EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 16 octobre 2013 sous la présidence de M. Yvon Collin, vice-président, la commission procède tout d'abord à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis, sur le projet de loi n° 71 (2013-2014) garantissant l'avenir et la justice du système de retraites .

M. Yvon Collin, président . - Le président Philippe Marini est retenu à Vilnius, avec notre collègue Marc Massion, où ils représentent le Sénat à la première conférence interparlementaire sur la gouvernance économique et financière, instituée en application du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG).

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites est l'aboutissement de plus d'un an de travaux. Le Conseil d'orientation des retraites (COR) a présenté ses projections en décembre 2012. La commission pour l'avenir des retraites, présidée par Yannick Moreau, a rendu son rapport en juin 2013. Enfin, des consultations avec les partenaires sociaux ont été menées pendant l'été.

En 2009, le COR prévoyait un déficit des régimes de retraites de 28 milliards d'euros en 2018. La réforme de 2010 visait à rétablir l'équilibre à cette échéance. Dès 2011, la Cour des comptes avait déjà révisé les prévisions de solde à la baisse et anticipé un déficit de 2,5 milliards d'euros en 2018. Fin 2012, le COR a publié de nouvelles projections, avec un déficit de 21 milliards d'euros en 2018. Les objectifs de la réforme de 2010 ne seront pas atteints, essentiellement à cause de la dégradation de la conjoncture.

Le COR a dû d'abord estimer l'évolution de la masse salariale, donc de la population totale et du taux d'activité. Selon ses hypothèses, la proportion des plus de 75 ans passera de 9 % de la population en 2015 à 16 % en 2060 et le taux d'activité augmentera à 68,7 %. Jusqu'en 2035, le nombre de retraités augmentera fortement, en raison des effets différés du baby-boom, pour se stabiliser ensuite. Quant à la population active, elle augmentera jusqu'en 2025, restera constante entre 2025 et 2035, puis augmentera à nouveau après cette date. C'est la période 2025-2035 qui sera délicate car le nombre des retraités augmentera tandis que celui des actifs restera stable.

Le COR a élaboré plusieurs scénarios d'évolution des soldes financiers fondés sur différentes hypothèses concernant le niveau de la productivité du travail, qu'il fait varier dans une fourchette entre 1,3 % à 1,8 %, et le taux de chômage de long terme, entre 4,5 % et 7 %. Il a aussi présenté des versions alternatives, selon que les rendements des régimes complémentaires des salariés (ARRCO) et des cadres (AGIRC) sont constants ou décroissants. Le rendement est constant lorsque la valeur du point - qui détermine le montant de la pension - et le salaire de référence sont tous deux indexés sur les prix. Il est décroissant lorsque la valeur du point est indexée sur les prix et le salaire de référence sur l'évolution du salaire moyen AGIRC et ARRCO. Les salaires progressant plus vite que les prix, le salarié achète alors plus cher le point. Pour les régimes, un rendement décroissant est plus favorable qu'un rendement constant.

L'évolution des salaires est corrélée à la productivité du travail. Dans le scénario retenu par le Gouvernement, la productivité du travail augmentera de 1,5 % par an, avec un taux de chômage de long terme de 4,5 % et un rendement des régimes complémentaires AGIRC-ARRCO constant. Dans ce cas, le solde s'établira à - 0,7 % du PIB en 2060, tandis qu'il serait équilibré avec un rendement des régimes AGIRC-ARRCO décroissant. Afin de prendre en compte l'accord AGIRC-ARRCO de mars 2013 ainsi que la révision à la baisse de la prévision de croissance, le Gouvernement a réactualisé la projection. En l'absence de réforme, le déficit s'établirait à 19,1 milliards d'euros en 2014 et atteindrait 26,6 milliards d'euros en 2040 en euros constants. Il est urgent d'agir.

Le projet de loi opère une distinction entre une période de court à moyen terme, 2014 à 2020, où primeront des mesures de recettes, et une période de long terme, où la hausse de la durée de cotisation produira ses effets. Première mesure de recette, le report du 1 er avril au 1 er octobre de chaque année de la revalorisation des pensions en fonction de l'évolution des prix. Cela représentera en 2014 une économie de 800 millions d'euros.

M. Aymeri de Montesquiou . - Ce n'est pas une mesure sociale !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Si, car l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), les pensions d'invalidité et les rentes liées aux accidents du travail ou aux maladies professionnelles continueront à être revalorisées au 1 er avril.

Autres mesures de recettes : la fiscalisation des majorations de pensions pour les retraités ayant élevé trois enfants ou plus ; la hausse des cotisations déplafonnées salariés et employeurs, de 0,15 % en 2014 puis de 0,05 % jusqu'en 2017 et enfin, l'allongement de la durée de cotisation à raison d'un trimestre tous les trois ans entre 2020 et 2035, soit 43 ans de cotisation en 2035 contre 41,5 aujourd'hui. Cette mesure aura un impact financier positif pour les régimes de retraite, à hauteur d'environ 5 milliards d'euros en 2030 et 10 milliards d'euros en 2040. À cette date, les mesures de recettes auront un impact de près de 8 milliards d'euros et les mesures d'économies, de 13 milliards d'euros.

En tenant compte des mesures de justice, qui ont un coût, l'impact net de la réforme se traduira par une amélioration du solde de l'ensemble des régimes de 4 milliards d'euros en 2014, et de 19 milliards d'euros en 2040.

Grâce à ces mesures, les régimes de base seront à l'équilibre dès 2020 et excédentaires à l'horizon de 2030. Des déficits persisteront pour les régimes des fonctionnaires et les régimes spéciaux, principalement ceux de la SNCF, de la RATP et des mines, équilibrés par des subventions, ainsi que pour les régimes de retraite complémentaire obligatoires.

Parmi les mesures de justice sociale, la plus importante est la prise en compte de la pénibilité. La réforme de 2010 a introduit un dispositif spécifique mais qui concerne davantage l'invalidité que la pénibilité. En effet, le départ à la retraite anticipé est ouvert à partir d'un taux d'invalidité de 10 % et pour certains accidents du travail ou maladies professionnelles. Seuls 10 000 dossiers ont été déposés depuis 2011, dont environ 6 000 ont été acceptés. Le bilan est maigre. Le projet de loi crée un compte personnel de prévention de la pénibilité. Le besoin de financement, estimé à 500 millions d'euros en 2020, sera couvert par une hausse équivalente de cotisations employeurs. D'autres dispositions visent à aider les femmes, les jeunes ou les assurés ayant eu une carrière heurtée à se constituer des droits à la retraite.

Le comité de pilotage des régimes de retraite (COPILOR), censé suivre l'application de la réforme de 2010, s'est réuni une seule fois, sans donner le moindre avis. Le texte le remplace par un comité de surveillance des retraites, rebaptisé « comité de suivi » par l'Assemblée nationale. Le schéma de pilotage s'inspire de celui mis en place pour l'évolution du solde des finances publiques, avec le Haut Conseil des finances publiques. Le comité de suivi rendra chaque année un avis sur le respect des objectifs, fondé sur les données transmises par le COR, et il formulera des recommandations. Le Gouvernement indiquera au Parlement, après consultation des partenaires sociaux, les suites qu'il entend leur donner. Enfin le comité de suivi remettra un avis sur les suites données à ses recommandations.

La réforme contribue à l'effort de consolidation des finances publiques, à l'amélioration du solde public et au respect de l'objectif de moyen terme (OMT) de solde structurel. Le Gouvernement a prévu un ajustement structurel à hauteur de 0,9 % du PIB en 2014, grâce à un effort en recettes de 0,2 % et en dépenses de 0,7 %. La réforme des régimes de retraite participe à l'amélioration du solde pour 3,4 milliards d'euros en 2014. Ses effets s'accentueront avec le temps : l'économie réalisée représentera 0,5 % du PIB en 2040.

M. François Marc, rapporteur général . - Je partage la position de notre rapporteur pour avis. La situation du système de retraites exige une réaction immédiate pour rétablir l'équilibre. Le Gouvernement s'y est attelé. L'exigence de solidarité est respectée avec les mesures en faveur des carrières longues ou des métiers pénibles, conformément aux attentes du pays. Nous devons soutenir l'initiative du Gouvernement.

M. Albéric de Montgolfier . - Que penser des hypothèses macroéconomiques retenues par le COR ? Un taux de chômage à 4,5 % ou 7 %, est-ce vraiment réaliste ?

Certes, la réforme de 2008 aligne la durée de cotisation dans les régimes spéciaux sur celle des autres régimes. Mais l'âge effectif de départ à la retraite, autour de 54 ou 55 ans, demeure très inférieur à la moyenne nationale. Les subventions versées par l'État resteront importantes. Ne faudrait-il pas augmenter les décotes ? Quelle est la différence entre un chauffeur de car employé par un conseil général et un conducteur de train automatisé employé par la SNCF ? Les différences de traitement entre régimes de retraite sont-elles justifiées ?

M. Jean-Paul Emorine . - Les hypothèses retenues dans la loi sont très optimistes. De plus le COR, comme l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), ignore les évolutions dues au progrès technique. Au milieu du siècle dernier notre pays comptait 5 millions d'agriculteurs. Avec la modernisation, ce nombre est tombé à 900 000 et pourrait descendre à 600 000 dans quelques années. Il n'est pas improbable que le nombre d'exploitations, d'environ 500 000 aujourd'hui, chute à 300 000. De même les gains de productivité provoqués par la mécanisation dans les entreprises ne sont pas pris en compte.

Quel sera le montant des subventions versées par l'État aux régimes spéciaux ? Comment se répartissent-elle selon les régimes ?

M. Vincent Delahaye . - Je ne partage pas l'avis du rapporteur général. L'intitulé du projet de loi est trompeur. Il garantit plutôt le maintien des injustices ! Il est très simple de prévoir un rééquilibrage si l'on se fonde sur des hypothèses optimistes. Mais il s'agit d'une mauvaise méthode. Entre 2007 et 2012, les gains annuels de productivité se sont élevés à 0,18 % par an. Pourtant le COR envisage un scénario à 2 % par an. Pourrait-il nous fournir un scénario fondé sur une croissance de la productivité de 0,5 % par an et un taux de chômage de 10 %, comme aujourd'hui ?

Vous nous indiquez les besoins de financement des différents régimes. Serait-il possible de connaître le nombre de personnes concernées par chaque régime ? Comment expliquer la forte baisse du déficit des régimes spéciaux, de 7,7 milliards d'euros à 4,4 milliards d'euros, entre 2030 et 2040 ?

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - C'est l'effet de l'allongement de la durée de cotisation.

M. Éric Bocquet . - La question des retraites relève d'un choix de société. Elle ne se résume pas à une équation comptable. Il ne suffit pas d'entrer des données dans un logiciel pour obtenir la solution ! La retraite à 60 ans a été instaurée par la gauche, une gauche décomplexée dirions-nous aujourd'hui. Nous devons assumer ce choix. Nul ne sait quelle sera la démographie, la croissance ou le niveau des salaires à l'avenir. Qui sait, l'évasion fiscale sera peut-être jugulée, nous disposerons alors de 50 milliards d'euros de recettes supplémentaires. S'il faut consacrer plus de ressources au financement des régimes de retraite, allons chercher l'argent là où il est !

Il est faux de croire que la société soutient la réforme. Qui ne dit mot consent ? Je crois plutôt que nos concitoyens sont rendus muets par la lassitude, la résignation, le renoncement. Mais ce qui ne s'exprime pas socialement s'exprimera politiquement dans les urnes. Enfin, à propos des régimes spéciaux, je suis partisan du plus grand dénominateur commun, non du plus petit.

M. Aymeri de Montesquiou . - Je suis surpris par les chiffres retenus. Un taux de chômage de 4,5 %, c'est le plein emploi. Une telle hypothèse paraît extravagante. Ensuite, la meilleure mesure de justice n'est-elle pas la convergence des régimes ? Comment justifier l'écart entre les conducteurs de la RATP et ceux des bus scolaires ? Il faut tenir compte de la pénibilité, mais à travail identique, il faut une durée de travail identique.

M. Francis Delattre . - Cette réforme a été exigée par l'Europe en contrepartie du report de deux ans des engagements de réduction des déficits.

M. François Marc, rapporteur général . - Voulez-vous dire que vous n'auriez pas fait de réforme ?

M. Francis Delattre . - Je ne vois là qu'un semblant de réforme, de simples ajustements sur la base d'hypothèses folkloriques. Les régimes AGIRC et ARRCO ont besoin à long terme de 8 à 9 milliards d'euros. L'effort prévu ici est insuffisant.

De plus, les régimes spéciaux ont été rapprochés du régime de la fonction publique, mais l'écart avec le régime général demeure important. Comment expliquer, alors que les règles ne changent pas, que leur déficit diminue de moitié ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - Cette réforme oublie les régimes complémentaires, les régimes de la fonction publique d'État et les régimes spéciaux. Le titre de la loi n'est pas adapté. Où est l'avenir, où est la justice ?

M. Yann Gaillard . - Cet échafaudage de prévisions me laisse très sceptique. Les chiffres seront sans doute revus chaque année. Je ne crois pas que la vérité surgisse de ce genre d'exercice. Je m'abstiendrai.

M. Dominique de Legge . - Un régime par répartition doit par construction être équilibré. On ne redistribue que ce qui est collecté. Le rapport entre les actifs et les inactifs est fondamental. Il n'est pas sûr que les mesures de politique familiale aillent dans le bon sens. Le scénario retenu est très optimiste, donc peu réaliste - un taux de chômage de long terme de 4,5 % ! Le gain de la réforme en 2040 est estimé à 18,6 milliards d'euros, malgré cela il subsistera toujours un déficit de 28,9 milliards d'euros à cette date.

M. François Fortassin . - Cette analyse prospective a au moins le mérite d'exister. Il est toutefois difficile de connaître l'espérance de vie à l'avenir. Or son évolution influera sur les régimes de retraites.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Dans le scénario retenu, les gains de productivité du travail s'élèveront à 1,5 % par an tandis que le taux de chômage de long terme s'établira à 4,5 %, soit le taux de chômage que connait l'Allemagne aujourd'hui. De plus, lors de la réforme de 2010, le Gouvernement avait déjà retenu l'hypothèse d'un taux de chômage de 5 %.

La productivité apparente du travail a ralenti à cause de la crise de 2008. Entre 1990 et 2007, elle s'est établie à 1,8 % par an. Monsieur Delahaye, prendre pour base un taux de chômage de 10% et une progression de la productivité du travail de 0,5 %, n'est-ce pas reconnaître que l'économie française est condamnée ? Ce serait un mauvais signal ! Là aussi, l'hypothèse retenue est la même qu'en 2010.

M. Francis Delattre . - Vous prétendez que nous nous sommes trompés en 2010. Pourquoi persévérer dans l'erreur en ce cas ?

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Ce n'est pas ce que j'ai dit. La crise de 2008 a modifié la donne. Si vos hypothèses de productivité faible et de chômage élevé s'avéraient exactes, cela signifierait que nous ne vivrions plus dans le même monde. Doit-on avoir cette ambition dans un projet de loi ? De plus, elles ne correspondent pas au régime de long terme de la France.

M. Vincent Delahaye . - Depuis combien d'années le chômage est-il de 10 % ?

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Le taux de chômage avant la crise n'était pas de 10 %. Il faut parier sur le redressement de l'économie française. Nous avons des atouts. Ne soyons pas défaitiste en raisonnant avec des hypothèses catastrophistes !

En réponse à Jean-Paul Emorine, je précise que le progrès technique est pris en compte dans les projections de l'INSEE. Il constitue l'une des composantes de la productivité apparente du travail.

S'agissant des régimes spéciaux, certains bénéficient d'une compensation car leur démographie est très déséquilibrée. Je ne dispose pas ici même des tableaux que vous demandez, mais ce système de compensation inter-régimes participe de la solidarité nationale.

Monsieur Bocquet, l'espérance de vie augmentant, il n'est pas infondé que les gains soient partagés entre temps de travail et temps de retraite.

Il y a urgence : si nous ne faisons rien, les régimes seront déficitaires de 20 milliards d'euros à l'horizon 2014. Grâce aux mesures du Gouvernement, les régimes de base - Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), Fonds de solidarité vieillesse (FSV), régime des indépendants (RSI), mutualité sociale agricole (MSA), caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), etc. - seront équilibrés en 2020. Si l'on restait dans le cadre de la réforme de 2010, leur déficit serait de 4 à 5 milliards d'euros en 2018. J'ai distingué ces régimes, d'une part, de ceux équilibrés par une subvention (fonction publique, régimes spéciaux) et d'autre part des régimes complémentaires (AGIRC et ARRCO). Ces derniers ont pris en mars 2013 des mesures extrêmement courageuses pour réduire leur déficit prévisionnel sans tirer sur leurs réserves, déjà en baisse sensible.

M. Francis Delattre . - Leurs mesures représentent 3 milliards d'euros. Il manquerait donc 4 à 5 milliards d'euros d'ici 2020. Sans compter qu'ils empruntent.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Nous devons ces décisions courageuses aux partenaires sociaux. À court terme, ils ont des choix à faire : indexer la valeur du point et celle de l'achat du point sur les prix ou sur les salaires. Selon que le rendement est décroissant ou constant, les évolutions de soldes varient considérablement. Les prévisions de déficits résiduels du COR sont établies à partir d'une hypothèse de rendement constant. On imagine mal que la valeur du point ne soit pas indexée sur les prix, mais il revient aux partenaires sociaux de définir cette valeur ainsi que le salaire de référence. Il ne revient pas au législateur de prendre cette décision à la place des partenaires sociaux.

Enfin, pour revenir au projet de loi, tout le monde sera soumis aux mêmes mesures, qu'il s'agisse des agents de la fonction publique, des salariés du privé ou des assurés de régimes spéciaux : les taux et la durée de cotisation augmenteront.

M. Aymeri de Montesquiou . - Même la durée ?

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Oui. Si la durée de cotisation n'est pas suffisante, une décote sera appliquée au montant de la pension.

M. Francis Delattre . - Cela ne veut pas dire que les assurés des régimes spéciaux partiront à la retraite au même âge que les autres...

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Sur ce point, nous nous sommes calés sur les dispositions des réformes de 2008 et de 2010. Nous ne sommes pas revenus en arrière.

M. Francis Delattre . - Heureusement !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Les fonctionnaires, pour obtenir une retraite à taux plein, seront soumis aux mêmes augmentations de taux de cotisation et de durée de cotisation. On dit souvent qu'ils sont mieux lotis que les salariés du privé...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - Vous n'allez pas dire qu'ils sont logés à la même enseigne !

M. Albéric de Montgolfier . - Le calcul de la pension se fonde sur les six derniers mois !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Il y a certes une différence entre la retraite moyenne d'un fonctionnaire et celle d'un salarié du privé.

M. Francis Delattre . - De combien ?

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - De l'ordre de 300 à 400 euros.

M. Francis Delattre . - De 350 euros, exactement.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Cet écart s'explique en grande partie par un effet de structure. Ce ne sont pas les mêmes populations. Les ouvriers et employés sont majoritaires dans le privé, tandis que dans la fonction publique d'État, le nombre des cadres de catégorie A a beaucoup augmenté ces dernières années. Comparer les pensions moyennes du public et du privé revient par conséquent à comparer des choux et des carottes. Si l'on regarde les taux de remplacement plutôt que les montants nominaux des pensions, on s'aperçoit que les chiffres sont quasiment identiques. De plus, les fonctionnaires ne cotisent pas sur leurs primes, or celles-ci représentent 10 % à 40 % de leur rémunération.

Mme Michèle André . - Exact !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - On peut toujours demander au COR d'étudier l'alignement des pensions nominales, mais alors le taux de remplacement diminuera significativement pour les fonctionnaires.

Le problème se situe entre 2025 et 2035, quand la population active se stabilisera tandis que le nombre de retraités augmentera significativement. Nous devons prendre des mesures rapides et équilibrées en recettes comme en dépenses. Si nous reportons à 2020 l'augmentation de la durée de cotisation, nous allons au-devant de déficits récurrents, de nature à compromettre le respect de nos engagements européens. Cette réforme n'est pas seulement équilibrée, elle rend notre système plus juste pour les jeunes, les femmes et les salariés exposés à des facteurs de pénibilité.

M. François Marc, rapporteur général . - Je partage les conclusions de notre rapporteur pour avis, qui démontre la nécessité d'agir dès aujourd'hui. Monsieur Delattre, les choses ont changé depuis 2010 : dans le cadre du semestre européen, nous avons inscrit nos discussions budgétaires avec Bruxelles dans des perspectives de moyen et long termes. Vous avez toute liberté de croire que nous obéissons à un ordre venu de « quelque part ailleurs » mais la réalité est que notre pays a choisi, avec d'autres au sein de l'Union européenne, ce modèle de cogestion budgétaire et financière.

M. Francis Delattre . - Je n'ai pas dit cela et je souscris bien sûr à vos propos en hommage du vice à la vertu.

M. Vincent Delahaye . - Le précédent gouvernement tablait sur 5 % de chômage, l'actuel sur 4,5 %... Je ne partage pas ces hypothèses optimistes. Depuis 1983, nous n'avons jamais connu un chômage inférieur à 7,5 %. Ce devrait être un minimum à retenir comme hypothèse de projection, même dans une perspective optimiste !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Le COR a fondé l'un de ses scenarios sur une hypothèse de 7 % de chômage à long terme : il est possible de vous y référer. Dans le scénario B, l'hypothèse de 4,5 % de chômage ne vaut qu'à partir de 2030. Il est supposé que le taux de chômage effectif convergera progressivement vers ce niveau. Ce n'est donc pas cette hypothèse qui est retenue pour les années 2014 et 2015.

M. Aymeri de Montesquiou . - Mais il faut bien une base de calcul. L'observation de ces trente dernières années, c'est tout de même un fondement solide : nous ne sommes jamais descendus sous les 7,5 % de chômage. Or à 4,5 %, nous sommes en-deçà même de la barre du plein emploi !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - Dans ce cas, l'hypothèse d'un taux de chômage à long terme de 5 % retenue dans la réforme de 2010 était déraisonnable.

M. Francis Delattre . - Voyez où cela nous a menés !

M. Aymeri de Montesquiou . - Tenons compte des erreurs passées...

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis . - À nouveau, c'est une hypothèse de long terme. Il y a urgence à agir. Les effets prévus dans le cadre de cette réforme sont équilibrés. Ainsi, je souhaite que la commission donne un avis favorable sur ce projet de loi.

La commission a émis un avis favorable à l'ensemble du projet de loi .

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