IV. LA JUSTICE DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER : DES MOYENS MATÉRIELS ET HUMAINS À RENFORCER

A. UNE SITUATION CONTRASTÉE EN MATIÈRE D'INSÉCURITÉ

Comme l'avait relevé votre rapporteur dans son avis budgétaire dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012, les départements d'outre-mer présentent une situation contrastée au regard des faits de délinquance et de criminalité.

On rappellera qu'une nouvelle présentation des statistiques de la criminalité est en vigueur depuis le 1 er mai 2010, conformément à une circulaire du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales du 12 février 2010. Désormais, les indicateurs relatifs à la délinquance générale et à la délinquance de proximité sont remplacés par trois indicateurs permanents de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales sur les atteintes aux biens (AAB), les atteintes volontaires à l'intégrité physique des personnes (AVIP) ainsi que les escroqueries et infractions économiques et financières (EIEF).

La Guyane représente aujourd'hui le deuxième département de France, après la Seine-Saint-Denis, pour le nombre d'AVIP (16,42 %o). La Guyane enregistre une criminalité de proximité très violente au préjudice des particuliers, aussi bien sur la voie publique qu'à leur domicile. On constate également d'importantes disparités entre chaque bassin de délinquance à l'intérieur de la Guyane, liées à des facteurs communautaires, sociaux, géographiques et démographiques. Enfin, commence à apparaître un phénomène de bandes, notamment à Cayenne, à Matoury et à Kourou, dans lesquels sont actifs quelques dizaines de groupes fluctuants et non structurés.

La Guadeloupe est marquée par un niveau de violence élevée . Elle se classe en effet au cinquième rang des départements dans lesquels sont enregistrés le plus de phénomènes de violence en France, derrière la Seine-Saint-Denis, la Guyane, Paris et les Bouches-du-Rhône. La Guadeloupe a été confrontée à un pic de délinquance du second semestre 2009 à la fin 2010. D'après les informations fournies à votre rapporteur, les AVIP affichent un bilan défavorable pour le premier semestre 2012, avec une hausse de + 2,06 % par rapport à 2011, en raison de l'augmentation des vols à main armée. De même, les fortes baisses des cambriolages (- 10,73 %) et des vols simples au préjudice de particuliers (- 16,36 %) sont aujourd'hui quasiment compensées par les hausses des vols à main armée (+ 58,72 %) et des vols liés à l'automobile et aux deux roues (+ 13,93 %).

La Martinique est le sixième département le plus violent de France, selon les indications fournies par le Gouvernement, avec un nombre d'AVIP (13 %o) près de deux fois supérieur à la moyenne nationale (7,43 %o). Par ailleurs, les 15-24 ans, qui représentent plus de 44 % de la population délinquante, sont surreprésentés dans les vols violents, représentent les deux tiers des personnes incriminées dans la détention illégale d'armes et commettent 60 % des faits d'infraction à la législation sur les stupéfiants.

Le niveau des différents taux de criminalité demeure nettement inférieur à La Réunion que dans celui des départements d'outre-mer d'Amérique, et est proche de ceux de la moyenne nationale. Le taux de criminalité s'élève à 37,6 crimes et délits pour 1 000 habitants, ce qui place La Réunion au 65 ème rang des départements en termes de sécurité : malgré une croissance démographique élevé, les faits d'insécurité placent ce département relativement sécure. Selon les informations fournies par le Gouvernement, la hausse des AVIP est limitée à + 1,1 %, liée aux émeutes de février-mars 2012. Les AAB affichent une diminution de - 4,95 % sur le premier semestre 2012, en raison de la forte baisse des faits de vols à la roulotte (- 27,16 %).

En faisant abstraction de l'immigration clandestine à l'origine d'une « délinquance de survie » qui représente 72,6 % de la délinquance générale contre 10 % dans les autres départements d'outre-mer, les AVIP, les AAB et les EIEF ne constituent pas la majorité des faits de délinquance constatés à Mayotte . En d'autres termes, celle-ci n'est pas touchée par un phénomène important de délinquance : le taux de criminalité de l'île demeure largement inférieur à celui des collectivités territoriales d'outre-mer dans leur ensemble. Toutefois, comme l'avait relevé la mission de votre commission, il convient de rester attentif aux évolutions futures : les mouvements sociaux de l'automne 2011 ont influé négativement sur les résultats de la délinquance, tant en matière d'atteintes aux personnes que d'atteintes aux biens. Là encore, la hausse récente de la criminalité pourrait en partie provenir d'un « rattrapage » lié, entre autres, au renforcement des moyens de l'État et aux campagnes de sensibilisation incitant les Mahorais à déposer plainte plutôt que de rechercher le règlement de leurs conflits au sein de leur communauté. Par ailleurs, la mobilisation prolongée des forces de l'ordre sur des problématiques d'ordre public a, de facto , diminué les moyens humains affectés aux missions de surveillance et de prévention. Ainsi, les cambriolages ont connu une forte augmentation ainsi que les vols avec violence sans arme à feu. Les manifestations contre la vie chère ont également mis en lumière de nouveaux modes d'action des délinquants, qui ont profité des journées d'action pour piller des commerces.

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