B. L'AVANCEMENT DES PROGRAMMES NUCLÉAIRES11 ( * )

1. Les armes nucléaires
a) Le programme de simulation

Le programme de simulation lancé en 1995 pour suppléer les enseignements des essais nucléaires, est constitué d'un ensemble cohérent d'investissements :

- l 'augmentation des moyens de calcul de la direction des applications militaires du CEA est réalisée dans le cadre du projet Tera ;

- le passage d'une machine radiographique AIRIX (Accélérateur à Induction de Radiographie pour l'Imagerie X), destinée à l'étude du fonctionnement non nucléaire des armes à un axe ( site de Moronvilliers) à une capacité multiaxes et multiflashs (site de Valduc) dans le cadre du projet EPURE (Expérience de Physique Utilisant la Radiographie Eclair). Rappelons que le 2 novembre 2010, les chefs d'Etat et de gouvernement français et britannique ont signé un traité relatif à la réalisation d'installations radiographiques et hydrodynamiques communes dans le cadre d'un programme nommé « TEUTATES ». Les installations prévues dans le cadre de ce programme concernent, d'une part l'installation EPURE et, d'autre part, un centre de développement technologique ( TDC ) au Royaume-Uni sur le site de l' Atomic Weapons Establishment (AWE) à Aldermaston. Tous les coûts postérieurs à 2015 seront partagés entre la France et le Royaume-Uni ;

- le laser mégajoule (LMJ) , destiné à l'étude du domaine thermonucléaire, permettra de reproduire à très petite échelle les phénomènes thermonucléaires caractéristiques du fonctionnement d'une arme nucléaire. Le LMJ est dimensionné pour un nombre total de 240 faisceaux laser élémentaires regroupés en 60 quadruplets, pouvant délivrer une énergie totale de 1,8 mégajoules. L'échéance de sa mise en service a été repoussée de deux ans, de fin 2012 à fin 2014. Ce scénario s'appuie sur une configuration initiale du LMJ avec 22 chaînes (176 faisceaux) en gardant ouverte la possibilité de compléter cette configuration, si besoin est, par huit chaînes supplémentaires (et de la porter à 240 faisceaux).

Retenons que tous les jalons du programme Simulation ont été franchis avec succès à ce jour et que les progrès de la simulation depuis maintenant dix sept ans ont permis une optimisation des têtes et une réduction des risques. Les moyens et les méthodes de la simulation bénéficient à la recherche et à l'industrie. Le coût à terminaison de la phase 1 du programme de simulation est évalué à 7 Mds € 2011 , dont 3,25 Mds € 2011 pour le LMJ.

b) Les têtes nucléaires

Le programme de modernisation des têtes nucléaires a été mené à bien par le CEA - DAM.

Pour ce qui concerne les têtes aéroportées, les missiles ASMP/A sont équipés de la nouvelle tête nucléaire aéroportée (TNA) , conçue à partir du concept de charge « robuste » et garantie par la simulation. L'intégralité des vecteurs ASMP/A a été livrée entre 2009 et 2011.

Pour ce qui concerne les têtes nucléaires de la composante océanique, la direction des applications militaires du CEA réalisera la nouvelle tête nucléaire océanique - TNO - destinée à équiper, à compter de 2015, le missile M 51.

2. La force océanique stratégique (FOST)

La force océanique stratégique a achevé en 2010 sa transition vers une flotte homogène constituée des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins du type « Le Triomphant ». Le « Terrible » a été admis au service actif fin septembre 2010.

La mise en service opérationnelle du missile M 51.1 a été prononcée simultanément sur le « Terrible ». Son développement a pu être conduit avec seulement cinq lancements ce qui est une prouesse d'ingénieurs. Pour parvenir à ce résultat, il a fallu développer de manière importante les capacités de simulation des industriels Astrium et DCNS, mais aussi instrumenter les tirs à un niveau jamais atteint auparavant.

Deux grands chantiers restent ouverts pour la composante océanique dans la prochaine décennie :

- d'une part, les trois premiers SNLE feront l'objet de travaux d'adaptation pour recevoir le M 51.1 à Brest. Ces travaux dureront jusqu'en 2018 ;

- d'autre part, le développement de la deuxième version du missile M 51, le M 51.2 a été lancée en juillet 2010, en vue d'une mise en service en 2015 sur le SNLE « Le Triomphant » à l'issue de ses travaux d'adaptation. Ce missile sera équipé de la nouvelle tête nucléaire océanique (TNO) en cours de développement/fabrication par le CEA/DAM.

3. La composante aéroportée

La composante aéroportée a franchi un jalon majeur en octobre 2009 avec la mise en service du nouveau missile AMSP/A sous Mirage 2000 N K3 sur la base aérienne d'Istres. Ce nouveau missile est équipé de la nouvelle tête nucléaire aéroportée (TNA), première tête nucléaire conçue sans aucun essai nucléaire et entièrement garantie par la simulation.

La transition entre les deux générations de systèmes d'armes s'est poursuivie en 2010 avec la mise en service de l'ASMP/A sous le Rafale :

- au sein des Forces Aériennes Stratégiques de l'armée de l'air sur la base aérienne de Saint-Dizier en juillet 2010 ;

- parallèlement sur les Rafale Marine embarqués sur le porte-avions Charles de Gaulle, lorsque ceux-ci sont en configuration nucléaire.

Les avions ravitailleurs Boeing C 135 FR et KC 135 R ont atteint leur limite d'âge. Les premiers avions C 135 sont entrés en service en 1964. Ils sont maintenus avec difficulté, en attendant l'arrivée des MRTT qui doivent les remplacer à l'horizon 2017.

Le programme MRTT n'a pas encore été lancé. Néanmoins, les études de levée de risques concernant la résistance à l'IEMN (impulsion électromagnétique nucléaire) et la sécurité des systèmes d'information ont été lancées fin 2011. Ce programme devrait être lancé en 2013.

Les avions d'armes des FAS en mission « dissuasion » ne peuvent être ravitaillés que par des avions de l'armée de l'air française dont on maîtrise la configuration technique (SSI, etc.) ce qui conduit à privilégier une acquisition des MRTT de gré à gré auprès d'un constructeur européen.

4. Les transmissions nucléaires

Dans le cadre de la mise en oeuvre de la dissuasion nucléaire française, le chef de l'Etat doit avoir la garantie qu'il pourra mettre en oeuvre à tout moment les forces nucléaires.

Les transmissions nucléaires doivent permettre de transmettre aux forces et systèmes d'armes, quelle que soit leur situation ou leur localisation, les éléments nécessaires à l'élaboration des missions, ainsi que les ordres exceptionnels.

Le programme d'ensemble HERMES, en charge des transmissions nucléaires, a également franchi récemment des étapes importantes avec notamment la revue de conception système du programme de transmission des sous-marins (TRANSOUM) et la préparation de la revue de conception détaillée du programme RAMSES IV. Ces systèmes d'amélioration des réseaux de transmission nucléaire seront totalement déployés en 2014 pour RAMSES IV et 2017 pour TRANSOUM. Le système de transmission de dernier secours SYDEREC est opérationnel.

5. Appréciation sur la situation actuelle des programmes

Le programme de renouvellement des deux composantes de la dissuasion a franchi avec succès les échéances de transition. Il ne reste maintenant qu'à réaliser les adaptations M51 des trois premiers SNLE, acquérir les dotations complémentaires de missiles et les nouvelles têtes nucléaires.

La modernisation de la flotte de ravitailleurs en vol a pris du retard mais devrait être lancée en 2013 avec le programme MRTT.

Les programmes ont été menés en respectant les calendriers et en maîtrisant les coûts et, l'effort d'investissement sur cette génération est pour l'essentiel derrière nous.


* 11 Pour plus de détail voir le rapport d'information n° 668 « l'avenir des forces nucléaires françaises » du 11 juillet 2012 de MM. Didier Boulaud et Xavier Pintat, co-présidents et Jean-Pierre Chevènement, Michelle Demessine, Josette Durieu, Jacques Gautier, Alain Gournac ; Gérard Larcher et Bernard Piras, sénateurs.

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