5. Une gestion de plus en plus marquée par la pénurie

Mme Clarisse Taron, secrétaire générale du Syndicat de la magistrature, a souligné que l'insuffisance des crédits alloués aux frais de justice conduisait les juridictions à réduire certains de leurs frais de fonctionnement pour pouvoir honorer les factures liées aux frais de justice. Ce sont ainsi les crédits qui auraient dû être consacrés à l'emploi de vacataires, d'assistants de justice, voire de juges de proximité, qui sont en fait utilisés pour le paiement de ces frais.

Elle a indiqué que dans plusieurs juridictions, notamment à Béziers et à Cahors, aucune enquête sociale n'était payée.

L'Union syndicale des magistrats (USM) dans son « livre blanc 2010 » sur l'état de la justice en France, souligne également la situation de tension financière qui affecte de nombreuses juridictions.

Les chefs de cour et de juridiction rencontrés à Caen et à Metz ont expliqué à votre rapporteur qu'ils devaient dans les derniers mois de l'année faire face à une pénurie de crédits, tant pour le paiement des frais de justice, ce qui est devenu finalement habituel, que pour les dépenses courantes. Le tribunal de grande instance de Metz a ainsi arrêté de régler les factures relatives aux frais de justice au début du mois de novembre.

Votre rapporteur relève enfin que la situation de certaines juridictions fait apparaître une évaluation défaillante des besoins des juridictions. En effet, il semblerait que la Chancellerie, ne disposant pas des moyens d'estimer précisément les besoins réels des juridictions, reconduise peu ou prou les dotations des années précédentes, sans corriger les carences.

Ce phénomène est accentué par les contraintes budgétaires que connaît actuellement notre pays. En effet, plusieurs magistrats et responsables de SAR rencontrés par votre rapporteur ont indiqué que les dialogues de gestion ne se déroulaient plus, en 2010, selon une démarche permettant aux chefs de cour de présenter des demandes au ministère, mais constituaient plutôt d'une brève période de consultation sur les propositions de la Chancellerie.

Votre rapporteur déplore que la logique de performance de la LOLF se traduise avant tout par une appréciation quantitative et comptable de l'activité et des moyens de la justice, sans véritable recherche d'une adéquation de moyens aux besoins. En l'absence de gestion prévisionnelle des effectifs, ce phénomène affecte aussi bien les moyens matériels des juridictions que leurs effectifs.

Les chefs de la cour d'appel de Caen, comme ceux de la cour d'appel de Metz, ont souligné qu'ils ressentaient, dans la gestion de leur budget opérationnel de programme (BOP), le retour à un cadre budgétaire contraint, amplifié par la logique de performance, dont ils ne peuvent retirer de bénéfice direct pour leurs juridictions. Les chefs de cour doivent ainsi gérer leur BOP en sachant, dès le début de l'année, que les crédits dont ils disposent pour le paiement des frais de justice et pour la masse salariale seront insuffisants. Comme l'ont indiqué les magistrats des juridictions messines, le déficit de moyens est désormais prévisible .

Ces tensions budgétaires s'observent également dans la dégradation des palais de justice, les chefs de cour et de juridiction ne disposant pas toujours des crédits nécessaires à l'entretien des bâtiments, comme votre rapporteur a pu le constater à Caen.

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