C. L'IMPOSSIBLE POURSUITE DU STATU QUO

1. Les recommandations de la Cour des comptes

La recommandation figurant au terme du chapitre X du rapport de septembre 2006 de la Cour des comptes, est ferme, mais brève : « en raison des perspectives démographiques et financières des régimes spéciaux, réformer ces régimes en mettant en oeuvre les principes prévus par la loi de 2003 ».

Pour sa mise en oeuvre, il conviendrait de se reporter au titre I er (Dispositions générales) de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, qui énonce plusieurs grands principes :

- la confirmation du choix fait en 1945 en faveur de la répartition (article 1) ;

- la notion de contributivité (article 2) ;

- l'équité entre les assurés sociaux (article 3) ;

- la garantie d'un niveau minimum de pension (article 4) ;

- l'allongement de la durée d'assurance (article 5) ;

- l'extinction de la surcompensation (article 9) ;

- le droit à l'information des assurés sociaux (article 10) ;

- l'accès et le maintien dans l'emploi des salariés âgés (articles 11 à 19).

2. Les pistes de réformes envisagées par le COR

Dans un document examiné en séance plénière le 12 juillet 2006, le Conseil d'orientation des retraites s'est attaché à apprécier les « questions susceptibles d'être examinées en 2008 », à l'occasion de la première clause de rendez-vous de la réforme des retraites de 2003.

En ce qui concerne la méthode à employer, le COR préconise 10 ( * ) « un examen différencié des régimes spéciaux non couverts par la loi de 2003 (...) dont certains sont en quasi extinction (le régime des mines) et d'autres correspondent à des activités appelées à se développer, qui sont confrontés à des problèmes démographiques (...) dissemblables et dont les règles aboutissent à des droits de niveaux très différents.

En ce qui concerne l'objectif à atteindre dans le cadre d'une future réforme, le COR juge «nécessaire que pour ces régimes, comme pour l'ensemble des autres régimes, soit visé un objectif d'équilibre financier à l'horizon de 2020 et que soient prises en compte les perspectives de long terme. »

Dans cet esprit, il propose d'envisager trois orientations générales :

« La première orientation est celle de l'allongement des durées d'activité et des durées d'assurance requises dans les régimes pour tenir compte des gains d'espérance de vie qui doit être associée à une politique du travail et de l'emploi faisant de la gestion des âges une priorité. Comme dans les autres secteurs, cette évolution devrait être conduite en prenant en compte les situations de pénibilité (intégrées dans les règles d'un certain nombre de ces régimes) et le cas échéant, mais de manière nécessairement circonscrite, des difficultés particulières de gestion de l'emploi.

La seconde orientation est celle d'une évolution des avantages familiaux et conjugaux, prenant en compte le droit communautaire et allant dans le sens d'une certaine harmonisation et d'une adaptation aux évolutions de la société. Sur ce point on renverra à la réflexion engagée, par ailleurs, par le Conseil.

La troisième orientation pourrait être celle d'une certaine harmonisation des logiques d'indexation des pensions permettant de donner à l'ensemble des retraités les mêmes types de garanties en termes d'évolution de leurs revenus à la retraite. »

Votre rapporteur prend acte de ces suggestions, tout en observant que deux des observations du COR sont susceptibles d'entraîner d'importantes dépenses supplémentaires qui n'apparaissent pas souhaitables :

- la notion de pénibilité , dont le champ est déjà suffisant large dans les régimes spéciaux ;

- le dossier des avantages familiaux qui peut faire l'objet de revendications d'alignement de la situation des hommes sur celles des femmes par le biais d'une interprétation extensive de la jurisprudence Griesmar de la Cour de justice des communautés européennes.

3. Les réflexions de votre commission

Votre commission n'entend pas ouvrir dès maintenant le débat de 2008 sur la prochaine réforme des retraites. Pour autant, elle considère que ce rapport de la Cour des comptes fournit l'occasion bienvenue d'engager une réflexion sur les régimes spéciaux de retraite.

La poursuite du statu quo semble impossible au-delà de l'horizon 2008. Certains petits régimes se sont d'ailleurs engagés dans la voie de l'autoréforme depuis le début de la présente législature. C'est le cas de celui des clercs de notaire qui a fait cette année le choix de cette démarche courageuse. Pour les autres caisses de retraite, un changement majeur est néanmoins intervenu : jusqu'en 2003, les trois fonctions publiques faisaient en quelque sorte « écran » entre la réforme et les grands régimes spéciaux. Ce n'est plus le cas aujourd'hui : plus de 90 % des assurés sociaux participent désormais à l'effort collectif de sauvegarde de l'assurance vieillesse .

La charge de la preuve est désormais inversée. Il appartient maintenant aux ressortissants de ces régimes non réformés de justifier le maintien de leurs avantages vis-à-vis de l'immense majorité des Français.

Pour résoudre à l'avenir ce problème, il faudra disposer au préalable d'un état de situation plus transparent et du soutien de l'opinion publique. D'ailleurs, grâce aux adossements, les citoyens peuvent connaître le coût des avantages spécifiques, le fameux « chapeau » de ces régimes : il s'élève par exemple à 8 milliards d'euros (sur 21 au total) pour la RATP.

Votre rapporteur considère qu'il convient donc de traiter ces systèmes de retraite au cas par cas et de les inciter, dès le début de la prochaine législature, à définir au préalable par eux même les voies d'une possible réforme. En cas d'échec, l'Etat pourra intervenir dans un deuxième temps, en 2008, et déterminer les changements nécessaires. En dernier recours, il conviendra de développer une réflexion visant à intégrer progressivement les retraites des grandes entreprises publiques dans le cadre du régime général ou de celui des trois fonctions publiques. La solution consisterait alors à fermer aux nouveaux entrants l'accès à ces régimes spéciaux sans remettre en cause les droits déjà acquis par les salariés et retraités actuels.

* 10 Conseil d'orientation des retraites - Séance du 12 juillet 2006 - L'évolution des différents régimes de retraite du point de vue de l'équilibre financier et de l'équité : quelques questions dans la perspective de 2008 - p. 28 et 29.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page