II. COMMANDEMENT ET MAÎTRISE DE L'INFORMATION

Le système de forces « commandement et maîtrise de l'information » recueillera en 2013 548 millions d'euros de crédits de paiement (446 M€ en 2012) et 1 837 en d'autorisations d'engagement (1 512 M€ en 2012), ce qui représente une augmentation respective de 23 % et de 21,5 %.

Les deux principales sous actions sont l'action 07*40 qui concerne le programme fédérateur d'observation spatiale MUSIS et l'action 07*39 qui agrège divers programmes, dont notamment les drones MALE, les drones tactiques et l'observation spatiale. A elles seules ces deux sous-actions concentrent les deux tiers des crédits de paiement pour 2013.

Programmes afférents à ce système de forces par ordre décroissant d'importance sur les crédits de paiement (ressources budgétaires) 2013

A. L'ESPACE MILITAIRE

Les crédits affectés à l'espace connaissent de grandes fluctuations elles-mêmes liées en grande partie au lancement des programmes.

Dans un souci de cohérence avec la LPM 2009-2014, le tableau présenté ci-dessus ne concerne que la période 2009-2012. Le point haut des autorisations d'engagement en 2011 résulte de l'affermissement des tranches fonctionnelles des programmes MUSIS et SYRACUSE III.

Les ressources affectées à l'espace militaire ont été maintenues dans une fourchette comprise entre 355 et 469 millions d'euros courants par an.

Les programmes inscrits dans le PLF 2013 bénéficient de 220,2 millions d'euros de crédits de paiement, auxquels devraient s'ajouter 160,2 millions de ressources exceptionnelles provenant du CAS fréquences, soit un total de 380 millions d'euros .

1. Les télécommunications spatiales militaires

La LPM 2009-2014 avait prévu que les transmissions reposeraient, d'une part, sur le système durci Syracuse pour les transmissions essentielles, dont le renouvellement aura lieu vers 2018 et, d'autre part, sur un segment dual à très haut débit à partir de 2013, pour le reste.

? Les liaisons du « noyau dur »

Les liaisons dites du « noyau dur » , essentielles à la conduite des opérations et soumises à de fortes exigences de sécurité, sont avant tout assurées par le système Syracuse. Syracuse III est le premier satellite français exclusivement dédié aux communications militaires et a notablement amélioré la couverture, les débits et la sécurité des communications des armées. Il dispose notamment d'une capacité en « extrêmement haute fréquence » (EHF). Deux satellites Syracuse III ont été mis en service en 2005 et 2006. Un troisième satellite viendra compléter la constellation Syracuse. Il sera réalisé en coopération franco-italienne. Il s'agit du satellite Sicral 2 dont la phase de développement a démarré en 2010 pour un lancement prévu en 2014. Le financement du projet Sicral 2 est inclus dans le programme Syracuse III. Le segment sol de Syracuse III est composé de 368 stations fixes et mobiles qui ont toutes été livrées en 2012.

? Les liaisons hors « noyau dur »

Il s'agit des liaisons destinées à la correspondance numérique, à la télégestion ou à la télémédecine. Ces liaisons n'ont pas les mêmes exigences que celles dédiées aux opérations en termes de disponibilité, de confidentialité et de protection. Elles peuvent donc reposer sur des technologies civiles voire des opérateurs commerciaux. D'autant que le besoin concernant ces liaisons est en constante augmentation du fait de la numérisation des données et leur centralisation croissante.

En pratique, au sein de ces liaisons on distingue :

- sur l'arc de crise : un besoin en liaisons haut débit, disponibles sans préavis, auquel répond le projet COMCEPT . Ce projet repose, pour le segment spatial , sur l'acquisition en coopération avec l'Italie du satellite Athena-Fidus, qui comportera une charge utile française et une charge utile italienne. Il utilisera les standards de télécommunication civils et sera mis en oeuvre depuis des terminaux utilisateurs civils à bas coût. Il offrira également une capacité de liaison avec des drones. Le satellite Athena-Fidus a été commandé en 2010, pour une mise en service prévue désormais en 2014. Le segment sol sera réalisé dans un cadre national . Il comprend pour la France une composante système et environ 660 stations sol utilisateur.

- sur le reste du globe : notamment pour les bâtiments de la marine nationale, un besoin en liaisons de débit plus faible, pouvant s'accommoder de préavis, mais exigeant une forte disponibilité ; cette capacité impose de faire appel à de la location de service réalisée au travers des accords-cadres ASTEL passés entre la DIRISI et les opérateurs commerciaux du domaine.

Rappelons que le programme TELECOMARSAT permet l'acquisition de matériel civil sur étagère pour les besoins du segment sol à terre et sur les bateaux afin d'exploiter le service loué par les accords ASTEL.

2. Le renseignement spatial

? L'imagerie optique et radar - les programmes actuels

Le programme Hélios II est un système d'observation spatiale optique dont les principaux objectifs par rapport à la génération précédente sont d'améliorer les capacités de prise de vue et de transmission des images ; d'augmenter la résolution des images réalisées dans la bande optique visible ; d'introduire une capacité infrarouge permettant l'observation de nuit et la détection d'indices d'activité. Il comprend la réalisation de deux satellites qui reprennent après adaptation la plate-forme réalisée pour Hélios I. Le premier satellite a été lancé en 2004 ( Helios IIA ) et le second ( Helios IIB ) en 2009. Le programme est opérationnel depuis avril 2010. Hélios II a été mené en coopération avec la Belgique et l'Espagne depuis 2001, avec l'Italie depuis 2005, ainsi qu'avec la Grèce depuis 2007. La participation de la France est de 90 %. Le coût total du programme s'établit à 2,2 2010 milliards d'euros dont 1,9 2010 milliard à la charge de la France. Le système Hélios II est le seul système militaire d'observation spatiale optique en opération en Europe. Les autres satellites d'observation optique européens en service sont civils et ont des performances très inférieures.

Le « segment sol d'observation » ( SSO) PHAROS 12 ( * ) entré en service opérationnel en juin 2012 permet l'acquisition des moyens de programmation, de réception et de production des images optiques de Hélios II mais aussi des images radar très haute résolution de la constellation de satellites allemands SAR-Lupe 13 ( * ) , des images radar haute résolution de satellites italiens COSMO-SkyMed 14 ( * ) et des images optiques haute résolution des satellites français Pléiades 15 ( * ) . En contrepartie des droits de programmation qu'elle a négociés sur les satellites radar italiens et allemands, la France a concédé des possibilités analogues pour ces deux pays sur les satellites Helios II 16 ( * ) . Tous les membres de la communauté « image » française, à poste sur le territoire national ou déployés sur les théâtres d'opérations extérieurs, peuvent ainsi utiliser au mieux les capacités des capteurs spatiaux.

? L'imagerie optique et radar - le programme MUSIS

Le projet MUSIS ( Multinational Spacebased Imaging System for surveillance reconnaissance and observation) a pour objectif la réalisation du futur système européen d'observation spatiale militaire , intégrant des capacités optique et radar.

Ce système remplacera à terme l'ensemble des composantes militaires ou duales opérationnelles (Hélios, Pléiades, SAR-Lupe et COSMO-SkyMed). Il améliorera les performances par rapport aux systèmes actuels selon deux axes d'effort :

-  une meilleure résolution pour permettre d'atteindre un seuil permettant l'identification de cibles plus petites ;

- l'augmentation de la fréquence de survol (revisite) de sites d'intérêt pour améliorer la mise à jour de l'information déjà détenue.

Le périmètre de MUSIS comprendrait de façon optimale :

- CSO : une composante spatiale optique très haute et extrêmement haute résolution (THR et EHR), réalisée sous responsabilité française qui prendrait la suite d'Hélios et comportant deux satellites ;

- CSG : une composante spatiale radar seconde génération réalisée sous responsabilité italienne  et qui prendrait la suite de COSMOS-SkyMed ;

- une composante spatiale radar SARah sous responsabilité allemande ;

- une composante spatiale optique champ large INGENIO sous responsabilité espagnole ;

- FCP : un programme fédérateur (FCP) permettant d'assurer une utilisation fédérée des différentes composantes.

En l'absence d'accord de coopération finalisé, et afin d'éviter tout risque de rupture capacitaire, la France a lancé en 2010 la réalisation d'un segment sol minimum ouvert à la coopération et une partie de la composante optique , (deux satellites sur un total de trois prévu à terme). Le premier satellite assurera la mission THR, alors que le deuxième, en orbite plus basse, assurera la mission EHR. La commande de ces deux satellites est intervenue à l'automne 2010, pour un coût de réalisation de 1,3 milliard d'euros, auquel s'ajoute un coût de maintien en condition opérationnelle estimé à 400 millions d'euros sur 12 ans. Leur mise en service est prévue en 2016 pour le premier satellite et en 2017 pour le second. Cette échéance est compatible avec la durée de vie prévisible d'Helios IIB.

Le projet MUSIS a été érigé en projet ad hoc de catégorie B de l'Agence européenne de défense (AED) en mars 2009.

? L'écoute électromagnétique

Plusieurs développements expérimentaux ont été réalisés en matière de capacités spatiales de renseignement électromagnétique :

- fin 2004 a été lancé le démonstrateur Essaim, constitué de quatre micro-satellites d'écoute électronique. Dédié à l'écoute des communications, Essaim a été « désorbité » en 2010.

- fin 2011 un deuxième système dédié à l'interception des signaux radars, baptisé Elisa et composé, lui aussi, de 4 micro-satellites a été lancé, pour une expérimentation de 3 ans. Il est dédié à la localisation des émetteurs radar ainsi qu'à l'enregistrement des paramètres techniques (Fr, LI, PRI, FR...) depuis l'espace.

La loi de programmation militaire prévoyait la réalisation, à partir de l'expérience acquise en ce domaine, d'un programme de ROEM d'origine spatial CERES 17 ( * ) . CERES devait permettre l'interception et la localisation des émissions électromagnétiques depuis l'espace (détection et localisation d'émetteurs radar ou de télécommunications).

Le calendrier du programme CERES a été remis en cause à la suite des arbitrages rendus dans le cadre de la programmation triennale. Le dossier d'orientation a été approuvé en avril 2012. La livraison des satellites en orbite est prévue en 2020.

? L'alerte avancée et la question de la défense antimissile

L'alerte avancée vise à contribuer aux missions suivantes :

- la surveillance de la prolifération et de l'activité balistique ;

- l'identification des agresseurs en vue de la mise en oeuvre de la dissuasion ou d'actions de contre-force conventionnelle ;

- l'alerte des populations à partir de l'estimation des zones visées ;

- le respect des engagements souscrits dans le cadre de l'OTAN. Le sommet de Lisbonne de novembre 2010 prévoit en effet que l'Alliance se dotera d'une capacité de DAMB des territoires et des populations. La France a annoncé que sa future capacité d'alerte avancée contribuerait en nature à cette mission à l'horizon 2020 18 ( * ) .

Le fait de disposer d'un système propre bien que connecté au système de l'OTAN conférera à la France une autonomie d'appréciation de la situation.

Les études d'architecture du système menées en 2011-2012 ont confirmé l'intérêt de développer deux types de capteurs complémentaires :

- des capteurs optiques spatiaux - à détecteurs infrarouges (satellites géostationnaires ou défilant) ;

- des radars UHF très longue portée installés à terre - ou en mer.

La première capacité a été testée par le lancement en février 2009 du démonstrateur SPIRALE . Composé de deux micro-satellites dotés d'un instrument d'observation infrarouge, ce démonstrateur était destiné à l'acquisition en orbite de signatures de « fonds de terre » en vue de spécifier, ultérieurement, un système opérationnel. Il a été désorbité en 2011.

En ce qui concerne la composante radar, un contrat de réalisation et d'expérimentation d'un démonstrateur à échelle réduite d'un « radar très longue portée » (TLP) a été signé en 2011 avec l'industriel Thales. Le lancement de la réalisation du radar lui-même n'est pas envisagé avant 2015, pour une mise en service opérationnelle complète à partir de 2018.

Le calendrier et l'architecture de ce système d'alerte avancée sont susceptibles d'être profondément modifiés à l'issue des travaux de l'actuel Livre blanc.

Les satellites militaires


* 12 Portail Hôte d'Accès au Renseignement d'Origine Spatiale.

* 13 Le système spatial d'imagerie radar SAR-Lupe repose sur une constellation de cinq satellites ayant pour mission d'acquérir des images radar tout temps, de jour comme de nuit. Les satellites ont été lancés en 2006, 2007(2) et 2008(2).

* 14 COSMO-SkyMed - COnstellation of small Satellites for Mediterranean basin Observation est une constellation de quatre satellites d'imagerie radar lancés en 2007(2) 2008 et 2010 par l'Italie.

* 15 Pléiades est un programme dual, civil et militaire, de deux satellites auquel le budget de la défense contribue à hauteur de près de 33 millions d'euros. Le premier satellite a été lancé en décembre 2011 et le second devrait l'être en décembre 2012.Il a été mené en coopération avec l'Autriche, la Belgique, l'Espagne et la Suède. Son coût est de l'ordre de 33 millions d'euros pour la France, financé sur le P 191 (subvention CNES - recherche duale).

* 16 Le segment sol Hélios allemand est opérationnel depuis 2010, le segment sol SAR-Lupe français l'est depuis juillet 2010. L'accès de la France à la capacité COSMO- SkyMed a débuté en 2010 et de l'Italie à Hélios II en 2009.

* 17 Capacité de renseignement d'origine électromagnétique spatiale

* 18 Voir les précédents travaux du Sénat et, notamment : rapport d'information n° 733 de MM. Jacques Gautier, Xavier Pintat et Daniel Reiner - la défense antimissile balistique bouclier militaire ou défi stratégique - 6 juillet 2011 http://www.senat.fr/notice-rapport/2010/r10-733-notice.html

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