3. Le recours facilité aux emprunts toxiques

Plusieurs facteurs peuvent expliquer le succès des produits structurés auprès des collectivités territoriales. Outre le bénéfice, dans un premier temps, de taux d'intérêt bas qui a pu faire oublier aux élus locaux les risques encourus au cours des périodes ultérieures, la Cour des comptes a recensé quatre facteurs permettant de comprendre le succès de ces produits structurés dans un contexte de recherche d'économies budgétaires.

Le premier facteur pointé par la Cour des comptes est l' insuffisance des compétences internes des collectivités territoriales . La plupart d'entre elles, et notamment les communes les plus modestes qui sont les plus concernées par la problématique, ne dispose pas des moyens humains et techniques adaptés à la gestion d'une dette sophistiquée, faisant appel à des produits structurés.

Les assemblées délibérantes des collectivités territoriales ne disposaient pas toujours de l'information suffisante et nécessaire sur les risques encourus par la souscription de ces produits, qui étaient connus des seules banques. En d'autres termes, la Cour des comptes a relevé une asymétrie d'informations entre les deux contractants, en défaveur des collectivités, qui a placé ces dernières dans « une situation de cécité préjudiciable à leur prise de décision ».

Le rôle des cabinets de conseil auprès des collectivités territoriales a également été relevé par la Cour des Comptes. Soit les collectivités ont préféré ne pas suivre les recommandations et les mises en garde des cabinets sur les risques encourus, soit les cabinets les ont incitées à souscrire ces emprunts. Face à la diversité des situations et de la qualité des conseils dont ont pu bénéficier les collectivités territoriales, la Cour des comptes estime que « les exécutifs locaux et les services de ces collectivités ne doivent pas se reposer entièrement sur eux pour prendre leurs décisions. »

Enfin, le quatrième et dernier facteur pointé par la Cour des Comptes est l'absence du contrôle de légalité sur ces contrats de prêt , en raison de l'insuffisance des dispositions actuelles du code général des collectivités territoriales. Votre rapporteur rappelle en effet que l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales prévoit que sont transmises au préfet « les conventions relatives aux emprunts ». En revanche, aucune disposition ne prévoit que les actes relevant du droit privé - ce qui est le cas d'un contrat de prêt -sont soumis à l'obligation de transmission 10 ( * ) . Cette carence est d'ailleurs confirmée par une circulaire du 25 juin 2010 11 ( * ) selon laquelle, « dans la mesure où le contrat d'emprunt est presque exclusivement un contrat de droit privé et que la délibération autorisant sa signature doit faire apparaître les principales caractéristiques de l'emprunt, il n'a pas à être transmis au préfet ».


* 10 Articles L. 2131-4 pour les communes, L 3131-5 pour les départements et L. 4141-5 du CGCT pour les régions.

* 11 Circulaire n° NOR IOCB1015077C du 25 juin 2010 relative aux produits financiers offerts aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics locaux.

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