2. Des interrogations sur le lancement de futurs programmes opérationnels

Le ministre de la défense a souligné à plusieurs reprises, notamment lors d'un discours au salon du Bourget le 14 juin 2005, que l'espace serait un des enjeux stratégiques du 21 ème siècle et que les pays européens devaient travailler ensemble à de nouveaux programmes ambitieux.

Le groupe d'orientation stratégique de politique spatiale de défense (GOSPS) créé en octobre 2003 avait pour mandat de déterminer, en partant d'une analyse de l'évolution du contexte stratégique, les capacités spatiales de défense et de sécurité, clefs d'une autonomie stratégique nationale. Ces capacités peuvent recouvrir des systèmes nationaux, coopératifs européens ou communautaires de type Galiléo. Le groupe a précisé, pour chacune de ces capacités, un mode de contrôle cohérent avec l'exigence de souveraineté.

Les conclusions du groupe ont été remises au ministre de la défense en septembre 2004 en vue d'être intégrées dans les réflexions préalables à l'élaboration de la prochaine loi de programmation militaire. Il avait été précisé à votre rapporteur l'an passé que le rapport du groupe d'orientation stratégique abordant des sujets particulièrement sensibles, comme les besoins de nos services de renseignement, ses conclusions ne pouvaient pas être communiquées à ce stade.

Le président du groupe d'orientation stratégique , M. François Bujon de l'Estang, avait toutefois formulé plusieurs observations dans la presse. Il avait considéré que les capacités spatiales françaises étaient loin d'être insignifiantes mais restaient « incomplètes et, dans certains domaines, embryonnaires ou inexistantes ». Il déclarait également : « l'avenir des filières n'est pas assuré, l'enchaînement des démonstrateurs et des programmes opérationnels n'est pas planifié. Au fil de la décennie 1990, le budget spatial militaire s'est trouvé en termes réels diminué de plus de moitié. Aucun programme nouveau, faute de décision dans les années passées, faute aussi d'une organisation défendant les couleurs de l'espace dans les armées, n'est prévu au-delà de 2010 ».

Considérant qu'il était plus que temps de réagir, M. Bujon de l'Estang estimait que « les besoins sont avérés, et les moyens de les satisfaire ont été identifiés et sont à la portée de l'Europe ».

Dans cette perspective, M. Bujon de l'Estang plaidait pour une « approche nouvelle ... combinant une approche nationale et une approche européenne, et ... recherchant l'effet multiplicateur de la dualité civile-militaire ». Il concluait en appelant à une forte volonté politique et budgétaire, la France se devant de montrer l'exemple pour légitimer l'appel à un effort commun.

Le ministère de la défense a précisé à votre rapporteur qu'une actualisation des orientations stratégiques pour la politique spatiale de défense devait prochainement être proposée au ministre. Élaborée à partir d'une analyse capacitaire et budgétaire, dans une démarche de coopération européenne, elle s'articulerait autour des objectifs suivants :

- dans le domaine des télécommunications , consolider un noyau dur de capacités militaires très protégé et compléter les moyens nationaux par des liaisons haut débit non protégées ;

- dans le domaine de l' observation , privilégier une architecture et un segment sol utilisateur communs , permettant de préserver si nécessaire la confidentialité des informations de chacun des partenaires ;

- dans le domaine de l' écoute électromagnétique , doter nos forces armées de moyens opérationnels d'interception des signaux électromagnétiques ELINT (écoute et cartographie des radars) ;

- enfin, dans le domaine spatial en général, favoriser l'émergence de programmes duaux en généralisant le cofinancement civil et militaire des programmes et maintenir un effort de recherche amont significatif.

Votre rapporteur constate que la relance des crédits de recherche et technologie entreprise ces trois dernières années permet à la France de réaliser un effort sans équivalent en Europe pour la préparation de futurs systèmes spatiaux. Toutefois, les bases de cette politique spatiale militaire restent fragiles. L'enveloppe globale dévolue à l'espace reste stable depuis plus de 10 ans. Elle ne permet guère d'aller au-delà du simple renouvellement des capacités existantes. La coopération européenne progresse lentement et le développement de capacités nouvelles reste encore fixé à des échéances lointaines. Beaucoup reste donc à faire pour concrétiser l'ambition régulièrement réaffirmée de faire jouer aux systèmes spatiaux un rôle-clef dans nos équipements de défense.

Le domaine du renseignement électromagnétique , dans lequel la préparation d'un programme opérationnel mériterait d'être lancée au plus tôt, et celui de l' alerte avancée , apparaissent stratégiques et devraient pouvoir bénéficier de l'acquis obtenu grâce aux programmes expérimentaux.

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