INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de finances pour 2009 se caractérise par un renouvellement des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales.

Pour la première fois, en effet, le budget de l'Etat s'inscrit dans une perspective pluriannuelle axée sur l'objectif de retour à l'équilibre des finances publiques pour 2012. Dans ce contexte, le projet de loi de finances pour 2009 prévoit d'associer pleinement les collectivités territoriales à cet effort de maîtrise des dépenses publiques, par la stricte limitation de la progression de l'ensemble des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales au rythme de l'inflation hors tabac.

En contrepartie de cette responsabilisation accrue, l'Etat entend renforcer les enceintes de dialogue avec les collectivités territoriales, dans une triple démarche de transparence, de participation et de responsabilité. Ces enceintes de dialogue seront appelées à jouer un rôle essentiel lors de l'examen des nombreuses réformes qui ont été annoncées par le gouvernement au cours des derniers mois.

A cet égard, si certaines de ces annonces ont pu susciter, à des degrés divers, des inquiétudes de la part des élus locaux, elles n'en demeurent pas moins fondamentalement nécessaires au regard de la situation de nos finances publiques et du contexte économique passablement difficile que traverse actuellement notre pays. De ce point de vue, la légitimité de la pleine association des collectivités territoriales à la maîtrise des dépenses publiques ne peut guère être contestée.

Néanmoins, il conviendra de veiller, dans les semaines et les mois à venir, à ce que ces réformes soient engagées dans une totale transparence et dans le respect des prérogatives des collectivités locales. En outre, la capacité financière des collectivités les plus défavorisées devra être préservée, sauf à remettre en cause le principe de péréquation qui figure désormais dans notre Constitution. Le projet de loi de finances pour 2009 ne constitue donc qu'une première étape dans ce processus.

Comme par les années passées, l'ensemble des dispositions du projet de loi de finances relatives aux relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales demeure difficile à appréhender dans sa globalité, du fait du cadre mal adapté que continuent de constituer à ce sujet les règles de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 (LOLF). Néanmoins, une réelle cohérence unit ces dispositions éparses à travers l'objectif de maîtrise de la progression des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales. En contrepartie, un certain nombre de réformes institutionnelles, tant au niveau de l'Etat qu'au niveau de l'Union européenne, entendent associer davantage les collectivités territoriales à la production normative et à la gouvernance globale.

I. UN MANQUE DE LISIBILITÉ PERSISTANT

Comme votre rapporteur n'a cessé de le répéter, les règles édictées par la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) ne permettent pas de rendre compte de façon lisible et exhaustive de l'ensemble des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales :

- Ainsi, aux concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales stricto sensu , partagés entre prélèvements sur recettes et crédits budgétaires (56,478 milliards d'euros au total, auxquels s'ajoute 1,8 milliard d'euros de subventions diverses de fonctionnement et d'équipement provenant de divers ministères), il convient d'ajouter les transferts de fiscalité destinés à financer les transferts de compétences aux collectivités (21,4 milliards d'euros) ainsi que la compensation des dégrèvements législatifs et des exonérations d'impôts locaux (17,2 milliards d'euros).

- Parallèlement, la mission (hors budget général) correspondant au compte de concours financiers « avances aux collectivités territoriales », dont les crédits atteignent 86,822 milliards d'euros, constitue une avance sur les recettes fiscales des collectivités territoriales et non directement une contribution financière de l'Etat au financement de ces dernières.

Source : PLF

A. LES CONCOURS FINANCIERS DE L'ETAT SONT PARTAGÉS ENTRE PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES ET CRÉDITS BUDGÉTAIRES

Au sein des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales, il y a lieu de distinguer, d'une part, les crédits budgétaires relevant de la mission « relations avec les collectivités territoriales », auxquels s'ajoutent les subventions diverses accordées par différents ministères, et, d'autre part, les prélèvements sur recettes en faveur des collectivités.

1. La mission « relations avec les collectivités territoriales » ne représente qu'une partie des crédits budgétaires destinés aux collectivités

a) La mission « relations avec les collectivités territoriales » regroupe les dotations budgétaires inscrites au budget du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Son montant est fixé à environ 2,4 milliards d'euros pour 2009.

Cette mission se compose de quatre programmes qui portent respectivement les crédits des concours financiers aux communes et groupements de communes (programme 119), aux départements (programme 120), aux régions (programme 121) et certains concours spécifiques (programme 122) :

- Les crédits du programme 119 « concours financiers aux communes et groupements de communes » (802,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 739,6 millions d'euros en crédits de paiement) correspondent traditionnellement à trois dotations : la dotation générale de décentralisation (DGD), la dotation globale d'équipement (DGE) et la dotation de développement rural (DDR), auxquelles s'ajoutent en 2009 une « dotation forfaitaire titres sécurisés » et une « dotation de développement urbain ». Les crédits affectés à ces quatre dernières dotations ont vocation à financer l'action n°1 du programme, consacrée au soutien aux projets des communes et groupements de communes, par l'allocation de subventions à des communes ou à des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sur la base de projets qu'ils présentent. De son coté, l'action n°2 « dotation générale de décentralisation » reprend une partie des dotations destinées à compenser les charges globales de fonctionnement des communes et de leurs groupements résultant d'un transfert, d'une création ou d'une extension de compétences.

- Les crédits du programme 120 « concours financiers aux départements » (488,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 484,9 millions d'euros en crédits de paiement) ne correspondent plus qu'à deux dotations : la DGE des départements contribue à l'action n°1 du programme, « aides à l'équipement des départements », tandis que la DGD contribue à l'action n°2 (« dotation générale de décentralisation »), qui reprend une partie des dotations destinées à compenser les charges globales de fonctionnement des départements résultant d'un transfert, d'une création ou d'une extension de compétences. Pour mémoire en effet, depuis 2008, la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC), qui figurait jusqu'alors au sein de ce programme, est inscrite en prélèvement sur les recettes de l'Etat.

- Les crédits du programme 121 « concours financiers aux régions » (800 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement) ne comprennent plus, depuis la transformation en 2008 de la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) en prélèvement sur recettes, que l'action n°2 « dotation générale de décentralisation », qui regroupe une partie des dotations destinées à compenser les charges globales de fonctionnement des régions résultant d'un transfert, d'une création ou d'une extension de compétences.

- Enfin, le programme 122 « concours spécifiques et administration » (321 millions d'euros en autorisations d'engagement et 312 millions d'euros en crédits de paiement) comporte quatre actions aux objectifs divers. L'action n°1 « aides exceptionnelles aux collectivités territoriales » reprend les subventions destinées à soutenir les collectivités déstabilisées par des circonstances exceptionnelles, auxquelles s'ajoutent à partir de 2009 les aides versées aux communes concernées par les restructurations du ministère de la défense. L'action n°2 « administration des relations avec les collectivités territoriales » regroupe les crédits de fonctionnement et d'investissement de la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l'intérieur. L'action n°3 « dotation générale de décentralisation » regroupe un certain nombre de concours spécifiques versés dans le cadre de la DGD (crédits du concours particulier relatif aux autorités organisatrices des transports urbains, crédits du concours « bibliothèques », crédits du concours « ports maritimes décentralisés » et crédits du concours « aérodromes »). Enfin, l'action n°4 « dotations outre-mer » regroupe quatre dotations destinées à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

MISSION « Relations avec les collectivités territoriales »

Programme
« Concours financiers aux communes et
aux groupements
de communes »

Programme
« Concours financiers aux départements »

Programme
« Concours financiers aux régions »

Programme
« Concours
spécifiques
et administration »

Actions :

Actions :

Action :

Actions :

- Soutien aux projets des communes et des groupements de communes

- Aides à l'équipement des départements

- Dotation générale de décentralisation

- Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales

- Dotation générale de décentralisation

- Dotation générale de décentralisation

- Administration des relations avec les collectivités territoriales

- Dotation générale de décentralisation

- Dotation outre-mer

Par rapport à 2008, la mission « relations avec les collectivités territoriales » est affectée par des mesures de transfert et des mesures de changement de périmètre à hauteur de +61,8 millions d'euros, résultant des opérations suivantes :

- création de trois nouvelles dotations budgétaires : une dotation de développement urbain (DDU) destinées aux villes défavorisées (50 millions d'euros), une dotation forfaitaire destinées aux communes concernées par la délivrance des titres sécurisés (6,34 millions d'euros) et une aide exceptionnelle aux collectivités concernées par la restructuration territoriale des implantations du ministère de la défense (5 millions d'euros) ;

- recentrage du secrétariat d'Etat à l'outre-mer sur une administration de mission, conduisant au transfert de plusieurs dotations du programme 123 « conditions de vie outre-mer » de la mission « outre-mer » vers l'action n°4 du programme 122 « concours spécifiques et administration » pour un montant de 102,3 millions d'euros ;

- abondement de la DGD des régions d'outre-mer inscrite sur le programme 121 de 40,5 millions d'euros au titre des transferts de compétences intervenant en application de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ;

- réduction de la DGD de droit commun des régions de 82,8 millions d'euros, justifiée par l'évolution de la jurisprudence communautaire relative aux subventions d'exploitation versées par les régions à la SNCF (lesquelles ne sont désormais plus assujetties à la TVA).

Envisagée de façon transversale, la mission « relations avec les collectivités territoriales » comprend les dotations suivantes :

- dotation générale de décentralisation (1,4 milliard d'euros) ;

- dotation globale d'équipement (709 millions d'euros) ;

- dotation de développement rural (131 millions d'euros) ;

- nouvelle dotation de développement urbain (50 millions d'euros) ;

- subventions et crédits divers (178 millions d'euros).

Toutefois, deux remarques importantes doivent être faites au sujet de cette mission :

- ses crédits ne représentent qu'environ 40% des crédits budgétaires et 4% seulement des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales ;

- l'Etat ne dispose d'aucune marge de manoeuvre pour 70% des crédits de cette mission , dans la mesure où les critères d'attribution et de répartition de la plupart de ses dotations sont définis par la loi.

Ce double constat avait conduit, l'an passé, notre collègue Michel Mercier, alors rapporteur spécial de la commission des finances, à proposer la suppression de la mission « relations avec les collectivités territoriales » , par, d'une part, la transformation des concours financiers sur lesquels l'Etat n'a pas de marge de manoeuvre en prélèvements sur recettes, et, d'autre part, le redéploiement des crédits restants au sein d'un nouveau programme de la mission « administration territoriale et générale de l'Etat ». Cette proposition conserve en 2009 toute sa pertinence.

b) La dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle correspond à la compensation des transferts de compétences en matière de formation professionnelle intervenus successivement depuis 1983 en faveur des régions. Pour 2009, les crédits de cette dotation sont inscrits, pour un montant de 1,686 milliard d'euros , au budget du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, au sein du programme 103-02 « accès des actifs à la qualification » de la mission « travail et emploi » .

c) Avec l'entrée en vigueur de la LOLF, les subventions budgétaires des autres ministères aux collectivités territoriales sont, depuis 2006, présentées par mission et programme et identifiées (à l'exception des crédits versés aux établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole) par les crédits relevant de la catégorie 63 (transferts aux collectivités territoriales). Les crédits inscrits au titre de la catégorie 63 représentent, en 2009, 1,77 milliard d'euros (en autorisations d'engagement) et sont principalement répartis entre sept missions (« ville et logement », « outre-mer », « politique des territoires », « écologie, développement et aménagement durables », « culture », « agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », « sécurité civile »). En 2008, 1,575 milliard d'euros de crédits avaient été ouverts au titre de la catégorie 63.

Néanmoins, si ces crédits participent bien de l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales, ils sont en revanche exclus du champ des concours de l'Etat entrant dans l' « enveloppe normée » (voir infra ).

2. L'essentiel des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales figure désormais en prélèvements sur les recettes de l'Etat

Le PLF pour 2009 prévoit que 52,4 milliards d'euros , soit 93 % des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales , sont prélevés sur les recettes de l'Etat. Ces 52,4 milliards d'euros se décomposent en 12 dotations principales, comprenant elles-mêmes parfois plusieurs composantes :

Intitulé du prélèvement

Montant prévu par le PLF
(art. 19)
(en milliers d'euros)

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation globale de fonctionnement

40.855.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat du produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques

700.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs

38.000

Dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

164.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle

583.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée

5.855.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

1.998.000

Dotation élu local

65.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse

44.000

Compensation de la suppression de la part salarie de la taxe professionnelle

100.000

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion

500.000

Dotation départementale d'équipement des collèges

329.000

Dotation régionale d'équipement scolaire

662.000

Compensation d'exonération au titre de la réduction de la fraction des recettes prises en compte dans les bases de taxe professionnelle des titulaires de bénéfices non commerciaux

279.000

Compensation d'exonération de la taxe foncière relative au non-bâti agricole (hors la Corse)

201.000

Fonds de compensation des baisses de DCTP

0

Fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles

20.000

TOTAL

52.393.000

Ce dispositif a toutefois été aménagé lors de son examen par l'Assemblée nationale (voir infra ).

L'existence de ces prélèvements sur recettes (PSR) a été consacrée par l' article 6 de la LOLF , lequel dispose qu'« un montant déterminé de recettes de l'Etat peut être rétrocédé directement au profit des collectivités territoriales ou des Communautés européennes en vue de couvrir des charges incombant à ces bénéficiaires ou de compenser des exonérations, des réductions ou des plafonnements d'impôts établis au profit des collectivités territoriales . Ces prélèvements sur les recettes de l'Etat sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de façon précise et distincte ». Les PSR constituent ainsi une exception aux principes d'unité (en permettant une contraction entre les recettes et les dépenses) et d'universalité (en permettant l'affectation de recettes à des dépenses) et se traduisent par des versements qui, une fois calculés, ont un caractère global et automatique .

Deux dotations concentrent 89% de ces prélèvements sur recettes :

- La DGF (plus de 40 milliards d'euros) constitue depuis 2004 la principale dotation de fonctionnement attribuée aux collectivités locales. Sa structure interne est particulièrement complexe, puisqu'elle comprend douze dotations et, pour chaque niveau de collectivités, une part forfaitaire ainsi qu'une ou plusieurs parts de péréquation. De 1996 à 2008, la DGF a évolué en fonction de l'indice de hausse des prix pour l'année à venir, auquel était ajoutée la moitié du taux de croissance du PIB en volume de l'année en cours .

- Le Fonds de compensation de la TVA (près de 5,9 milliards d'euros) a pour objet la compensation par l'Etat de la TVA acquittée par les collectivités territoriales sur leurs investissements. Son rythme rapide de progression (environ 10% par an depuis 2004) reflète à la fois la dynamique de l'investissement local et les élargissements successifs de son assiette.

Décomposition de la DGF

- La DGF des communes (16,4 milliards d'euros en 2008) comprend principalement une dotation forfaitaire (85% de la DGF des communes), ainsi que trois dotations de péréquation : la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), la dotation de solidarité rurale (DSR) et la dotation nationale de péréquation (DNP).

- La DGF des EPCI à fiscalité propre (6,4 milliards d'euros en 2008) comprend une dotation de compensation et une dotation d'intercommunalité.

- La DGF des départements (12 milliards d'euros en 2008) regroupe une dotation forfaitaire, une dotation de compensation, une dotation de péréquation urbaine et une dotation de fonctionnement minimal.

- La DGF des régions (5,3 milliards d'euros en 2008), comprend une dotation forfaitaire et une dotation de péréquation.

Les prélèvements sur recettes intègrent également un certain nombre de dotations de compensations d'exonérations , lesquelles ont pour but de compenser les pertes de recettes fiscales entraînées par les exonérations et allègements de bases décidés par le législateur. Leur montant est calculé en fonction des ressources fiscales que percevait la collectivité avant l'exonération.

En 2004, une part importante des compensations d'exonération ont été intégrées dans la DGF. Depuis 2008, dans un objectif de maîtrise des dépenses publiques, un certain nombre de ces dotations jouent le rôle de variables d'ajustement et se voient appliquer un taux de minoration qui modère leur évolution spontanée.

Les crédits prévus par le PLF pour 2009 au titre des compensations d'exonérations représentent 3 ,32 milliards d'euros .

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