B. UNE MODERNISATION DE LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA FORMATION

1. Une diversification des modes de recrutement

L'administration de la PJJ a diversifié les modes de recrutement de ses agents afin de privilégier l'expérience et la motivation pour le travail social plutôt que les connaissances théoriques de candidats surdiplômés.

Trois nouveaux modes de recrutement ont été mis en place : des concours « de troisième voie » et concours sur titres, une validation des acquis professionnels, ainsi qu'un recours aux contractuels.

* un bilan en demi-teinte des concours « de troisième voie » et des concours sur titres

S'agissant des éducateurs, la DPJJ a introduit en 2004, d'une part, un concours dit « de troisième voie » réservé à des candidats disposant d'une expérience professionnelle dans les domaines éducatif, culturel ou sportif, et, d'autre part, un concours sur titres réservé aux titulaires du diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé (DEES).

Six ans après l'introduction de ces modes de recrutement, le nombre d'inscrits à ces deux concours demeure limité. De plus, les résultats enregistrés témoignent des difficultés à recruter des candidats répondant aux compétences requises. Au regard de ces résultats, la DPJJ tente depuis 2007 d'améliorer la publicité de ses concours en ciblant davantage les annonces auprès d'un public proche des métiers recherchés. Par ailleurs, il semble que ces lauréats privilégient l'affectation géographique et n'hésitent pas à renoncer au bénéfice du concours lorsque les postes proposés ne correspondent pas à leurs souhaits. La mise en place en 2010 d'une procédure recensant préalablement leurs voeux géographiques n'a pas permis d'enrayer ce phénomène.

Les concours de troisième voie et sur titres ont toutefois permis de recruter, entre 2006 et 2010, 334 éducateurs (soit plus de 28% des recrutements, hors liste d'aptitude et examen professionnel).

S'agissant des directeurs, un concours « de troisième voie » a été mis en place en 2005. Si cette voie de recrutement ne concerne qu'un nombre restreint de candidats 31 ( * ) , il est toutefois possible d'observer que les résultats sont mitigés et le niveau des candidats généralement moyen.

* la validation des acquis professionnels

Dans le cadre de l'examen professionnel, la validation des acquis professionnels permet aux agents techniques d'éducation et adjoints techniques de devenir éducateurs.

Par ailleurs, le concours externe sur épreuves d'éducateur prévoit également la reconnaissance de l'expérience professionnelle (REP) en équivalence des conditions de titres ou diplômes. Le nombre de demandes de REP est toutefois en baisse régulière (104 demandes en 2007, 50 en 2009), bien qu'il offre une réelle opportunité pour les candidats ayant une expérience de terrain.

* le recours aux contractuels

En 2003, la DPJJ a obtenu l'autorisation de recruter 10% de ses effectifs budgétaires en personnels sous contrat pour des durées maximales de trois ans renouvelables une fois. Cette souplesse permet notamment aux foyers de pallier les effets des vacances durables de postes. Pour l'année 2010, le plafond d'emplois de contractuels a été fixé à 1.221,5 ETPT.

Les recrutements organisés en 2010 ont permis à 77 contractuels assurant des missions d'éducateurs d'être intégrés dans le corps des éducateurs, ce qui représente plus d'un tiers des recrutements.

2. L'évolution des statuts et des régimes indemnitaires envisagée en 2011

* les réformes statutaires

La réforme du statut de la filière de direction a été mise en oeuvre avec la publication de deux décrets, le 24 mai 2005, portant statut particulier du corps des directeurs des services de la PJJ et relatifs aux statuts d'emplois des directeurs territoriaux et des directeurs fonctionnels de la PJJ. En 2008, la DPJJ a entrepris de réexaminer ce statut afin, notamment, de l'adapter aux évolutions de l'organisation territoriale de ses services déconcentrés. Outre la répartition des emplois de directeurs fonctionnels en trois groupes, le nouveau statut prévoit de réduire la période de détachement dans un emploi fonctionnel à trois ans maximum (renouvelables une fois dans les mêmes fonctions et sur le même emploi). Par ailleurs, afin de prendre en compte l'allongement des carrières, un parcours de carrière sera établi pour les directeurs sous statut d'emploi. Parallèlement, les échelons de fin de grille seront revalorisés afin de mettre en place des fins de carrière attractives. Cette réforme devrait entrer en vigueur au début de l'année 2011.

Par ailleurs, le corps des infirmiers de la PJJ devrait être intégré dans le corps interministériel des infirmiers de l'Etat, ce qui permettrait aux infirmiers de la PJJ de passer d'une grille indiciaire structurée en trois grades à une grille indiciaire structurée en deux grades. Cette intégration présente également l'intérêt de s'inscrire dans la politique interministérielle de rapprochement des corps qui remplissent des missions voisines et de résorption des petits corps.

* les réformes indemnitaires envisagées en 2011 :

- une revalorisation du régime indemnitaire des psychologues, afin de compenser l'augmentation de leur temps de présence dans les structures dans le cadre du passage à l'aménagement et réduction du temps de travail. En outre, cette revalorisation accompagnera la mise en place de la nouvelle mesure judiciaire d'investigation éducative, destinée à renforcer le rôle d'aide à la décision des magistrats (voir supra ) ;

- une revalorisation, d'un montant de 500 euros annuels, du régime indemnitaire des assistants de service social et des conseils techniques de service social devrait voir le jour en 2011 ;

- enfin, la PJJ poursuivra en 2011 la mise en place du régime indemnitaire des responsables d'unité éducative (RUE) 32 ( * ) .

3. Une réforme de la formation

La diversification des recrutements et l'évolution des missions confiées à la PJJ doivent permettre de trouver une meilleure adéquation entre les profils recrutés et les prises en charge de publics multiples et difficiles. Cela suppose une individualisation plus poussée des parcours de formation, notamment pour les personnes recrutées par la troisième voie ou après reconnaissance des acquis de l'expérience, qui ont besoin avant tout d'une formation d'adaptation.

a) L'école nationale de protection de la jeunesse (ENPJJ)

L'école nationale de protection judiciaire de la jeunesse (ENPJJ), ouverte à Roubaix en octobre 2008, assure la prise en charge des formations statutaires des éducateurs et des directeurs de service.

Les enseignements sont dispensés en respectant trois modalités pédagogiques que sont l'alternance, le parcours individualisé et la pluri-professionnalité :

- en plus des formations théoriques dispensés à l'ENPJJ, les élèves sont placés en stage dans des unités afin d'être mis en situation opérationnelle à chaque étape de leur progression ;

- les formations sont adaptées aux parcours antérieurs des stagiaires ;

- enfin, les formations communes aux différents corps sont privilégiées, afin d'améliorer l'efficacité de la prise en charge pluridisciplinaire des mineurs délinquants.

En 2009, l'école a dispensé 123.031 journées de formation statutaire pour un effectif global de 1.315 stagiaires.

Par ailleurs, elle a dispensé 2.235 journées de formation continue, qui ont bénéficié à 661 agents, tandis que les pôles territoriaux de formation ont dispensé 27.731 journées de formation continue à 4.489 agents.

Enfin, l'ENPJJ a mis en place une classe préparatoire intégrée pouvant préparer 21 jeunes remplissant les conditions pour s'inscrire au concours d'éducateur 2010. Les résultats obtenus en 2010 confirment la tendance de l'année précédente : 20 candidats ont été admissibles et 9 d'entre eux ont été admis au concours d'éducateur 2010.

Prochainement, l'ENPJJ proposera des formations aux magistrats intervenant dans le domaine de la justice des mineurs. Ces formations pourront être ouvertes aux avocats, par le biais du Conseil national des barreaux.

b) La réforme de la formation des éducateurs et des directeurs

La DPJJ a entrepris, conformément aux orientations données par la Direction générale de l'administration et de la fonction publique à la suite du rapport de Raymond-François Le Bris sur la formation initiale des agents de l'État 33 ( * ) , de modifier la formation initiale des éducateurs (recrutés à bac +2). Désormais, la formation à l'ENPJJ, d'une durée d'un an, sera suivie de six mois dans un service, période au cours de laquelle les éducateurs stagiaires seront placés en situation de prise en charge des mineurs et suivis par un tuteur. La durée de la formation initiale passera ainsi de 24 à 18 mois. Un bilan de positionnement permettant de tenir compte du passé académique et professionnel du stagiaire sera mis en place, afin de supprimer les redondances avec les enseignements qu'il aurait préalablement suivis. Enfin, l'apprentissage opérationnel sera développé dans le cadre de stages pratiques organisés durant la première année de formation, avant que n'intervienne une période de pré-affectation de six mois consécutifs dans un poste que l'éducateur stagiaire aura vocation à conserver dans le cadre de son affectation définitive.

Lors de son audition par votre rapporteur pour avis, M. Eric Corsin, représentant du syndicat SNPES-PJJ-FSU, s'est inquiété des conséquences de cette réduction du temps de formation initiale des éducateurs, craignant, dans la mesure où celle-ci ne s'accompagne pas d'un relèvement des exigences de qualification au concours, qu'elle aboutisse à une dégradation de la qualité des prises en charge.

Par ailleurs, la DPJJ propose de modifier la formation des directeurs des services de la PJJ (recrutés à bac +3) selon des modalités similaires : réduction de la durée de la formation (18 mois), application du principe de l'alternance, période de pré-affectation. Toutefois, contrairement à la formation des éducateurs, le rang de classement final serait supprimé pour les directeurs et pourrait être remplacé par un croisement entre les voeux des stagiaires et ceux de l'employeur. Cette réforme serait applicable aux promotions entrant en formation en 2012.

4. Un renforcement du dialogue social rendu nécessaire par l'évolution des missions de la PJJ

La mise en oeuvre des orientations du projet stratégique national 2008-2011 de la PJJ et les réorganisations engagées dans le cadre de la RGPP ont rendu nécessaire un renforcement du dialogue social à la PJJ :

- la DPJJ s'efforce tout d'abord de développer les instances de concertation. En 2009, 7 CTP centraux, 43 réunions bilatérales et 5 réunions multilatérales ont eu lieu. Au premier semestre 2010, 5 CTP centraux et 40 réunions ont eu lieu avec les organisations syndicales, dont 8 réunions multilatérales. 9 réunions de groupes de travail sur l'évolution des statuts des infirmiers, des psychologues et des assistants de service social ou sur la mise en place d'observatoires des relations sociales et des conditions de travail ont été tenues avec des représentants du personnel. Plusieurs CTP ont fait l'objet d'un boycott par les organisations syndicales ;

- depuis février 2010, la DPJJ expérimente dans deux DIR la mise en place d'observatoires des relations sociales et des conditions de travail, destinés à prendre en compte les difficultés rencontrées par les agents des services déconcentrés en matière d'organisation et de conditions de travail ;

- par ailleurs, la DPJJ participe à l'élaboration d'une charte du dialogue social ministérielle et souhaite développer avec les organisations syndicales des pratiques de contractualisation, notamment locales ;

- une concertation a été engagée au niveau national sur le recrutement et le maintien dans l'emploi des personnes handicapées, ainsi que sur les moyens accordés aux organisations syndicales en matière de nouvelles technologies de l'information et de la communication ;

- enfin, la DPJJ met en place un plan pluriannuel de formations de deux jours destinées aux 192 élus des CTP interrégionaux (notions budgétaires liées à la LOLF, gestion prévisionnelle des ressources humaines).

Le recentrage au pénal de la PJJ a suscité de nombreux débats avec les organisations syndicales. Les représentants syndicaux rencontrés par votre rapporteur pour avis lui ont notamment fait part de leurs vives inquiétudes quant aux incidences de la baisse continue des moyens alloués à la PJJ sur la qualité de la prise en charge, ainsi que sur l'insuffisante évolution des statuts des personnels. Ils ont par ailleurs exprimé le sentiment que la PJJ, qu'ils ont qualifiée d' « enfant délaissé » du ministère de la Justice, ne bénéficiait pas de perspectives d'évolution claires ni d'une attention suffisante de la part des pouvoirs publics.


* 31 Un poste offert en 2005, 2 en 2006, 3 en 2007, 5 en 2008, et 2 en 2009 et 2010.

* 32 Cette nouvelle fonction de cadre intermédiaire, mise en place en 2010 et complémentaire de celle de directeur de service, est désormais assurée par les directeurs de service responsables d'une unité éducative et par les chefs de services éducatifs fonctionnels, les professeurs techniques et les conseillers techniques de service social qui le souhaitent. Chaque unité d'un établissement (qui doit en comporter au moins deux) est ainsi placée sous les ordres d'un RUE, l'établissement étant quant à lui dirigé par un directeur de service. Le directeur est responsable du pilotage de la structure tandis que le RUE se concentre sur l'encadrement des équipes éducatives. Au 1er septembre 2010, 253 RUE (sur les 380 à recruter) étaient en fonctions.

* 33 « Propositions pour une réforme de la formation des agents de l'Etat », rapport remis en décembre 2008.

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