B. UN CONTRÔLE DU POIDS DES NORMES REPOSANT SUR DIVERSES INSTANCES
La croissance exponentielle des normes pose la question de la gouvernance normative actuelle et, plus largement, des relations entre l'État et les collectivités territoriales. Comme l'a relevé Jacqueline Gourault, « la gouvernance normative actuelle ne repose pas suffisamment sur une culture partagée de l'information et de l'évaluation des politiques publiques locales ». Les études d'impact qui accompagnent les projets de loi ne permettent pas d'établir une évaluation précise, en raison de l'absence d'une base de données partagée entre l'État et les collectivités territoriales. En d'autres termes, les élus locaux regrettent d'être insuffisamment associés à la gouvernance normative qui les concerne pourtant au premier chef.
Face à ce constat, plusieurs démarches destinées à endiguer le flux normatif et à améliorer l'association des collectivités territoriales à l'édiction de normes ont été mises en place, avec des résultats divers.
1. La commission consultative d'évaluation des normes
Les conclusions du groupe de travail relatif aux relations entre l'État et les collectivités territoriales, présidé par notre ancien collègue Alain Lambert, avaient préconisé la mise en place d'une commission consultative d'évaluation des normes (CCEN), destinée à associer les collectivités territoriales à l'élaboration, par les administrations centrales, des projets réglementaires qu'elles doivent appliquer.
a) Une commission au large champ de compétences
La CCEN a été créée en 2007 24 ( * ) . Elle est, à l'instar de la commission consultative d'évaluation des charges (CCEC), une formation restreinte du comité des finances locales (CFL). Composée de vingt-deux membres - parmi lesquels quinze sont représentants des élus locaux - désignés parmi les membres titulaires du CFL, elle comprend également en son sein des experts, conviés par le président en fonction de l'ordre du jour. Il s'agit, le plus souvent, de représentants du Secrétariat général du Gouvernement ou des associations nationales d'élus. Bien que pouvant assister aux séances, ils ne disposent pas d'une voix délibérative.
La CCEN s'est vu dotée d'un large champ de compétences.
Elle est obligatoirement consultée sur « l'impact financier, qu'il soit positif, négatif ou neutre, des mesures réglementaires créant ou modifiant des normes à caractère obligatoire concernant les collectivités territoriales, leurs groupements ou leurs établissements publics », ainsi que les propositions de texte européen ayant un impact technique et financier sur les collectivités territoriales et leurs établissements publics. Elle peut également être consultée par le Gouvernement sur tout projet de loi ou d'amendement ayant un impact technique et financier sur les collectivités.
Comme votre rapporteur l'avait rappelé dans son dernier avis budgétaire, la CCEN a défini trois critères d'éligibilité permettant de soumettre un projet de norme à son contrôle :
- il doit s'agir d'une mesure réglementaire ;
- cette mesure doit être obligatoire. Ainsi, les normes sportives ou les normes AFNOR sont exclues de son champ de compétences, puisqu'il s'agit de normes facultatives ou de « bonnes pratiques », bien que leur application s'avère, de facto , obligatoires, pour des raisons juridiques ou assurancielles ;
- elle doit concerner les collectivités territoriales, leurs groupements ou leurs établissements publics, de manière directe ou indirecte et non exclusive.
Les avis rendus par la CCEN sont consultatifs et non contraignants ; en d'autres termes, le Gouvernement peut s'écarter des recommandations de la commission ou s'abstenir d'en tenir compte.
* 24 Article 97 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007, codifié aux articles L. 1211-4-2 et R. 1213-1 et suivants du code général des collectivités territoriales.