D. OBJECTIF ET INDICATEURS DE PERFORMANCE : « RATIONALISER LE DÉVELOPPEMENT DES PROJETS INFORMATIQUES »

Cet objectif n° 3 du projet annuel de performances visait à rationaliser le nombre d'applications informatiques et à maîtriser le développement de nouveaux projets. Le respect de cet objectif était assuré au moyen de deux indicateurs, l'un portant sur la réduction du nombre d'applications informatiques par fonction et l'autre sur la maîtrise des coûts.

Le premier indicateur 87 ( * ) a été supprimé dans le cadre de la simplification du PAP.

Le second indicateur relatif à la maîtrise des coûts des projets a évolué à compter du PAP 2014. Il a été remplacé par un indicateur tourné vers le respect des délais et des coûts des projets informatiques les plus importants.

Il convient désormais de calculer pour les projets dont le coût prévisionnel à terminaison est supérieur à 5 millions d'euros (seuil à partir duquel les projets sont soumis à l'examen de la DISIC), le retard accumulé dans l'année sur le jalon de déploiement du système ainsi que le surcoût cumulé dans l'année.

Pour calculer le surcoût de l'année, il convient d'effectuer la différence entre le dernier devis déclaré et le devis (initial) et ensuite de constater le nombre de projets pour lesquels le surcoût de l'année est supérieur à 5 % (en millions d'euros constants). Il est procédé de même avec les délais sur le jalon « fin du déploiement » à périmètre constant.

Le tableau ci-après illustre les valeurs cibles du nouvel indicateur pour les années 2014-2017. Introduit pour la première fois en 2014, cet indicateur en cours de stabilisation n'a pas encore fait l'objet d'une comparaison de type PAP (prévision) versus RAP (exécution).

E. LES PERFORMANCES DU PILOTAGE DES SYSTÈMES D'INFORMATION

Dans leur rapport sur le PLF pour 2015 88 ( * ) , vos rapporteurs avaient montré l'ampleur des conséquences du dysfonctionnement du logiciel LOUVOIS et constaté que cette situation était révélatrice de dysfonctionnements récurrents dans la gestion des SIAG.

Depuis 2013, le ministère s'est engagé dans une réorganisation de la gouvernance des SIAG dont les résultats ne sont pas immédiatement perceptibles s'agissant de la conduite de projets s'étalant sur plusieurs années, mais qui traduisent une volonté d'introduire une plus grande rigueur.

1. LOUVOIS, un « boulet à traîner » jusqu'au déploiement de la nouvelle application SOURCE SOLDE

Malgré les investissements de correction réalisés et la mise en place de procédures palliatives de vérification, de nombreuses anomalies dans le versement des rémunérations subsistent qui ne permettent pas de sécuriser le versement des soldes et de lever le dispositif d'urgence mis en place à la fin de l'année 2012.

Elles se traduisent notamment par d'importants indus de paye et moins-versés aux administrés.

Au cours de son audition par la commission des finances du Sénat, le 29 octobre 2014 89 ( * ) , M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration, constatait :

« Comme vous le savez, la gestion de la masse salariale du ministère de la défense a été perturbée par les nombreuses anomalies dans le versement des rémunérations depuis le raccordement au calculateur LOUVOIS. Leurs causes, qui sont d'ordre technique, fonctionnel et organisationnel, ont fait l'objet d'un plan d'action. Ces anomalies se traduisent par d'importants indus de paye et de moins-versés aux administrés . La deuxième partie de la campagne de régularisation est en cours depuis le début de l'année et se poursuivra en 2015. Elle vise à traiter la totalité des dossiers et des anomalies : il s'agit de calculer et de régulariser, pour chaque personnel concerné, le solde entre les paiements qui lui sont dus et les versements qui lui ont été effectués par ou hors Louvois, et de mettre ainsi ses droits à jour. Cette campagne permettra non seulement de rétablir chaque administré dans ses droits, en lui versant ses dus, mais aussi de préserver les droits de l'État et le budget du ministère en recouvrant les sommes versées indûment.(...).

Concernant Louvois, une campagne de récupération des« trop-versés » pour la période février 2013-septembre 2014 est en cours, la campagne concernant la période octobre 2011-janvier 2013 étant quasiment achevée. Pour l'armée de terre, ces sommes représentent 78 millions d'euros sur 2011-2013 et 200 millions d'euros sur 2013-2014. Pour la marine, ce sont respectivement 25 millions d'euros pour 2013 et 14 millions d'euros pour 2014, pour le service de santé des armées, 27 millions d'euros pour 2013 et 15 millions d'euros pour 2014 (...).

S'agissant de LOUVOIS, nous faisons tout ce qui est possible pour récupérer les sommes indûment versées, mais il s'avère que certains payeurs publics ont des difficultés notamment lorsque les personnes qui ont quitté les armées sont au chômage. Le Trésor public dispose des outils pour réaliser ces recouvrements auprès des personnes qui ont quitté la fonction publique 90 ( * ) . (...)

Outre la question des trop-versés dont le ministère de la défense porte la charge en exécution des crédits de Titre 2, les dysfonctionnements de Louvois obligent le ministère à consacrer des crédits à la mise au point de versions correctives destinées à améliorer les performances mais aussi à prendre en considération les évolutions réglementaires - c'est ainsi que 5,2 millions d'euros ont été alloués en 2014 et 5,5 millions d'euros sont inscrits à ce titre en 2015 - mais aussi à prendre en charge un dispositif de vérification systématique et préalable des soldes 91 ( * ) pour détecter les erreurs les plus flagrantes et les corriger avant le versement. Ces dysfonctionnements entraînent également le maintien en service d'applications anciennes dont les coûts de maintenance vont s'accroître.

La mise en oeuvre du plan d'actions ministériel a nécessité des mesures de renfort en personnels auprès des différents services impliqués dans la gestion de la solde. Les effectifs plus importants ont été affectés auprès des CERH des différentes armées, essentiellement au CERH de Nancy (+ 63) et de Toulon (+39). Le centre de maintenance interarmées de la solde (CMIS) s'est vu affecter 26 personnes et le service ministériel opérateur des droits individuels (SMODI) a bénéficié de 3 commissaires supplémentaires. Ces renforts sont réalisés par redéploiement de personnels militaires et civils.

2. Cette situation perdurera avec plus ou moins d'intensité jusqu'au déploiement de l'application SOURCE SOLDE

Le calendrier du projet, jalonné par deux points de visibilité, devrait conduire à  la présentation de prototypes en décembre 2014 (fournis par les candidats au cours du dialogue compétitif 92 ( * ) ) et le premier déploiement (début de qualification du système) en décembre 2015. Compte tenu de la complexité du projet, ces deux dates sont très ambitieuses et justifient des équipes importantes tant du côté de l'administration que chez les industriels.

Le dialogue compétitif doit permettre de consolider le calendrier des bascules des armées. Au mieux, la première bascule pourrait intervenir au premier trimestre 2017 après une longue période de solde en double.

Le marché sera conclu pour une période de 10 ans et comprendra une tranche ferme, couvrant la réalisation du système et sa mise en service, et des tranches conditionnelles couvrant la maintenance du système et les évolutions nécessaires pour rester en phase avec les évolutions de la réglementation. Le plan prévisionnel d'investissement de l'action 05 tient compte à ce stade (sur le fondement des estimations de la partie étatique) de la nécessité de notifier et d'engager la tranche ferme du marché et de procéder à des paiements à hauteur d'environ 40 % de son montant. La notification des tranches conditionnelles devrait intervenir au-delà de 2015.

Le dispositif mis en place s'articule autour d'une équipe de programme intégrée composée d'un binôme formé par le directeur de programme, appartenant à la DGA, et l'officier de programme, appartenant à l'autorité cliente, la DRH-MD. L'équipe de programme est actuellement composée de 29 ETP et pourrait monter à 40 ETP.

Les méthodes et procédures de conduite sont globalement celles des programmes d'armement adaptées aux SIAG. Dans sa phase actuelle le projet est sous responsabilité de la DGA.

L'une des difficultés identifiées dans l'élaboration de logiciel de cette nature est l'extrême diversité des régimes indemnitaires et l'hétérogénéité de la réglementation. Une simplification préalable, autant que possible, serait sans doute, la bienvenue.

3. Des dépassements de délais et de coûts pour un grand nombre de projets

Vos rapporteurs avaient constaté dans le rapport sur le PLF 2015 des retards importants et des dépassements de coût 93 ( * ) . Même si l'on peut admettre des décalages dans le temps et des dépassements de budget lorsqu'ils résultent de la mise en chantier de fonctionnalités nouvelles, il n'en demeure pas moins que la situation traduite par le tableau pages 111 et 112 ne peut être qualifiée de satisfaisante.

Elle reflète encore les défauts chroniques dans la définition des projets, dans l'évaluation de leurs coûts et dans leur conduite qui ont appelé la réforme de la gouvernance des SIAG et l'introduction de procédures plus rigoureuses dans le suivi des projets 94 ( * ) .

4. Une réforme de la gouvernance a été mise en place en 2013 mais ses effets ne pourront être mesurés qu'à moyen terme

Une nouvelle gouvernance des SIAG a été mise en place en 2013. Elle s'est traduite par une redistribution des rôles et missions entre les directions métiers du ministère, la direction générale des systèmes d'information et de communication (DGSIC) et la délégation des systèmes d'administration et de gestion (DéSIAG). L'objectif est de disposer de SIAG efficaces et nécessaires à la modernisation du ministère en maîtrisant coût global et délais des projets.

En qualité de porteurs des besoins de transformation, les métiers sont désormais responsables de la conduite des projets de SIAG.

La DéSIAG, rattachée au secrétaire général pour l'administration (SGA ) :

• participe, en liaison avec la DGSIC, à l'urbanisation des SIAG ;

• établit et entretient le schéma directeur des SIAG du ministère, ce schéma pour la période 2015-2017 sera achevé à la fin de l'année 2014 ;

• prépare les travaux de la commission des systèmes d'information d'administration et de gestion (CSIAG) ;

La commission des systèmes d'information d'administration et de gestion (CSIAG) 95 ( * ) définit les grandes orientations en matière de SIAG et valide le schéma directeur ainsi que l'organisation fonctionnelle des processus d'administration et de gestion du ministère (urbanisation)

Un comité de pilotage des SIAG (COPIL SIAG), désormais présidé par le délégué des systèmes d'information d'administration et de gestion, instruit les décisions de la CSIAG, contrôle l'application de la politique des SIAG et pilote les actions correspondantes. Il assure la phase de concertation préalable et conduit la coordination entre les zones fonctionnelles. Il construit les indicateurs et analyse leurs variations.

• pilote l'action 5 « Systèmes d'information, d'administration et de gestion » du programme 212 et élabore à ce titre la gestion stratégique du portefeuille de projets en investissant en fonction des enjeux stratégiques de modernisation du ministère ;

D'un point de vue strictement financier, la gestion stratégique du portefeuille de projets consiste à allouer prioritairement la ressource disponible sur les opérations qui présentent le meilleur retour sur investissement et l'impact le plus fort sur la transformation et la modernisation du ministère (tout en n'obérant pas le financement du maintien en condition opérationnelle (MCO) de la base installée qu'il convient de rationaliser).

• veille à ce que les projets réunissent toutes les conditions de succès et soient accompagnés d'une démarche de maîtrise des risques ;

Depuis le début 2013, l'opportunité de lancer une nouvelle opération SIC est systématiquement étudiée par la DéSIAG avant le lancement effectif du projet. L'initiative en provenance des états-majors, directions et services porteurs du besoin fait l'objet d'une soutenance sur le fondement d'un document formel d'expression du besoin. En 2014, une trentaine d'initiatives de ce type seront ainsi examinées lors de revues dites « initiales ».

Des revues de lancement ou de changement de phase des projets ont par ailleurs été mises en place. Elles rassemblent l'ensemble des compétences du ministère pour aider les métiers à réunir les conditions de succès de leurs projets. Contribuant à la gestion stratégique du portefeuille de projets, les revues sont organisées soit par la DéSIAG pour les projets à fort enjeu ministériel (15 revues de ce type programmées pour 2014) ou par les responsables SIC (placés auprès des états-majors, directions et services) pour les autres projets.

A l'occasion de ces revues, le devis du projet est également examiné autant que le retour sur investissement, qui est évalué et consolidé.

Plusieurs projets ont bénéficié de ce dispositif, prioritairement mis en oeuvre au profit des projets de SIAG dont les enjeux sont associés aux chantiers de transformation lancés par le ministère fin 2013 dans le cadre de la LPM. Les recommandations issues des revues de projet sont communiquées au président du comité directeur du projet, qui doit les mettre en oeuvre. Elles sont suivies en commission des SIAG, présidée par le SGA.

Les projets : ALPHA d'optimisation des processus achat, ARES, de gestion logistique du soutien de l'homme et des matériels communs, ARCADE de gestion du courrier, PRESAJE pour l'organisation des JDC, ARIANE pour l'accompagnement des reconversions, SERES pour l'optimisation de la fonction RHL pilotée par le service du commissariat des armées et SOURCE SOLDE de remplacement du calculateur Louvois, ont ainsi été analysés pour réunir les conditions de réussite. Plusieurs projets ont également bénéficié d'un accompagnement et d'un ajustement pour sécuriser leur déroulement et leur devis.

En moyenne, les projets bénéficient de 40 à 60 recommandations dont 50 % sont primordiales.

Ce premier retour d'expérience témoigne de l'utilité du dispositif, voire de son caractère indispensable pour sécuriser des projets intrinsèquement complexes dans un contexte de restrictions budgétaires et de déflations d'effectifs extrêmement contraignant.

• participe à l'élaboration de projets ou conduit certains projets transverses à la demande du SGA ;

• met en oeuvre, en matière de sécurité des systèmes d'information, les mesures de sécurité applicables aux projets SIAG du SGA (expression de besoins, assistance et contrôle).

Il est prématuré d'évaluer les résultats de cette réforme du pilotage des SIAG lors de leur lancement et pendant les phases de conception. Son but est de prendre des mesures en amont de manière à sécuriser la mise en service en limitant les problèmes de mise au point sources de délais et de surcoût. Selon le ministère de la défense, « la majorité des projets, lancés en 2013 et 2014, n'ont pas encore atteint ce stade. De fait, les résultats finaux ne sont pas encore accessibles. Toutefois, les premiers résultats obtenus sur le projet ARCADE livré en septembre 2014 - avec un respect à la fois des coûts et des délais - sont très encourageants. D'autant plus que les plannings et devis prévisionnels de la majorité des projets en cours amènent à confirmer la cible de l'indicateur de suivi de la performance des projets de SIAG (part des projets dérivant en coût ou en délai inférieure au quart et surcoût cumulé limité à 5 %) ».

Vos rapporteurs espèrent que le renforcement des moyens et la réorganisation de la fonction pilotage des systèmes d'information permettra d'améliorer une situation devenue difficilement acceptable sur le plan budgétaire, mais plus encore lorsqu'elle affecte le moral des personnels de la défense.


* 85 Projet de loi de finances pour 2014 : Défense : soutien de la politique de la défense - Avis n° 158 (2013-2014) de Mme Michelle DEMESSINE et M. Joël GUERRIAU, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées p. 92

http://www.senat.fr/rap/a13-158-7/a13-158-7.html

* 86 Sont en revanche exclus de ce périmètre, les militaires soldés selon les modalités de la paie sans ordonnancement préalable, les militaires de la gendarmerie nationale rémunérés par le ministère de l'intérieur et enfin les officiers généraux de la 2 e section gérés par l'application PRELUDE.

* 87 Depuis 2010, la DGSIC procède au recensement des applications rattachées à chaque fonction métier de quatre zones fonctionnelles : les ressources humaines, les finances, la gestion du système d'information et les échanges. Ces zones représentent à elles seules 70 % du total des SIAG du ministère et constituent le périmètre de l'indicateur. L'objectif, mesuré par l'indicateur « Nombre d'applications informatiques par fonction », figurant au PAP jusqu'en 2014 était de réduire le nombre d'applications répondant à un même besoin fonctionnel. En 2010, 6,8 applications étaient recensées en moyenne par fonction. Compte tenu de la connaissance actualisée du parc applicatif du ministère, l'objectif est désormais de faire passer ce taux à 4,10 en 2014 et 3,70 en 2015.

* 88 Projet de loi de finances pour 2014 : Défense : soutien de la politique de la défense - Avis n° 158 (2013-2014) de Mme Michelle DEMESSINE et M. Joël GUERRIAU, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, p. 98 et suiv.

http://www.senat.fr/rap/a13-158-7/a13-158-7.html

* 89 http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20141027/etr.html#toc2

* 90 Lorsque les personnels sont dans les cadres, moyennant un étalement des retenues, les trop-versés peuvent être récupérés progressivement sur les soldes. En revanche, lorsque les personnes ont quitté les armées, la recherche devient plus compliquée et le recouvrement plus incertain - la situation sociale est prise en considération - ce qui peut entraîner des abandons de créances. Cette partie du recouvrement incombe au Trésor Public et échappe au ministère de la défense.

* 91 Des contrôles sont effectués manuellement par la transmission des soldes du mois N+1 en début de mois N, aux directions de personnels afin de les vérifier et de passer les corrections pour réduire au minimum le nombre des bulletins présentant une solde négative ou une solde à zéro.

* 92 La procédure de passation de marché est un dialogue compétitif, débuté par la publication de l'avis d'appel public à candidatures (AAPC) le 1er février 2014. Le dossier de consultation des entreprises (DCE) a été envoyé le 18 avril aux trois candidats admis au dialogue.

L'objectif est de réaliser trois tours de dialogue. Le premier a eu lieu du 13 juin au 24 juillet. Le suivant aura lieu au quatrième trimestre 2014 et les offres finales sont attendues début 2015, pour une notification prévue au premier semestre 2015.

* 93 Projet de loi de finances pour 2014 : Défense : soutien de la politique de la défense - Avis n° 158 (2013-2014) de Mme Michelle DEMESSINE et M. Joël GUERRIAU, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées p. 102

http://www.senat.fr/rap/a13-158-7/a13-158-7.html

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