Avis n° 252 (2010-2011) de M. Bruno RETAILLEAU , fait au nom de la commission de l'économie, déposé le 25 janvier 2011

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N° 252

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 janvier 2011

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d' adaptation de la législation au droit de l' Union européenne en matière de santé , de travail et de communications électroniques ,

Par M. Bruno RETAILLEAU,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine , président ; MM. Gérard César, Gérard Cornu, Pierre Hérisson, Daniel Raoul, Mme Odette Herviaux, MM. Marcel Deneux, Daniel Marsin, Gérard Le Cam , vice-présidents ; M. Dominique Braye, Mme Élisabeth Lamure, MM. Bruno Sido, Thierry Repentin, Paul Raoult, Daniel Soulage, Bruno Retailleau , secrétaires ; MM. Pierre André, Serge Andreoni, Gérard Bailly, Michel Bécot, Joël Billard, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean-Marie Bockel, Yannick Botrel, Martial Bourquin, Jean Boyer, Jean-Pierre Caffet, Yves Chastan, Alain Chatillon, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Marc Daunis, Denis Detcheverry, Mme Évelyne Didier, MM. Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fauconnier, Alain Fouché, Serge Godard, Francis Grignon, Didier Guillaume, Michel Houel, Alain Houpert, Mme Christiane Hummel, M. Benoît Huré, Mme Bariza Khiari, MM. Daniel Laurent, Jean-François Le Grand, Philippe Leroy, Claude Lise, Roger Madec, Michel Magras, Hervé Maurey, Jean-François Mayet, Jean-Claude Merceron, Jean-Jacques Mirassou, Robert Navarro, Louis Nègre, Mmes Renée Nicoux, Jacqueline Panis, MM. Jean-Marc Pastor, Georges Patient, François Patriat, Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Marcel Rainaud, Charles Revet, Roland Ries, Mmes Mireille Schurch, Esther Sittler, Odette Terrade, MM. Michel Teston, Robert Tropeano, Raymond Vall, René Vestri.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

2789 , 2989 , 3036 et T.A. 594

Sénat :

225, 256 et 257 (2010-2011)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Les technologies de l'information et de la communication (TIC) irriguent désormais notre vie quotidienne et représentent un formidable moteur de croissance et de développement. La numérisation des données, leur reproductibilité à l'infini et l'instantanéité des échanges d'informations qu'elles permettent bouleversent en effet, de façon le plus souvent positive, les rapports sociaux, voire les équilibres politiques, et constituent l'un des principaux piliers d'une économie de la connaissance dont les apports les plus fructueux restent encore à venir.

La société numérique a besoin d'un cadre minimum de régulation pour assurer son développement harmonieux et la préservation des intérêts légitimes de chacun de ses acteurs, dans le respect de l'intérêt général. Cette régulation passe par un cadre normatif adapté, ainsi que par des institutions habilitées à en garantir le respect.

Le « paquet télécoms », ensemble de normes de différente nature adoptées au niveau européen en vue de réguler, voire de règlementer les divers réseaux numériques existants, participe à ce cadre. Sa troisième version, adoptée par le Parlement européen et le Conseil le 25 novembre 2009, contient un règlement et deux directives que chaque État membre devra avoir transposés en droit interne avant le 25 mai 2011.

Ces dernières comportent un nombre important de dispositions 1 ( * ) de caractère le plus souvent technique qui, sans révolutionner les équilibres fixés par les précédentes moutures du « paquet télécoms », font évoluer de façon positive ses différentes mesures et apportent de nouveaux outils concernant aussi bien la protection des consommateurs que la sécurité des réseaux, la gestion du spectre, la garantie des libertés individuelles ou encore la neutralité des réseaux.

La mise en oeuvre et le contrôle de l'application de ces mesures sont confiés, outre aux autorités ministérielles compétentes dans chaque État membres, à des autorités de régulation nationales, transversales ou sectorielles, dont l'indépendance est par ailleurs garantie. Pour la France, sont ainsi mobilisées l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), la Commission nationale informatique et liberté (CNIL), l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) ou encore l'Agence nationale des fréquences (ANFR).

La briéveté du délai de transposition, la technicité des mesures, l'absence d'évolutions réellement marquantes depuis la précédente révision du « paquet télécoms » et le peu de marge de manoeuvre laissé aux États pour s'acquitter de leur obligation de transposition ont plaidé pour que celle-ci s'effectue a minima , en se rapprochant autant que possible des textes européens, et qu'elle ait lieu par voie d'ordonnances 2 ( * ) .

C'est pourquoi l'article 11 du présent projet de loi habilite le Gouvernement à prendre les dispositions transcrivant en droit français, principalement dans le code des postes et communications électroniques (CPCE), le contenu des directives européennes. Habilitation ne signifie pas pour autant désaisissement du Sénat, bien au contraire : d'une part, le Gouvernement a pris soin de soumettre à consultation publique les avants-projets d'ordonnances, dont certains points seraient cependant encore en évolution ; d'autre part, l'examen par le Parlement de l'instrument de ratification de ces ordonnances sera l'occasion d'en effectuer un contrôle étroit.

L'examen par l'Assemblée nationale, selon la procédure accélérée, de ce texte comportant des mesures à caractère essentiellement social 3 ( * ) a été l'occasion d'y adjoindre des dispositions connexes aux directives et touchant au régime des noms de domaine (article 12), à l'instauration d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP (article 13) ou encore à l'interconnexion des réseaux (article 15).

Le présent rapport analyse ces différentes mesures et en propose le cas échéant des adaptations. Par ailleurs, il profite du vecteur que constitue ce projet de loi pour y intégrer des dispositions approfondissant des thèmes directement abordés par les directives, comme la neutralité des réseaux, qui est un sujet majeur pour garantir un équilibre favorable au développement de l'écosystème Internet.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. L'OUVERTURE DU MARCHÉ EUROPÉEN DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Le secteur des télécommunications est d'une importance cruciale pour l'économie européenne , puisqu'il représente près d'un tiers du marché mondial et continue de croître de façon substantielle chaque année, sous l'influence des « nouveaux usages » (web 2.0, téléphonie 3G +, VoIP...) touchant des catégories de consommateurs de plus en plus larges.

Le dynamisme de ce secteur est dû en grande partie à sa libéralisation , contrebalancée par une stricte régulation, à l'oeuvre depuis la fin des années 80. Jusqu'alors abandonné aux monopoles étatiques, il va en effet faire l'objet d'une dérèglementation en deux étapes :

- l'ouverture du marché des équipements, avec une directive de 1988 4 ( * ) ;

- l'ouverture du marché des services, à travers deux directives de 1990 5 ( * ) , la directive « service » et la directive relative à la fourniture d'un réseau ouvert, dite « ONP cadre ».

C'est finalement le 1 er janvier 1998 que le marché des télécommunications européen a été totalement ouvert à la concurrence .

Puis le législateur européen a adapté le cadre règlementaire en 2002 à travers l'adoption de cinq directives, souvent rassemblées sous l'appellation de « paquet télécoms » :

- la directive « cadre » 6 ( * ) ;

- la directive « autorisation » 7 ( * ) ;

- la directive « interconnexion » 8 ( * ) ;

- la directive « service universel » ; 9 ( * )

- la directive « vie privée et communications électroniques » 10 ( * ) .

Ce nouveau cadre normatif est venu confirmer l'objectif d'une concurrence effective sur l'ensemble du marché des communications électroniques, élaborer un cadre règlementaire harmonisé pour tous les réseaux de communications de ce type, renforcer la régulation sectorielle du secteur et le rôle des autorités nationales, et simplifier les conditions d'entrée sur ce marché.

II. LA NÉCESSAIRE RÉVISION DU « PAQUET TELECOMS »

Depuis son adoption, le marché des télécommunications a été marqué par la concentration des opérateurs , souvent les anciens monopoles, à même d'exercer sur le secteur une « puissance significative », ou bien encore par des ententes entre ses principaux acteurs, empêchant d'atteindre une parfaite concurrence.

Aussi le législateur européen a-t-il engagé, en 2006, un processus de révision du « paquet télécoms » . La Commission européenne a publié ses propositions de nouveaux textes règlementaires le 13 novembre 2007. A l'issue de deux années de procédure entre le Parlement et le Conseil, le nouveau cadre a été adopté le 25 novembre 2009 et résulte de trois textes :

- la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant la directive 2002/22/CE concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, la directive 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et le règlement (CE) n° 2006/2004 relatif à la coopération entre les autorités nationales chargées de veiller à l'application de la législation en matière de protection des consommateurs ;

- la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant les directives 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, 2002/19/CE relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion, et 2002/20/CE relative à l'autorisation des réseaux et services de communications électroniques ;

- le règlement (CE) n° 1211/2009 instituant l'ORECE.

Cette révision du cadre législatif existant ne modifie pas ses principes généraux, mais procède plutôt à des aménagements sur plusieurs points essentiels :

- l'ORECE est créé et des mécanismes de coopération et de contrôle entre régulateurs nationaux sont instaurés ;

- la gestion du spectre radioélectrique est assouplie ;

- la protection des consommateurs est renforcée.

Si le cadre juridique national a été largement façonné par ces évolutions communautaires, le législateur français a parfois devancé le législateur européen, avec l'adoption de dispositions dans différents textes récents :

- la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, dite « LCEN » ;

- la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite « loi Chatel » 11 ( * ) ;

- la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, dite « LME » 12 ( * ) ;

- la loi du 17 décembre 2009 de lutte contre la fracture numérique 13 ( * ) .

Il n'en reste pas moins que ces évolutions sont insuffisantes au regard des évolutions récentes du « paquet télécoms », qui appellent des modifications plus profondes des dispositions de nos textes et codes consacrés au secteur.

III. LES MODALITÉS DE TRANSPOSITION DE LA RÉVISION DU « PAQUET TÉLÉCOMS » EN DROIT FRANÇAIS

Il faut aujourd'hui transposer l'ensemble de cette révision du cadre européen , et ce au plus tard le 25 mai 2011 . Or, la marge de manoeuvre laissée aux États membres pour transposer ces directives est très étroite.

Compte tenu des délais très courts, le Gouvernement français propose la transposition par ordonnances , à travers un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques , adopté par le Conseil des ministres du 15 septembre 2010 et déposé à l'Assemblée nationale avec engagement de la procédure accélérée , où il a été examiné le 13 janvier dernier.

Le chapitre III de ce texte contient un unique article 11 - par ailleurs ultime disposition du projet de loi - habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans un délai de six mois à compter de la publication de la loi, les mesures législatives nécessaires à la transposition de la révision du « paquet télécoms ».

Il inclut par ailleurs dans le champ de l'habilitation des sujets dépassant le périmètre strict de la révision. Enfin, il prévoit le dépôt d'un projet de loi de ratification devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l'ordonnance. L'étude d'impact rattachée au projet de loi justifie le recours aux ordonnances par la nécessité « de se conformer aux délais précédemment mentionnés ».

La version consolidée du projet de transposition par ordonnances fait état de modifications d'un peu plus d'une cinquantaine d'articles , ressortant essentiellement du CPCE, mais également du code de la consommation, de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ainsi que la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

La révision du « paquet télécoms » comporte quatre types de mesures , que l'on peut classer selon la marge de manoeuvre qu'elles laissent aux États membres :

- certaines dispositions ne nécessitent pas de transposition , soit qu'elles présentent un caractère normatif suffisant et s'appliquent donc directement en droit national ; soit qu'elles existent déjà en droit français, du fait des avancées réalisées par la série de lois précédemment évoquée ;

- la plupart des autres mesures ne laisse quasiment aucune marge de manoeuvre et doit donc être transposée de façon presque mécanique, comme l'illustre la reprise quasi mot pour mot de passages entiers des directives européennes dans les avant-projets d'ordonnances ;

- quelques dispositions laissent une marge d'appréciation variable aux États membres ;

- enfin, un dernier type de dispositions n'appelle pas nécessairement de transposition , mais le Gouvernement a souhaité les inclure dans le champ de l'habilitation car elles contribuent à atteindre les objectifs du « paquet télécoms ».

A - LES DISPOSITIONS LAISSANT UNE MARGE D'APPRÉCIATION AUX ÉTATS MEMBRES

1 - La neutralité des réseaux

La neutralité des réseaux est un principe fondateur d'Internet qui exclut toute discrimination à l'égard de la source, de la destination ou du contenu de l'information transmise sur le réseau.

La directive « cadre » fixe aux autorités réglementaires nationales l'objectif de favoriser l'accès des citoyens à l'information de leur choix et à diffuser les applications et services de leur choix, et donne aux autorités de régulation nationales le pouvoir de régler les différends entre opérateurs de réseaux et prestataires de services Internet. La directive « service universel » prévoit quant à elle la transparence des contrats souscrits entre les utilisateurs et les opérateurs en matière d'accès au réseau, ainsi que la possibilité pour les autorités de régulation nationales de fixer des exigences minimales en matière de qualité de service, de sorte d'assurer une qualité standard minimum aux utilisateurs.

Ce thème de la neutralité du Net a suscité de nombreux travaux : le Gouvernement a engagé à cette fin une consultation publique le 9 avril dernier, qui s'est achevée le 17 mai, de laquelle il est ressorti que le nouveau cadre européen constituait un environnement règlementaire adapté et qu'il n'apparaissait pas nécessaire d'introduire des dispositions législatives supplémentaires en droit interne. Il a par ailleurs été remis, à la mi-juillet, un rapport au Parlement sur le sujet 14 ( * ) .

La Commission européenne a elle-même lancé une consultation , entre juin et septembre 2010, afin de déterminer le besoin éventuel de nouvelles normes en ce domaine. Un livre blanc sur le sujet est attendu prochainement. L'ARCEP a également engagé un vaste processus de réflexion en organisant, le 13 avril 2010, un grand colloque sur le sujet, suivi de la mise en ligne, le 20 suivant, d'« éléments de réflexion » et de « premières orientations ». Enfin, les deux assemblées parlementaires ont développé leur propre analyse de la neutralité.

2 - Le périmètre du service universel

Les dispositions relatives au service universel - service d'accès à Internet à haut débit à un coût abordable sur l'ensemble du territoire - ne devaient pas faire l'objet de modification dans le cadre la négociation de la révision du « paquet télécoms ». Celle-ci est toutefois intervenue, laissant aux États membres le soin de définir les caractéristiques du raccordement au réseau et des débits minimum nécessaires , la référence à un débit spécifique minima de 56 Kbits ayant été supprimée.

L'étude d'impact accompagnant le projet de loi relève toutefois qu'une « ambigüité subsiste quant à la portée réelle de cette modification », jugeant préférable dans ces conditions - et dans l'attente d'une communication de la Commission européenne sur le sujet - de ne pas modifier le périmètre du service universel. Il s'agit toutefois d'un sujet extrêmement important, notamment pour l'aménagement numérique du territoire, sur lequel il importera que la représentation nationale ait prochainement un débat.

B - LES DISPOSITIONS ADDITIONNELLES QUI N'ÉTAIENT PAS RENDUES OBLIGATOIRES PAR LA TRANSPOSITION

1 - La gestion du spectre radioélectrique

Première série de mesures complémentaire à la stricte transposition des directives, celles relatives à la gestion des fréquences ont principalement pour objet d'étendre les pouvoirs de l'ANFR.

Elles consistent en outre à contrôler la conformité des installations électriques perturbant des installations et équipements radioélectriques, à étendre l'infraction engendrée par l'absence de possession d'une autorisation administrative, à compléter les mesures destinées à lutter contre les brouilleurs de téléphones mobiles, à encourager le développement du marché secondaire des fréquences, ou encore à améliorer la procédure de traitement des brouillages.

2 - La sécurité des réseaux

Les mesures prévues par les directives ont pour objectif de renforcer la sécurité et le contrôle des équipements mis en oeuvre par les opérateurs qui sont directement impliqués dans les interceptions des communications électroniques prévues par la loi. Ces équipements étant installés au coeur des réseaux des opérateurs, ils jouent un rôle majeur dans la sécurité des communications des abonnés.

A cet effet, il est proposé de créer une nouvelle sanction pénale, de renforcer celles existant et d'habiliter les agents de l' Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) à procéder à des contrôles approfondis.

IV. LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI

A. LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI INITIAL

Le projet de loi initial comporte un unique article consacré aux communications électroniques : l' article 11 , seule disposition du chapitre III traitant des dites communications.

Cet article autorise le Gouvernement à transposer le nouveau cadre réglementaire résultant de la révision du « paquet télécoms » par voie d'ordonnance, dans les conditions de l'article 38 de la Constitution.

Les et de son I autorisent la transposition de la directive « mieux légiférer » et de la directive « droits des citoyens » , constitutives dudit « paquet télécoms » .

Le de son I autorise le Gouvernement à prendre les meures législatives nécessaires à l'accroissement de l'efficacité de la gestion des fréquences radioélectriques .

Le de son I autorise le Gouvernement à prendre les meures législatives nécessaires au renforcement de la lutte contre les infractions susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans les réseaux et services de communications électroniques, ainsi qu'à adapter la législation afin de répondre aux menaces et prévenir et réparer les atteintes à la sécurité des systèmes d'informations .

Le de son I permet au Gouvernement de rectifier des erreurs et de clarifier certaines dispositions du CPCE.

Enfin, ses II et III prévoient ses modalités d'application , tant dans l'espace que dans le temps.

B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

S'agissant de l' article 11 , l'Assemblée nationale a modifié la rédaction du 4° du I, afin de restreindre plus explicitement le champ de l'habilitation donnée au Gouvernement sur des sujets sensibles comme la vie privée et le secret des correspondances, ou encore la sécurité des réseaux.

Par ailleurs, les députés ont inséré trois autres articles traitant des communications électroniques :

- un article 12 tendant à consolider la base législative du régime français des noms de domaine ;

- un article 13 instituant un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP ;

- un article 15 prévoyant la remise par cette dernière au Parlement, d'ici la mi-2011, d'un rapport sur la qualité de service de l'accès à Internet .

V. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR VOTRE COMMISSION

Votre commission vous propose :

- d'adopter conforme l' article 11 , dont le champ de l'habilitation, utilement précisé par les députés, semble désormais satisfaisant ;

- d'insérer un article 11 bis renforçant, au profit du régulateur sectoriel, les outils lui permettant de faire respecter par les différents acteurs concernés le principe de neutralité des réseaux ;

- de modifier l' article 12 sur quatre points en vue de :

rappeler l' objectif d'intérêt général de la mission d'attribution des noms de domaine dont sont chargés les offices d'enregistrement ;

préciser par décret les critères de bonne foi et d'intérêt légitime permettant d'enregistrer certains noms protégés ;

garantir le caractère impartial et contradictoire des procédures de résolution des litiges faisant intervenir des tiers à la demande des offices ;

reporter au 31 décembre 2011 l' opposabilité des nouveaux principes d'attribution des noms de domaine pour les offices qui exercent actuellement leur activité sans avoir fait l'objet d'une désignation.

- d'insérer un article 12 bis prévoyant la transmission à des tiers des informations détenues par les gestionnaires d'infrastructures et opérateurs de communications électroniques relatives à l'implantation et au déploiement de leurs infrastructures et de leurs réseaux ;

- d'encadrer, à l' article 13 , l'institution d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP ;

- d'insérer un article 13 bis élargissant les thématiques du rapport de l'ARCEP au Parlement et donnant à celle-ci six mois supplémentaires pour le rédiger ;

- de supprimer en conséquence l' article 15 traitant déjà du sujet, mais dans un chapitre où il n'a pas vraiment sa place.

EXAMEN DES ARTICLES

CHAPITRE III - Dispositions relatives aux communications électroniques
Article 11 - Habilitation à légiférer par voie d'ordonnance pour la transposition du troisième « paquet télécoms »

Commentaire : cet article autorise le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance pour insérer, principalement dans le CPCE, toute une série de dispositions visant essentiellement à assurer la transposition du troisième « paquet télécoms ».

I. Le texte du projet de loi

L'article 11 du projet de loi, seule disposition du texte d'origine à traiter des télécommunications, tend à habiliter le Gouvernement à prendre des ordonnances dans le domaine législatif afin :

- de transposer en droit national les deux directives modificatrices (2009/136/CE et 2009/140/CE) du troisième « paquet télécoms » (1° et 2° du I) ;

- de prendre des mesures complémentaires concernant la gestion des fréquences (3° du I), la sécurité des réseaux (4° du I) et diverses corrections d'erreurs matérielles et rectifications (5° du I).

L'avant-projet d'ordonnances, mis en consultation par le Gouvernement à la mi-2010, donne à voir les modifications envisagées par ce dernier à ces cinq titres respectifs.

A. La transposition du troisième « paquet télécoms » (1° et 2° du I)

L'habilitation à transposer le troisième « paquet télécoms » figure aux 1° et 2° du I de l'article 11 du projet de loi. Les dispositions législatives affectées par cette transposition peuvent être regroupées en cinq grands sujets.

1. Le renforcement de la régulation

C'est à travers les modifications des directives « cadre » - et notamment ses articles 3, 7, 7 bis , 8 et 12 -, « accès » - et notamment son article 13 bis - et « autorisation » - et notamment son article 10 - que sont renforcés les pouvoirs des autorités nationales de régulation. Ce renforcement passe par une réaffirmation de leur indépendance, mais s'accompagne également d'un contrôle accru par les pairs et la Commission européenne afin d'améliorer la cohérence des pratiques des autorités nationales de régulation et d'ainsi consolider le marché intérieur des communications électroniques.

Au niveau européen , est recherchée une plus grande cohérence des pratiques de régulation entre les différentes autorités compétentes . Un organe de coordination et de contrôle entre les autorités de régulation nationales (ARN) - l'ORECE - est créé à cet effet, et des mécanismes de coopération et de contrôle par les pairs entre régulateurs nationaux sont instaurés. L'ORECE doit jouer le rôle de forum exclusif entre la Commission européenne et les ARN, ainsi qu'entre les ARN elles-mêmes. Le nouveau cadre communautaire reconnaît par ailleurs à la Commission européenne le pouvoir d'adopter des mesures d'harmonisation sous forme de recommandations ou de décisions lorsque subsistent des divergences d'approche réglementaire entre les ARN dans l'Union européenne.

Au niveau national , l' indépendance des autorités de régulation du secteur des communications électroniques est consacrée . Il est ainsi expressément souligné, à l'article L. 131 du CPCE, que « les membres et agents de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes exercent leurs fonctions en toute impartialité, sans recevoir d'instruction du Gouvernement, ni d'aucune institution, personne, entreprise ou organisme ».

Sur le fond, le cadre normatif dans lequel s'inscrivent les autorités nationales de régulation évolue notablement.

Les objectifs que l'ARCEP et le ministère en charge des communications électroniques doivent prendre en compte dans leurs décisions, tout d'abord, sont élargis en vue d'éviter la réapparition de monopoles dans les nouveaux réseaux. Devront ainsi être désormais pris en compte par le régulateur :

- la diversité des situations en matière de concurrence, qui devrait contraindre l'autorité de régulation à préciser le cadre géographique retenu pour ses analyses de marché (3° bis de l'article L. 33-1 du CPCE) ;

- le risque encouru par les entreprises qui investissent, ce qui formalise une pratique de l'ARCEP jusqu'alors dépourvue de base légale (3° ter de l'article L. 32-1 du même code).

Par ailleurs, les pouvoirs de mutualisation des autorités de régulation nationale sont substantiellement renforcés, et ce s'agissant du droit d'accès imposé aux opérateurs :

- aux équipements et installations établis en application d'un droit de passage (article L. 34-8-4 [nouveau] du CPCE), ainsi qu'aux ressources associées (19° de l'article L. 32 du même code) ;

- aux lignes intérieures d'un immeuble lorsque leur duplication serait inenvisageable (article L. 34-8-4 précité), c'est-à-dire la partie terminale des réseaux.

Les pouvoirs de régulation de l'ARCEP sont aussi révisés à la hausse, le nouveau « paquet télécoms » permettant aux régulateurs nationaux :

- d'étendre à des marchés connexes des remèdes imposés à un opérateur exerçant une influence significative sur un marché donné, par un mécanisme dit « d'effet de levier » (article L. 37-2 du CPCE) ;

- d'imposer la séparation fonctionnelle à un opérateur intégré, le contraignant à séparer ses activités de réseau de ses activités de service en les confiant à deux entités distinctes (article L. 38-1 du même code). Cette disposition, dont l'application serait exceptionnelle, a déjà été transposée en France par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle ;

- de prendre, en matière de téléphonie mobile, des décisions tendant à la fixation des tarifs maximums des numéros surtaxés (article L. 44 du même code) et au blocage par les opérateurs de certains numéros pour éviter ou faire cesser des comportements frauduleux ou abusifs (article L. 44-2 du même code). Les dernières évolutions de l'avant-projet d'ordonnances prévoient, dans ce dernier cas, que la décision soit prise par le juge, saisi par le régulateur compétent.

Le pouvoir de règlement des différends de l'ARCEP se trouve conforté. L'article 20 de la directive « cadre » prévoit que l'ARCEP pourrait dorénavant régler les différends entre opérateurs de réseaux et d'autres acteurs économiques, tels que les fournisseurs de contenu, portant sur les conditions techniques et tarifaires d'acheminement (article L. 36-8 du CPCE). Il importe que cette disposition soit bien interprétée - et appliquée - de façon parfaitement symétrique, à savoir qu'elle permette aux deux catégories d'acteurs principalement concernés - les fournisseurs d'accès et les éditeurs de contenus - de saisir pareillement le régulateur national.

Les pouvoirs de sanction de l'ARCEP sont en outre également consolidés, puisqu'il lui serait désormais permis :

- d'assortir une mise en demeure d'une astreinte (article L. 36-11 du CPCE), que seul un juge peut prononcer pour l'instant ;

- de décider la suspension ou l'arrêt de la commercialisation d'un service (idem).

2. La gestion du spectre radioélectrique

Ce sont les articles 9 et 9 bis de la directive « cadre » qui traitent de la gestion du spectre, modifiant en conséquence les articles L. 42, L. 42-1 et L. 43 du CPCE. L'objectif général est de rendre cette gestion plus souple et plus efficace, afin de permettre un accès facilité des utilisateurs aux fréquences. Toutefois, les dispositions finalement retenues dans le « paquet télécoms » sont, à la demande des États membres, bien moins ambitieuses que celles proposées initialement par la Commission européenne, qui souhaitait libéraliser notablement l'utilisation et la gestion du spectre.

La Commission européenne se voit chargée de proposer, sur une base pluriannuelle, un programme de politique du spectre définissant les orientations et les objectifs de la planification stratégique et de l'harmonisation de l'utilisation des fréquences. Adopté par le Conseil et le Parlement européen en procédure de codécision, ce dernier permettra d'associer les institutions en charge de cette ressource rare et d'approfondir leur coopération en matière de vision stratégique de l'utilisation du spectre radioélectrique.

Par ailleurs, trois grandes modifications sont apportées à cette politique de gestion du spectre :

- la substitution d'un régime d'autorisation générale , certes assorti de nombreuses dérogations visant au respect d'intérêts supérieurs, à un régime fondé sur l'attribution de licences ;

- l' application du principe de neutralité technologique pour la majeure partie des fréquences attribuées aux communications électroniques. En vertu de ce principe, tout type de technologies ou de services peut être utilisé par les opérateurs, ce qui est censé faciliter les évolutions techniques dans le temps. L'application de ce principe à la gestion du spectre pourrait toutefois s'avérer en partie inadaptée ou poser des difficultés, occasionnant des risques de brouillage des ondes dès lors que cohabitent sur les fréquences services de télévision, de radio, de la Défense nationale ... Par ailleurs, des bandes de fréquence spécifiques doivent nécessairement être déterminées pour que les équipementiers puissent standardiser la fabrication de leurs terminaux ;

- le développement du marché secondaire , qui consiste à autoriser la possibilité de louer ou revendre une partie ou la totalité des fréquences attribuées originairement.

Par ailleurs, l'habilitation prévoit un certain nombre de mesures complémentaires sur l'utilisation du spectre, commentées de ce fait dans le chapitre consacré aux dites mesures.

3. La neutralité des réseaux

Le concept de neutralité des réseaux, principe fondateur de l'Internet, renvoie à l'absence de pratiques de blocage dans la transmission de données, de dégradation ou de ralentissement du trafic, en fonction de la nature, de l'origine ou de la destination de ce trafic.

Apparu au début des années 2000 aux États-Unis, suite à des conflits entre câblo-opérateurs et fournisseurs de contenus, il n'a été soulevé qu'à partir de la fin 2007 seulement en Europe, à l'occasion justement de la discussion sur la révision du « paquet télécoms ».

Même si les exemples d'atteinte à ce principe sont encore limités, il a pris depuis une importance croissante, du fait de l'augmentation exponentielle du trafic et du risque de restriction de la liberté d'accès à certains contenus licites.

De nombreux travaux ont été réalisés - ou sont en cours de réalisation - sur le sujet. Le « paquet télécoms » , dont l'article 11 permet la transposition, contient une série de dispositions relatives à la neutralité des réseaux :

- la définition de « l'accès » , actuellement limitée aux « moyens, matériels ou logiciels » et aux « services en vue de permettre au bénéficiaire de fournir des services de communication électronique », est étendue à la fourniture de « services de communications au public par voie électronique », c'est-à-dire aux services sur Internet, quelque soit leur support d'accès [ordinateur, téléphone portable, tablette électronique (8° de l'article L. 32 du CPCE)] ;

- l' objectif d'une concurrence effective et loyale entre exploitants de réseaux et fournisseurs de services de communications électroniques est reconnu, « y compris pour la transmission de contenu » (2° de l'article L. 32-1 du même code) ;

- l'ARCEP et le ministre en charge des communications électroniques se voient chargés de « favoriser l'accès des utilisateurs finals à l'information et préserver leur capacité à diffuser ainsi qu'à utiliser les applications de leur choix » (15° du même article L. 32-1) ;

- l'ARCEP se voit reconnaître le pouvoir de « fixer (...) des exigences minimales en matière de qualité de service », afin d'empêcher la violation du principe de neutralité (article L. 36-15 du même code).

Cette faculté a bien pour objectif, ainsi qu'il est mentionné dans cet article, de « prévenir la dégradation du service et l'obstruction ou le ralentissement du trafic sur les réseaux ». Si l'Internet est visé en premier lieu par une telle disposition, l'absence de précision sur la nature des réseaux auxquels elle s'applique autorise son extension à tous types de réseau. Elle requiert de l'ARCEP qu'elle informe, préalablement à la prise de toute mesure, à la fois la Commission européenne et l'ORECE de sa démarche, et qu'elle prenne éminemment en compte les remarques adressées par ces institutions ;

- l'autorité de régulation voit par ailleurs, comme cela a été évoqué précédemment, étendre son pouvoir de règlement des différends à ceux opposant des fournisseurs d'accès à Internet à des prestataires de services sur le réseau ;

- l'information des consommateurs sur toute pratique de leur opérateur susceptible d'altérer leur accès aux réseaux est renforcée, à travers de nouvelles mentions obligatoires figurant dans les contrats de services de communications électroniques, qui doivent figurer « sous une forme claire, détaillée et aisément accessible » et concerner la procédure de gestion de trafic, les restrictions à l'accès à des services ou à des équipements, et les recours pour assurer la sécurité et l'intégrité du réseau (article L. 121-83 du code de la consommation).

4. La protection des consommateurs et des données personnelles

De nombreuses et importantes dispositions du nouveau « paquet télécoms » prennent en considération la nécessaire protection des utilisateurs des réseaux, qui se trouvent dans une position de faiblesse dans leurs relations avec les opérateurs privés et les autorités publiques qui les gèrent.

La protection des consommateurs , tout d'abord, est renforcée à plusieurs égards. C'est ici la directive « service universel », et plus précisément ses articles 7, 20 à 22, 23 bis , 26 et 30, qui sont affectés par les modifications du « paquet télécoms ».

Sont ainsi prévus :

- la consolidation de l'information des consommateurs ou au bénéfice des utilisateurs.

C'est ainsi que les services d'urgence se verront gratuitement fournir par les opérateurs des données relatives à la localisation des terminaux des appelants, l'exception liée à la faisabilité technique étant supprimée (article L. 33-1 du CPCE). Selon les éléments recueillis lors des auditions par votre rapporteur, cette disposition pourrait se heurter à des difficultés techniques, les opérateurs n'ayant pas systématiquement connaissance de ces données ni possibilité de les transmettre.

Par ailleurs, lesdits opérateurs devront mettre à disposition de leurs clients des « informations claires, actualisées et facilement accessibles » (articles L. 33-1 précité et L. 121-84-9 du code de la consommation).

Enfin, outre le renforcement de ces informations générales, de nouvelles mentions obligatoires devraient figurer dans les contrats de communications électroniques : outre celles précédemment évoquées au titre de la neutralité des réseaux, elles concerneront les frais de résiliation et de portabilité, les modalités de paiement, les services après-vente, l'annuaire, les tarifs promotionnels et les droits associés au suffrage universel (article L. 121-83 du code de la consommation) ;

- la facilitation du changement d'opérateur , à travers d'une part la portabilité du numéro en un jour, sur le fixe comme sur le mobile, certes assortie de possibilités de dérogation, et d'autre part l'indemnisation de l'abonné en cas de « retard ou d'abus dans la prestation de conservation du numéro » (I de l'article L  44 du CPCE). On rappellera que la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises (PME), précisée par le décret du 27 janvier 2006 relatif à la conservation du numéro, avait complété l'article L. 44 du CPCE en prévoyant que les clients peuvent changer d'opérateurs mobiles en conservant leur numéro d'appel en moins de dix jours et en n'ayant à s'adresser qu'au nouvel opérateur qu'ils auront choisi ;

- la facilitation de l'accès des personnes en situation de handicap aux services de communication électronique, les réseaux ouverts au public étant soumis au respect du cadre légal sur « l'accès des utilisateurs finals handicapés en vue de fournir à ces utilisateurs un accès (...) équivalent » [(o) de l'article L. 33-1 du même code].

En second lieu, et afin de répondre au caractère de plus en plus intrusif de l'activité des opérateurs dans la sphère privée des utilisateurs, la protection des données à caractère personnel est renforcée . Ainsi, les opérateurs vont être contraints désormais de mettre en place de véritables politiques de protection des données personnelles dont ils devront rendre compte auprès de l'autorité indépendante compétente, c'est à dire la CNIL.

La directive « vie privée », et plus précisément ses articles 4, 5, 6 et 13, est ici visée. Les évolutions découlant de sa révision sont les suivantes :

- les opérateurs doivent, d'une façon générale, prendre les mesures appropriées pour garantir la sécurité des services de communication électroniques accessibles au public (IV de l'article 32 bis de la loi du 6 janvier 1978 précitée) et notifier les failles de sécurité à la CNIL et aux utilisateurs (V du même article). Cette notification, dont le champ et les modalités restent à fixer, permettra à la CNIL de tenir un registre des carences en matière de protection des données personnelles, de prévenir et de sanctionner les opérateurs récalcitrants à y mettre fin ; elle donnera par la même occasion la possibilité aux utilisateurs de réagir contre l'atteinte potentielle ou effective à leurs données personnelles ;

- obligation est également faite aux opérateurs de mettre en oeuvre des procédures internes permettant de répondre aux demandes des autorités et de transmettre les informations sur ces procédures (III de l'article L. 34-1 du CPCE) ;

- le traitement de données par les opérateurs dans un but commercial doit être autorisé par les abonnés « expressément et pour une durée déterminée » (IV de l'article L. 34-1 du même code), les opérateurs étant contraints d'indiquer dans les courriels commerciaux une « adresse valable à laquelle le destinataire peut transmettre une demande visant à obtenir que ces publicités cessent » (article L. 121-15-1 du code de la consommation) ;

- la publicité non sollicitée , à travers la prospection directe au moyen d'un automate, est interdite , sauf si l'abonné a « exprimé son consentement préalable » (article L. 34-5 du CPCE), cet accord pouvant être « valablement exprimé par l'utilisation de paramètres permanents appropriés de son dispositif de connexion » (III de l'article 32 bis de la loi du 6 janvier 1978 précitée).

5. La sécurité des réseaux

L'extension, la complexification et le renforcement de l'interdépendance des réseaux de communication électronique ont fait de leur sabotage une arme de plus en plus utilisée par des « cyber criminels » cherchant à utiliser les vulnérabilités du système à des fins politiques, économiques ou idéologiques. Les récentes attaques dont ont été victimes des services gouvernementaux estoniens, ukrainiens, américains et même français ont montré l'importance de cette nouvelle forme de menaces terroristes susceptible de mettre en danger les intérêts étatiques et économiques des pays développés.

En l'état actuel de la législation nationale, l'ANSSI peut demander aux opérateurs, en cas de telles attaques cyber terroristes, de mettre en place des procédures de protection contre les réseaux et systèmes d'information et d'interception des données. Cependant, aucune norme ne permet d'imposer des normes de sécurité préventives de nature à garantir la « résilience » des réseaux, c'est-à-dire leur capacité à résister à des attaques.

La transposition du « paquet télécoms » est l'occasion de renforcer les prérogatives des pouvoirs publics en la matière sur deux points :

- en soumettant les opérateurs à des règles en matière de sécurité et d'intégrité du réseau et du service auxquelles ils ne sont pas astreints actuellement [(a) de l'article L. 33-1 du CPCE)] ;

- en permettant au ministre chargé des communications électroniques d'« imposer à l'opérateur de se soumettre, à ses frais, à un contrôle de sécurité effectué par un organisme qualifié indépendant désigné par le ministre et de lui communiquer les résultats » [article L. 33-10 (nouveau) du même code]. A cette fin, l'opérateur doit fournir toutes les informations nécessaires pour évaluer la sécurité et l'intégrité de ses services et réseaux, y compris les documents relatifs à sa politique de sécurité.

6. Le périmètre du service universel

Du fait que cette problématique avait été exclue des travaux de révision du « paquet télécoms », et devait faire l'objet d'un traitement séparé, les dispositions y ayant trait sont relativement mineures et concernent :

- l' obligation pour les États membres de distinguer , dans les appels d'offre pour l'attribution du service universel, le service téléphonique du raccordement au réseau (article L. 35-1 du CPCE) ;

- la suppression de la disposition fixant à 56 Kbits le débit minimum du service universel, à laquelle il est substitué la référence à un débit suffisant au regard des technologies les plus utilisées (même article).

B. Les mesures complémentaires (3° et 4° du I)

1. La gestion du spectre radioélectrique

En sus des dispositions projetées afin de transposer le « paquet télécoms », précédemment évoquées, le I de l'article 11 du projet de loi propose, dans son 3°, de prendre dans ce domaine des mesures complémentaires en vue « d'accroître l'efficacité de la gestion des fréquences radioélectriques notamment en encourageant le développement du marché secondaire des fréquences et en renforçant le dispositif de contrôle des brouillages et de lutte contre les brouillages préjudiciables ».

L'autorité chargée du contrôle et de la régulation des fréquences, l' ANFR , est dotée, au terme de l'avant-projet d'ordonnances, d'un certain nombre de nouveaux pouvoirs . L'objectif est de renforcer la sécurité et le contrôle des équipements mis en oeuvre par les opérateurs qui sont directement impliqués dans les interceptions des communications électroniques prévues par la loi.

En effet, ces équipements étant installés au coeur des réseaux des opérateurs, ils jouent un rôle majeur dans la sécurité des communications des abonnés . Leur vulnérabilité à des virus informatiques fait peser le risque d'une atteinte au secret des correspondances et à la vie privée. Afin de prévenir de tels risques, l'ANFR se voit confier :

- la réalisation de contrôles a priori chez les exploitants de réseau, lorsqu'une infraction est simplement présumée (article R. 20-44-11 du CPCE) ;

- la possibilité de céder des autorisations délivrées pour certains services de radio , à l'intérieur d'une même bande de fréquences, en vue de développer le marché secondaire des fréquences (article L. 43-3 du même code) ;

- la possibilité de suspension ou de retrait d'un accord sur l'implantation d'antennes de téléphonie mobile , dans le cadre de la libération des fréquences du dividende numérique et de leur utilisation pour des services de communication électronique mobile (article L. 43 du même code) ;

- de nouveaux pouvoirs de sanction , en incluant à la liste des pratiques punies de six mois d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, certaines pratiques susceptibles d'entraîner des brouillages du signal (article L. 39-2 du même code).

2. La sécurité des réseaux

Aux mesures prévues dans les directives constituant le « paquet télécoms » en matière de sécurité des réseaux, s'ajoutent deux points supplémentaires concernant plus précisément l'ANSSI :

- l' encadrement des matériels d'interception .

C'est le 4° du I de l'article 11 du projet de loi qui propose de prendre des mesures non prévues dans le « paquet télécoms », mais de nature à « renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques, notamment en ce qui concerne la recherche, la constatation et la répression des infractions ».

Au terme de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques, la détention, fabrication, commercialisation et publicité pour des matériels d'interception, tout comme le fait de procéder à des interceptions, sont en principe interdits . Ils sont néanmoins autorisés à titre dérogatoire par l'ANSSI au nom du Premier ministre, l'Autorité fixant alors des prescriptions d'utilisation aux opérateurs. Le non respect de ces dispositions est puni de lourdes peines d'amende et d'emprisonnement prévues aux articles L. 226-1 et L. 226-3 du code pénal.

Du fait de l'inadaptation de ce dispositif aux évolutions technologiques des attaques et à leur danger potentiel, le Gouvernement a souhaité élargir le champ de l'habilitation initiale de façon à pouvoir, par voie d'ordonnances, renforcer la lutte contre ces risques . Cette habilitation lui permettrait d'alourdir les sanctions prévues en cas de détention, fabrication, commercialisation et publicité pour des matériels d'interception ; de sanctionner le non respect par les opérateurs de prescriptions d'utilisation édictées par l'ANSSI et d'habiliter les agents de cette dernière à procéder à des contrôles in situ sur la bonne utilisation des matériels ;

- la protection des infrastructures critiques .

S'il est acquis que les opérateurs concernés prendraient, en cas d'attaque contre les systèmes-réseau, des mesures en assurant la protection, il n'existe pas de disposition normative permettant aux pouvoirs publics de les contraindre à mettre préventivement en place des moyens de nature à protéger les infrastructures majeures de production d'énergie, de transport ou de communication visées aux articles L. 1332-1 et 1332-2 du code de la défense.

La question se pose avec d'autant plus d'acuité alors que se développent les systèmes dits de « réseau intelligents », ou smart grids qui, s'ils permettent d'optimiser notablement les performances des réseaux énergétiques, les fragilisent également et accroissent leur vulnérabilité.

En vue de remédier à cette carence, le 4° de l'article 11 du projet de loi propose d'habiliter le Gouvernement à prendre des mesures législatives complémentaires à celles prévues pour la transposition du « paquet télécoms » pour répondre à ce type de menaces.

C. La correction d'erreur et les clarifications (5° du I)

Le 5° du I de l'article 11 du projet de loi propose d'habiliter le Gouvernement à prendre « toutes dispositions modifiant la partie législative du code des postes et des communications électroniques afin de remédier aux éventuelles erreurs et en clarifier en tant que de besoin les dispositions ».

Cette habilitation générale permettra aux services juridiques des ministères concernés d'améliorer formellement la rédaction de dispositions législatives du CPCE en partie erronées ou obscures.

D. Le cadre d'application (II et III)

1. Les conditions d'application dans l'espace

Les dispositions du II de l'article 11 ont pour but, selon les termes de l'étude d'impact, de rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna les modifications portant sur les dispositions des articles L. 34-1, L. 39-3 et L. 43 du CPCE, sur les dispositions des articles 32 et 32 bis de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, ainsi que sur les dispositions des articles 12 et 34-2 de la loi n° 86-107 du 30 septembre 1986 précitée, dans la mesure où celles-ci étaient d'ores et déjà applicables dans ces collectivités. Des dispositions identiques sont prévues pour les Terres australes et antarctiques françaises à l'exception de celles concernant les articles L. 34-1 et L. 39-3 du CPCE, qui ne sont pas applicables dans ce territoire.

Seule l'application de la modification insérant un II nouveau, relatif aux pouvoirs de contrôle de l'ANFR, à l'article L. 43 du même code, n'a pas été retenue car elle nécessite, au préalable, de coordonner les pouvoirs de l'ANFR et celles des collectivités de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française.

2. Les modalités d'application dans le temps

Les modalités d'application de l'article 11 du présent projet de loi dans le temps sont les suivantes :

- l' habilitation prévue par son I au profit du Gouvernement vaut pour une période de six mois à compter de la promulgation de la présente loi ;

- le projet de loi de ratification des ordonnances ainsi prises doit être déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l'ordonnance.

En pratique, les délais de prise d'ordonnance et de ratification sont strictement contraints par les exigences communautaires de transposition imposant que l'essentiel des dispositions soit applicable au plus tard le 25 mai 2011 . Une période plus longue est toutefois prévue par les directives pour quelques dispositions relatives à la gestion du spectre.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a adopté, sur cet article 11, un amendement du Gouvernement visant à modifier la rédaction du 4° du I, en restreignant plus explicitement le champ de l'habilitation . Ceci afin de répondre aux remarques formulées quant au caractère excessivement large de ce champ, sur des sujets aussi sensibles que la vie privée et le secret des correspondances, ou encore la sécurité des réseaux.

Il est ainsi précisé que les infractions et les peines qu'il est prévu d'adapter et de compléter afin de lutter contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret professionnel sont celles prévues par l'article 226-3 du code pénal. Il s'agit de renforcer les peines pour défaut d'autorisation et de publicité de matériels très sensibles - en matière de brouillage et d'interception, par exemple -, de créer une sanction pénale en cas de non-respect des conditions fixées par l'autorisation, et d'habiliter les agents des services de l'État à contrôler l'application de la loi.

Une seconde modification précise que la réponse aux menaces ainsi que la prévention et la réparation des atteintes à la sécurité des systèmes d'information tant des autorités publiques que des opérateurs passent par la soumission de l'établissement et de l'exploitation des réseaux ouverts au public au respect de règles prescriptives. Elle précise par ailleurs que l'article L. 33-1 du CPCE sera complété et adapté pour prescrire des mesures exceptionnelles de sécurité aux opérateurs.

Aucun amendement n'a été adopté, en revanche, en séance publique.

III. La position de votre commission

Votre commission accueille favorablement, dès lors qu'il intègre les précisions de son champ d'application apportées par l'Assemblée nationale, le contenu de cet article 11, tant en ce qui concerne la transposition des directives du « paquet télécoms » (1° et 2° du I) que les mesures complémentaires envisagées (3 et 4° du I).

Outre qu'elle permettra à notre pays de se mettre en conformité avec le droit européen dans le délai lui étant imparti à cet effet, la transposition du « paquet télécoms » permettra d' adapter utilement les outils de réglementation et de régulation existants au profit des institutions nationales compétentes, et d' en apporter de nouveaux adaptés aux évolutions des technologies et des pratiques constatées.

Votre commission prendra toutefois garde, lorsqu'il lui sera donné d'examiner le texte de ratification de ces ordonnances, que ces dernières ne s'écartent pas des projets qui lui ont été communiqués et qui ont été soumis à consultation. Elle sera, à cet égard, particulièrement vigilante sur les points sur lesquels son attention a été attirée.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 11 bis (nouveau) (article L. 32-1 du code des postes et communications électroniques) - Neutralité des réseaux

Commentaire : cet article additionnel renforce, au profit du régulateur national des communications électroniques, les outils lui permettant de faire respecter par les différents acteurs concernés le principe de neutralité des réseaux.

La neutralité des réseaux, concept encore inconnu voici quelques années, fait l'objet d'une actualité inédite du fait de l'importance cruciale de ses enjeux, à la fois techniques, économiques et politiques.

Si un cadre normatif a minima existe aujourd'hui, notamment à travers le « paquet télécoms » et sa transposition en cours, il parait opportun, au regard de l'évolution prévisible des pratiques, de le renforcer. C'est l'objet du présent article additionnel.

A. Le triple enjeu lié à la neutralité des réseaux

Au coeur de cette problématique, de plus en plus médiatisée, se trouve un triple enjeu fondamental pour l'avenir des réseaux et, plus largement, pour l'échange d'informations au sein de nos sociétés.

Le premier enjeu est d'ordre technique ; il est relatif au bon fonctionnement des réseaux et dépend en grande partie des fournisseurs d'accès. L' accès à Internet étant un service dit « non managé » , les paquets de données parviennent à l'équipement terminal selon une vitesse fluctuante en fonction de la densité du trafic. L'utilisateur n'a, dès lors, aucune garantie sur le temps d'affichage d'une page web ou le délai d'acheminement d'un courriel. A l'inverse, la téléphonie et la télévision sur ADSL sont des services dits « managés », dont la qualité est gérée et garantie par les opérateurs.

Or, les flux sur Internet connaissent une double rupture aujourd'hui, qui fait craindre une congestion du réseau , surtout le réseau mobile :

- ils augmentent très rapidement en quantité : selon l'Institut de l'audiovisuel et des télécommunications en Europe (IDATE), + 40 % par an d'ici 2013 pour la voix, et + 100 % pour les données d'ici 2014 ;

- leur nature évolue : les échanges asymétriques réseau vers les utilisateurs se développent de façon exponentielle, avec le streaming et la consultation de vidéo.

La nécessaire « gestion de la rareté » qui découle de ces évolutions s'accommode mal d'offres de services présentées comme « illimitées » par les opérateurs mobiles. Elle suscite l'impatience et l'incompréhension d'utilisateurs « surfant » sur l'Internet à des débits réels bien inférieurs à ceux annoncés en théorie, et pours lesquels ils ont rémunéré leur fournisseur d'accès.

L'enjeu de la neutralité du Net est également économique . L'écosystème numérique, qui représente aujourd'hui 6 à 7 % du PIB mondial, en constituera 20 % dans une dizaine d'années et structurera l'ensemble de l'économie mondiale. Afin que celle-ci poursuive son développement il importe que le Net continue de fonctionner de façon souple, fluide et transparente.

Or, ces dernières années, la valeur ajoutée s'est déplacée de l'amont (fournisseurs d'accès) vers l'aval (éditeurs de contenus) de la chaine de valeur. Les premiers ont ainsi investi le segment des seconds, et la frontière s'est brouillée entre les acteurs, avec des phénomènes de concentration verticale. D'où la tentation pour chacun, sur un marché donné, de favoriser ses services sur un autre marché par rapport à ses concurrents, et donc de restreindre à cet effet l'accès au réseau de ces derniers. Cette pratique, de nature discriminatoire, est contraire aux principes généraux de pertinence, de proportionnalité, d'efficacité, d'information préalable et de transparence ayant présidé à la naissance du réseau Internet.

Mais les problématiques liées à la neutralité du Net débordent largement le cadre des terminaux informatiques classiques pour concerner :

- les téléphones mobiles . L'accès peut y être favorisé pour certaines applications (ex : App store pour Apple), et certains logiciels au contraire écartés (ex : pas de technologie flash sur les Iphones) ;

- les moteurs de recherche . Le caractère objectif du référencement et de la présentation des résultats par ces derniers fait question. Surtout quand on sait que le moteur Google représente à lui seul les deux-tiers des recherches ;

- les télévisions connectées . Des partenariats entre constructeurs de télévisions et éditeurs de contenus (ex : Sony et Google) prévoient d'ores et déjà des clauses d'exclusivité, qui font craindre des modèles fermés préjudiciables aux consommateurs.

Enfin, la problématique de la neutralité des réseaux relève d'une dimension politique certaine . De nombreuses institutions, telles que la Commission européenne au niveau communautaire, ou les deux assemblées parlementaires, le Gouvernement, l'ARCEP ... se sont emparées du sujet et ont formulé des propositions de réforme du cadre normatif. Le Sénat , à l'initiative de ses groupes d'études « postes & communications électroniques », relevant de la commission en charge de l'économie, et « médias et nouvelles technologies », relevant de la commission en charge de la culture, a de son côté organisé, le 26 octobre 2010 , une table-ronde sur le sujet qui a réuni l'ensemble des acteurs concernés.

En effet, le réseau Internet est devenu un bien public stratégique , véhiculant des libertés aussi fondamentales que les libertés d'expression, d'information ou encore d'accès à l'information, auxquelles le Conseil constitutionnel a donné valeur constitutionnelle .

Il résulte des différents travaux menés sur le sujet que ce réseau doit être gouverné par un principe général de neutralité, et que les mesures de gestion technique des réseaux prises par les opérateurs doivent impérativement être justifiées, proportionnées, non discriminatoires et transparentes.

B. Quel cadre de régulation pour assurer la neutralité des réseaux ?

Le cadre juridique national reconnaît déjà la liberté de communication (article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen), qui comprend la liberté d'accéder aux services en ligne (Conseil constitutionnel, 10 juin 2009).

Les opérateurs sont par ailleurs soumis à une obligation de neutralité (article L. 33-1 du CPCE).

Le ministre en charge des communications électroniques et l'ARCEP doivent prendre les mesures permettant d'assurer l'exercice de ces libertés (articles L. 32-1 et L. 34-8 du CPCE).

Ce cadre national est en passe d'être renforcé par le troisième « paquet télécoms » , qui comporte quatre dispositions permettant de mieux garantir le respect du principe de neutralité. On rappellera qu'il s'agit respectivement de :

- la reconnaissance du principe de neutralité , à la fois comme objectif des autorités de régulation nationales et dans une dimension sociétale ;

- la transparence sur les restrictions à l'accès aux réseaux de communications électroniques et les mesures de gestion de trafic pouvant être mises en oeuvre ;

- l'extension du pouvoir de règlement des différends de l'ARCEP aux litiges entre fournisseurs d'accès à Internet et prestataires de services sur l'acheminement du trafic ;

- le pouvoir donné à l'ARCEP de fixer des exigences minimales de qualité de service .

Parallèlement à ces avancées du droit positif, les institutions qui se sont saisies du sujet ont avancé des propositions de réforme, dont certaines préfigurent le contenu des avant-projets d'ordonnances auxquelles renvoie l'article 11 du présent projet de loi.

Le rapport gouvernemental sur la neutralité du Net, remis au Parlement début juillet, propose plusieurs pistes d'évolution règlementaire :

- obliger les opérateurs à informer clairement les fournisseurs et utilisateurs des conditions d'accès à Internet, et notamment de leurs pratiques de gestion du trafic ;

- fournir aux consommateurs un mécanisme de règlement des litiges avec leur opérateur relatifs à la neutralité du Net ;

- imposer aux opérateurs de se doter d'un médiateur indépendant chargé de régler ces litiges ;

- introduire un objectif de non-discrimination dans les relations opérateurs-fournisseurs de services pour l'acheminement du trafic ;

- demander à l'ARCEP de définir des lignes directrices encadrant les mécanismes et pratiques de gestion du trafic acceptables de la part des opérateurs.

Fin septembre, l'ARCEP a justement remis un rapport sur la neutralité du Net, dans lequel elle :

- recommande aux opérateurs et fournisseurs de services de ne pas différencier les modalités de traitement de chaque flux de données en fonction du type de contenu, de service, d'application, de terminal ou en fonction de l'adresse d'émission ou de réception ;

- ouvre la porte à des exceptions liées aux nécessites de gestion des flux, dont elle renvoie le contenu à des travaux entre différents acteurs concernés ;

- entend soumettre ces exceptions à des critères d'efficacité, de pertinence, de proportionnalité, de transparence et de non discrimination.

On notera que la Commission européenne doit remettre prochainement un Livre blanc sur le sujet.

Le Sénat a organisé, à l'initiative notamment de votre commission, une table-ronde sur le sujet, que votre rapporteur pour avis avait animé.

Enfin, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a mis en place, début octobre, une mission d'information sur la Net-neutralité, présidée par Laure de la Raudière, dont les conclusions devraient prochainement être publiées. La présidente de la mission, également rapporteure pour avis du présent texte à l'Assemblée nationale, a déposé un amendement lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale proposant de compléter l'article L. 33-1 du CPCE en vue de soumettre l'exploitation de réseau de communications électroniques ouverts au public au respect de conditions portant sur la neutralité dans ses aspects économique et politique.

Bien que précisant dans son exposé des motifs que des mesures législatives plus précises seraient proposées, le cas échéant, à l'issue du travail mené par la mission d'information qu'elle préside sur la neutralité de l'Internet et des réseaux, et que le pouvoir réglementaire déterminerait les mesures d'application nécessaires, l'auteure de l'amendement a finalement préféré le retirer , à la demande du Gouvernement, dans l'attente de la publication de ces travaux.

C. Les propositions de votre commission

Votre commission a bien pris acte des différents travaux menés ou en cours sur la problématique de la neutralité des réseaux. Elle estime cependant que le sujet, dont l'actualité et les enjeux sont croissants, est désormais suffisamment « mûr » pour compléter le dispositif communautaire par une mesure simple et consensuelle qui garantisse le principe de non discrimination comme un objectif de régulation .

En effet, si les quelques dispositions traitant du sujet au sein du « paquet télécoms » lui semblent devoir être accueillies favorablement, elles ne lui paraissent pas suffisantes , en revanche, pour donner réellement au régulateur national les moyens incontestables d'intervenir en cas de traitement différencié entre opérateurs et fournisseurs de contenus sur l'acheminement du trafic.

Aussi votre proposition vous propose, sans plus attendre, d'adopter un dispositif législatif aussi léger que souple, s'inspirant de propositions déjà avancées, de nature à prévenir ou empêcher de telles pratiques, et garantir ainsi un usage libre et neutre des réseaux. Ceci en modifiant l' article L. 32-1 du CPCE .

En l'état, cet article habilite le ministre chargé des communications électroniques et l'ARCEP à veiller à un certain nombre mission d'intérêt public. Parmi celles-ci, il est fait état de certains éléments ayant à voir avec le concept de neutralité des réseaux , soit :

- « la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence » (4°) ;

- « le respect par les opérateurs de communications électroniques (...) du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis (...) » (5°) ;

- « l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs » (9°).

Cependant, il n'est pas fait état d'un pouvoir explicite pour ces autorités, et plus spécifiquement pour l'ARCEP, d'intervenir en cas de non respect du principe de neutralité par les opérateurs ou par les fournisseurs de services de communications au public en ligne pour l'acheminement du trafic et l'accès à ces services.

C'est en vue de prévoir un tel pouvoir que la commission a adopté l'amendement créant dans cet article L. 32-1 créant un 4° bis à cet effet.

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 12 (articles L. 45 et L. 45-1, et L. 45-2 à L. 45-8 [nouveaux] du code des postes et communications électroniques) - Règles encadrant l'attribution et la gestion des noms de domaine sur Internet

Commentaire : cet article tend à consolider la base législative du régime français des noms de domaine correspondant au territoire national.

I. Le droit en vigueur

A. Les noms de domaine

Un nom de domaine est une chaîne de caractères structurée permettant l'accès à un site sur le réseau Internet et la localisation d'un fichier en évitant le recours à l'adresse IP numérique. Tout site Internet fait ainsi l'objet d'une double forme d'identification :

- l'une, très technique , à travers l' adresse IP (Internet Protocol), composée de quatre nombres compris entre 0 et 255 et séparés d'un point (ex : 194.153.205.26) ;

- l'autre, plus accessible au grand public, généralement sous forme de mots composés de lettres, davantage mémorisables, les noms de domaine (ex : senat.fr).

Alors que les noms de domaine constituent une ressource rare (plusieurs personnes pouvant être intéressées par un même nom pour des usages concurrents), ils sont devenus un outil central de l'univers numérique pour la communication des entreprises et des institutions publiques et un support aujourd'hui indispensable à la liberté d'expression des citoyens sur Internet.

L'attribution des noms de domaine (ou « nommage ») est aujourd'hui encore gérée depuis les États-Unis, par l'intermédiaire de l'Internet Corporation for Assigned Names and Numbers ( ICANN ), une association de droit privé américaine à but non lucratif et toujours liée au Département du commerce malgré une évolution récente de sa gouvernance.

L'ICANN délègue 15 ( * ) une partie de cette tâche à d'autres organismes à travers le monde, appelés « registres » ou « offices d'enregistrement » :

- les extensions dites « génériques » (les noms de domaine en « .com », « .org », « .net », « .mobi », etc.) voient ainsi leur gestion confiée à diverses sociétés (généralement à but lucratif) ;

- les extensions dites « géographiques » (« .us », « .fr », « .be », etc.) sont, elles, gérées selon les règles définies par les pouvoirs publics des pays concernés.

B. Le cadre juridique en vigueur en France jusqu'en 2010

En France, le cadre juridique de l'attribution des noms de domaines a été élaboré tardivement. D'abord envisagé lors des travaux préparatoire de la LCEN, il résulte finalement de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004, relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, dont les rapporteurs pour notre commission étaient nos collègues Pierre Hérisson et Bruno Sido.

Dans sa rédaction issue de cette loi, l' article L. 45 du CPCE consacre le principe selon lequel « l'attribution d'un nom de domaine est assurée (...) dans l'intérêt général, selon des règles non discriminatoires rendues publiques et qui veillent au respect, par le demandeur, des droits de la propriété intellectuelle ».

En raison de la mission d'intérêt général dévolue à ces organismes, le législateur a choisi d'instaurer un contrôle des offices d'enregistrement par le ministre chargé des communications électroniques, ce dernier les désignant après consultation publique pour une période de cinq à dix ans renouvelable et pouvant éventuellement sanctionner certains manquements en leur retirant leur désignation.

Le décret du 6 février 2007 pris pour l'application de ces dispositions et codifié aux articles R. 20-44-34 à R. 20-44-50 du CPCE encadre encore plus nettement les pouvoirs des offices d'enregistrement :

- il fixe des principes généraux d'attribution des noms de domaine et définit des catégories de termes protégés dont l'enregistrement par les offices est interdit ou réservé à certains titulaires parce qu'ils peuvent porter atteinte aux droits des tiers ;

- il prévoit une procédure administrative à la charge de l'office pour bloquer, supprimer ou transférer les noms de domaine des titulaires qui ne respecteraient pas les règles de nommage ou porteraient atteinte aux droits des tiers ;

- il leur enjoint de créer une base de données fiable relative aux titulaires des noms de domaine, de présenter un rapport d'activité annuel au ministre, et de répondre à toute demande de ce dernier.

À ce jour, et alors que la loi avait vocation à s'appliquer à toutes les extensions correspondant au territoire national 16 ( * ) , seule l'extension en « .fr » a vu la procédure de désignation engagée et menée à son terme.

Ce processus a, en outre, été mené avec une très grande lenteur : Après une consultation publique du 25 avril au 24 juin 2008, l' appel à candidatures pour la gestion du « .fr » n'a été lancé que le 15 janvier 2009 et clos le 9 mars, et ce n'est finalement que le 19 février 2010 que le ministre chargé de l'industrie a adopté un arrêté portant désignation de l'Association française pour le nommage Internet en coopération ( AFNIC ) comme office d'enregistrement en charge de l'extension « .fr » 17 ( * ) , soit trois ans après la publication du décret et plus de cinq ans après la promulgation de la loi !

Votre rapporteur pour avis regrette ces retards , qui nuisent à la sécurité juridique du système de nommage et ne favorisent pas l'attractivité des noms de domaine français. Il souhaite, de façon générale, que le pouvoir réglementaire applique dans des délais raisonnables les dispositions législatives votées par le Parlement et espère donc, en l'espèce, que les prochaines procédures de désignation des offices d'enregistrement se feront rapidement, en suivant des calendriers bien plus resserrés.

C. La décision du Conseil constitutionnel du 6 octobre 2010

Une nouvelle intervention du législateur a été rendue nécessaire en raison de la décision du 6 octobre 2010 du Conseil constitutionnel 18 ( * ) . Faisant droit à une question prioritaire de constitutionnalité transmise par le Conseil d'État, il a en effet censuré l'article L. 45 du CPCE au motif que le législateur a, par des dispositions insuffisamment précises, laissé à l'autorité administrative et aux offices d'enregistrement une latitude excessive pour fixer les règles d'attribution et de gestion des noms de domaine. Cette « incompétence négative » du législateur était susceptible, selon la haute juridiction, de porter atteinte à deux types de libertés constitutionnelles :

- la liberté de communication , d'une part, car les noms de domaine peuvent constituer par eux-mêmes des vecteurs d'opinion, et permettent en tout état de cause un accès facilité à ceux-ci ;

- la liberté d'entreprendre , d'autre part, les noms de domaine représentant en effet une importante valeur marchande, et leur attribution pouvant s'avérer déterminante pour l'exercice d'une activité économique.

La garantie de ces deux libertés fondamentales relevait, a estimé le juge constitutionnel, du législateur, qui aurait dû, à défaut d'édicter l'ensemble des contraintes y étant liées, au moins fixer un certain nombre de principes fondamentaux en matière d'attribution et de gestion des noms de domaine. Or, selon le conseil, le législateur « a entièrement délégué le pouvoir d'encadrer les conditions dans lesquelles les noms de domaine sont attribués ou peuvent être renouvelés, refusés ou retirés ». Pour les noms de domaine enregistrés sous l'extension en « .fr » gérée par l'AFNIC, ce pouvoir relève en effet de l'arrêté pris par le ministre en charge de l'industrie, de la convention conclue entre l'État et l'AFNIC, et in fine , de la « charte de nommage » adoptée par cette dernière.

En revanche, les droits de la propriété intellectuelle n'ont pas été méconnus dès lors que l'article L. 45 précisait bien que les règles d'attribution des noms de domaines devaient veiller à les respecter également.

Afin de préserver la sécurité juridique du dispositif en cause, le Conseil constitutionnel a choisi de reporter dans le temps les effets de sa décision . Le législateur dispose ainsi d'un délai courant jusqu'au 1 er juillet 2011 pour pallier la carence des dispositions censurées. Il doit, d'ici cette date, fixer certains principes généraux en matière de noms de domaine et, en particulier, faire figurer dans la loi les règles relatives à leur attribution, à leur renouvellement, à leur refus ainsi qu'à leur retrait.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

A. Le texte adopté en commission des affaires économiques

C'est à l'initiative de M. Lionel Tardy que la Commission des affaires économiques a introduit, au sein d'un nouvel article 12 , les dispositions destinées à répondre à la censure de l'article L. 45 du CPCE dans les délais extrêmement brefs imposés au Parlement par le Conseil constitutionnel.

Amendement d'appel constituant, selon son auteur lui-même, une solution « a minima », il proposait simplement, pour répondre à la censure du Conseil constitutionnel, de donner une valeur législative aux principales dispositions réglementaires du CPCE relatives aux noms de domaine.

B. Le texte adopté en séance publique

Le délai écoulé entre l'adoption du texte en commission et son examen en séance publique a permis de réaliser un travail de fond associant les parlementaires concernés, l'AFNIC (actuel office d'enregistrement désigné pour la gestion du « .fr ») et le Gouvernement. Cette concertation a abouti à un nouvel amendement , déposé par Mme Laure de la Raudière, rapporteur de la commission des affaires économiques, réécrivant entièrement l'article 12 pour le développer et le préciser d'un point de vue juridique.

Cet amendement a été adopté par les députés en séance publique au bénéfice de cinq sous-amendements de précision technique présentés par M. Lionel Tardy.

Dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée, le nouveau régime juridique des noms de domaine est désormais précisé par neuf articles du CPCE (art. L. 45 et L. 45-1 à L. 45-8) qui consacrent pour l'essentiel les pratiques et principes déjà existants.

- L' article L. 45 , dans sa nouvelle rédaction, confirme que les noms de domaine de premier niveau pour chacune des extensions françaises sont attribués et gérés chacun par un organisme unique dénommé « office d'enregistrement » (terme recommandé par la Commission générale de terminologie et de néologie 19 ( * ) ).

L'office est désigné après consultation publique par le ministre chargé des communications électroniques pour une durée fixée par voie réglementaire, ce dernier pouvant procéder au retrait de la désignation en cas de manquements ou d'incapacité financière ou technique de l'office.

- L' article L. 45-1 énonce les principes généraux de gestion et d'attribution des noms de domaine français. Les règles définies par les offices doivent être non discriminatoires et transparentes, garantissant le respect de la liberté de communication, de la liberté d'entreprendre et des droits de propriété intellectuelle.

Le principe du « premier arrivé, premier servi » est confirmé (sous réserves des exceptions définies infra ), tout comme celui de la responsabilité du demandeur lors de l'enregistrement des noms de domaine, et celui selon lequel les noms de domaines sont attribués pour une durée limitée mais renouvelable.

La sécurité ainsi assurée aux titulaires d'une possession continue et exclusive de leurs noms de domaine est propre à garantir la confiance nécessaire au développement, dans la durée, des échanges et activités commerciales en ligne.

- L' article L. 45-2 définit les termes qui doivent être protégés par les offices d'enregistrement et énumère les motifs de retrait, de refus d'enregistrement ou de renouvellement des noms de domaine français : atteinte à l'ordre public, atteinte à des droits de propriété intellectuelle et atteinte au nom des institutions publiques.

Le législateur répond ainsi pleinement aux exigences du Conseil constitutionnel, qui avait censuré le fait qu'il ait « entièrement délégué le pouvoir d'encadrer les conditions dans lesquelles les noms de domaine sont attribués ou peuvent être renouvelés, refusés ou retirés » .

Le texte proposé par l'Assemblée nationale modifie en outre légèrement le niveau de protection des noms de collectivités et des institutions puisqu'il devient possible d'enregistrer le nom d'une collectivité si le demandeur a un intérêt légitime (son nom de famille, ou le nom d'une marque) et agit de bonne foi (ne cherche pas à porter atteinte à la collectivité, ou ne se livre pas à des activités relevant du parasitisme, par exemple).

- L' article L. 45-3 ouvre la possibilité d'enregistrer des noms de domaine français aux personnes physiques résidant sur le territoire de l'Union européenne ainsi qu'aux personnes morales ayant leur siège social ou leur établissement principal sur le territoire de l'un des États membres de l'Union européenne.

Cette ouverture est un élément essentiel au dynamisme des extensions françaises (longtemps réservée aux seuls nationaux et soumise à la production de justificatifs, la possession de noms de domaine en « .fr » est peu développée par rapport à certaines de nos voisins européens - l'Allemagne notamment). En outre la légalité de critères limitant l'éligibilité pour les noms de domaines correspondant au territoire national aux seuls citoyens français ou aux personnes résidant en France n'est plus aujourd'hui assurée au regard des exigences du droit européen, et en particulier de la libre prestation de services.

- L' article L. 45-4 réaffirme que l'attribution des noms de domaine est assurée par les offices d'enregistrement par l'intermédiaire de bureaux d'enregistrements (ce sont ces bureaux qui commercialisent ensuite les noms de domaine auprès des particuliers, à des tarifs librement fixés selon les prestations proposées). Cet article formalise en outre un mécanisme d' accréditation des bureaux d'enregistrement par les offices.

Le principe de séparation des activités entre office et bureaux d'enregistrement était déjà présent dans le décret de 2007 pour les noms de domaine français (article R. 20-44-39 du CPCE). Cette question a fait, dans son principe, l'objet d'un vif débat à l'ICANN, qui autorise désormais la confusion des activités d'office et de bureau d'enregistrement 20 ( * ) . Votre rapporteur approuve le maintien en France de cette séparation qui permet de bien distinguer les activités de régulation (offices) des prestations de commercialisation (bureaux).

- L' article L. 45-5 impose la publicité des prix et prestations des offices, qui devront publier quotidiennement les noms de domaine enregistrés, ce qui devrait mieux permettre aux titulaires de droits protégés de surveiller les enregistrements abusifs portant atteinte à leurs intérêts 21 ( * ) . Il rappelle également l'importance pour les titulaires de fournir des données exactes permettant de les identifier et l'obligation faite aux offices de collecter et d'utiliser ces informations dans le respect de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

- L' article L. 45-6 donne une base juridique à l'établissement d'une procédure de règlement des litiges administrée par l'office d'enregistrement dont le règlement doit être homologué par le ministre.

- L' article L. 45-7 renvoie à un décret en Conseil d'État les modalités de mise en oeuvre de ces articles et l' art. L. 45-8 étend leur application à Wallis-Et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises (auxquelles correspondent respectivement les extensions « .wf » et « .tf » ).

L' entrée en vigueur de ces dispositions est fixée au 30 juin 2011 , ce qui permettra de conserver une base juridique au régime des noms de domaine français sans solution de continuité, le Conseil constitutionnel ayant reporté les effets de sa censure au 1 er juillet 2011. Néanmoins, l'ouverture de l'enregistrement des noms de domaine à toutes les personnes physiques et morales de l'Union européenne a, elle, été repoussée au 31 décembre 2011, en raison des préparatifs opérationnels conséquents qu'elle nécessite.

Enfin, par souci de sécurité juridique, la désignation des organismes déjà choisis comme office d'enregistrement (de fait, seule l'AFNIC est concernée pour le « .fr » ) est maintenue en vigueur jusqu'à la date de la première désignation opérée, après consultation publique, sur le fondement des nouvelles dispositions et, au plus tard, jusqu'au 30 juin 2012.

Votre rapporteur note que la désignation par arrêté de l'AFNIC comme gestionnaire du « .fr » courait initialement jusqu'en 2017, et qu'elle se trouvera donc raccourcie d'au moins cinq ans (sur un total de sept). Il renouvelle donc son souhait que la procédure de désignation, qui a un coût élevé, tant pour l'administration que pour les organismes candidats, soit cette fois menée avec diligence.

II. La position de votre commission

Votre commission de l'économie se félicite d'abord de la réactivité avec laquelle le Parlement a entrepris de répondre, dans des délais pourtant très contraints, à la censure du Conseil constitutionnel.

Sur le fond, la nouvelle rédaction proposée pour les articles L. 45 à L. 45-8 ménage désormais un équilibre satisfaisant entre, d'une part, les grandes libertés consacrées par la décision du 6 octobre 2010 (liberté de communication et liberté d'entreprendre) et d'autre part la nécessaire protection de l'ordre public et de certains droits (propriété intellectuelle, marques).

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté :

- un amendement visant à corriger une omission et à rappeler le caractère d' intérêt général de la mission d'attribution et de gestion des noms de domaine confiée aux offices d'enregistrement ;

- un amendement prévoyant que les critères de « bonne foi » et d'« intérêt légitime », qui permettent d'enregistrer comme nom de domaine certains termes protégés, devront être bien précisés par décret en Conseil d'État.

Cet ajout vise à permettre aux offices d'enregistrement de lutter efficacement contre certaines pratiques de « cyber-squattage » (enregistrement abusif de certains noms de domaine par des tiers à des fins purement lucratives) tout en prenant en compte le fait qu'il existe des termes qui peuvent être protégés sur la base d'intérêts et droits différents : marques, noms d'institutions publiques, patronymes, etc. (par ex. « evian.fr » : marque et nom de commune ; « bessieres.fr » : patronyme et nom de commune 22 ( * ) ; « milka.fr » : patronyme et marque 23 ( * ) ).

En pratique, les offices d'enregistrement pourront ainsi adopter un système n'autorisant l'enregistrement de certains noms protégés que sur production de pièces justifiant l'intérêt légitime du demandeur (ce qui constitue un niveau de protection plus élevé que la plupart des extensions génériques, comme le « .com »). Le pouvoir réglementaire et les offices pourront également s'inspirer des principes en vigueur pour les noms de domaine sous l'extension « .eu » , où la mauvaise foi du titulaire d'un nom de domaine peut être démontrée :

lorsque le nom de domaine a été enregistré principalement pour le revendre à des fins spéculatives,

lorsqu'il n'est pas exploité pendant une longue période de temps (pratiques de « parking »),

lorsqu'il est enregistré dans le but d'entretenir la confusion avec celui d'une entreprise ou d'une collectivité, ou dans le but de perturber leurs activités,

lorsque le titulaire a déjà fait l'objet de plusieurs procédures d'arbitrage, ou a enregistré un nombre très important de noms de domaines génériques ;

- un amendement prévoyant que le règlement intérieur des offices d'enregistrement comprenne des dispositions propres à garantir le caractère impartial et contradictoire des procédures extrajudiciaires de résolution des litiges faisant intervenir des tiers ;

- un amendement rendant opposables, avec effet reporté au 31 décembre 2011, les nouveaux principes d'attribution des noms de domaine pour les offices qui exercent encore actuellement leur activité sans avoir fait l'objet d'une désignation par les pouvoirs publics.

Depuis 2004, les désignations d'offices d'enregistrement pour les domaines comme « .re » (Réunion), « .mq » (Martinique) ou « .pm » (Saint-Pierre-et-Miquelon) n'ont toujours pas eu lieu et des incertitudes subsistent sur l'opposabilité du nouveau régime juridique des noms de domaine à ces extensions dont l'office d'enregistrement exerce ses fonctions de fait, par délégation de l'ICANN, sans avoir pourtant fait l'objet d'une désignation formelle par les pouvoirs publics français.

Or la situation de certaines de ces extensions ultramarines est critique et leur configuration technique parfois instable et vulnérable. Votre rapporteur espère que l'adoption de cet amendement permettra aux parties concernées, au plan local ou national, de corriger les défaillances techniques constatées et de relancer rapidement le développement de ces extensions.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 12 bis (nouveau) (article L. 33-7 du code des postes et communications électroniques) - Transmission à des tiers des informations détenues par les gestionnaires d'infrastructures et opérateurs de communications électroniques relatives à l'implantation et au déploiement de leurs infrastructures et de leurs réseaux

Commentaire : cet article prévoit la transmission à des tiers des informations détenues par les gestionnaires d'infrastructures et opérateurs de communications électroniques relatives à l'implantation et au déploiement de leurs infrastructures et de leurs réseaux.

La France s'est engagée dans un programme national de développement du très haut débit , qui a pour vocation de desservir l'ensemble du territoire, tout en s'efforçant de « monter en débit » sur le réseau haut débit existant. L'Union européenne s'est également dotée d'objectifs similaires.

Cette évolution, qui met en jeu tous les acteurs - opérateurs, collectivités territoriales et État -, s'étendra sur de nombreuses années. Des mesures ont été prises pour coordonner les travaux sur les infrastructures de réseaux , notamment dans la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique.

En vue de permettre une meilleure articulation des initiatives privées et publiques, et pour éviter les duplications inutiles d'infrastructures, il est impératif que les autorités chargées de l'aménagement du territoire disposent d'une connaissance fine et actualisée des réseaux et infrastructures en permanence.

C'est dans ce but que l'État, les communes, les départements, les régions, les syndicats d'énergie, d'eau et d'assainissements, et les groupements de collectivités coordonnent leurs efforts, notamment via les schémas directeurs territoriaux prévus par la loi précitée.

Outre l'élaboration de tels schémas, il paraît indispensable de disposer de données de masse interopérables pour mener à bien cette évolution. Cela suppose notamment que le format et la structure de ces données ne soient pas spécifiques à chacun des propriétaires de réseau, mais qu'elles partagent un protocole standardisé et qu'elles puissent être échangées. Cela suppose également que ces informations puissent être communiquées à des tiers concourant contractuellement avec ces personnes publiques à l'aménagement du territoire.

C'est à cet effet que la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie a introduit, dans son article 109 - codifié à l' article L. 33-7 du CPCE -, le droit pour l'État et les collectivités locales d'accéder à la connaissance des réseaux . Les modalités d'application de cet article étaient renvoyées à un décret .

Or, à la suite d'une requête déposée par la Fédération française des télécommunications (FFT), le Conseil d'État a partiellement annulé le décret n° 2009-167 du 12 février 2009 pris en application dudit article L. 33-7. Les dispositions visées portaient d'une part sur la communication de ces informations à des tiers et d'autre part sur le format et la structure des données. Elles ont été annulées au motif que le pouvoir réglementaire ne disposait d'aucune habilitation législative pour adopter de telles mesures.

Ces dispositions sont pourtant essentielles pour que le dispositif de « connaissance des réseaux » par les collectivités territoriales soit effectif, en particulier dans le cadre de la préparation des schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique ou dans le cadre de la mise en oeuvre de réseaux d'initiative publique (RIP). En effet, les collectivités ne disposent pas nécessairement des compétences techniques en interne pour traiter ces données. Elles ont donc besoin de pouvoir les communiquer à des bureaux d'études ou à leurs prestataires dans le cadre d'un RIP. En outre, il est important que ces données soient communiquées dans un format facilement utilisable par les systèmes d'information géographiques.

C'est en vue de pallier cette annulation partielle que notre collègue Hervé Maurey a fait adopter, dans la proposition de loi n° 676 (2009-2010) relative aux télécommunications :

- un article 1 er bis définissant le format numérique dans lequel ces données sont communiquées, pour qu'elles soient utilisables par les collectivités et autres personnes publiques concernées ;

- un article 1 er ter précisant explicitement que ces informations peuvent être communiquées à des tiers concourant, avec ces personnes publiques, à l'aménagement numérique du territoire.

M. Maurey a redéposé devant votre commission, dans le cadre du présent projet de loi , deux amendements visant à introduire également en son sein le contenu de ces deux dispositions. Cette dernière n'étant pas examinée en procédure accélérée, contrairement au présent texte, il lui a paru opportun de faire également figurer ces dispositions, dont une mise en oeuvre rapide est nécessaire , dans le présent texte. Celui-ci comportant en outre des mesures de transposition soumises à des délais-limites communautaires, il sera plus probablement adopté de façon définitive dans des délais plus rapprochés.

La commission n'a pas souhaité retenir le premier amendement , sur le format et la structure des données , car il lui a semblé qu'il serait excessivement contraignant , obligeant les gestionnaires et opérateurs à numériser l'ensemble de leurs données relatives à l'implantation et au déploiement de leurs infrastructures et de leurs réseaux, dont seule une partie a vocation à être transmise aux personnes publiques et à des tiers, et utilisée par ces derniers. Votre rapporteur s'est en revanche engagé envers l'auteur de cet amendement, qui soulève une réelle difficulté à laquelle il faut apporter une réponse, à travailler d'ici la séance publique en vue de trouver une rédaction suffisamment précise .

En revanche, la commission a adopté le second amendement qui modifie l'article L. 33-7 du CPCE de façon à autoriser le transfert de ces informations à des tiers concourant, avec les collectivités et l'État, à l'aménagement numérique du territoire. C'est l'objet de l'article additionnel 12 bis ainsi inséré.

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 13 - (article L. 131-1 [nouveau] du code des postes et communications électroniques) - Institution d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes

Commentaire : cet article institue un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP.

Anciennement Autorité de régulation des télécommunications (ART), l'ARCEP est une autorité administrative indépendante (AAI) chargée depuis le 5 janvier 1997 de réguler les télécommunications et le secteur postal en France.

Initialement composée de cinq membres, l'ARCEP est, depuis mai 2005, composée d'un collège de sept membres . Trois d'entre eux sont désignés par le président de la République et les quatre autres, respectivement, par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat.

Chargée d'accompagner l'ouverture du secteur des télécommunications, en régulant les marchés correspondants, l'ARCEP doit veiller à l'exercice d'une concurrence effective et loyale au bénéfice des consommateurs. Elle s'acquitte de cette tache soit par une régulation dite « asymétrique » parce qu'elle ne s'impose pas uniformément à tous les opérateurs présents sur le marché concerné, soit au contraire en fixant des obligations générales qui s'appliquent à l'ensemble des opérateurs, sous réserve de leur validation par le ministre en charge des télécommunications, au terme d'une régulation dite « symétrique » .

Elle dispose en outre d'un pouvoir de sanction à l'encontre des opérateurs ne remplissant pas leurs obligations, et d'une faculté d'intervention pour régler les différents entre opérateurs en matière d'accès au réseau (conditions techniques et tarifaires).

L'ARCEP veille également à l'attribution et à la gestion des ressources en fréquences et en numérotation . Elle détermine aussi les montants des contributions au financement des obligations de service universel et assure la surveillance des mécanismes de ce financement.

Enfin, l'ARCEP exerce, depuis 2005, des compétences dans le domaine postal . Elle veille ainsi à l'ouverture et au bon fonctionnement du marché des postes, en délivrant les autorisations d'exercer une activité postale, en émettant des avis rendus publics sur les tarifs et les objectifs de qualité du service universel ou encore en estimant le coût de la mission d'aménagement du territoire.

I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

C'est à l' initiative du Gouvernement que les députés ont créé un article 13 dans le projet de loi insérant, après l'article L. 131 du CPCE fixant le régime des membres de l'ARCEP, un article L. 131-1 instaurant auprès de cette dernière un commissaire du Gouvernement.

Le premier alinéa de ce nouvel article prévoit sa nomination par le ministre chargé des communications électroniques et des postes. Il lui donne pour mission de faire connaître les analyses du Gouvernement, en particulier en ce qui concerne la politique en matière postale et de communications électroniques. Il lui fait interdiction d'être par ailleurs commissaire du Gouvernement auprès de La Poste. Enfin, il précise qu'il ne prend pas part aux délibérations de l'Autorité.

Le second alinéa donne pouvoir au commissaire de faire inscrire de droit à l'ordre du jour de l'autorité toute question intéressant la politique en matière postale ou de communications électroniques ou entrant dans les compétences de l'autorité, sans que cette inscription puisse lui être refusée.

Défendant son amendement, le ministre en charge de l'industrie, M. Eric Besson, a fait valoir qu'il se justifiait par « les pouvoirs règlementaires étroitement imbriqués » de l'ARCEP et du Gouvernement « rendant indispensable un dialogue étroit entre les deux ». Citant trois exemples de cette proximité de compétence et d'action entre les deux institutions - la gestion des fréquences, le déploiement du très haut débit fixe et la protection du consommateur -, il a souligné que le commissaire « présentera le point de vue du Gouvernement sur les dossiers concernant l'exercice du pouvoir règlementaire sans participer (...) aux délibérations ».

Indiquant que la plupart des autorités indépendantes dotées d'un pouvoir règlementaire dans la sphère économique disposaient d'un tel commissaire, et que sa présence était préconisée par de multiples rapports du Parlement et du Conseil d'État, il a insisté sur le fait que son instauration ne constituerait « en aucun cas une remise en cause de l'indépendance de l'Autorité ».

Il est vrai que le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation sur les autorités administratives indépendantes, présenté par notre Patrice Gélard en juin 2006 24 ( * ) , proposait d'« assurer la présence d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'ensemble des autorités administratives indépendantes dotées d'un pouvoir réglementaire ». Il soulignait toutefois que, pour ceux alors existants, « les pouvoirs du commissaire du Gouvernement sont (...) limités, puisqu'il ne saurait participer aux délibérations de l'autorité ».

Quant au rapport du Comité d'évaluation et de contrôle de la législation sur les AAI, présenté en octobre 2010 par les députés René Dosière et Christian Vanneste 25 ( * ) , il demandait « la présence d'un commissaire du Gouvernement auprès de chaque autorité administrative indépendante », afin d'assurer « la cohérence de l'action publique », en précisant toutefois que cette recommandation valait « sauf exception justifiée » et « dans le respect de (l')indépendance » de chaque AAI.

II. La position de votre commission

Votre commission estime que le texte de l'article 13, tel qu'il ressort de l'examen par l'Assemblée nationale, est susceptible d'être lu comme contraire au cadre communautaire. De plus, son utilité n'apparaît pas évidente, au regard des relations existant déjà entre le Gouvernement et l'ARCEP. Dès lors, votre commission, sans remettre en cause le souhait légitime du Gouvernement de s'exprimer devant l'ARCEP sur des thématiques d'intérêt général, en a encadré les modalités afin que le dispositif adopté respecte le droit communautaire.

A. UNE PROPOSITION CONTRAIRE EN L'ÉTAT AU DROIT COMMUNAUTAIRE

Dans un courrier adressé au Gouvernement français, la Commission européenne a appelé la France à « reconsidérer le calendrier » prévu pour la nomination d'un commissaire auprès de l'ARCEP, un projet sur lequel elle a exprimé des « inquiétudes ».

Cette interrogation de la Commission européenne n'est pas surprenante dans la mesure où le dispositif prévu parait, du moins en l'état, contraire à la fois à la directive de 2009 et à la jurisprudence récente de la CJCE.

1. La possible contrariété avec la directive de 2009

Dans la directive 2009/140/CE du 25 novembre 2009 , faisant partie du troisième « paquet télécoms », l'Union européenne accroît son exigence d'indépendance et d'impartialité à l'égard des autorités nationales de régulation .

Cette exigence accrue d'indépendance est non seulement exprimée dans le considérant 13 de la directive, mais elle fait également l'objet d'un nouvel article 3 bis inséré dans le texte de la directive cadre :

- considérant 13 : « Il convient de renforcer l'indépendance des autorités réglementaires nationales afin d'assurer une application plus efficace du cadre réglementaire et d'accroître leur autorité et la prévisibilité de leurs décisions. À cet effet, il y a lieu de prévoir, en droit national, une disposition expresse garantissant que, dans l'exercice de ses fonctions, une autorité réglementaire nationale responsable de la régulation du marché ex ante ou du règlement des litiges entre entreprises est à l'abri de toute intervention extérieure ou pression politique susceptible de compromettre son impartialité dans l'appréciation des questions qui lui sont soumises » ;

- article 3 bis : « Les autorités réglementaires nationales responsables de la régulation du marché ex ante ou du règlement des litiges entre entreprises conformément à l'article 20 ou 21 de la présente directive agissent en toute indépendance et ne sollicitent ni n'acceptent d'instruction d'aucun autre organe en ce qui concerne l'accomplissement des tâches qui leur sont assignées en vertu du droit national transposant le droit communautaire ».

La nomination d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP pourvu des pouvoirs prévus par le texte de l'Assemblée nationale pourrait donc limiter les objectifs des textes communautaires les plus récents.

Par ailleurs, cette nomination semble contraire à la définition que donne la jurisprudence communautaire de l'indépendance des autorités de régulation.

2. La contrariété avec la jurisprudence communautaire

Dans un arrêt « Commission c/ Allemagne » du 9 mars 2010 , la Cour de justice des communautés européennes ( CJCE ) a eu l'occasion de définir une position en matière d' indépendance des autorités de contrôle vis-à-vis du Gouvernement . Dans cette affaire, la CJCE avait à se prononcer sur l'existence d'un contrôle du Gouvernement allemand sur les autorités chargées d'appliquer la réglementation relative à la protection des données personnelles. Ces autorités, qui constituent une sorte de CNIL, existent au sein de chaque Land allemand.

La CJCE a donc du interpréter la directive de 1995 relative à la protection des données. Cette directive prévoyait notamment l'indépendance des autorités de contrôle de ce domaine. La position adoptée par la Cour à cette occasion ne souffre aucune ambigüité quant à sa définition de l'indépendance d'une autorité de contrôle :

- cette indépendance s'entend aussi bien à l'égard des personnes privées que des autorités de l'État ;

- elle implique non seulement que l'organe concerné doive bénéficier d'un « statut qui lui assure la possibilité d'agir en toute liberté, à l'abri de toute instruction et de toute pression », mais, surtout, d'un « pouvoir décisionnel soustrait à toute influence extérieure à l'autorité de contrôle, qu'elle soit directe ou non ».

L' État allemand a donc été condamné pour manquement en raison du non-respect de l'indépendance de ces autorités de contrôle. Or, plusieurs éléments permettent d'affirmer que la position de la CJCE pourrait être la même concernant les effets de la nomination d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP :

- le texte de la directive de 2009, comme celui de la directive cadre de 2002, est bien plus exigeant en matière d'indépendance des autorités de régulation que la directive de 1995 relative à la protection des données ne l'est concernant les autorités de contrôle. Le degré d'indépendance exigé par la CJCE sera donc au moins aussi fort concernant une autorité de régulation telle que l'ARCEP qu'elle ne l'a été pour une autorité de contrôle ;

- de plus, la CJCE définit l'indépendance de ces autorités comme la protection de celles-ci contre toute forme de pression, d'influence, directe et indirecte . Certes, dans l'arrêt de 2010, l'Allemagne a été condamnée pour avoir placé les autorités de contrôle sous tutelle, ce qui est beaucoup plus intrusif que la nomination d'un commissaire du Gouvernement. Mais les pouvoirs conférés à ce dernier sont de nature à caractériser une atteinte à l'indépendance de l'ARCEP (maîtrise de l'ordre du jour, accès aux documents confidentiels, participation aux débats) ;

- enfin, le fait que l'ARCEP exerce une régulation de type asymétrique rend l'Union européenne encore plus exigeante concernant son indépendance. Dans ce contexte, la participation de l'État au capital de France Télécom et de La Poste est une circonstance qui n'est pas de nature à diminuer la présomption d'ingérence . Ces éléments doivent donc inciter à la plus grande prudence.

Il existe un risque substantiel que la CJCE, si elle était saisie, condamne la nomination d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'ARCEP. C'est la raison pour laquelle la Commission européenne a d'ores et déjà mis en garde la France avant même que le dispositif soit définitivement adopté.

B. UNE INITIATIVE PEU UTILE

1. L'existence de relations entre le Gouvernement et l'ARCEP

Depuis l'été 2010, plusieurs réunions de travail se sont tenues entre l'ARCEP et le Gouvernement, et selon les représentants de l'Autorité auditionnés, les contacts formels et informels fréquents .

Des représentants des services de l'État [direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS), direction générale des collectivités locales (DGCL), délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), commissariat général au Gouvernement (CGI)] participent ainsi systématiquement à toutes les réunions techniques et aux groupes de travail du « GRACO », groupe d'échange entre l'ARCEP, les collectivités territoriales et les opérateurs.

L'exercice par l'autorité de ses pouvoirs de régulation est toujours précédé de procédures de consultation publiques (publication d'un projet de décision, appel à contributions) lors desquelles le Gouvernement a l'opportunité de faire valoir son point de vue (y compris de façon confidentielle). Surtout, le Gouvernement a l'entière maîtrise de l'entrée en vigueur des décisions de l'ARCEP prises dans le cadre de ses pouvoirs de régulation symétrique, puisque celle-ci est subordonnée à son homologation par le ministre (article L. 36-6 du CPCE).

Très concrètement, la concertation a été particulièrement approfondie sur deux sujets d'importance :

- les fréquences. Les appels à candidatures pour les bandes 2.6 GHz et 800 MHz seront lancées par arrêté du ministre sur proposition de l'ARCEP (article  L. 42-2 du CPCE), et la concertation avec le Gouvernement a déjà permis de converger sur la définition de la procédure et de ses objectifs (aménagement numérique du territoire, concurrence sur le marché mobile, valorisation du patrimoine immatériel de l'État) ;

- le très haut débit . Le cadre réglementaire du déploiement et de la mutualisation du FttH dans les zones moins denses (décision du 10 janvier 2011), comme celui des zones très denses (janvier 2010), ont fait l'objet d'une phase intense de consultation sur plusieurs mois, notamment avec le Gouvernement, avant d'être homologués par le ministre.

2. L'encadrement des décisions de l'ARCEP

Il est à noter que l'indépendance des autorités de régulation connaît bien évidemment des limites.

Si ces dernières bénéficient d'une réelle indépendance à l'égard du politique, leurs décisions sont soumises à un double contrôle :

- celui de l'homologation par le ministre en charge des communications électroniques, qui « valide » les décisions à caractère règlementaire prises par chaque autorité afin des rendre applicables ;

- celui de la justice, les décisions des AAI étant soumises au respect de la loi et en tant que telles susceptibles de recours.

3. La comparaison avec les autres AAI

D'autres AAI ne disposent pas de commissaire au Gouvernement sans que cela induisent de difficultés dans les relations qu'elles entretiennent avec le Gouvernement :

- au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), l'absence de commissaire du gouvernement est couramment justifiée par le rôle particulier que joue cette institution gardienne de libertés de rang constitutionnel (liberté de communication et pluralisme des courants d'opinions).

Or, l'ARCEP, outre son rôle de régulateur économique, participe également à la protection d'une liberté de rang constitutionnel , la liberté d'expression, qui implique l'accès aux services de communication au public en ligne 26 ( * ) ;

- à la Commission de régulation de l'énergie ( CRE ), s'il existe bien formellement un commissaire du Gouvernement, celui-ci n'y a en réalité presque jamais siégé ces dernières années. En outre le troisième « paquet énergie » (directive 2009/72/CE), dont la transposition est en cours insiste sur l'indépendance du régulateur non seulement vis-à-vis des entreprises du secteur régulé mais surtout, désormais, vis-à-vis de l'État actionnaire.

C. Un dispositif susceptible d'être maintenu sous réserve d'un strict encadrement

Si le dispositif tel que voté par les députés paraît de façon flagrante contraire au droit communautaire, et s'il est au fond peu utile au regard des pratiques actuelles, il ne paraît au demeurant pas choquant de formaliser un droit pour le Gouvernement à s'exprimer devant l'ARCEP sur les sujets qui l'intéressent directement. Mais ce à condition de bien distinguer l'intervention de l'État régalien de l'État actionnaire , ce qui implique de revenir sur les pouvoirs conférés au commissaire du Gouvernement s'agissant de la maîtrise de l'ordre du jour de l'Autorité, de la présence à ses débats et de l'accès à des informations confidentielles.

Votre rapporteur pour avis estime que la rédaction de l'Assemblée nationale ne garantit pas l'indépendance de l'ARCEP . Il a donc cherché à entendre la demande du Gouvernement, soucieux de présenter son point de vue au collège, mais en cherchant un point d'équilibre tel que l'indépendance et l'impartialité de l'Autorité ne soient pas remises en cause.

L' amendement que votre commission a adopté vise en ce sens à préserver le droit du Gouvernement à s'exprimer devant l'ARCEP, tout en encadrant strictement ce pouvoir. A cet effet, il réécrit le nouvel article L. 131-1 du CPCE prévu par l'article 13 du présent projet de loi sur deux points principaux :

- le commissaire ne peut que proposer à l'Autorité d'inscrire un dossier à l' ordre du jour , celle-ci conservant la maitrise de sa fixation ;

- il ne peut accéder aux documents couverts par le secret professionnel et transmis à l'ARCEP, ni à l'instruction de procédures contentieuses par cette dernière.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 13 bis (nouveau) - Remise par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes d'un rapport au Parlement sur la qualité de service de l'accès à Internet, sur les marchés de l'interconnexion de données et sur les pratiques de gestion de trafic

Commentaire : cet article additionnel prévoit la remise par l'ARCEP au Parlement, d'ici la fin 2011, d'un rapport sur la qualité de service de l'accès à Internet, sur les marchés de l'interconnexion de données et sur les pratiques de gestion de trafic.

Le troisième « paquet télécoms » donne pouvoir à l'ARCEP de fixer « des exigences minimales en matière de qualité de service » . Cette compétence est codifiée, dans les projets d'ordonnances, à l' article L. 36-15 du CPCE . Elle est d'une grande importance puisqu'elle permet à l'autorité de régulation de fixer un « standard minimum de qualité » dans l'accès au réseau garanti à l'ensemble des utilisateurs, et participe ainsi au respect d'une forme de neutralité des réseaux.

Pour aussi importante qu'elle soit, cette disposition, rédigée nécessairement en termes généraux, est relativement imprécise : que doit-on entendre par « exigences minimales » ? A quel niveau les fixer ? Selon quelles méthodes ? Pour quels types de services et quels usages ?

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Plutôt que de vainement tenter de détailler ex ante le champ d'application de cette disposition, la rapporteure pour avis à l'Assemblée nationale, Mme Laure de la Raudière, a fait adopter un amendement renvoyant les précisions à un rapport de l'ARCEP , autorité qui aura à appliquer l'article L. 36-15.

Ainsi, cet amendement insère un article 15 dans un chapitre IV, intitulé « dispositions diverses », qui charge l'ARCEP de remettre au Parlement, avant le 30 juin 2011, un rapport sur les instruments et les procédures de mesure de la qualité de service de l'accès à l'Internet.

« La mesure de la qualité de service sur Internet ne semble pas aisée, et pourtant c'est un enjeu important, pour permettre à l'ARCEP de fixer par la suite des exigences minimales de qualité de service de l'Internet » explique l'auteure de l'amendement dans son exposé des motifs, qui poursuit : « Il semble donc nécessaire d'éclairer la représentation nationale sur la façon dont la mesure de la qualité de service sur Internet pourra être effectuée ».

II. La position de votre commission

Votre commission approuve l'initiative de l'Assemblée nationale consistant à charger l'ARCEP d'éclairer le Parlement sur les enjeux de la qualité de service de l'accès à Internet.

Elle a cependant décidé d' enrichir cette initiative , et ce :

- en renvoyant l'article additionnel ainsi créé après l'article 13 , ce qui permet de l'intégrer dans le chapitre III du projet de loi, qui traite des « dispositions relatives aux communications électroniques », alors que l'actuel article 15 prévoyant la remise d'un rapport par l'ARCEP est malencontreusement situé dans le chapitre IV, qui traite de « dispositions diverses ». La création du présent article additionnel s'accompagne donc de la suppression, à des fins de coordination et par ailleurs, de cet article 15 ;

- en intégrant dans le rapport l'examen d'autres thématiques liées au débat sur la neutralité de l'Internet et des réseaux, en particulier la situation des marchés de l'interconnexion entre opérateurs pour l'acheminement du trafic Internet et les pratiques de gestion de trafic mises en oeuvre par les opérateurs sur leurs réseaux ;

- enfin, en laissant un an à l'ARCEP pour élaborer ce rapport ainsi étoffé, ce qui lui permettra de le faire en pleine concertation avec les acteurs des secteurs concernés.

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

CHAPITRE IV - Dispositions diverses
Article 15 - Remise par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes d'un rapport au Parlement sur la qualité de service de l'accès à Internet

Commentaire : cet article prévoit la remise par l'ARCEP au Parlement, d'ici la mi-2011, d'un rapport sur la qualité de service de l'accès à Internet.

L'origine et le contenu de cet article ont été précisés dans les commentaires accompagnant l'article 13 bis .

Comme cela y est également indiqué, votre commission a souhaité à la fois en élargir le champ et le transférer du chapitre IV au chapitre III du projet, où il a davantage sa place.

Dès lors que ce transfert a été opéré par l'adoption de l'article 13 bis, elle a pu supprimer le présent article 15.

Votre commission a supprimé cet article.

*

* *

La commission a adopté le texte des articles 11, 11 bis , 12, 12 bis , 13, 13 bis et 15 dans la rédaction qu'elle vous propose.

ANNEXE I - EXAMEN EN COMMISSION DU RAPPORT POUR AVIS ADAPTATION DE LA LÉGISLATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES (MARDI 25 JANVIER 2011)

La commission examine le rapport de M. Bruno Retailleau et établit le texte qu'elle propose pour le projet de loi n° 2789 (2010-2011) relatif à l'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communication électroniques .

M. Daniel Raoul . - Il était convenu que le créneau de 14 à 15 heures du mardi serait sanctuarisé pour les réunions de groupe. Si je regrette l'horaire retenu aujourd'hui, je déplore tout aussi fortement la méthode de travail, car il n'est pas dans les habitudes de la commission que les amendements du rapporteur soient diffusés juste avant sa réunion.

M. Pierre Hérisson, président . - Je vous remercie d'avoir dit que ce n'était pas dans les habitudes de la commission.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis . - Je comprends parfaitement votre remarque. L'explication tient au fait que la commission des affaires sociales, qui est saisie au fond sur le reste du projet de loi, se réunit demain, mercredi, pour examiner le rapport et adopter son texte. Pour que nos propositions sur les articles pour lesquels nous avons une délégation au fond puissent être intégrées, nous avons dû anticiper ce jour la réunion initialement prévue la semaine prochaine.

J'en viens à présent au projet de loi. Le troisième « paquet télécoms » est composé de deux directives - que le texte tend, dans son article 11, à transposer - et d'un règlement qui s'impose directement aux États membres - adoptés le 25 novembre 2009. Plusieurs d'entre vous ont examiné les deux premiers de ces « paquets télécoms », le deuxième ayant débouché sur la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. Les premières étapes de l'ouverture du marché européen des télécommunications étaient inspirées par la libéralisation et le démantèlement des monopoles. Aujourd'hui, une régulation sectorielle est-elle encore pertinente ? Ou bien faut-il s'en tenir au droit commun et soumettre le secteur à la juridiction de l'Autorité de la concurrence ? L'option finalement retenue a été de renforcer la régulation sectorielle, car de nouveaux monopoles pourraient à nouveau émerger par la suite.

Sur la quinzaine d'articles que comporte le projet de loi, nous sommes saisis par délégation au fond des articles 11, 12, 13 et 15. Nous travaillons ici à une transposition par voie d'ordonnance, ce qui ne me pose aucun problème tant la technicité de la matière rend la transcription quasi automatique et réduit notre marge de manoeuvre. Cette transposition doit intervenir avant le 25 mai prochain. Nous disposons de la garantie ex ante qu'a constituée la grande consultation menée par le Gouvernement depuis mai 2010 sur les avant-projets d'ordonnances, et de la garantie ex post du projet de loi de ratification, qui nous redonnera la main sur ce que l'Exécutif aura fait. Nous pouvons donc accepter le recours à la procédure d'habilitation sans que le rôle du Parlement soit amoindri.

Les grands chapitres de cette transposition sont techniques.

M. Daniel Raoul . - Pas tous !

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis . - S'agissant tout d'abord du renforcement de la régulation, il y aura une nouvelle articulation entre les régulateurs nationaux et le groupe des régulateurs européens. Le renforcement de l'échelon européen ne gênera pas notre régulateur, qui s'est inscrit dans une pratique positive de ce point de vue. On réaffirme également l'indépendance et l'impartialité des autorités de régulation nationales.

M. Daniel Raoul . - C'est contradictoire avec l'article 13.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis . - Je reviendrai, à propos de la neutralité de l'Internet, sur les nouveaux pouvoirs conférés aux régulateurs nationaux.

Deuxième grand chapitre, on encourage la fluidité dans la gestion du spectre radioélectrique. Bruxelles a une conception très théorique de la neutralité technique et il a fallu lutter pied à pied pour que cela reste au niveau national ; trop de dogmatisme aboutirait à des brouillages.

M. Daniel Raoul . - On peut être d'accord sur cela.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis . - Troisième grand chapitre, la neutralité des réseaux. La notion de neutralité est consacrée. Schématiquement, les tuyaux qui transportent les informations sont posés par des industriels...

M. Daniel Raoul . - Et des collectivités !

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis . - En effet. Il y a un risque d'engorgement des réseaux : les échanges de données sur les mobiles ont décuplé en deux ans. Inversement, il y a un risque de verrouillage par les opérateurs. La neutralité est essentielle pour qu'Internet reste ouvert. Le texte apporte des outils à cet égard. Le régulateur pourra en effet exiger la transparence sur la gestion du trafic par les opérateurs ; il pourra fixer et contrôler un seuil minimal de qualité de service, c'est nouveau et complexe ; il reçoit par ailleurs un pouvoir de règlement des différends entre les opérateurs et les fournisseurs de services.

Le quatrième chapitre traduit la tendance actuelle du droit communautaire à se saisir des dossiers de consommation. Le changement d'opérateur est facilité, la portabilité, qu'avait prévue la loi Chatel, étant de un mois au maximum. L'ergonomie des terminaux sera facilitée pour les handicapés. Quant aux cookies, qui permettent de personnaliser les publicités, on passe du désabonnement au consentement : on pourra donc les refuser.

La sécurité des réseaux, ensuite. Pour la première fois, le ministre en charge du secteur pourra imposer à un opérateur un contrôle par un organisme tiers indépendant. Des règles de résilience sont énoncées pour garantir un retour à la normale après l'attaque d'un réseau.

Nous sommes sensibles au sixième chapitre, qui porte sur le service universel. La référence à un débit minimum de 56 kbit/s est supprimée. Cela aura-t-il des conséquences pratiques ? Je ne le pense pas.

D'autres mesures n'étaient pas imposées par la directive, comme la portée du spectre. L'Agence nationale des fréquences (ANFR) pourra suspendre des accords d'implantation d'antennes afin d'éviter les brouillages, l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information (ANSSI) veillant à la sécurité des réseaux.

L'article 12 a été introduit à l'Assemblée nationale à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité sur l'attribution et la gestion des noms de domaine. Le législateur n'avait pas, en effet, suffisamment garanti la liberté d'entreprendre et celle de pensée, et doit y remédier avant le 1er juillet selon les prescriptions du juge constitutionnel. Nous complétons à cette fin la rédaction votée par les députés.

Nous reparlerons de l'article 13 et du commissaire du Gouvernement auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes (Arcep), prévu par un amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale. L'article 15, enfin, prévoit un rapport au Parlement sur la qualité du service de l'accès à Internet.

Je vous propose d'adopter conforme l'article 11, qui définit le champ de l'habilitation. Je présenterai quatre amendements sur l'article 12, afin de renforcer la base juridique des noms de domaine français et assurer la protection des termes correspondant aux noms de communes, d'institutions publiques ou de marques commerciales. Nous essayons ainsi de trouver un juste équilibre entre la liberté de communication et la liberté d'entreprendre, d'une part, et la protection des intérêts des collectivités publiques, d'autre part. Une attention particulière a également été apportée à la situation des noms de domaine enregistrés sous les extensions ultramarines.

L'article 13 est extrêmement débattu. J'ai écouté l'Arcep et le Gouvernement, j'ai saisi la commissaire européenne en charge de la société numérique, Nelly Kroes, et eu des contacts avec son cabinet. La rédaction de l'Assemblée nationale ne garantit pas l'indépendance de l'Arcep. Il ne s'agit pas de plier face à une exigence, mais de donner les moyens de son efficacité à une institution qui a bien travaillé depuis qu'elle existe. Elle intervient en effet dans un champ économique capital, vaste et qui crée des emplois. Nous avons donc cherché à entendre la demande du Gouvernement soucieux de présenter son point de vue au collège, mais en trouvant un point d'équilibre tel que l'indépendance et l'impartialité de l'Autorité ne soient pas remises en cause. L'amendement que je vous présenterai apporte des garanties en encadrant strictement l'intervention du commissaire du Gouvernement.

L'article 15 est important. L'Assemblée nationale a souhaité un rapport sur la qualité de service de l'accès à Internet, notion qui reste en effet à éclairer. Le concept de neutralité intéresse, lui, la relation entre le constructeur de réseau et le producteur de contenu. Or il faut, pour légiférer efficacement en la matière, savoir ce qu'est le marché de l'interconnexion ; c'est pourquoi nous élargissons le champ du rapport demandé à l'Arcep.

Enfin, en insérant un article additionnel après l'article 11, nous proposons à l'Arcep un outil de non-discrimination. Alors que le consommateur doit être informé sur les pratiques de gestion du trafic, la non-discrimination ne figurait pas dans les missions de l'Arcep. Et puisque, à ma grande surprise, les représentants de toutes les parties l'acceptent, il faut s'empresser d'inscrire ce point d'équilibre dans le texte.

M. Michel Teston . - Sur la forme, j'ai entendu ce qu'a dit le rapporteur sur le recours aux ordonnances. Toutefois, s'agissant de directives adoptées le 25 novembre 2009, le Gouvernement avait largement le temps de procéder à cette transposition par la voie législative, ainsi que je l'ai souligné dans ma question orale du 11 janvier dernier.

Nous avons déjà débattu en 2008 de la séparation fonctionnelle entre réseau et service. Nous n'y sommes pas favorables parce que nous en avons vu les conséquences dans les transports ou encore dans l'énergie. Or, le troisième « paquet télécoms » ne tranche pas vraiment : il ouvre une possibilité sans créer une obligation. Dans ce débat, je me range, non avec les partisans de la séparation fonctionnelle, mais avec ceux qui craignent qu'on ralentisse les investissements dans la fibre optique tout en renchérissant l'accès au réseau.

Pour la gestion du spectre, est recherchée l'application contraignante des principes de neutralité technologique - liberté d'utiliser n'importe quel type de technologie sur une bande de fréquence donnée - et de neutralité des services - liberté d'utiliser le spectre pour fournir n'importe quel service -. Nous constatons cette évolution, en nous interrogeant sur la volonté des institutions européennes de ne pas poser les questions du dividende numérique et du service universel. Ce dernier n'existe que pour le téléphone fixe, alors qu'il constituerait la meilleure garantie possible pour les utilisateurs.

L'article 13 résulte d'un amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale. L'institution d'un commissaire du Gouvernement à l'Arcep est-elle une bonne solution ? Lors de ses voeux, le président de l'Arcep a dit qu'il fallait éviter une confusion regrettable : les rôles du régulateur et de l'État actionnaire doivent être soigneusement séparés, sauf à porter atteinte à la régulation. J'ai bien noté ce que vous avez dit de votre amendement. Puisque les autorités administratives fleurissent, qu'elles soient véritablement indépendantes !

M. Daniel Raoul . - Aux termes de l'article 11 du projet de loi, la majorité des fréquences reste affectée au système audiovisuel. Comment poser au détour d'un article une règle contraire à l'esprit du texte et qui peut conduire à des blocages ?

On a déjà eu le débat sur les fameuses autorités indépendantes, dont on sait toute l'actualité dans le domaine de la santé. Que devient cette indépendance avec un commissaire du Gouvernement ? C'est has been puisqu'on nomme désormais des gens indépendamment de leurs compétences, et sans doute indispensable dans la perspective de septembre 2011 l'on vient de le voir dans l'audiovisuel - mais cette cuisine politicienne n'honore pas le Sénat. Dès lors que tout circule sur la fibre optique, la neutralité me semblerait vouloir qu'on fusionne le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et l'Arcep.

Vous proposez un rapport de l'Arcep ? Votre refus des rapports est donc à géométrie variable...

M. Hervé Maurey . - Le service universel est le grand absent de la transposition. On peut le regretter. On aurait opposé le redoutable article 40 à l'amendement que j'avais pensé déposer. Pourquoi ne pas inclure le haut débit dans le service universel ? Le débat vaut d'être ouvert.

Je n'ai pas la religion des autorités indépendantes : il y en a beaucoup, qui ont beaucoup de pouvoir et l'État se défausse sur elles. Cela dit, l'apparition impromptue d'un commissaire du Gouvernement est assez choquante. Elle pose le problème de l'indépendance de l'autorité puisque l'État est le principal actionnaire d'un des opérateurs. Je m'inquiète quand je lis que l'État souhaite que le dividende numérique soit affecté en fonction de la rentabilité plus que de l'aménagement du territoire, et mon inquiétude grandit encore quand l'un des opérateurs déclare, lors des voeux du président de l'Arcep, que l'on « remet ainsi l'église au centre du village ».

M. Daniel Raoul . - Très bien !

M. Bruno Sido . - J'assistais aux voeux du président de l'Arcep. Le brouhaha était tel que je n'ai rien entendu de son discours - il a d'ailleurs répondu ensuite à côté de ma question. Nous connaissons bien les commissaires du Gouvernement dans les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), où ils ont un pouvoir considérable. Il s'agit de savoir ce qui se passe. La Haute-Marne met en place de la fibre optique. Je n'ai pas de problème pour couvrir les zones blanches, car les collectivités peuvent elles-mêmes devenir opérateurs et ainsi « allumer » des fibres optiques. Mais dans les villages desservis en ADSL, c'est une montée en débit qui est nécessaire, sur laquelle l'Arcep doit donner le « mode d'emploi ». Or, sa décision est sans cesse repoussée depuis six mois ! En tant que président de conseil général, j'ai posé la fibre optique, mais je ne peux satisfaire tous mes habitants car ces messieurs prennent tout leur temps pour discuter. Il faut leur mettre l'épée dans les reins, parce que nous avons besoin de réponses, et le commissaire du Gouvernement peut s'en charger. L'Arcep doit travailler jour et nuit. Bien sûr, il faut veiller à ce que la rédaction soit conforme à la directive européenne, mais il faut que quelqu'un soit l'aiguillon.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis . - S'agissant de la séparation fonctionnelle, vous avez parlé d'un remède exceptionnel pour une situation exceptionnelle : l'Arcep n'est pas près d'appliquer cette disposition.

Je partage l'avis de Daniel Raoul et Michel Teston sur la gestion du spectre. La neutralité du service bute en effet sur le problème du brouillage. On ne peut utiliser les fréquences n'importe comment. Le principe de réalité s'impose avec les brouillages, dès que cohabitent télévision, radio, Défense nationale. Les industriels doivent pouvoir compter sur une standardisation des terminaux, pour régler les puces sur des fréquences stables. Cependant, ces lubies européennes restent sans conséquence...

Le monde de l'Internet est fort mal connu et aucun parlementaire ne peut percer entièrement ses secrets. Le régulateur doit donc nous dire qui paye quoi dans la bande passante.

S'agissant enfin de l'article 13, les fréquences sont un bien public. Que le Gouvernement dise devant le collège ce qu'il pense de leur utilisation ne me choque donc pas, à la différence de ce qui est proposé s'agissant de sa maîtrise de l'ordre du jour, de sa présence à tous les débats et de l'accès à des informations confidentielles. L'État, actionnaire de France Télécom et de la Poste, ne peut pas être juge et partie ; ma rédaction, qui est euro-compatible, garantit cela.

On pourra discuter du service universel, dans lequel nous ne savons pas mettre le mobile et l'accès à Internet. Je vous rejoins enfin sur la montée en débit, qui est absolument nécessaire.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 11

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - L'amendement n° COM-1 supprimant l'article, j'y suis défavorable.

L'amendement n° COM-1 est rejeté.

Article 11

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Michel Teston et plusieurs de ses collègues

COM-1

Suppression de l'article

Défavorable

L'article 11 est adopté sans modification.

Article additionnel après l'article 11

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - L'amendement n° COM-12 consacre l'objectif de non-discrimination.

M. Michel Teston . - Nous en comprenons l'esprit, mais est-ce suffisant en l'absence de service universel ? Nous en doutons.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Le service universel garantit en tout point du territoire des conditions tarifaires acceptables pour l'accès à un service. La non-discrimination est tout autre chose : les citoyens qui ont déjà accès au service ne doivent pas être discriminés dans l'acheminement du trafic.

M. Michel Teston . - Nous nous abstiendrons.

L'amendement n° COM-12 est adopté.

L'article additionnel est inséré .

Article additionnel après l'article 11

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-12

Pouvoirs de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) en matière de neutralité des réseaux

Adopté

Article 12

L'amendement n° COM-13 est adopté.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - L'amendement n° COM-18 traite du régime des noms de domaine.

L'amendement n° COM-18 est adopté.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - L'amendement n° COM-14 clarifie ce même régime.

L'amendement n° COM-14 est adopté.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Toujours les noms de domaine, cet amendement sera particulièrement utile au développement des extensions ultramarines, notamment pour la Martinique, la Réunion et Saint-Pierre et Miquelon.

M. Charles Revet . - Tout le monde est d'accord !

L'amendement n° COM-15 est adopté.

L'article 12 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 12

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-13

Rappel de l'objectif d'intérêt général de la mission d'attribution des noms de domaine dont sont chargés les offices d'enregistrement

Adopté

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-18

Précision par décret des critères de bonne foi et d'intérêt légitime permettant d'enregistrer certains noms protégés

Adopté

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-14

Garantie du caractère impartial et contradictoire des procédures de résolution des litiges faisant intervenir des tiers à la demande des offices

Adopté

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-15

Report au 31 décembre 2011 de l'opposabilité des nouveaux principes d'attribution des noms de domaine pour les offices qui exercent actuellement leur activité sans avoir fait l'objet d'une désignation

Adopté

Article additionnel après l'article 12

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Je serais favorable à l'amendement n° COM-2 d'Hervé Maurey s'il était rectifié pour prévoir un décret, parce qu'il est irréaliste de demander aux opérateurs de tout numériser.

M. Michel Teston . - Il faut être cohérent. Nous demandons depuis toujours que ces informations nous soient fournies.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Il ne faut pas leur imposer de numériser toutes leurs informations, mais seulement celles qu'ils doivent nous transmettre.

M. Daniel Raoul . - Ce ne sont pas des données confidentielles et les collectivités veulent savoir qui fait quoi !

M. Hervé Maurey . - Cet amendement a été adopté par le Sénat dans la proposition de loi de notre collègue Daniel Marsin sur les télécommunications. Mais comme elle n'est pas près d'être adoptée définitivement, je le redépose ici.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Je vous propose d'y retravailler ensemble pour lui donner une forme acceptable.

M. Michel Teston . - Oui, mais à condition que ce ne soit pas une façon d'enterrer le dossier !

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Je préfère que nous ne votions pas cet amendement et que nous le retravaillions ensemble d'ici la séance.

L'amendement n° COM-2 est retiré.

L'amendement n° COM-3 est adopté.

L'article additionnel est inséré.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - A vant de nous prononcer sur l'amendement n° COM-4, je propose que nous attendions qu'Hervé Maurey et Bruno Sido, qui mènent actuellement des auditions sur la couverture numérique du territoire, notamment en téléphonie mobile, aient progressé dans leur réflexion.

M. Bruno Sido . - Quinze jours !

M. Hervé Maurey . - Cet amendement a également été adopté dans la proposition de loi Marsin. Je le retire mais une « opération vérité » est nécessaire : on ne peut pas considérer qu'une commune est entièrement couverte si elle possède seulement un point de couverture !

L'amendement n° COM-4 est retiré.

Article additionnel après l'article 12

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Hervé Maurey

COM-2

Obligation pour les gestionnaires d'infrastructures et opérateurs de communications électroniques de numériser leurs informations relatives au déploiement de leurs infrastructures et réseaux d'ici le 31 décembre 2012

Retiré

M. Hervé Maurey

COM-3

Transmission à des tiers des informations détenues par les gestionnaires d'infrastructures et opérateurs de communications électroniques relatives à l'implantation et au déploiement de leurs infrastructures et de leurs réseaux

Favorable

M. Hervé Maurey

COM-4

Modalités de mesure des zones communales de couverture en téléphonie mobile

Retiré

Article 13

M. Pierre Hérisson , président . - Je propose de mettre en discussion commune les amendements n° s COM-16, COM-6 et COM-5.

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Les amendements n° COM-6 et COM-5 suppriment l'article 13, qui institue le commissaire du Gouvernement auprès de l'Arcep, mais mon amendement n° COM-16 tend à maintenir l'article tout en prévenant toute possibilité d'ingérence dudit commissaire auprès de l'Autorité. Il ne peut modifier l'ordre du jour de lui-même, doit se retirer lors des délibérations et n'a accès ni aux informations sur le secret des affaires, ni aux sujets contentieux.

M. Michel Teston . - Nous en faisons une question de principe : il ne faut pas de confusion entre l'État régulateur et l'État tuteur, donc pas de commissaire du Gouvernement auprès de l'Arcep. Nous ne voterons pas l'amendement de repli du rapporteur.

M. Bruno Sido . - Pourquoi écrivez-vous dans votre amendement n° COM-16 que le commissaire du Gouvernement « se retire lors des délibérations » ?

M. Bruno Retailleau , rapporteur pour avis . - Parce que le secret de ses débats est essentiel à l'indépendance de l'Arcep. La Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a déjà condamné l'Allemagne à ce sujet.

L'amendement n° COM-16 est adopté.

Les amendements n° s COM-6 et COM-5 deviennent sans objet.

L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 13

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-16

Encadrement de l'institution auprès de l'Arcep d'un commissaire du Gouvernement

Adopté

M. Michel Teston et les membres du groupe socialiste, rattachés et apparentés

COM-6

Suppression de l'article

Tombé

M. Hervé Maurey

COM-5

Suppression de l'article

Tombé

Article additionnel après l'article 13

L'amendement n° COM-11 est adopté.

L'article additionnel est inséré.

Article additionnel après l'article 13

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-11

Extension du champ du rapport confié à l'Arcep sur la qualité de service de l'accès à l'internet

Adopté

Article 15

L'amendement de coordination n° COM-17 est adopté.

L'article 15 est supprimé.

Article 15

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis

COM-17

Amendement de suppression

Adopté

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission, les membres du groupe socialiste, rattachés et apparentés s'abstenant.

ANNEXE II - AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Projet de loi

N° 225 (2010-2011)

PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ADAPTATION DE LA LÉGISLATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

CEDDAT

003

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par

M. MAUREY

Article additionnel après l'article 12

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le premier alinéa de l'article L. 33-7 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les gestionnaires d'infrastructures de communications électroniques et les opérateurs de communications électroniques sont tenus de détenir les informations relatives à l'implantation et au déploiement de leurs infrastructures et de leurs réseaux sous forme de données numériques vectorielles géolocalisées pouvant être reprises dans des systèmes d'informations géographiques et suivant un format largement répandu, avant le 31 décembre 2012. »

Objet

La France est engagée dans un Programme national Très haut débit qui a pour vocation de desservir l'ensemble du territoire. L'Europe s'est également dotée d'objectifs pour monter vers le très haut débit. Cette évolution met en jeu tous les acteurs : opérateurs, collectivités territoriales et l'État.

L'évolution concerne la mise en place de nouveaux réseaux très haut débit, mais aussi l'amélioration des réseaux existants. Elle s'étalera sur de nombreuses années. De nombreuses mesures ont été prises pour coordonner les travaux sur les infrastructures de divers réseaux, notamment dans la loi relative à la lutte contre la fracture numérique.

Pour permettre une meilleure articulation des initiatives privées et publiques, et pour éviter les duplications inutiles d'infrastructures, il est impératif que les autorités chargées de l'aménagement du territoire disposent d'une connaissance fine, actualisée en permanence. L'État, les communes, les départements, les régions, les syndicats d'énergie, d'eau et d'assainissements, les groupements de collectivités sont amenés à coordonner leurs efforts, notamment via les schémas directeurs territoriaux. Il est indispensable de disposer d'outils de traitement de masses et interopérables pour mener à bien cette évolution. Cela suppose notamment que le format et la structure des données ne soient pas spécifiques à chacun des propriétaires de réseau.

Cet effort porte sur l'ensemble des gestionnaires d'infrastructures et de réseaux, publics et privés, au bénéfice de l'intérêt général.

Le décret de février 2009, en partie annulée, prévoyait d'obliger les opérateurs à effectuer ce travail sur leurs informations avant le 1 er juillet 2011. Ils ont donc eu le temps de s'y préparer avant l'annulation du décret.

Projet de loi

N° 225 (2010-2011)

PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ADAPTATION DE LA LÉGISLATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

CEDDAT

007

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article 12

Alinéa 9 (article L. 45-1)

Après les mots : « attribués et gérés », insérer les mots « dans l'intérêt général »

Objet

Le caractère d'intérêt général de l'activité des offices d'enregistrement résulte de la nature des missions qui leur sont confiées : ils définissent des règles transparentes et équitables de gestion et d'attribution des noms de domaine et organisent la régulation d'une ressource rare à la fois enjeu économique et support de la liberté d'expression, selon les termes mêmes de la décision 2010-45 QPC du Conseil constitutionnel du 6 octobre 2010.

L'ancien article L. 45 du Code des postes et des communications électroniques mentionnait ainsi expressément que : « L'attribution d'un nom de domaine est assurée par [les offices d'enregistrement] dans l'intérêt général , selon des règles non discriminatoires rendues publiques (...). »

Cet amendement vise donc à réparer cette omission en rétablissant ces termes dans la nouvelle rédaction de l'article L. 45-1.

Projet de loi

N° 225 (2010-2011)

PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ADAPTATION DE LA LÉGISLATION AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

CEDDAT

008

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article 12

Alinéa 29 (article L. 45-6)

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

« Le règlement intérieur fixe notamment les règles déontologiques applicables aux tiers et garantit le caractère impartial et contradictoire de leur intervention. »

Objet

Le projet de nouvelle rédaction confirme la possibilité pour les tiers intéressés de s'adresser à l'office d'enregistrement afin d'obtenir la suppression ou le transfert d'un nom de domaine portant atteinte à leurs droits. Si c'est bien à l'office qu'il revient de prendre in fine ces décisions, celui-ci peut recourir à un organisme tiers pour instruire et arbitrer les litiges.

Ces dispositions visent à valider la pratique actuelle de l'office d'enregistrement du « .fr », l'AFNIC ayant mis en place des procédures alternatives de règlement des litiges, plus rapides, moins onéreuses et souvent plus efficaces que le recours au juge. Ainsi, la principale procédure de résolution des litiges utilisée aujourd'hui reste l'arbitrage par « décision technique » confiée à l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).

Néanmoins, le choix des arbitres et les règles de ces procédures de résolution des litiges par des tiers devraient être bien mieux encadrées par la loi pour garantir les droits et libertés des particuliers .

Projet de loi

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EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

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009

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article 12

Alinéa 35

Après l'alinéa 35, insérer un paragraphe ainsi rédigé:

« Dans l'attente de la désignation prévue à l'article L. 45 du code des postes et des communications électroniques, les articles L. 45 à L. 45-8 sont opposables à compter du 31 décembre 2011 aux organismes qui assument les fonctions d'office ou de bureau d'enregistrement pour les domaines de premier niveau visés à l'article L. 45. »

Objet

Depuis 2004, les désignations d'offices d'enregistrement pour les domaines comme .re (Réunion), .mq (Martinique) ou .pm (St Pierre et Miquelon) n'ont toujours pas eu lieu. On peut s'attendre à ce qu'ils n'interviennent pas avant plusieurs années.

Ce décalage crée des incertitudes juridiques. Les dispositions des articles L. 45 et suivant sont-elles dès lors applicables ? Un titulaire ou un ayant-droit peut-il se prévaloir du texte devant la justice ou devant la personne morale qui gère au quotidien le domaine de premier niveau ?

Or la situation de ces extensions dites ultramarines est critique. C'est notamment le cas du .mq pour la Martinique. Techniquement, sa configuration est instable et très vulnérable. Il était encore très récemment impossible d'enregistrer des noms de domaine. Sans parler du tarif extrêmement élevé quand on le compare au .fr. Le Conseil Régional, la Chambre de Commerce et d'Industrie et des associations de professionnels locaux du secteur informatique ont fait part de leurs préoccupations depuis des années, et signalé notamment en 2008 ces problèmes en réponse à une consultation publique du Ministère de l'Industrie.

L'adoption de cet amendement donnerait aux parties concernées (au plan local ou national) le pouvoir de corriger les défaillances techniques constatées sur .mq par exemple, et de relancer rapidement le développement des autres extensions.

Projet de loi

N° 225 (2010-2011)

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EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

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010

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article additionnel après l'article 13

Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes remet au Gouvernement et au Parlement, au plus tard un an suivant la promulgation de la présente loi, un rapport portant sur :

- les instruments et les procédures de suivi de la qualité de service de l'accès à l'internet ;

- la situation des marchés de l'interconnexion de données et leurs perspectives d'évolution ;

- les pratiques de gestion de trafic mises en oeuvre par les opérateurs de communications électroniques.

Objet

L'article 15 du projet de loi prévoit de demander à l'ARCEP la préparation d'un rapport à remettre au Parlement concernant les instruments et procédures de mesure de la qualité de service de l'accès à l'internet. Cette disposition a vocation à accompagner le pouvoir que le troisième « paquet télécoms » va donner à l'ARCEP de fixer des exigences minimales de qualité de service sur l'internet public.

Ce nouveau pouvoir répond en particulier aux préoccupations liées au débat sur la neutralité d'Internet et des réseaux, associé à la préoccupation de préserver le caractère universel et ouvert de l'internet.

Il apparaît utile que ce rapport intègre l'examen d'autres thématiques liées au débat sur la neutralité de l'internet et des réseaux, en particulier la situation des marchés de l'interconnexion entre opérateurs pour l'acheminement du trafic Internet et les pratiques de gestion de trafic mises en oeuvre par les opérateurs sur leurs réseaux.

Enfin, il est proposé de laisser un an à l'ARCEP pour élaborer ce rapport ainsi étoffé, ce qui lui permettra également de l'élaborer en pleine concertation avec les acteurs des secteurs concernés.

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N° 225 (2010-2011)

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EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

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011

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article additionnel après l'article 11

Après le 4° du II de l'article L. 32-1 du code des postes et communications électroniques, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :

bis A l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans les relations entre opérateurs et fournisseurs de services de communications au public en ligne pour l'acheminement du trafic et l'accès à ces services ;

Objet

Quelques dispositions traitent du sujet capital de la "neutralité des réseaux" dans le « paquet télécom ». Cependant, elles ne paraissent pas suffisantes pour donner réellement au régulateur national les moyens incontestables d'intervenir en cas de traitement différencié entre opérateurs et fournisseurs de contenus sur l'acheminement du trafic.

Un certain nombre de travaux ont été menés sur ce sujet d'une importance croissante, et ont dessiné des pistes pour mieux encadrer les pratiques discriminatoires dans l'accès au réseau.

Il semble désormais opportun d'adopter un dispositif législatif, aussi léger que souple, de nature à prévenir ou empêcher ce type de pratiques, et garantir ainsi un usage libre et neutre des réseaux.

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012

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article 13

Rédiger ainsi cet article :

Après l'article L. 131 du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un article L. 131-1 ainsi rédigé :

Art. L. 131-1. - Un commissaire du Gouvernement auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, nommé par les ministres chargés des communications électroniques et des postes, fait connaître les analyses du Gouvernement, en particulier en ce qui concerne la politique en matière postale et de communications électroniques. Il ne peut être simultanément commissaire du Gouvernement auprès de La Poste. Il se retire lors des délibérations de l'autorité.

Il peut proposer à l'Autorité de faire inscrire à son ordre du jour toute question intéressant la politique en matière postale ou de communications électroniques.

Il ne peut avoir accès ni aux informations couvertes par le secret des affaires transmises à l'Autorité dans le cadre de l'exercice de ses missions, ni aux dossiers relevant des procédures menées par l'Autorité en application des articles L. 32-4, L. 36-8 et L. 36-11 du présent code.

Objet

L'institution d'un commissaire du Gouvernement auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) ne doit pas porter atteinte à son indépendance, nécessaire à l'exercice effectif de ses compétences et dont le principe vient d'être renforcé par le nouveau paquet de directives communautaires relatives aux communications électroniques, qu'il convient d'interpréter à la lumière de l'arrêt du 9 mars 2010 de la Cour de justice de l'union européenne.

Ainsi, le présent amendement a pour objet de supprimer toute possibilité d'ingérence ou d'influence du représentant du Gouvernement dans les débats, discussions et délibérations de l'Autorité, sa présence étant laissée à la discrétion de l'Autorité, afin de respecter les critères définis par la Cour de justice de l'union européenne. De même, toujours à la lumière de ces critères, le Gouvernement ne peut pas imposer à l'Autorité tout ou partie de l'ordre du jour de ses réunions. Enfin, il est fait interdiction au commissaire d'accéder aux documents remis confidentiellement à l'ARCEP par les opérateurs.

Projet de loi

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EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

CEDDAT

013

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article 15

Supprimer cet article.

Objet

Amendement de coordination. Le contenu de cet article est renvoyé par un précédent amendement après l'article 13, dans le chapitre III du projet de loi, où il a davantage sa place.

Projet de loi

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EN MATIÈRE DE SANTÉ, DE TRAVAIL ET DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

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014

COMMISSION DE L'ÉCONOMIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

(Dispositions relatives aux communications électroniques : Chapitre III, articles 11, 12, 13 et Chapitre IV, article 15)

AMENDEMENT

Présenté par M. Bruno RETAILLEAU, rapporteur pour avis

Article 12

Alinéa 16 (article L. 45-2)

Après l'alinéa 16, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 45-7 et les règles d'attribution de chaque office d'enregistrement définissent les éléments permettant d'établir un usage de mauvaise foi et l'absence d'intérêt légitime. »

Objet

Amendement de précision.

Le texte proposé par l'Assemblée répond au souci de trouver un équilibre entre :

- une part la liberté de communication, rappelée par le Conseil constitutionnel, qui impose que les titulaires puissent choisir leurs noms de domaine sans contraintes disproportionnées ;

- d'autre part la nécessité d'éviter les pratiques de « cyber-squattage » (enregistrement abusif de certains noms de domaine par des tiers à des fins purement lucratives).

Cet amendement vise donc à préciser que les critères de « bonne foi » et d' « intérêt légitime » devront être précisés par le pouvoir réglementaire et par les registres.

Ils pourront ainsi utilement s'inspirer des règles en vigueur pour les noms de domaine sous l'extension « .eu », où la mauvaise foi du titulaire d'un nom de domaine peut être démontrée, notamment :

- lorsque que le nom de domaine a été enregistré principalement pour le revendre à des fins spéculatives,

- lorsqu'il n'est pas exploité pendant une longue période de temps (pratiques de « parking »),

- lorsqu'il est enregistré dans le but d'entretenir la confusion avec celui d'une entreprise ou d'une collectivité, ou dans le but de perturber leurs activités,

- lorsque le titulaire a déjà fait l'objet de plusieurs procédures d'arbitrage, ou a enregistré un nombre très important de noms de domaines génériques.

ANNEXE III - LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

Jeudi 20 janvier 2011

- UFC - Que choisir : M. Edouard Barreira , chargé d'études pour les technologies de l'information et de la communication (TIC) ;

- Groupement des éditeurs de services en ligne (GESTE) : MM. Etienne Drouard , avocat chez Morgan Lewis & Bockius, président de la commission juridique, et Guillaume Monnet , juriste ;

- France Télécom - Orange : MM. Pierre Louette , secrétaire général, Éric Debroeck , directeur de la réglementation, Michaël Trabbia , directeur adjoint des affaires publiques, et Mme Florence Chinaud , directeur des relations institutionnelles ;

- ARCEP : MM. Jean-Ludovic Silicani , président, Philippe Distler , directeur général, Michel Combot , directeur général adjoint, et Guillaume Meheut , chargé de mission auprès du président ;

- Association des services Internet communautaires (ASIC) : MM. Giuseppe Martino , co-président, directeur juridique et réglementaire, Benoît Tabaka , secrétaire général, et Olivier Esper , trésorier, responsable des affaires institutionnelles ;

- Cabinet de M. Éric Besson , ministre en charge de l'industrie : M. Akilles Loudière , Mme Lucile Badaire , conseillers en charge de l'économie numérique, et Mme Juliette Lafont , conseillère parlementaire ;

- Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS) du ministère de l'économie , des finances et de l'industrie : Mme Frédérique Delaugerre , chef du bureau de la réglementation des communications électroniques, et M. Christophe Ravier , adjoint au chef de service ;

- Association française pour le nommage Internet en coopération ( AFNIC) : M. Mathieu Weill , directeur général ;

- Internet Society France : M. Gérard Dantec , président ;

- Free : MM. Maxime Lombardini , directeur général, et Olivier de Baillenx , directeur des relations institutionnelles ;

- SFR : Mme Marie-Georges Boulay , directeur de la réglementation et de la concurrence, et M. Vincent Talvas , directeur des affaires publiques.


* 1 Elles représentent une soixantaine de pages à elles deux.

* 2 Ce qui n'avait pas été le cas lors de la transposition du « paquet télécoms » originaire qui, en 2004, s'était faite par voie parlementaire.

* 3 Ce qui explique que notre commission ne se soit saisie au fond que des articles 11, 12, 13 et 15, qui seuls concernent les communications électroniques, le reste relevant de la commission des affaires sociales, tandis que la commission des affaires culturelles s'est saisie pour avis.

* 4 Directive 88/301/CEE de la Commission du 16 mai 1988 relative à la concurrence dans les marchés de terminaux de télécommunication.

* 5 Directive 90/387/CEE du Conseil du 28 juin 1990 relative à l'établissement du marché intérieur des services de télécommunication par la mise en oeuvre de la fourniture d'un réseau ouvert de télécommunication, et directive 90/388/CEE de la Commission, du 28 juin 1990 également, relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunication.

* 6 Directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et les services de communications électroniques.

* 7 Directive 2002/20/CE relative à l'autorisation des réseaux et de services de communications électroniques.

* 8 Directive 2002/19/CE relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion.

* 9 Directive 2002/22/CE relative au service universel et les droits d'utilisateurs au regard des réseaux et services de communication électroniques.

* 10 Directive 2002/58/CE relative au traitement des données à caractère personnel et à la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques.

* 11 Loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs.

* 12 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

* 13 Loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique.

* 14 La neutralité de l'Internet - Un atout pour le développement de l'économie numérique, rapport du Gouvernement au Parlement établi en application de l'article 33 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique, remis le 16 juillet 2010.

* 15 La désignation technique des registres chargés de la gestion des domaines Internet est opéré par l'Internet Assigned Numbers Authority (IANA), autre organisme américain, dépendant initialement de l'université de Californie du Sud, et maintenant de l'ICANN.

* 16 Outre le « .fr », la France dispose de plusieurs domaines Internet de premier niveau « code pays » (ccTLD) correspondant à son territoire national : « .gf » Guyane Française ; « .gp » Guadeloupe ; « .mq » Martinique, « .re » Réunion ; «  .pm » Saint Pierre et Miquelon ; « .wf » Wallis et Futuna ; « .yt » Mayotte ; « .tf » Terres Australes et Antarctiques Françaises. Le « .nc » est géré par l'office des postes et télécommunications de Nouvelle Calédonie et le « .pf » par le ministère des postes et télécommunications et des sports de Polynésie Française, le CPCE n'étant pas applicable à ces territoires (sauf certaines dispositions) car les communications électroniques font partie des compétences qui ont été transférées aux collectivités territoriales correspondantes. Enfin, les extensions « .bl » Saint-Barthélemy et « .mf » Saint Martin (partie française) créées après une mise à jour de la norme ISO 3166-1 (codes pays) n'ont pas encore été déléguées.

* 17 Une convention a dans le même temps été conclue entre l'État et l'AFNIC, qui précise les règles particulières de gestion et d'attribution des noms de domaine et les modalités concrètes du contrôle de l'État sur cet organisme.

* 18 Décision n° 2010-45 QPC du 6 octobre 2010, « M. Mathieu P. »

* 19 Vocabulaire des télécommunications, JORF n° 0300 du 27 décembre 2009 page 22537 texte n° 70.

* 20 ICANN, Resolution on Cross-Ownership Issues for Registries and Registrars, 5 novembre 2010.

* 21 Pour le « .fr », l'AFNIC avait mis en place jusqu'ici un service payant (Service Qualifié d'Accès aux "données Whois" - SQUAW) réservé aux utilisateurs pouvant prouver qu'ils apportent une valeur ajoutée à l'information fournie et qu'ils présentent des garanties quant à l'utilisation de ces information.

* 22 La commune de Bessières a ainsi obtenu la transmission forcée du nom de domaine « bessieres.fr » enregistré six ans plus tôt et utilisé en toute bonne foi par M. Jacques Bessières (AFNIC, décision FR 181).

* 23 Le contentieux opposant Mme Milka B., qui utilisait le nom de domaine « milka.fr », et la multinationale américaine Kraft Foods, détentrice de la marque de chocolats Milka, a connu un certain retentissement médiatique.

* 24 Les autorités administratives indépendantes : évaluation d'un objet juridique non identifié ; rapport de M. Patrice Gélard, fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation, n° 404 (2005-2006).

* 25 Les autorités administratives indépendantes ; rapport de MM. René Dosière et Christian Vanneste fait au nom du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, n° 2925, déposé le 28 octobre 2010.

* 26 Décision du Conseil constitutionnel n° 2009-580 DC du 10 juin 2009, « Loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet ».

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