EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 17 novembre 2010, sous la présidence de M. Jacques Legendre, président, la commission examine le rapport pour avis de M. Ambroise Dupont sur les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2011.

M. Yves Dauge . - Je remercie notre collègue dont le rapport aborde chaque année un sujet spécifique, qu'il s'agisse du paysage, de la publicité à l'entrée de nos villes, ou des parcs naturels . Le thème retenu aujourd'hui touche au rayonnement de la France. Ce qu'il a exposé aujourd'hui rejoint ce que nous disions sur la politique culturelle extérieure. Au départ, la France joue toujours un rôle formidable pour le patrimoine, puis elle passe à autre chose et certains s'emploient à détricoter la protection mise en place pour obtenir le label. Cela dit, l'association des 35 sites français est extrêmement militante et les élus sont pour la plupart convaincus de la nécessité de tenir leurs engagements. L'Unesco ne nous demande pas d'appliquer un droit international, mais de parfaitement appliquer le nôtre. Or il ne s'agit plus de protéger un monument mais des zones : les deux tiers de la Réunion ont été classés ; de même, le Val de Loire, cité par le rapporteur, s'étend sur 280 kilomètres de long et deux régions. L'Unesco nous demande d'ailleurs de transmettre notre savoir-faire et nous travaillons avec les sites du fleuve Mékong et du fleuve Niger - deux beaux dossiers sur lesquels on peut faire valoir, en français !, une très belle politique.

Il est bon qu'un rapport du Sénat évoque cela car c'est une affaire d'autorité morale. Il est honteux que l'État se fasse donner des leçons à Brasilia sur le Mont Saint-Michel ou sur Provins alors qu'il ne devrait recevoir que des félicitations.

M. René-Pierre Signé . - Quand on parle de patrimoine, on pense plus volontiers à des sites qu'au patrimoine agricole, pourtant menacé. La France fonctionne verticalement et chaque ministre s'occupe de son département. Pourtant, 7 000 km² de forêt disparaissent chaque année, soit l'équivalent d'un département tous les dix ans, tandis que les maisons Scellier ou Robien se multiplient dans les lotissements et que les supérettes fleurissent à l'entrée des villes. Le paysage est attaqué de toutes parts. Et que dire des entrées de ville ? Harmonie n'est pourtant pas monotonie ! Ajoutez à tout cela la RGPP.

Le rapporteur a parlé des parcs nationaux, mais qu'en est-il des parcs régionaux ? Le concept se banalise. Il y en avait 25 dans le temps, 45 aujourd'hui - qui n'ont aucun pouvoir. On crée aussi des réserves naturelles un peu partout. Les terres agricoles et espaces naturels sont menacés par une urbanisation sans utilité.

J'ai interrogé hier M. Delors sur la politique agricole commune (PAC). Une diminution de 10 % des crédits causerait la disparition d'un tiers des agriculteurs : les friches s'étendront. L'enrésinement chasse les forêts de feuillus. Tout n'est pas rose...

M. Jacques Legendre , président . - Les demandes d'inscription au patrimoine mondial se multiplient. Or les engagements liés à l'inscription sont onéreux pour l'État et pour les collectivités concernées. Il faut faire acte de candidature avec discernement, en ayant à l'esprit la charte de M. Dauge. Le Mont Saint-Michel cerné par les éoliennes, c'est un saccage ! Et deux représentants de l'État affirment des points de vue contraires...

Les crédits des parcs nationaux sont en baisse, M. Paul Raoult a attiré mon attention sur ce problème. Si nous voulons des parcs, il faut débloquer les moyens de fonctionnement correspondants.

Je déplore les difficultés rencontrées par le rapporteur pour obtenir réponse au questionnaire budgétaire. Celui-ci a été envoyé le 10 juillet dernier, mais il est demeuré poste restante : nous n'avons pas obtenu toutes les réponses prescrites à l'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Je vous propose de placer en début de rapport un encadré pour dénoncer cette manière inadmissible. La chose ne doit pas se reproduire : autant en avertir sans attendre le nouveau ministre !

M. Claude Bérit-Débat . - Les règles mises en place par les communes sont respectées, la plupart du temps, d'autant que le classement valorise le patrimoine et que chacun en mesure l'intérêt. Les retombées économiques sont certaines, mais le coût n'est pas négligeable et les collectivités territoriales, réforme après réforme, n'ont plus suffisamment de moyens ! L'État ne donne pas l'exemple en coupant dans les budgets. Je suis pessimiste pour l'avenir. Je connais la question pour avoir créé une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) dans un site majeur comportant une abbaye du XII e siècle. Les collectivités auront-elles encore demain les moyens d'abonder les dotations des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) ?

M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis . - Yves Dauge est un pionnier de la protection des paysages et du patrimoine. Je me réjouis de l'accueil qu'il a fait à ma proposition. J'ai parlé des parcs nationaux mais mon propos concernait toutes les zones de protection. Je le dis depuis longtemps : ne cherchons pas à créer des structures que nous ne saurons pas faire vivre.

Les crédits de la forêt sont certes stables en 2011, mais ils ont augmenté toutes ces dernières années. Je remercie notre président d'avoir marqué sa réprobation au sujet du questionnaire laissé sans réponse. Je veux dire à M. Bérit-Débat que je ne suis pas pour ma part favorable à une réglementation de plus ; et il n'est pas toujours vrai que le classement entraîne des dépenses supplémentaires, sur les grands sites, les monuments déjà classés... En revanche, il infléchit la discussion sur les nouveaux équipements envisagés et leur insertion dans le paysage - je songe aux douze ponts que l'on veut installer sur la Loire.

En 2017, des SCOT seront établis sur tout le territoire. Les zones classées au patrimoine mondial doivent à mon sens faire l'objet d'un « porter à connaissance » sur ces documents. Les périmètres sont de plus en plus vastes, il faut les signaler - de même que des ouvrages et des sites particuliers, les forts Vauban, par exemple. Les obligations incombent aux élus et à l'État, le demandeur du classement et garant du respect des règles.

M. Claude Bérit-Débat . - J'ai seulement dit que les problèmes proviennent du manque de moyens et non de la réglementation.

M. Ambroise Dupont , rapporteur pour avis . - Au jour le jour, on a surtout besoin de vigilance et non forcément de beaucoup de moyens.

M. Jacques Legendre , président . - L'Unesco a classé hier au patrimoine mondial immatériel la cuisine gastronomique française. Mme Catherine Dumas en sera heureuse ! Cela flatte notre identité culturelle !

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».

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