défiscalisation de l'investissement dans le logement social pourrait assurer dès la première année une « aide fiscale » de 60 millions d'euros aux opérateurs, aide qui atteindrait, à dépense fiscale supposée constante (200 millions d'euros dont 90 % pour la défiscalisation à l'impôt sur le revenu), 143 millions d'euros la cinquième année.

Votre rapporteur pour avis ne peut que souscrire aux modifications proposées de la « défiscalisation logement », coûteuse pour les finances publiques et qui, en dehors même de ses effets négatifs, n'apporte qu'une contribution très marginale à la solution des problèmes de logement outre-mer.

En eux-mêmes, un recentrage et un encadrement plus rigoureux de la défiscalisation sont donc certainement souhaitables.

En revanche, il s'interroge sur le réalisme des projections présentées :

- même défiscalisé, l'investissement dans le logement social, par définition peu rentable, demeurera peu attractif pour les investisseurs privés ;

- la volonté, tout à fait légitime, d'orienter le bénéfice de la défiscalisation vers les opérateurs sociaux plutôt que vers « le monteur, le banquier et l'investisseur » ne favorisera pas non plus le succès du nouveau « produit », non seulement auprès des investisseurs potentiels mais aussi et peut-être surtout auprès des intermédiaires qui, précisément parce qu'ils y trouvaient leur compte, ont largement contribué à attirer les capitaux métropolitains vers la « défiscalisation logement » ;

- enfin, on peut surtout penser que le changement de régime de l'investissement logement conduira les investisseurs à se reporter vers d'autres formules.

Le principal résultat du recentrage de la défiscalisation de l'investissement logement pourrait donc être une baisse sensible de cet investissement, ce qui peut certainement avoir un intérêt pour les finances publiques mais n'en aurait aucun pour le financement du logement social outre-mer.

b) L'intervention de l'ANAH et du 1 % logement

L'ANAH

La mission a également intégré dans son plan de financement une implication accrue de l'ANAH, dont elle propose d'étendre les interventions à la réhabilitation des logements des propriétaires occupants, qui représente une charge annuelle importante pour la LBU (33,6 millions d'euros pour 2007), moyennant une réduction du montant individuel des aides.

On peut s'interroger, compte tenu de la capacité financière des bénéficiaires de ces aides, sur la possibilité de les réduire sensiblement, sauf à compromettre l'effort de réhabilitation des propriétaires occupants.

Mais il paraît de toute façon irréaliste d'estimer que la participation de l'ANAH à la politique du logement outre-mer, chiffrée par la mission d'audit à 6,8 millions d'euros en 2005, puisse être portée dès la première année du plan de financement proposé à 30 millions d'euros et maintenue à ce niveau.

Au demeurant, l'ANAH étant pour l'essentiel financée par le budget général de l'Etat, le développement de son intervention ne résoudrait pas le problème de la contrainte budgétaire.

Le 1 % logement

Le plan de financement de la mission d'audit table sur un apport annuel du 1 % logement de 60 millions d'euros, sous forme de subventions : le concours du 1 % logement, qui intervient généralement sous forme de prêts à conditions privilégiées, se situe actuellement dans les DOM entre 9 et 10 millions d'euros par an.

On relèvera que ces estimations ont suscité, de la part de l'Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction (ANPEEC) une réponse exprimant de fermes réserves tant en ce qui concerne le montant que les modalités de la contribution attendue du 1 % logement.

2. Les modalités du pilotage de la politique du logement dans les DOM

En même temps que les décisions du gouvernement en matière d'apurement de la dette de l'Etat et d'extension à l'outre-mer du volet logement du plan de cohésion sociale, le Premier ministre a annoncé à la Guadeloupe une révision des conditions de gestion de la politique du logement outre-mer, qui doit être « plus visible, plus mesurable et plus partenariale » et assurer la participation du ministère du logement à la gestion des crédits du logement social outre-mer.

A cette fin, il a notamment fait part de son intention de prévoir la réunion annuelle -pour la première fois en janvier 2007- d'une Conférence nationale du logement outre-mer et il a exprimé le souhait qu'à l'avenir « la ligne budgétaire unique soit présentée et votée au Parlement en même temps que les crédits du logement social en métropole », ce qui laisse présager une réintégration de la LBU dans les crédits gérés par le ministère du logement.

La « Conférence nationale du logement outre-mer », co-présidée par les deux ministres compétents, réunirait les élus ultramarins et les représentants des opérateurs du logement social. Elle contribuerait à la définition des orientations de la politique du logement outre-mer, en particulier dans les domaines des actions à conduire à des partenariats à développer, et pourrait à ce titre se prononcer :

- sur les modalités de la gestion de la LBU par le ministère du logement et le développement de l'action dans les DOM de l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et de l'ANAH ;

- sur la répartition des crédits entre les DOM et entre les opérations de construction et de réhabilitation de logements.

On ne peut voir que des avantages à la constitution d'une telle instance de concertation entre les acteurs de la politique du logement outre-mer.

En revanche, la réintégration de la LBU dans le budget du logement et donc la remise en cause du choix opéré en 1997/1998 pose la question de la définition des compétences du ministère de l'outre-mer.

Certes, comme l'a souligné le présent rapport, la gestion par le ministère de l'outre-mer des crédits de la LBU n'est pas exempte de tout reproche, même si les responsabilités en la matière sont partagées entre le ministère chargé de l'outre-mer et celui chargé du budget.

Mais au-delà des difficultés imputables à la mauvaise gestion de la contrainte budgétaire, le transfert de la LBU au ministère de l'outre-mer a incontestablement permis de progresser dans la définition d'outils adaptés à la situation du logement outre-mer.

C'est pourquoi, rejoignant l'opinion exprimée par le rapporteur spécial de la commission des finances, votre rapporteur pour avis incline à penser que, s'il doit y avoir un ministère de l'outre-mer, il est logique que relèvent de sa compétence les secteurs de l'action publique, comme l'emploi ou le logement, dans lesquels la spécificité des problèmes posés nécessite l'intervention d'une administration spécialisée.

Ainsi, s'il convient certes d'éviter que, comme cela a été le cas en 2005 avec le plan de cohésion sociale, l'outre-mer demeure à l'écart des efforts consentis en faveur de la politique nationale du logement, on peut aussi estimer que le problème du logement ne se pose pas dans les mêmes termes en outre-mer et en métropole et que cela justifie qu'il soit géré par le ministère de l'outre-mer.

*

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Lors d'une réunion tenue le 29 novembre 2006, la commission des affaires économiques, après avoir adopté à l'unanimité l'amendement proposé par son rapporteur pour avis, a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2007, les commissaires du groupe socialiste votant contre.

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* *

ANNEXE : AMENDEMENT ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Article additionnel après l'article 50 bis

Après l'article 50 bis , insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 128 de la loi de finances rectificative pour 2005 (loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005) est complété par sept alinéas ainsi rédigés :

« Le document relatif à la politique mentionnée au 7° comporte également :

« - un état récapitulatif, par mission, de l'effort budgétaire et financier consacré à chaque département ou région d'outre-mer, à chaque collectivité d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux Terres australes et antarctiques françaises ;

« - une évaluation du coût net de chaque exonération de cotisation sociale ou d'impôt destinée à l'outre-mer ;

« - un état de la mise en oeuvre du principe de continuité territoriale en matière de transports de personnes ;

« - le détail et le coût des compléments de rémunérations, de pensions et d'indemnités temporaires applicables aux fonctionnaires en poste outre-mer ;

« - le détail des statuts fiscaux particuliers ;

« - tous les deux ans, une appréciation des différences de salaires et de prix à la consommation entre les collectivités territoriales ultramarines et la métropole.

*

* *

* 1 Chargée de la première évaluation triennale de la loi de programme pour l'outre-mer (loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003), cette commission, installée le 5 juillet 2006 par le ministre de l'outre-mer, est composée de 22 parlementaires, dont 12 élus d'outre-mer, et comprend aussi 6 représentants des directions d'administration centrale compétentes. Elle est présidée par M. Simon Loueckhote, sénateur de Nouvelle-Calédonie.

* 2 L'indicateur de la demande d'emploi dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon correspond au ratio entre la demande d'emploi en fin de mois de catégorie 1 (DEFM 1) et la population active calculée selon l'enquête emploi de l'INSEE 1997 et 2002 pour les DOM et le recensement de 1999 pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Il est donc intéressant de mentionner également les chiffres cités par l'avis du Conseil économique et social sur l'évaluation de la LOPOM ; avis qui se réfère au taux de chômage au sens du BIT, c'est à dire calculé dans les mêmes conditions qu'en métropole : ce taux aurait été en moyenne en 2005 de 27,9 % dans les DOM contre 9,8 % en métropole, l'enquête INSEE (variation mai 2004 à mai 2005) indiquant une augmentation du chômage en Guadeloupe (26 %), une stabilisation en Guyane (26,5 %), une légère baisse en Martinique (21,8 %) et une régression de plus d'un point à la Réunion (31,9 %).

* 3 Loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000, dite LOOM.

* 4 Industries, restauration, presse, production audiovisuelle, énergies renouvelables, NTIC, centres d'appels, pêche, cultures marines, aquaculture, agriculture.

* 5 Le fait que la défiscalisation soit plus souvent « externalisée » (plus de 66 % des investissements agréés) que « directe » met en évidence le défaut de capacité de financement des entreprises ultramarines : celles-ci n'ont en effet pas les moyens d'avancer le montant de l'investissement et ont souvent des difficultés pour accéder au crédit ou assumer des charges d'emprunt. Comme le relève le Conseil économique et social, la défiscalisation directe est donc le plus souvent réservée aux petits investissements, par exemple l'achat de petit matériel.

* 6 La mission cite aussi les réponses du ministère à des questionnaires parlementaires faisant état de la nécessité de produire 15.000 logements sociaux neufs par an, mais sans préciser sur quelle durée.

* 7 Étant rappelé (cf. supra p. 8) que les crédits de l'action 01 ont été en 2006 augmentés de 2,2 millions d'euros par rapport aux chiffres inscrits dans la loi de finances, et ont donc été de 270 millions d'euros en AE et 173 millions d'euros en CP : compte tenu de ce transfert de moyens, les AE baissent de 18 % et les CP augmentent de 1,6 %.

* 8 En application de l'article 5 de l'ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété.

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