Avis n° 83 (2006-2007) de M. Charles GUENÉ , fait au nom de la commission des lois, déposé le 23 novembre 2006

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N° 83

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2006

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2007 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME IX

SÉCURITÉ CIVILE

Par M. Charles GUENÉ,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest, président ; MM. Patrice Gélard, Bernard Saugey, Jean-Claude Peyronnet, François Zocchetto, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Georges Othily, vice-présidents ; MM. Christian Cointat, Pierre Jarlier, Jacques Mahéas, Simon Sutour, secrétaires ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Michèle André, M. Philippe Arnaud, Mme Eliane Assassi, MM. Robert Badinter, José Balarello, Laurent Béteille, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. François-Noël Buffet, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Yves Détraigne, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Gaston Flosse, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Philippe Goujon, Mme Jacqueline Gourault, MM. Charles Guené, Jean-René Lecerf, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Hugues Portelli, Marcel Rainaud, Henri de Richemont, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, MM. Alex Türk, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 3341 , 3363 à 3368 et T.A. 619

Sénat : 77 et 78 (annexe n° 27 ) (2006-2007)

Lois de finances .

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Après avoir entendu, le 22 novembre 2006, M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, la commission des Lois, réunie le 29 novembre 2006 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président, a procédé sur le rapport pour avis de M. Charles Guené, à l'examen des crédits de la mission sécurité civile inscrite dans le projet de loi de finances pour 2007, dont la commission des Finances est saisie au fond.

M. Charles Guené, rapporteur pour avis, a indiqué que la nouvelle présentation des crédits de la sécurité civile résultant de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) permettait déjà de développer une culture de gestion à la sécurité civile mais que la constitution d'une mission interministérielle était nécessaire pour conforter les synergies entre les services de l'Etat compétents en matière de prévention des risques et de protection des populations.

Après avoir rendu hommage aux sauveteurs et aux sapeurs-pompiers morts cette année dans l'exercice de leurs fonctions, il a souligné l'importance de l'entreprise de modernisation de la sécurité civile menée depuis 2002, en particulier avec l'adoption de la loi du 13 août 2004.

Il a précisé que, dans un contexte économique délicat, ce budget était un budget de transition pour la sécurité civile après l'achèvement des grands programmes d'investissement, qui permettait toutefois la remise à niveau de la flotte aérienne ou la mise en oeuvre du programme d'intérêt national ANTARES.

Ces observations ont conduit votre commission des Lois à donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission sécurité civile pour 2007.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Fortement sollicités au cours des dernières années, les personnels de la sécurité civile et des services de secours ont payé un lourd tribut à l'exercice de leurs missions . Votre commission, unanime, salue la mémoire des sapeurs-pompiers et secouristes décédés alors qu'ils tentaient de sauver des vies.

Le budget de la sécurité civile pour 2007 apparaît comme un budget de transition , après l'achèvement des grands programmes d'investissements.

Toutefois, il s'inscrit dans la cadre de la démarche ambitieuse de modernisation de la sécurité civile initiée en 2002 et consacrée par la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, qui a fait émerger une organisation de la sécurité civile opérationnelle et adaptée à son temps tout en favorisant l'émergence d'une véritable culture de la sécurité civile en France.

Aujourd'hui, 80% des dispositions de ce texte sont applicables . Certaines de ses innovations majeures, telles que la Conférence nationale des services d'incendie et de secours ou les nouvelles modalités de répartition des dépenses de secours ont déjà fait la preuve de leur pertinence.

Cependant, votre commission souligne l'urgence de la publication des deux décrets d'application de cette loi tendant respectivement à prévoir les obligations des exploitants chargés de services au public pour satisfaire les besoins prioritaires de la population en cas de crise et à préciser les mesures appropriées à prendre dans les établissements médico-sociaux pratiquant un hébergement collectif permanent pour garantir la sécurité des personnes hébergées en cas de défaillance énergétique.

I. LES CRÉDITS DE LA SÉCURITÉ CIVILE POUR 2007

A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS

1. Des interrogations persistantes sur la définition de la mission « sécurité civile »

La sécurité civile , qui « a pour objet la prévention des risques de toute nature, l'information et l'alerte des populations ainsi que la protection des personnes, des biens et de l'environnement contre les accidents, les sinistres et les catastrophes par la préparation et la mise en oeuvre de mesures et de moyens appropriés » 1 ( * ) , est en pratique assurée par de multiples acteurs (SDIS, Etat, communes, associations de sécurité civile...).

Les catastrophes récentes ont d'ailleurs souligné la nécessité de mieux coordonner prévention des risques et gestion des crises.

C'est pourquoi, lors des réflexions préalables à la mise en oeuvre de la nouvelle architecture budgétaire, le Sénat avait proposé au Gouvernement de créer une mission interministérielle « Ecologie et maîtrise des risques » 2 ( * ) , regroupant les crédits de la sécurité civile , ceux du ministère de l'écologie et du développement durable destinés à la prévention des risques, ceux du ministère de l'équipement et des transports relatifs à la météorologie ainsi qu'un programme « Prévention et contrôle des risques industriels ».

Dans la mise en oeuvre de la réforme de l'architecture budgétaire issue de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF), le Gouvernement n'a pas retenu cette option interministérielle pourtant conforme à la nécessaire coordination des acteurs chargés de la prévention et de la gestion des crises .

En effet, il a institué une mission sécurité civile ministérielle autonome divisée un peu artificiellement en deux programmes (intervention des services opérationnels, coordination des moyens de secours) et sept actions .

Simultanément, afin de garantir une vision plus cohérente de la politique nationale de sécurité civile, l'ensemble des crédits de l'Etat qui y sont consacrés (environ 902 millions d'euros pour 2007, en baisse de 1,1 % par rapport à 2006) sont retracés dans un « document de politique transversale » (DPT), ce qui tend a posteriori à souligner la cohérence de la position du Sénat.

LFI en 2006

Moyens prévus pour 2007

Programmes du DPT

• Actions du programme

AE*
(en millions d'euros)

CP
(en millions d'euros)

AE*
(en millions d'euros)

CP**
(en millions d'euros)

Coordination des moyens de secours


Préparation et gestion des crises

• Coordination des acteurs de la sécurité civile


• Soutien à la politique de sécurité civile

209,28

6,35

164,25

38,66

207,13

6,35

162,1

38,66

295,89

12,69

252,74

30,37

189,68

12,69

147,28

29,69

Intervention des services opérationnels


Participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts


• Interventions spécialisées sur les autres catastrophes naturelles et technologiques


• Secours à personne par hélicoptère


Neutralisation des engins explosifs

259,5

122,48

32,98

70,64

33,38

255,43

127,3

32,07

66,13

29,92

270,25

133,36

26,25

74,3

36,32

239,74

122,73

25,19

57,3

34,5

Administration territoriale


Coordination de la sécurité des personnes et des biens

71,12

71,12

68,09

68,09

62,11

62,11

61,81

61,81

Contrôle et prévention des risques technologiques et développement industriel


Prévention des nuisances et des risques industriels


Contrôles techniques de sécurité et de météorologie


Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

85,85

-

51,7

34,14

85,85

-

51,7

34,14

88 ,1

-

50,87

37,23

88,24

-

50,87

37,37

Forêt


Prévention des risques et protection de la forêt

51,66

51,66

50,44

50,44

48,32

48,32

48,36

48,36

Météorologie


Observation et prévision météorologiques

137,61

137,61

137,61

137,61

147,56

147,56

147,56

147,56

Prévention des risques et lutte contre les pollutions


Prévention des risques technologiques et des pollutions


Prévention des risques naturels


Gestion des crues

111,09

46,79

12,34

51,95

86,84

44,66

6,4

35,77

101,41

40,86

11,08

49,47

94,97

42,18

9,4

43,37

Sécurité et affaires maritimes


Sécurité et sûreté maritimes


Action interministérielle de la mer

9,25

6,64

2,6

9,78

7,18

2,6

11,7

9,18

2,57

10,74

8,16

2,57

Veille et sécurité sanitaires


Gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises

7,96

7,96

7,87

7,87

12,29

12,29

12,29

12,29

Interventions territoriales de l'Etat


Plan Loire Grandeur Nature Centre


Plan Durance multi-usages Provence-Alpes-Côte d'Azur

9,23

8,47

0,75

3,36

2,85

0,5

10,35

9,64

0,71

8,93

8,72

0,21

Totaux

952,58

912,44

1.047,97

902,37

* AE : autorisations d'engagement

** CP : crédits de paiement

Source : document de politique transversale « sécurité civile » du projet de loi de finances pour 2007.

L'an dernier, lors de son audition devant la commission des Lois de l'Assemblée nationale, M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, constatait l'étroitesse de la mission sécurité civile et appelait à un nouvel examen de ses contours.

Or, force est de constater que le projet de loi de finances pour 2007 conserve la maquette budgétaire actuelle. En réponse à une question écrite de votre rapporteur pour avis, le ministère de l'intérieur indiquait : « Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a, dès le début de l'année 2006, demandé au Premier ministre de bien vouloir engager une réflexion interministérielle sur la création d'une mission interministérielle. Les échanges entre les ministères concernés ayant fait apparaître des difficultés, peut-être plus apparentes que réelles, pour définir le périmètre de cette mission, le Premier ministre avait décidé de confier une réflexion à un parlementaire ou à une personnalité qualifiée dont les conclusions devaient être rendues avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2007 devant l'Assemblée nationale. Ce calendrier n'ayant pu être tenu, la maquette de la loi de finances est restée inchangée sur ce point pour l'année 2007 ».

Déplorant ce retard, votre commission estime que la réflexion sur l'institution d'une mission « sécurité civile » interministérielle, qui pourrait être un gage de synergie et d'une coopération renforcée entre les services de l'Etat concernés, doit être rapidement menée.

Par ailleurs, il faut rappeler que ces crédits ne tiennent pas compte des efforts des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) qui assurent l'essentiel des missions de secours et des dépenses qui en résultent : leur coût global est de 4,5 milliards d'euros en 2006 (dont 3,6 en fonctionnement).

Aussi, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par son rapporteur spécial, M. Georges Ginesta, tendant à inscrire au sein du DPT la réalité de l'effort national pour la sécurité civile en y prévoyant la présentation des dépenses engagées par les collectivités territoriales au titre des SDIS.

Le DPT présenterait également « une vision d'ensemble de la stratégie définie, en matière de gestion par la performance, par les services d'incendie et de secours, sur la base d'indicateurs normalisés au niveau national » 3 ( * ) , rejoignant une logique défendue de longue date par votre rapporteur.

La mission sécurité civile est donc en l'état rattachée au ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Le directeur de la défense et de la sécurité civiles est responsable de la gestion des crédits.

Le total des crédits de paiement demandés pour la mission pour 2007 s'élève à 429,38 millions d'euros 4 ( * ) (soit une baisse d'environ 7 % par rapport à 2006) tandis que le montant des autorisations d'engagement augmentera de 20,75 %.

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Ouvertes
en LFI
pour
2006

Demandées pour 2007

Fonds
de concours étendus

Ouverts
en LFI pour 2006

Demandés pour 2007

Fonds
de concours attendus

Intervention des services opérationnels

259,5

270,26

1,27

255,4

239,7

1,27

- Participation de l'Etat à la lutte
contre les feux de forêts

122,48

133,36

127,3

122,73

- Interventions spécialisées
sur les autres catastrophes naturelles
et technologiques

32,98

26,25

0,4

32,07

25,19

0,4

- Secours à personne par hélicoptère

70,64

74,3

0,47

66,13

57,3

0,47

- Neutralisation des engins explosifs

33,38

36,32

0,4

29,92

34,5

0,4

Coordination des moyens de secours

209,28

295,81

1,09

207,13

189,68

1,09

- Préparation et gestion des crises

6,35

12,69

6,35

12,69

- Coordination des acteurs
de la sécurité civile

164,25

252,74

1,09

162,1

147,28

1,09

- Soutien à la politique
de sécurité civile

38,66

30,37

38,66

29,69

Total mission

468,78

566,06

462,53

429,38

Source : bleu budgétaire.

En 2007, les effectifs attribués à la mission sécurité civile seront quasiment stables (2.598 équivalents temps plein travaillés où ETPT 5 ( * ) contre 2.604 en 2006), ainsi répartis :

- Programme intervention des services opérationnels : 2.139 ETPT (contre 2.248 en 2006) 6 ( * ) , soit 82,3 % de ceux de la mission ;

- Programme coordination des moyens de secours : 459 ETPT (contre 356 en 2006) 7 ( * ) .

2. Le programme « intervention des services opérationnels »

Avant toute chose, il convient de souligner la forte imbrication des deux programmes de la mission sécurité civile.

Le programme « intervention des services opérationnels » retrace les dépenses liées à la mise en oeuvre des moyens nationaux de la sécurité civile, mobilisés afin d'appuyer ceux des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) pour protéger la population en cas de crise.

Ce programme sera financé en 2007 à hauteur de 239,7 millions d'euros en crédits de paiement (- 6,15 % par rapport à 2006), cette baisse traduisant l'achèvement de programmes d'investissement importants. Ces crédits se décomposent de la manière suivante :

122,73 millions d'euros en crédits de paiement sont destinés au financement de l'action n° 1 « Participation de l'Etat à la lutte contre les feux de forêts » (soit environ 49,3 % des crédits de paiement du programme), qui correspond à la mobilisation des moyens nationaux de la sécurité civile pour lutter contre les feux  ;

25,1 millions d'euros en crédits de paiement doivent garantir l'action des moyens nationaux de la sécurité civile dans leurs interventions spécialisées sur les autres catastrophes naturelles et technologiques en partiulier par l'acquisition d'équipements de pointe (340.000 euros pour l'achat de radiamètres) pour les unités d'instruction et d'intervention de la sécurité civile (UIISC) et de matériels de navigation performants (action n° 2) ;

57,3 millions d'euros en crédits de paiement seront notamment destinés au fonctionnement courant et à la maintenance (22,09 millions d'euros) du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile (action n° 3) ;

34,5 millions d'euros en crédits de paiement sont destinés au financement de l'action n° 4 « Neutralisation des engins explosifs », qui recouvre les activités du service de déminage de la sécurité civile.

3. Le programme « Coordination des moyens de secours »

La coordination des acteurs des secours par la politique nationale de défense et de sécurité civiles est une garantie de leur efficacité alors qu'ils doivent répondre à des risques toujours plus complexes et divers.

Tandis que le montant des autorisations d'engagement prévues est de 295,81 millions d'euros (+ 41 %), les crédits de paiement relatifs à ce programme pour 2007 s'élèveront à 189,68 millions d'euros (- 8,42 % par rapport à 2006), cette baisse étant surtout provoquée par la diminution de la dotation relative au fonds d'aide à l'investissement des SDIS (FAI).

Ces crédits se décomposent de la manière suivante :

12,69 millions d'euros sont prévus au titre de l'action n° 1 « préparation et gestion des crises », notamment pour l'acquisition de matériels d'intervention et d'équipements de soutien logistique (170.000 euros pour l'achat de groupes électrogènes) mais aussi pour le financement des colonnes de renforts de sapeurs-pompiers, mobilisées pour appuyer l'action des SDIS exposés aux risques d'incendies ;

147,28 millions d'euros sont consacrés à l'action n° 2 « Coordination des acteurs de la sécurité civile », dont il faut souligner le périmètre très large (les crédits de cette action représentent 75 % de ceux du programme) : en effet, elle regroupe la subvention de l'Etat au budget de fonctionnement de l'Ecole nationale supérieure des officiers sapeurs-pompiers (ou ENSOSP) 8 ( * ) , qui sera fixée à 7 millions d'euros, les pensions et prestations versées aux sapeurs-pompiers victimes d'accidents (11,82 millions d'euros), le fonds d'aide à l'investissement des SDIS (FAI) précité, la participation de l'Etat au financement de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP)... ;

29,69 millions d'euros sont prévus au titre de l'action n° 3 « Soutien à la politique de sécurité civile », qui rassemble les fonctions d'état-major, d'inspection ainsi que les services administratifs de la direction de la défense et de la sécurité civiles (DDSC).

B. LES CARACTÉRISTIQUES PRINCIPALES DU BUDGET POUR 2007

1. Le maintien des capacités d'intervention du groupement des moyens aériens de la sécurité civile

Le groupement des moyens aériens de la sécurité civile est composé de 66 appareils (26 avions et 40 hélicoptères). Conformément à la politique menée depuis 2002, le projet de loi de finances tend à lui permettre d'assurer ses missions, de plus en plus diverses, en garantissant sa disponibilité et ses performances 9 ( * ) .

Concernant les moyens de la base d'avions de la sécurité civile 10 ( * ) (11 bombardiers d'eau Canadair ; 10 Tracker ; 2 Dash 8 ; 3 avions de liaison Beechcraft 200), principalement sollicités dans le cadre de la lutte contre les feux de forêts, l'acquisition d'un douzième Canadair est prévue mais les modalités de son financement, qui devrait avoir lieu « en gestion 2006 », ne sont pas clairement précisées.

Compte tenu du montant de cette acquisition (21 millions d'euros), d'importants redéploiements de crédits vont devoir être effectués entre les services du ministère, soulignant de facto l'intérêt de l'instauration d'une mission sécurité civile interministérielle qui faciliterait de telles opérations.

Par ailleurs, avec les deux Dash 8, la sécurité civile possède désormais des avions polyvalents complémentaires des Canadair lors des opérations d'attaque des feux naissants en guet aérien armé. Leur utilisation en opération au cours de l'été 2006 a levé les réticences initiales qui s'étaient exprimées lors de leur acquisition, notamment parmi les personnels navigants, sur leur efficacité.

Concernant les moyens du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile 11 ( * ) (6 Alouette III ; 4 Ecureuil ; 30 EC 145), le développement de la polyvalence de la flotte d'EC 145, qui donne toute satisfaction, se poursuit (achat d'enregistreurs de vol, de radars météo, de treuils ... ; 3,7 millions d'euros en crédits de paiement). En outre, afin de compenser les pertes de deux appareils (en 2003 et 2006) et de doter la sécurité civile d'une flotte d'hélicoptères susceptible de répondre efficacement à toutes les missions qui lui sont dévolues, 3 nouveaux EC 145 seront commandés en 2007 (22,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 1,13 million d'euros en crédits de paiement). En 2005, les hélicoptères de la sécurité civile ont secouru en moyenne une personne toutes les heures .

Enfin, la location d'un hélicoptère bombardier d'eau adapté aux conditions spécifiques d'extinction de feux de forêts en Corse a été prolongée pour une durée de quatre ans (16 millions d'euros en autorisations d'engagement).

2. Le soutien renouvelé de l'Etat aux services d'incendie et de secours

a) Le report de la suppression des contributions communales en 2010

Prévu par la loi du 3 mai 1996 12 ( * ) , le transfert de la gestion des moyens de secours vers les SDIS s'est achevé, pour l'essentiel, le 4 mai 2001.

Principaux acteurs des secours, les SDIS ont vu leur organisation actualisée par la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile :

- leur financement, aujourd'hui partagé entre les départements, les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale (le montant des cotisations communales et intercommunales étant plafonné), devait être assuré par les seuls départements à compter du 1 er janvier 2008. Leur participation au financement des SDIS prendra ensuite la forme d'un prélèvement sur leur dotation forfaitaire 13 ( * ) ;

- en contrepartie, l'influence du conseil général dans les décisions des SDIS qui demeurent des établissements publics autonomes a été confortée : ainsi, le président du conseil général est président de droit du conseil d'administration du service où les représentants du conseil général sont majoritaires et le conseil général détermine sa contribution annuelle au vu du rapport adopté par ce dernier sur l'évolution de ses ressources et de ses charges.

En 2006, le total des contributions des collectivités territoriales aux SDIS s'élève à 3,49 milliards d'euros (en budget primitif ; soit une augmentation de 5,7% par rapport à 2005), dont 3,6 en fonctionnement et 1,08 en investissement.

La participation financière des départements représente 52,91 % du total de ces contributions (+ 10,18 % par rapport à 2005), contre 47,09 % pour celle des communes et des EPCI.

Toutefois, lors du dernier congrès des sapeurs-pompiers, le 7 octobre dernier, M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, a annoncé le report au 1er janvier 2010 de la suppression des contributions communales et intercommunales car certaines modalités du dispositif qui succédera aux règles en vigueur doivent encore être précisées (modalités de participation financière des EPCI sans fiscalité propre et de répartition de leur contribution entre les communes-membres ; prise en compte spécifique de l'impact de la réforme pour les communes à faible montant de DGF...).

b) La modification de la répartition du fonds d'aide à l'investissement des SDIS et le programme ANTARES

La loi de finances pour 2003 a institué un fonds d'aide à l'investissement spécifique (FAI) 14 ( * ) pour accompagner le financement d'opérations prioritaires ou d'intérêt commun, qui a été pérennisé ultérieurement.

Le fonds est réparti entre les zones de défense en fonction de la population DGF des départements composant chaque zone. De là, le montant attribué à chaque zone est attribué aux SDIS par le préfet de zone. Doté initialement de 45 millions d'euros en crédits de paiement en 2003, le fonds bénéficiait de 64,5 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2006.

Or, après trois ans de fonctionnement, ses modalités d'attribution vont être modifiées. La Cour des comptes a en effet relevé un certain « saupoudrage » des fonds accordés , certaines zones se limitant à répartir les subventions sans sélectionner réellement les catégories d'opérations à financer.

Votre rapporteur nuance ce constat en soulignant que certaines années, une partie des crédits du FAI a été tardivement mise à disposition des préfets de zone et des SDIS pour des raisons de régulation budgétaire .

De plus, il tient à insister sur la complexité de la procédure actuelle de mise à disposition des crédits , le préfet de zone devant faire valider par le ministère l'ensemble des opérations des SDIS pour lesquelles il envisage de verser une part de l'enveloppe qui lui est attribuée.

Un groupe de travail de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, instance de concertation précieuse entre représentants des élus présidents de conseil d'administration de SDIS, les représentants des sapeurs-pompiers et l'Etat, consultée sur tout projet de loi ou d'acte réglementaire relatif aux missions, au fonctionnement ou au financement des SDIS 15 ( * ) , doit examiner les pistes d'adaptation de ce dispositif, qui permettraient de lui redonner sa vocation initiale sans pénaliser les SDIS.

Une partie du fonds devrait être désormais engagée pour le financement du programme d'intérêt national ANTARES 16 ( * ) où l'Etat serait maître d'ouvrage. Ainsi, le montant du fonds passerait de 64,85 millions d'euros en crédits de paiement en 2006, à 37,57 millions d'euros pour 2007. Simultanément, 13,18 millions d'euros seraient consacrés à ANTARES.

Rendu possible par la loi du 13 août 2004, ce dernier tend à moderniser les réseaux de communication des services d'incendie et de secours et à favoriser l'interopérabilité des transmissions de l'ensemble des services concourant à la sécurité civile (SDIS, SAMU, police, gendarmerie) par la mise en place d'une « infrastructure nationale partageable des transmissions » à partir du réseau ACROPOL de la police nationale.

Les expérimentations effectuées dans plusieurs SDIS (Ain, Eure-et-Loir, Gironde, Vosges) ont souligné les gains d'un tel dispositif pour l'efficacité opérationnelle des secours (accélération des remontées d'information ; géolocalisation ...).

Votre rapporteur se félicite de cette mutualisation des moyens de communication, qui tend à réduire leur coût de fonctionnement pour les services utilisateurs (coût de 150.000 euros par an pour le SDIS de l'Ain contre un coût de possession de 250.000 euros sans l'équipement partagé). Une piste d'économies supplémentaires pourrait être de faire bénéficier le réseau des directions départementales de l'équipement (DDE) de l'infrastructure contre participation financière.

Simultanément, en particulier dans un souci de péréquation entre SDIS, il conviendrait de « sanctuariser » également la deuxième part du FAI.

Selon les pistes évoquées au sein de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, cette part pourrait à l'avenir être mise à disposition des SDIS selon quelques critères simples qu'elle va définir et soumettre à l'Etat pour validation, permettant en particulier de prendre en considération les risques locaux et la solidarité entre SDIS.

c) L'achèvement du plan de modernisation de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP)

Pour des raisons historiques, la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) 17 ( * ) est composée de personnels à statut militaire, tout comme le bataillon des marins-pompiers de Marseille 18 ( * ) .

Sous l'autorité du préfet de police de Paris, la Brigade est chargée de la lutte et de la protection contre les incendies, des accidents sur la voie publique, du secours à victimes ainsi que des sinistres et catastrophes de toute nature sur les territoires de Paris et des trois départements de la « Petite couronne » (Hauts-de-Seine ; Seine-Saint-Denis ; Val-de-Marne), représentant une population de plus de 6 millions d'habitants 19 ( * ) .

L'activité de la Brigade a connu en 2005 une légère hausse (le nombre d'interventions a augmenté de 3 %). Il faut signaler à cet égard la diminution du nombre des accidents de la circulation (- 3,8 %) mais aussi l'augmentation importante des incendies (+ 12 %).

Simultanément, l'année 2005 possède le triste record du nombre de personnes décédées au cours de feux d'immeubles (98).

Le budget de la BSPP, qui relève de la préfecture de police de Paris, est cofinancé par les collectivités territoriales concernées et par l'Etat, à hauteur de 25 %. La contribution de ce dernier pour 2007 s'élève à 71,73 millions d'euros.

Ces crédits doivent permettre l'achèvement du plan de modernisation de la Brigade initié en 2002 : pour 2007, sont prévus en particulier le recrutement de 125 hommes, la création de 72 logements ou encore la livraison du nouveau centre de secours de Vincennes.

3. Le renforcement d'une culture de gestion et d'évaluation au sein de la sécurité civile

Votre commission se félicite de l'amélioration des modalités d'examen du budget de la mission sécurité civile . Les objectifs et les indicateurs de résultat sont globalement bien définis et bien renseignés, permettant une meilleure appréhension du coût des missions de secours et de la performance des services .

De plus, les remarques émises lors des débats parlementaires sur la définition, voire l'existence de certains objectifs et indicateurs ont amené des évolutions satisfaisantes : ainsi, les indicateurs mesurant le taux de satisfaction des demandes de concours aériens, ou l'optimisation de l'action soutien par ratio entre le coût de l'action et les crédits de la mission, dont l'utilité n'était pas évidente, ont été supprimés.

L'objectif n° 2 du programme Coordination des moyens de secours (« Promouvoir les orientations prioritaires de la sécurité civile par le renforcement de la sécurité des sapeurs-pompiers en intervention et l'harmonisation des moyens des SDIS ») manque en revanche toujours de lisibilité.

Les trois indicateurs de résultat qui y sont liés (accidentologie des sapeurs-pompiers en service commandé ; attrait des formations proposées par l'Ecole nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers ENSOSP - taux d'adhésion des SDIS à l'infrastructure complémentaire Acropol-Antarès) soulignent la diversité des actions comprises dans cet objectif, qui pourrait probablement être scindé. De plus, l'indicateur relatif à l'attrait des formations ne semble avoir qu'un intérêt limité.

Les indicateurs liés à l'activité de secours du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile sont dorénavant renseignés avec précision.

En revanche, les données relatives « au délai moyen d'intervention sur colis piégé » (indicateur 6-2 du programme intervention des services opérationnels) ne sont pas disponibles.

Cette transparence accrue souligne, s'il en était besoin, la nature « sous contrainte » du budget de la sécurité civile, parfois amené à évoluer de manière aléatoire pour répondre à des catastrophes imprévisibles , nécessitant la mobilisation des moyens nationaux de secours.

La situation des SDIS est, quant à elle, marquée à nouveau par une augmentation importante de leurs budgets (+ 6,4 % par rapport à 2005). Comme l'a souligné la Cour des comptes en 2004, cette augmentation doit inciter chaque SDIS à développer des outils de gestion (logiciel de gestion prévisionnelle des effectifs) en vue de mieux contrôler l'évolution de leurs dépenses.

Le développement de cette culture de gestion suppose l'existence d'instruments d'évaluation fiables.

Ainsi, conformément aux recommandations de la Cour des comptes et aux préconisations de votre commission, la direction de la défense et de la sécurité civiles (DDSC) a mis en place, fin 2005, un outil statistique relatif à l'activité des SDIS (Infosdis).

La définition d'indicateurs de cette activité permettant d'obtenir une grille d'analyse unique des données semble nécessaire pour la comparaison permanente des actions menées par les SDIS. Selon le ministère de l'intérieur, cet outil a déjà permis de constater le caractère parfois tardif de l'adoption des schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques (SDACR) et d'en suivre la mise à jour.

Comme il l'a déjà souligné, votre rapporteur estime qu'avec une telle base de données, la Conférence nationale des services d'incendie et de secours pourrait devenir une instance permanente d'évaluation du fonctionnement des services d'incendie et de secours et diffuser les bonnes pratiques opérationnelles ou managériales validées par elle sur le site www.infosdis.fr.

II. LA MISE EN oeUVRE DE LA SÉCURITÉ CIVILE

1. Les actions liées à la sécurité sanitaire

La canicule de 2003 avait souligné de manière dramatique les interactions permanentes entre sécurité sanitaire et sécurité civile, et la nécessité de renforcer la coopération entre les acteurs concernés pour améliorer la réponse des secours en cas de crise. La lutte contre l'épidémie de chikungunya et les mesures de prévention du risque de grippe aviaire en sont une nouvelle illustration.

a) La préparation au risque de grippe aviaire

Depuis l'alerte lancée début 2004 par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le risque d'une épidémie de grippe aviaire de grande ampleur, la France se prépare à une pandémie grippale .

La stratégie de l'Etat de préparation et de réponse à cette pandémie est décrite dans le plan gouvernemental du 6 janvier 2006. En cas de crise, ce plan prévoit de confier la conduite opérationnelle de l'action de l'Etat au ministère de l'intérieur.

Les services de la DDSC ont été mobilisés, avec les sapeurs-pompiers, lors de la première identification du virus dans un élevage avicole de l'Union européenne, à Versailleux (Ain), procédant alors à l'euthanasie des dindes de cet élevage et à la destruction des bâtiments de l'exploitation.

Ils poursuivent en outre le travail de planification (plan de continuité des services de février 2006), de sensibilisation (circulaires aux préfets) et de préparation (exercices nationaux et régionaux en 2005 et 2006 ; achat de 1.474.200 masques) au risque de grippe aviaire.

b) La réponse à l'épidémie de chikungunya

Virus transmis par la piqûre des moustiques du genre Aedes , le chikungunya (ou « maladie de l'homme courbé ») provoque de fortes douleurs articulaires associées à une raideur du corps, et des fièvres intenses.

Identifiée pour la première fois en 1953 en Tanzanie, cette maladie n'est à ce jour pas transmissible d'homme à homme mais de fortes suspicions de transmission in utero existent. Aucun traitement n'a été mis au point et à ce jour, seuls les symptômes du virus peuvent être combattus. En outre, la prolifération des moustiques doit être combattue pour éviter sa propagation.

En 2005, le chikungunya a touché les Comores, Mayotte (40.000 malades) , l'île Maurice. Il a provoqué une crise sanitaire sans précédent à La Réunion entre janvier et juin 2006 .

Les moyens nationaux de la sécurité civile ont complété les structures de commandement mises en place à La Réunion et à Mayotte et mené la lutte anti-vectorielle autour des habitations.

Grâce à ce dispositif important et à l'arrivée de l'hiver austral, les cas de chikungunya ont diminué. Malheureusement, l'épidémie n'est pas éradiquée et le retour de conditions climatiques favorables à son vecteur pourrait amener une recrudescence des cas sans poursuite des mesures de prévention et de lutte. C'est pourquoi les dispositifs mis en place devraient être reconduits.

2. Les interventions de la sécurité civile à l'étranger

Depuis vingt ans, personnels et moyens de la sécurité civile sont régulièrement sollicités par les gouvernements du monde entier et déployés à l'étranger, conformément à une procédure bien définie.

Après examen attentif d'une demande formelle d'assistance, le ministère des affaires étrangères décide alors du principe de l'intervention, en relation constante avec le ministère de l'intérieur (centre opérationnel de gestion interministérielle des crises - COGIC), chargé de proposer une stratégie d'engagement des moyens. De là, un élément de reconnaissance et d'évaluation (ERE) est envoyé sur place pour analyser la situation et définir l'étendue du dispositif français.

Sous commandement unique, les détachements engagés, placés auprès de l'ambassadeur de France, sont composés de personnels des unités d'instruction et d'intervention de la sécurité civile (UIISC), mais aussi de sapeurs-pompiers, voire de secouristes agréés par la sécurité civile.

Votre commission tient à rendre un hommage particulier aux équipes de secours qui ont permis le rapatriement de plus de 11.000 Français en provenance du Liban, du 17 juillet au 17 août , réalisant de fait la plus grande opération de rapatriement depuis la fin de la guerre d'Algérie.

Lieu

Durée

Moyens mis en oeuvre

Nature de la catastrophe

Mission des détachements

Pakistan

Octobre 2005

Détachement composé d'un ERE de 5 personnels et d'un GICA de 21 personnels

Séisme :

49.739 mors

74.134 blessés

Suivi du déploiement des moyens français

Animation de la cellule de crise à l'ambassade de France

Coordination des secours européens

Sauvetage

Indonésie

Mai-Juin 2006

Détachement composé d'un ERE de 5 personnels et de 42 médecins et infirmiers

Séisme :

5.846 morts

15.000 blessés

Envoi de matériel médical et de Fret humanitaire : déploiement d'un dispensaire de campagne pour la Croix-Rouge française

Aide sanitaire

Renfort des équipes hospitalières

Liban

Juillet-Août 2006

Deux missions d'appui et de secours à Beyrouth et à Chypre (87)

Equipes de soutien aux rapatriés à Roissy

Guerre, bombardements du territoire libanais

Evacuation et rapatriement de 11.000 ressortissants français

Côte d'Ivoire

Septembre 2006

ERE de 5 personnels

Pollution toxique

Evaluation des risques sanitaires et environnementaux

Définition de mesures conservatoires et des modalités de neutralisation du danger

3. La lutte contre les feux de forêts

a) Une année difficile en 2005, un bilan très satisfaisant en 2006

Les données disponibles pour l'année 2005 soulignent les difficultés rencontrées par les secours dans un contexte de sécheresse intense et de vents violents au cours de l'été.

La surface brûlée dans les départements méditerranéens s'est établie à 17.800 hectares (dont 16.200 hectares pendant l'été). De plus, il y a eu extension de la zone traditionnelle de risques avec 4.950 hectares brûlés sur le reste du territoire. Ce bilan préoccupant a été aggravé par le décès de 6 agents de la sécurité civile (4 membres d'équipage d'avions de la sécurité civile ; 1 pilote de bombardier et 1 sapeur-pompier).

L'année 2006 , pourtant marquée par une sécheresse dans la zone sud et des températures caniculaires en juillet, a été plus favorable sur le front des feux de forêts.

Le bilan des surfaces brûlées dans les départements méditerranéens au 1 er septembre s'établit à un peu plus de 5.200 hectares pour 2.020 départs de feux, surface bien inférieure à la moyenne décennale (15.600 hectares). 40 % de la superficie brûlée est imputable à des incendies qui ont eu lieu avant la mobilisation du dispositif estival (exemple des 450 hectares brûlés au Menez Hom dans le Finistère en mai) et les départements du Languedoc-Roussillon ont été plus durement touchés qu'à l'accoutumée.

Au total, grâce à l'amélioration de la prévention et de la lutte contre les incendies, les feux de forêts n'ont pas pris d'ampleur catastrophique.

Nombre de départs de feux

Surfaces incendiées

2004

2005

2006

2004

2005

2006

Alpes-Maritimes

147

143

140

243

338

144

Bouches-du-Rhône

229

204

180

2.674

2.264

700

Haute-Corse

388

241

380

4.460

4.200

610

Corse-du-Sud

241

272

320

98

200

230

Hérault

79

121

69

102

700

910

Var

305

303

303

932

1.860

470

Total zone méditerranéenne

1.999

1.871

2800

10.600

17.570

5.263

Sud Ouest

1.250

1.830

990

1.450

3.350

900

Autres

521

NC

NC

1.650

1.600

1.000

Total France

3.770

NC

NC

13.700

22.520

7.100

Source : ministère de l'intérieur et base de données Prométhée (au 28/11/06).

b) Une stratégie de prévention et de lutte sans cesse améliorée

Les retours d'expérience de la campagne de feux de forêt de 2003 (74.000 hectares brûlés dans toute la France) et l'examen attentif des campagnes « feux de forêts » ultérieures des services de secours illustrent en premier lieu le rôle déterminant de la prévention des incendies par :

- la connaissance toujours plus fine de l'origine des feux de forêts . En 2004, 75 % des incendies ont donné lieu à une enquête contre 20 % en moyenne dans les années 90. En 2005, la répartition de l'origine des feux de forêt était la suivante : imprudence (47 %) ;  malveillance (39 %) ; accidentel (9 %) ; foudre (5 %) ;

- les aides au maintien des activités agricoles ou pastorales dans les massifs méditerranées fragilisés par des feux récurrents. Pour 2007, 28 millions d'euros sont prévus par le ministère de l'agriculture au titre de la prévention des incendies de forêts ;

- le respect de l'obligation de débroussaillement des parcelles à proximité des habitations et infrastructures et la mise en place de plans de prévention des risques d'incendie de forêts (PPRIF ; 55 communes sont aujourd'hui dotées d'un plan approuvé et 162 d'un plan prescrit), destinés à limiter le « mitage » urbain des massifs les plus exposés. En effet, ces mesures doivent permettre de ne pas disperser l'action des secours mobilisés contre un feu en les contraignant à défendre une habitation ou un terrain isolé.

Votre commission constate les efforts entrepris en ce sens, en particulier grâce à des opérations de sensibilisation des propriétaires par les collectivités territoriales (cellule d'aide au débroussaillement en Corse) ;

- l'atout essentiel que constitue l'expertise de Météo France pour l'anticipation des risques et le déploiement préventif des moyens de secours.

Ainsi, Météo France (qui dispose depuis longtemps d'une antenne météorologique qui diffuse, deux fois par jour, des prévisions de danger pour quinze départements méditerranéens) a mis en place une nouvelle antenne spécifique à la zone sud ouest , dont les forêts sont plus sensibles aux incendies depuis les tempêtes de 1999 (chablis). De plus, dans le cadre du programme Eurorisk , Météo France et la DDSC développent une carte nationale de danger météorologique en matière d'incendies de forêts , afin de permettre aux zones moins régulièrement exposées de disposer d'un outil d'appréciation du risque feux de forêts ;

- des dispositifs efficaces de surveillance des massifs et de prévention opérationnelle au cours de l'été (agents forestiers ; stratégie de guet aérien armé et d'attaque des feux naissants 20 ( * ) des avions bombardiers d'eau).

Concernant les dispositifs de lutte contre les feux de forêts, il convient d'insister sur :

- la mobilisation réussie des moyens de la flotte aérienne de la sécurité civile , confirmant la pertinence du maintien de ses capacités (3.600 heures de vol d'avions bombardiers d'eau en 2005). L'apport décisif des deux nouveaux bombardiers d'eau polyvalents Dash 8 et de l'hélicoptère bombardier d'eau Aircrane, loué pour les interventions en Corse auquel il est adapté, a déjà été souligné.

- la plus grande souplesse de l'utilisation des colonnes de renfort de sapeurs-pompiers , en soutien des moyens de secours locaux ;

- l'engagement accru des forces de police et de gendarmerie, ainsi que de l'institution judiciaire, pour rechercher et réprimer les incendiaires . En 2006, 150 auteurs d'incendie ont été identifiés, dont une dizaine pour des feux volontaires et les parquets sont intervenus pour la mise en oeuvre des poursuites sous forme de comparution immédiate. A titre d'exemple, la Cour d'assises du Var a condamné à douze ans de réclusion un auteur d'incendie qui a parcouru 2.000 hectares en 2003 et dans lequel une dizaine de sapeurs-pompiers avaient été blessés.

4. L'adaptation permanente aux risques nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique (NRBC)

Pour 2007, la capacité de réponse des secours va être renforcée par certains équipements (acquisition de tenues à haute protection et de deux embarcations pour les navires ; mise en place d'une deuxième chaîne de décontamination dans le cadre du plan de modernisation de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP)).

La formation aux risques NRBC des personnels de l'Etat concernés va être également améliorée avec le développement du centre de formation à la gestion des crises NRBC à la caserne Mortier de Cambrai .

Après avoir envisagé de recourir à un partenariat public-privé, le ministère de l'intérieur a finalement confié la maîtrise d'oeuvre des formations à l'institut national des hautes études de sécurité (INHES) en mai 2006. L'INHES bénéficie d'une subvention de 300.000 euros à ce titre. Le pôle doit démarrer ses activités au début de l'année prochaine (simulations de crises...).

De son côté, la BSPP a créé un centre de formation « risques technologiques » délivrant toutes les qualifications NRBC, qui vise à former ses personnels et à sensibiliser les autres acteurs de la chaîne des secours (police, gendarmerie, services de santé) ou les services d'équipements.

Les SDIS, qui bénéficient désormais d'équipements idoines pour les interventions NRBC, ont développé deux spécialités professionnelles, à « risques radiologiques » et « risques chimiques et biologiques ». Mais la préparation aux risques NRBC passe surtout par les exercices , seuls à même de valider les bonnes pratiques (entre 2005 et 2006, une vingtaine d'exercices NRBC a été menée).

A titre d'exemple, le 13 février 2006, un exercice a été organisé à Lyon, prévoyant des attaques simultanées au stade Gerland, à la station de tramway Montrochet et place des Terreaux afin de tester la capacité de réponse et de coordination des secours (intégration de la dimension judiciaire ; expérimentation d'ANTARES ...).

III. LES CHANTIERS DE LA SÉCURITÉ CIVILE

1. Une réflexion nécessaire sur l'activité et les conditions d'intervention des sapeurs-pompiers

a) Le renforcement de la sécurité des sapeurs-pompiers dans l'exercice de leurs missions

Les sapeurs-pompiers assument au quotidien leur mission difficile de protection de la population avec compétence et courage. Toutefois, l'accomplissement de cette mission devient plus difficile voire impossible lorsque les personnels en intervention pour sauver des vies sont victimes d'incivilités ou d'agressions.

En 2005, 728 actes d'incivilités ou d'agressions concernant 1.124 sapeurs-pompiers ont été recensés par la DDSC dans 69 départements. 60 % d'entre eux ont fait l'objet d'un dépôt de plainte simple ou avec constitution de partie civile.

La DDSC enquête à l'heure actuelle pour connaître les suites judiciaires réservées à ces plaintes.

En raison de cette évolution préoccupante, de nouvelles stratégies sont mises en place tendant à la fois à conforter la protection des sapeurs-pompiers face à de tels comportements, à prévoir une formation « attitude et comportement » à l'attention des personnels les plus exposés, et à améliorer la réponse commune des sapeurs-pompiers, de la police nationale et de la gendarmerie nationale en cas de troubles urbains.

En complément, dans le cadre de la discussion du projet de loi de prévention de la délinquance, en cours à l'Assemblée nationale, un amendement du Gouvernement tend à réintroduire la notion de guet-apens en droit pénal, à prévoir l'alourdissement des peines encourues par les auteurs de violences commises avec une arme, soit en bande organisée ou soit avec guet-apens, à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique, d'un sapeur-pompier ou d'un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs, et à créer un nouveau délit d'embuscade 21 ( * ) .

L'amendement crée une infraction spécifique, prévue par un nouvel article 222-14-1, de violences volontaires avec arme sur agent de la force publique, sapeur-pompier civil ou militaire ou agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs, commise en bande organisée ou avec guet-apens.

Cette infraction doit être punie de 15 ans de réclusion criminelle - au lieu de 10 ans d'emprisonnement comme actuellement - si les violences ont entraîné une incapacité de travail de plus de huit jours, jusqu'à la réclusion criminelle à perpétuité en cas de décès de la victime.

Simultanément et paradoxalement, le développement d'une culture de la sécurité dans les SDIS était urgent afin de limiter le nombre d'accidents de service.

Entre 2001 et 2005, on a constaté le décès de 90 sapeurs-pompiers et relevé l'importance des accidents à l'origine de ces décès (37 % résultent d'accidents de la circulation et de trajet et 4 % d'accidents en caserne).

Cependant, les actions de sensibilisation des personnels et l'adaptation des procédures (74 SDIS disposent désormais d'un comité d'hygiène et de sécurité) à la suite de retours d'expérience commencent à porter leurs fruits puisque le nombre d'accidents de service en 2005 est en baisse de 40 % par rapport à 2004.

Enfin, la Conférence nationale des services d'incendie et de secours vient également d'instituer en son sein une commission « sécurité des sapeurs-pompiers » afin de faire des propositions pour améliorer la situation actuelle.

b) L'adaptation urgente des modalités de garde des sapeurs-pompiers professionnels22 ( * )

A compter du 1 er janvier 2002, l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'aménagement et la réduction du temps de travail (ARTT) 23 ( * ) a entraîné un bouleversement du fonctionnement des SDIS, la mise en place de la réduction du temps de travail nécessitant l'instauration d'un régime d'équivalence pour les gardes de nuit.

Le décret n° 2001-1382 du 31 décembre 2001 a permis aux SDIS de maintenir des cycles de travail de 24 heures, de combiner plusieurs cycles (alternance des gardes de 12 heures et de 24 heures) ou d'instaurer, par dérogation, une durée équivalente à la durée annuelle du travail dans le cadre de gardes de 24 heures, la durée de travail après équivalence devant être comprise entre 2.160 heures et 2.400 heures .

En pratique, cette réforme et le maintien de gardes de 24 heures ont eu pour effet de diminuer la disponibilité des personnels (qui effectuent de 90 à 100 jours de garde par an contre 135 avant la réforme) et d'impliquer des recrutements supplémentaires.

De plus, le faible nombre annuel de gardes de 24 heures n'est pas sans effet sur l'organisation du travail (difficultés supplémentaires pour maintenir la condition physique et le niveau d'expérience des personnels ainsi que la cohésion des équipes de secours...).

C'est pourquoi un nombre croissant de SDIS a instauré un système de gardes plus souple en adoptant le régime de travail réel (8 ou 12 heures). Toutefois, il conviendrait de mieux harmoniser les pratiques en vigueur.

De plus, la jurisprudence récente de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a considéré que les dispositions des directives communautaires relatives à la durée du temps de travail s'imposaient aux sapeurs-pompiers professionnels et que toute période de garde même inactive devait être considérée comme du travail effectif, contrairement à ce qu'avait estimé le Conseil d'Etat en 2002.

En outre, ce dernier a considéré que l'application des régimes d'équivalences était subordonnée au respect d'une durée hebdomadaire moyenne de présence de 48 heures sur une période de quatre mois consécutifs. En pratique, cette décision impliquerait de nouveaux recrutements massifs pour garantir une couverture opérationnelle satisfaisante du territoire par les SDIS alors que le nombre d'interventions des SDIS est en voie de stabilisation et que le nombre de sapeurs-pompiers professionnels connaît déjà une augmentation sensible (+ 958 en 2005).

Aussi, il semble urgent que le Gouvernement intervienne pour régler ces difficultés, en particulier auprès de ses partenaires européens, dans le souci d'assurer la pérennité de notre organisation des secours.

c) La conciliation de bon sens entre les perspectives d'évolutions statutaires et les moyens des SDIS

A cet égard, il convient de signaler :

- la première année d'application du projet de fin de carrière des sapeurs-pompiers professionnels , destiné à prendre en considération la situation des personnels âgés d'au moins 50 ans, connaissant des difficultés incompatibles avec l'exercice de fonctions opérationnelles.

Une enquête de la DDSC a montré que : 143 sapeurs-pompiers ont bénéficié d'une affectation non opérationnelle ; 5 sapeurs-pompiers ont bénéficié d'un reclassement pour raison opérationnelle ; 14 sapeurs-pompiers ont bénéficié d'un congé pour raison opérationnelle avec faculté d'exercer une activité privée alors que 22 d'entre eux ont bénéficié d'un tel congé avec constitution de droits à pension. Ce bilan est encore modeste mais les dispositifs innovants du projet de fin de carrière sont appelés à monter en puissance ;

- que la création d'un cadre d'emplois de catégorie A pour les infirmiers de sapeurs-pompiers et l'intégration et la titularisation des sapeurs-pompiers de Mayotte dans la fonction publique territoriale font l'objet de projets de décrets qui devraient être publiés avant la fin de l'année ;

- que l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) 24 ( * ) à certains sapeurs-pompiers professionnels , qui devait être adaptée après plusieurs décisions juridictionnelles la rattachant à l'emploi occupé par l'agent et non à la possession d'un grade ou à l'appartenance d'un cadre d'emplois, a été étendue, à la suite d'une erreur technique, à 28.000 personnels par le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006, qui n'avait pas donné lieu à un avis de la CNSIS et était donc contraire aux lois en vigueur.

Le décret n° 2005-951 du 31 juillet 2006 a supprimé ce dispositif entaché d'illégalité et un nouveau projet de décret, prévoyant l'attribution de la NBI à 4.500 sapeurs-pompiers, est en préparation ;

- que l'amélioration de l'accès au grade de major , qui fait l'objet d'un concours jugé peu attractif et dont les modalités ne répondent pas aujourd'hui aux besoins des SDIS, fait également l'objet d'un projet de décret répondant à plusieurs objectifs : donner la possibilité à des adjudants plus jeunes d'accéder à ce grade d'officier par voie interne lorsqu'ils justifient de 3 ans de services et à des adjudants expérimentés de bénéficier de voies d'accès facilitées, et favoriser l'accès des majors au grade de lieutenant ;

- et que le projet de restructuration de la catégorie C de la fonction publique résultant de la signature, le 25 janvier dernier, d'un protocole d'accord entre le ministère de la fonction publique et plusieurs organisations syndicales représentatives (« accords Jacob ») doit être mis en oeuvre pour les sapeurs-pompiers professionnels . Cette réforme pourrait aboutir à la fusion des grades de sapeurs-pompiers de deuxième et de première classe, et à une progression d'indice des caporaux et des sergents.

Sur ces différents points, à l'issue de longues négociations entre l'Etat, les présidents de conseils d'administration des SDIS et les organisations représentatives des sapeurs-pompiers, un relevé de conclusions , comportant d'importantes avancées sociales (application des accords Jacob avec accès des adjudants à l'échelle 6 culminant à l'indice brut exceptionnel 529 ; attribution de 15 points de NBI au titre des interventions en zone urbaine sensible ; poursuite des négociations sur la santé au travail et la fin de carrière ; mise en place d'un groupe de travail sur l'évolution des catégories A et B), a été soumis à M. Brice Hortefeux , ministre délégué aux collectivités territoriales.

Toutefois, le 16 novembre, quatre organisations syndicales ont rejeté ce compromis pour proposer des mesures statutaires impossibles à accepter eu égard au coût induit pour le contribuable (maintien de l'attribution de la NBI à l'ensemble des sapeurs-pompiers à qui elle avait été versée par erreur...).

Regrettant une certaine surenchère, votre rapporteur déplore en outre les violences choquantes commises à l'encontre des forces de l'ordre (15 policiers et gendarmes ont été blessés dont deux grièvement) lors de la manifestation des sapeurs-pompiers professionnels le 21 novembre, bien éloignées de ce que doit être le comportement des sapeurs-pompiers, qui a valeur d'exemple pour les jeunes notamment .

Il souhaite que les négociations reprennent au plus vite afin de trouver un compromis acceptable par l'ensemble des acteurs. A cette condition, un projet de décret pourrait être publié avant la fin de l'année.

d) Un plan d'action bienvenu en faveur du développement du volontariat sapeur-pompier

Le volontariat sapeur-pompier 25 ( * ) doit être particulièrement encouragé car il garantit le maillage étroit du territoire par les services de secours et constitue un exemple d'engagement civique.

Constatant une stagnation du nombre d'engagements et une diminution de leur durée, le Gouvernement a initié plusieurs actions en vue de développer et de fidéliser le volontariat.

Ainsi, la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires 26 ( * ) a pris effet au 1er janvier 2005 . Prenant la forme d'une rente viagère en principe versée aux sapeurs-pompiers âgés d'au moins 55 ans ayant accompli vingt ans de service, elle est financée par les cotisations des sapeurs-pompiers et des SDIS, ainsi que par l'Etat. Le coût annuel du dispositif est de 60,3 millions d'euros , mais est en partie financé par les produits financiers qu'il génère. L'Etat participe à ce financement par un abondement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) des départements à hauteur de 32 millions d'euros cette année. L'association nationale gérant ce régime en place depuis 2005, a choisi la CNP Assurances, le 29 juin dernier, pour régler les premières prestations à la fin de l'année.

L'ensemble des mesures de reconnaissance de la fidélité des sapeurs-pompiers volontaires s'élèvera à 90 millions d'euros par an (PFR ; allocation de vétérance...).

L'an dernier, le Gouvernement a également instauré un dispositif d'incitation fiscale en faveur du volontariat assimilant la mise à disposition par une entreprise à titre gratuit de salariés sapeurs-pompiers volontaires pendant les heures de travail au profit des SDIS à un don en nature ouvrant droit à une réduction d'impôt égale à 60 % de leur montant dans la limite de 5 % du chiffre d'affaires. L'utilisation de ce dispositif devrait être encouragée dans le cadre du nouveau plan d'action en faveur du développement du volontariat , signé par le ministre de l'intérieur, les représentants des employeurs et les représentants des associations d'élus et des sapeurs-pompiers, le 7 octobre dernier.

Ce plan doit concilier la disponibilité des sapeurs-pompiers volontaires et l'activité de l'entreprise (mise en place d'un suivi statistique plus fin du volontariat ; concertations pour conclure une convention nationale entre l'Etat, les employeurs et les assurances ; instauration d'un label « Employeur partenaire des sapeurs-pompiers » pour récompenser ceux d'entre eux qui favorisent l'exercice du volontariat parmi leurs salariés...).

2. La diffusion de la culture de la sécurité civile

Objectif majeur de la loi de modernisation de la sécurité civile, la diffusion de cette culture passe par une meilleure sensibilisation de la population aux risques ainsi que par un apprentissage de la conduite à tenir en cas de crise .

a) Des efforts importants de sensibilisation de la population

En premier lieu, la loi du 13 août 2004 a prévu de faire bénéficier tout élève d'une sensibilisation à la prévention des risques et aux missions des services de secours ainsi que d'un apprentissage des gestes élémentaires de premier secours 27 ( * ) au cours de sa scolarité.

Le décret n° 2006-41 du 11 janvier 2006 a précisé que dans les écoles, un enseignement des règles générales de sécurité et de principes simples pour porter secours est intégré dans les horaires et programmes de l'école primaire et que dans les collèges et lycées, cet enseignement et cette formation sont mis en oeuvre en application des programmes et dans les différentes activités organisées par l'établissement dans le cadre du projet d'établissement.

La formation aux premiers secours, validée par l'attestation de formation aux premiers secours (AFPS), est assurée par des organismes habilités (parmi lesquels figurent les services déconcentrés des ministères de l'éducation nationale et de la santé, les SDIS et les associations agréées).

La sensibilisation et la formation aux premiers secours (APS à l'école 28 ( * ) et AFPS au collège 29 ( * ) ) ont commencé lors de cette rentrée scolaire .

En second lieu, les réserves communales de la sécurité civile , instituées par la loi du 13 août 2004 à l'initiative du Sénat, montent en puissance . 114 réserves sont constituées ou en cours de constitution.

L'objectif de ces réserves, instituées par les communes qui le souhaitent, est de mobiliser les bonnes volontés locales pour participer aux dispositifs de préparation et de réponse aux crises.

La réserve va en effet « appuyer les services concourant à la sécurité civile en cas d'évènements excédant leurs moyens habituels ou dans des situations particulières. A cet effet, elles participent au soutien et à l'assistance des populations (aide aux personnes sinistrées par une catastrophe), à l'appui logistique et au rétablissement des activités (déblaiement des voies, pompage de bâtiments...). Elles peuvent également contribuer à la préparation de la population face aux risques (information sur les risques ; actualisation du plan communal de sauvegarde) » 30 ( * ) .

Il est intéressant de constater que la plupart des réserves sont instituées dans des communes soumises aux risques d'inondation ou de feux de forêts : ainsi, de nombreux comités communaux feux de forêts ont intégré le dispositif des réserves (24 dans le Var par exemple).

b) L'amélioration de la réponse aux crises de sécurité civile

La modernisation du réseau national d'alerte (RNA), dont l'anachronisme devenait préoccupant (4.500 sirènes datant en partie de la seconde guerre mondiale ; couverture partielle du territoire ; signaux d'alerte mal connus de la population), est en cours : trois expérimentations sont en cours pour valider les procédures et les équipements. Dans l'Ain, département pilote du programme ANTARES et à Mulhouse, il s'agit de valider le déclenchement des sirènes à partir de ce réseau. Les premiers essais effectués ont été concluants 31 ( * ) . Dans le Vaucluse, le site de Bollène, exposé à plusieurs risques, a été choisi pour valider l'utilisation de différents moyens d'alerte.

La rénovation de la procédure d'alerte a pour complément le développement d'une réelle stratégie de communication de crise dans les médias destinée à informer la population d'un danger et à lui indiquer les comportements à adopter lorsqu'il survient .

C'est pourquoi deux conventions ont été passées par le ministère de l'intérieur avec Radio France (25 juin 2004) et France Télévisions (juin 2006). A titre d'exemple, la convention nationale avec Radio France est déclinée en conventions locales entre les préfectures et Radio Bleu ou France Info, qui précisent notamment que les journalistes de Radio France peuvent être autorisés, en cas de catastrophe, à assurer l'information de la population au sein du PC de crise.

En outre, une campagne nationale de communication sur la signification du signal national d'alerte , les réflexes inhérents et la connaissance du risque sera lancée prochainement (41.280 euros prévus en 2006 et 161.000 euros programmés pour 2007 à cet effet).

Enfin, conformément aux articles 35 à 40 de la loi précitée du 13 août 2004 qui ont soumis les associations participant aux dispositifs de secours à une procédure d'agrément , le décret n° 2006-237 du 27 février 2006 et la circulaire d'application du 12 mai dernier ont précisé les modalités de délivrance de cet agrément.

Délivré par le préfet (associations locales) ou par le ministre de l'intérieur (associations nationales), cet agrément précise la nature des missions pour lesquelles il est délivré, ainsi que le champ de la compétence territoriale de l'association.

3. En marche vers une force de protection civile européenne

Si la protection civile relève en premier lieu de la compétence des Etats, conformément au principe de subsidiarité, l'Union européenne a été amenée à prendre des initiatives en la matière, en cohérence avec les besoins de coordination accrue exprimés lors de catastrophes naturelles ou technologiques récentes :

- un programme d'action communautaire en faveur de la protection civile communautaire a été institué par une décision 1999/847/CE du Conseil le 8 décembre 1999. Fondé sur des budgets spécifiques, il est utilisé pour assurer un soutien communautaire aux actions menées en matière de préparation des crises et de réaction rapide. Il doit expirer fin 2006 mais la Commission européenne a présenté une proposition de règlement pour créer un « instrument » confortant et étendant les domaines concernés par cette aide au cours de la période 2007-2013 ;

- un mécanisme communautaire tendant à favoriser une coopération renforcée dans le cadre des interventions relevant de la protection civile a été instauré par la décision 2001/792/CE Euratom du Conseil du 23 octobre 2001.

30 Etats 32 ( * ) participent à ce mécanisme en mettant leurs moyens disponibles à disposition à la demande d'un pays touché par une catastrophe, par l'intermédiaire du centre de veille et d'information basé à Bruxelles (à la Commission) et en veille permanente, qui dispose d'une base de données contenant les moyens nationaux susceptibles d'être mobilisés et un système de communication commun.

Le mécanisme communautaire a été sollicité à plusieurs reprises avec succès (par exemple, à la suite du raz-de-marée en Asie du sud-est début 2005). Certains Etats membres vont même plus loin dans la coopération, à l'exemple de la France, de l'Espagne, de l'Italie et du Portugal depuis l'été 2006 en matière de lutte contre les feux de forêts.

La France , a simultanément proposé la création d'une force d'intervention rapide de protection civile (FIRE).

Ce dispositif européen de réaction rapide aux catastrophes se traduirait en pratique par la création d'une cellule de crise à Bruxelles , chargée d'analyser la situation et de déclencher l'intervention des secours, la mise en place d'une capacité de planification opérationnelle , ainsi que le renforcement de la coordination opérationnelle sur le terrain (désignation d'une nation pilote pour coordonner les moyens) et des moyens d'intervention de l'Union européenne (réflexion commune sur l'acquisition d'avions gros porteurs).

M. Michel Barnier , ancien ministre des affaires étrangères et ancien commissaire européen, a été chargé par la Commission européenne d'émettre des propositions sur la modernisation des mécanismes européens de protection civile ( Europe aid ). Ces dernières sont proches de la position française : création d'une force européenne de protection civile ; intervention respectueuse des compétences nationales et locales à la demande des Etats membres ; spécialisation de ces derniers dans la gestion d'un ou plusieurs risques ; capacité de réponse reposant sur les moyens nationaux et des moyens additionnels ; création d'un centre opérationnel pour la planification et l'organisation d'exercices et d'un institut de formation commun pour la protection civile et l'action humanitaire.

Le Parlement européen s'est prononcé pour une modernisation du mécanisme communautaire de protection civile améliorant l'information des citoyens (système d'alerte), préconisant l'intégration des enjeux de santé publique, ainsi que la mobilisation des moyens militaires en intervention. Simultanément, il a appelé à la constitution d'une force de protection civile européenne le 17 novembre dernier.

Lors de son audition par votre commission, M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, a confirmé que la France était à la fois soucieuse de préserver ses propres moyens d'intervention, nécessaires à une réponse rapide en cas de catastrophe, et de favoriser une meilleure mutualisation des moyens des Etats-membres.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner l'importance de l'entreprise de modernisation de la sécurité civile depuis 2002. Il insiste également sur la nécessité d'encourager toute action susceptible de diffuser en France une culture de la sécurité civile, afin que celle-ci devienne effectivement « l'affaire de tous ».

*

* *

Ces observations ont conduit votre commission des Lois à donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission sécurité civile inscrits au budget du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

* 1 Article 1 er de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile.

* 2 Rapport d'information n° 292 de MM. Jean Arthuis et Philippe Marini au nom de la commission des Finances sur la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 3 Article 51 septies.

* 4 Ces crédits représentent donc 51,89% des crédits de l'Etat pour la sécurité civile.

* 5 La loi de finances fixe un nombre maximum d'emplois par ministère. Ces plafonds d'emplois sont exprimés en équivalent temps plein travaillé (ETPT). Ils sont répartis dans chacun des programmes à titre indicatif.

* 6 Transfert de 108 militaires du centre opérationnel de gestion interministérielle de crise (COGIC) et des états-majors de zone vers le programme Coordination des moyens de secours, 19 départs à la retraite, 325 fins de contrat de militaires, 50 mutations de militaires mais aussi 381 entrées prévues et rattachement de 12 démineurs de la police nationale au programme.

* 7 129 entrées dont le rattachement des 108 militaires précités, 5 suppressions d'emplois nettes au titre de l'amélioration de la productivité et 26 sorties.

* 8 L'ensemble des personnels et des formations de l'ENSOSP devraient être transférés avant l'été prochain sur le site d'Aix-les Milles, choisi en 2002. Le budget de l'école est de 17,5 millions d'euros dont 4,5 millions d'euros issus de la contribution de l'Etat.

* 9 En tant que rapporteur spécial, notre collègue Claude Haut a assuré un contrôle sur pièce et sur place sur la flotte aérienne de la sécurité civile. Tout en indiquant quelques pistes d'amélioration, il émettait une appréciation globalement positive sur sa gestion et l'état d'esprit de ses personnels.

* 10 En dehors des périodes à risques où ils sont répartis sur les zones les plus exposées aux feux (Ajaccio ; Bastia ; Bordeaux ; Cannes ; Carcassonne), les avions sont stationnés sur la plate-forme de Marignane (Bouches-du-Rhône), où sont installés le commandement et les services de soutien.

* 11 Les hélicoptères de la sécurité civile sont stationnés sur 22 bases réparties sur l'ensemble du territoire national. Le centre de commandement est situé à Nîmes-Garons (Gard).

* 12 Loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours.

* 13 Article L. 2334-7-4 du code général des collectivités territoriales.

* 14 Article L. 1424-36-1 du code général des collectivités territoriales et décret n° 2003-883 du 16 septembre 2003. La ville de Marseille et le service d'incendie et de secours de Mayotte ont été rendus éligibles à ce fonds par la loi du 13 août 2004 et le décret n° 2005-623 du 30 mai 2005.

* 15 Article 44 de la loi de modernisation de la sécurité civile. La Conférence peut aussi émettre des voeux.

* 16 ANTARES : Adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours.

* 17 Afin de tirer les leçons de l'incendie de l'ambassade d'Autriche à Paris lors d'un bal en son honneur, le 1 er juillet 1810, Napoléon 1 er créa le bataillon des sapeurs-pompiers de Paris pour assurer la lutte contre les incendies dans la capitale (décret du 18 septembre 1810). Cette unité, composée de 7.597 hommes, est devenue régiment (1867) avant d'être transformée en brigade (1967) rattachée à l'arme du Génie.

* 18 En 2006, il y a 11.829 sapeurs-pompiers militaires.

* 19 En outre, la Brigade assure la protection de quelques sites sensibles (Lacq-Artix ; Biscarosse ; centre national d'études spatiales de Kourou).

* 20 Cette stratégie consiste, en période de risques élevés, à maintenir des appareils en vol sur les espaces les plus exposés afin de pouvoir éteindre les débuts d'incendie dans les dix premières minutes.

* 21 Rapport n°3436 du président Philippe Houillon au nom de la commission des Lois.

* 22 En 2006, l'effectif de sapeurs-pompiers professionnels est de 37.800.

* 23 Loi n° 84-53 du 26 janvier 2004 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et décrets n° 2000-815 du 29 août 2000 et n° 2001-623 du 12 juillet 2001.

* 24 A l'heure actuelle, à ce titre, un adjudant-chef bénéficie d'une indemnité de 72 euros.

* 25 En 2006, les 204.000 sapeurs-pompiers volontaires représentent 80% des effectifs.

* 26 Article 83 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 et décret n° 2005-1150 du 13 septembre 2005.

* 27 Article L. 312-13-1 du code de l'éducation.

* 28 Apprendre à Porter Secours.

* 29 Attestation de Formation aux Premiers Secours.

* 30 Article L. 1424-8-1 du code général des collectivités territoriales.

* 31 51.180 euros ont déjà été engagés pour ces expérimentations.

* 32 Les 25 Etats de l'Union européenne, la Bulgarie, l'Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Roumanie.

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