2. Des aides fragmentées, peu incitatives et parfois concurrentes
a) Des aides insuffisamment incitatives

À la suite des États généraux de la presse écrite, les ministres du budget et de la culture ont confié à M. Aldo Cardoso une mission dans le but de proposer des recommandations dans le sens d'une gestion « irréprochable et équilibrée » des aides à la presse.

Le rapport de M. Cardoso, en date du 8 septembre 2010, part du constat que le dispositif d'aides publiques se singularise par sa très grande complexité, liée, en particulier, à la multiplicité des bénéficiaires (éditeurs, messageries de presse, La Poste, SNCF, diffuseurs, lectorat), à la dissociation entre destinataires théoriques et bénéficiaires finaux dans le cas de certaines aides 5 ( * ) et d'une extrême fragmentation qui limite considérablement la lisibilité de l'effort budgétaire consenti par l'État. Le système des aides publiques en faveur de la presse pâtit également de sa profonde sédimentation , dans la mesure où « les canaux d'intervention de l'État se sont additionnés sans jamais provoquer une révision globale et approfondie de l'édifice juridique touffu auquel ils ont donné naissance ».

M. Cardoso souligne, en particulier, la capacité très insuffisante du régime d'aides publiques à susciter le changement, en raison de la part largement prépondérante des aides de fonctionnement . Moins d'un quart des aides versées aux éditeurs peut être identifié comme des aides à l'investissement. Dans ces conditions, la mission de M. Cardoso conclut que « la capacité d'un tel dispositif à répondre aux besoin structurants du secteur et à favoriser sa transition vers un modèle économiquement viable peut donc être remise en cause ».

Par ailleurs, en l'absence de stratégie cohérente et de hiérarchisation entre les objectifs poursuivis, les effets de la montée en puissance de certaines aides sont susceptibles de se neutraliser, dans la mesure où elles viennent en soutien de dispositifs concurrents. C'est le cas, notamment, des deux modes de distribution que constituent le transport postal de la presse et le portage.

Le développement de ces deux circuits d'acheminement est, certes, indispensable afin de renforcer la diffusion de la presse par abonnement, qui demeure encore le meilleur moyen de fidéliser le lectorat et de stabiliser les recettes de la presse en réponse à l'érosion des ventes au numéro. Néanmoins, le portage et le transport postal sont potentiellement concurrents si les aides qui leur sont consenties s'accroissent de façon significative simultanément et indépendamment l'une de l'autre. En effet, comme le rappelle M. Cardoso, le fort taux de subvention dont bénéficie la distribution postale de la presse quotidienne d'information politique et générale est susceptible de réduire l'avantage comparatif du portage .

Toutefois, en dépit du risque de neutralisation des effets poursuivis par ces deux dispositifs, les aides accordées au portage et au transport postal de la presse ont été augmentées simultanément en 2009 pour atteindre respectivement 70 et 269 millions d'euros.


* 5 M. Cardoso note, ainsi, que « l'aide versée aux éditeurs au titre de la modernisation de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale est in fine reversée à Presstalis sous la forme de majorations de barèmes ».

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