2. Les dépenses fiscales

Les dépenses fiscales en outre-mer, c'est-à-dire l'ensemble des mesures d'exonération d'impôt, hors cotisations sociales, sont estimées à 3,2 milliards d'euros pour 2011, dont 1,3 milliard sur la TVA 7 ( * ) .

Là aussi, la fiabilité des chiffres est en question et, dans leur rapport 8 ( * ) sur le présent projet de loi, les rapporteurs spéciaux de la commission des finances du Sénat expriment leur crainte que l'administration soit en réalité dans l'incapacité d'en évaluer précisément le coût.

De même, le rapporteur spécial de la commission des finances de l'Assemblée nationale 9 ( * ) dénonce « l'absence de pilotage des dépenses fiscales, lors même qu'elles sont le principal outil financier de la politique de l'Etat outre-mer ».

Le projet de loi de finances pour 2011 propose des modifications substantielles de certaines de ces dépenses fiscales.

L'article 13 prévoit de « rationaliser » les avantages fiscaux liés à l'investissement dans la production d' énergie photovoltaïque . Il touche l'outre-mer à deux titres :

- il ramène de 50 % à 25 % le crédit d'impôt sur le revenu qui concerne l'ensemble du territoire national ;

- il supprime, à compter du 29 septembre 2010, les « investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil » du champ éligible aux réductions d'impôt sur le revenu et sur les sociétés spécifiques à l'outre-mer.

Cette double peine est particulièrement surprenante .

La première est clairement contraire à l'esprit du Grenelle de l'environnement.

La seconde est en contradiction avec la Lodeom, qui n'a pourtant été adoptée qu'il y a un an et demi : dans un souci de lutte contre la fraude et les abus, celle-ci avait en effet prévu que « les projets d'investissement comportant l'acquisition, l'installation ou l'exploitation d'équipements de production d'énergie renouvelable sont pris en compte dans la limite d'un montant par watt installé fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l'outre-mer et de l'énergie pour chaque type d'équipement. Ce montant prend en compte les coûts d'acquisition et d'installation directement liés à ces équipements ». Or, cet arrêté, qui ne semble pourtant pas d'une grande complexité, n'a jamais été pris . On peut en conséquence, comme le fait Claude Bartolone dans son rapport spécial, se demander si le Gouvernement n'a pas retardé la publication de l'arrêté, sachant que le dispositif de défiscalisation serait lui-même supprimé.

L'exposé des motifs du projet de loi justifie la suppression de l'éligibilité des investissements réalisés outre-mer dans le secteur photovoltaïque par une phrase sibylline, que certains pourraient estimer quelque peu contradictoire : il s'agit « d'assurer la sécurité des approvisionnements en électricité outre-mer ».

Votre rapporteur se permet de rappeler que les territoires d'outre-mer sont propices au développement de l'énergie solaire. Qui plus est, La Réunion est engagée dans un vaste programme d'autonomie énergétique, Gerri , encouragé par le Gouvernement et soutenu fermement par le Président de la République lors de sa visite en janvier 2010 :

« en matière d'énergies renouvelables et de réduction des émissions, La Réunion va montrer le chemin et c'est La Réunion qui va devenir une référence en France et une référence dans le monde dans cette partie de l'océan indien. Vous allez démontrer que vous êtes les meilleurs. Le projet Gerri est né du Grenelle de l'environnement, en octobre 2007. Il a été confirmé par le conseil interministériel à l'outre-mer et s'incarne aujourd'hui dans les projets d'énergies renouvelables et de mobilité durable les plus grands et les plus avancés de France. C'est formidable que cinq des dix plus grandes fermes photovoltaïques de France se trouvent ici, à la Réunion, y compris la plus grande, 13,5 mégawatts. »

Comment comprendre alors l'article 13 du projet de loi de finances pour 2011 ?

L'article 58 procède à « une réduction homothétique des avantages fiscaux à l'impôt sur le revenu ». Ce « rabot » des niches fiscales concerne également l'outre-mer, à l'exception des investissements dans le logement social. Cette décision semble équilibrée, compte tenu de l'état des finances publiques, de la très récente création et mise en oeuvre de ce dispositif et des nombreuses difficultés d'application qu'il soulève aujourd'hui.


* 7 En Guadeloupe, Martinique et à La Réunion, le taux normal est fixé à 8,5 % et le taux réduit à 2,1 %. La TVA n'est pas applicable en Guyane.

* 8 Rapport Sénat n° 111 annexe n° 18 (2010-2011) de Marc Massion et Eric Doligé, au nom de la commission des finances.

* 9 Rapport Assemblée nationale n° 2857 annexe 30 (treizième législature) de Claude Bartolone, au nom de la commission des finances.

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