Avis n° 111 (2014-2015) de M. René-Paul SAVARY , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 20 novembre 2014

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N° 111

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 novembre 2014

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2015 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME VI

SANTÉ

Par M. René-Paul SAVARY,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Alain Milon, président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général ; M. Gérard Dériot, Mmes Colette Giudicelli, Caroline Cayeux, M. Yves Daudigny, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Gérard Roche, Mme Laurence Cohen, M. Gilbert Barbier, Mme Aline Archimbaud, vice-présidents ; Mme Agnès Canayer, M. René-Paul Savary, Mme Michelle Meunier, M. Jean-Louis Tourenne, Mme Elisabeth Doineau, secrétaires ; MM. Michel Amiel, Claude Bérit-Débat, Mme Nicole Bricq, MM. Olivier Cadic, Jean-Pierre Caffet, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Noël Cardoux, Daniel Chasseing, Mmes Karine Claireaux, Annie David, Isabelle Debré, Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Chantal Deseyne, MM. Claude Dilain, Jérôme Durain, Jean-Yves Dusserre, Mme Anne Emery-Dumas, MM. Michel Forissier, François Fortassin, Jean-Marc Gabouty, Mme Françoise Gatel, M. Bruno Gilles, Mme Pascale Gruny, M. Claude Haut, Mme Corinne Imbert, MM. Éric Jeansannetas, Georges Labazée, Jean-Baptiste Lemoyne, Mmes Hermeline Malherbe, Brigitte Micouleau, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Louis Pinton, Mme Catherine Procaccia, M. Didier Robert, Mme Patricia Schillinger, MM. Michel Vergoz, Dominique Watrin.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 2234, 2260 à 2267 et T.A. 420

Sénat : 107 et 108 à 114 (2014-2015)

LES OBSERVATIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Réunie le mercredi 19 novembre 2014 , sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission a examiné le rapport pour avis de M. René-Paul Savary , sur les crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2015 .

La commission a relevé que le projet de loi de finances pour 2015 fixait les crédits de la mission « Santé » à 1,2 milliard d'euros, en hausse de 3 % à périmètre constant par rapport aux crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2014. Cette évolution résulte de l'effet conjugué d'une baisse de 5,8 % des crédits du programme 204 « prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » et d'une hausse de 13,7 % des crédits du programme 183 « protection maladie » .

La commission souligne que les opérateurs sanitaires de l'Etat font face à des contraintes budgétaires croissantes au moment même où ils doivent assurer des missions toujours plus nombreuses, ce qui génère des tensions d'autant plus fortes qu'elles sont accentuées par les incertitudes liées aux mesures envisagées par le Gouvernement dans la future loi de santé . Si les efforts de rationalisation sont légitimes, les agences sanitaires doivent garder une taille critique suffisante pour continuer à développer une expertise de qualité.

La commission constate ensuite l'insuffisante maîtrise des crédits dédiés au financement de l'aide médicale de l'Etat (AME) . Les dépenses d'AME font l'objet de sous-budgétisations chroniques qui remettent en cause la soutenabilité même de la mission. En outre, la dette de l'Etat vis-à-vis de l'assurance maladie au titre de l'AME n'est pas résorbée.

La commission considère que des ajustements complémentaires aux réformes en cours sont nécessaires pour retrouver une véritable maîtrise du dispositif. Elle a adopté un amendement du rapporteur qui institue pour les bénéficiaires de l'AME une contribution forfaitaire annuelle comparable à la participation plafonnée de droit commun à laquelle sont soumis les assurés lorsqu'ils recourent à des soins médicaux (50 euros).

Suivant l'avis de son rapporteur, la commission a ensuite donné un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2015.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de finances pour 2015 fixe les crédits de la mission « Santé » à 1,2 milliard d'euros, un niveau en hausse de 3 % à périmètre constant par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2014. Cette hausse générale résulte de l'évolution en sens contraires des deux programmes de la mission :

- le programme 204 relatif à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l'offre de soins retrace en particulier les subventions pour charges de service public versées à des opérateurs sanitaires de l'Etat. Ses crédits diminuent de 5,8 % à périmètre constant, après une baisse de 2,5 % en 2014 par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 ;

- le programme 183 « protection maladie », qui représente 53 % du budget de la mission et se compose à hauteur de 98 % de crédits dédiés au financement de l'aide médicale de l'Etat (AME), affiche quant à lui une hausse de 13,7 %, après une progression de 2,9 % en 2014 par rapport à la loi de finances initiale pour 2013.

La conjugaison de ces deux tendances ne permet pas à la mission « Santé » de contribuer à la réalisation des 7,7 milliards d'euros d'économies prévues pour l'Etat en 2015 dans le cadre du plan d'économies de 50 milliards d'euros élaboré par le Gouvernement pour les trois prochaines années. En particulier, sous l'effet de la hausse soutenue des crédits alloués à l'AME, les dépenses d'intervention de l'ensemble de la mission progressent d'environ 6 %.

A cet égard, votre rapporteur considère que la croissance des crédits de l'AME demeure insuffisamment maîtrisée. Le manque de fiabilité des prévisions budgétaires du Gouvernement, dont témoignent les sous-budgétisations chroniques de ces dépenses ainsi que le maintien d'une dette de l'Etat vis-à-vis de l'assurance maladie, ne peut conduire qu'à la plus grande circonspection dans l'appréciation de la programmation budgétaire triennale présentée dans le projet annuel de performance (PAP) 2015 de la mission. La programmation prévoit un ralentissement du rythme d'augmentation des crédits de la mission « Santé » en 2016 (+ 1,58 % par rapport à 2015) et 2017 (+ 0,57 % par rapport à 2016).

Figure n° 1 : Evolution des plafonds des crédits de paiement de la mission « Santé » entre 2015 et 2017

(en millions d'euros)

LFI 2014

PLF 2015

2016

2017

Plafond de la mission

1 170

1 205

1 224

1 231

% d'évolution entre N-1 et N

+ 2,99 %

+ 1,58 %

+ 0,57 %

Source : Projet annuel de performance (PAP) de la mission « Santé » pour 2015 (la LFI 2014 est présentée au format de la maquette budgétaire retenue pour la programmation 2015-2017 ; elle est retraitée des modifications de périmètre et de transferts impactant la mission en PLF 2015)

A périmètre constant, ces objectifs ne pourront être tenus qu'au prix d'une poursuite des efforts de rationalisation demandés aux agences sanitaires et à la condition d'une réforme du dispositif de l'AME.

Or la recherche d'efficience et de productivité à laquelle sont légitimement appelés les opérateurs sanitaires de l'Etat risque d'atteindre rapidement ses limites dans un contexte où ces derniers assument - et continueront à assumer - des missions toujours plus nombreuses, en particulier dans la perspective de la mise en oeuvre de la future loi de santé.

Quant à l'AME, si les mesures prises pour aligner les modalités de tarification et de facturation des dépenses sur le droit commun apparaissent bienvenues, elles demeurent insuffisantes pour retrouver une véritable maîtrise de la dépense. Votre rapporteur appelle donc de ses voeux, dans le respect du double objectif humanitaire et sanitaire du dispositif, des ajustements complémentaires.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. DES AGENCES SANITAIRES SOUS FORTE PRESSION BUDGÉTAIRE MALGRÉ L'ATTRIBUTION DE MISSIONS NOUVELLES

Le programme « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », qui relève de la responsabilité de la direction générale de la santé, poursuit trois objectifs généraux :

- piloter le réseau des agences sanitaires et animer celui des agences régionales de santé (ARS) ;

- développer les stratégies de santé publique et réduire la vulnérabilité de la population face à des évènements sanitaires graves ;

- moderniser l'offre de soins et garantir sa qualité.

La mise en oeuvre de ces orientations se décline en huit actions. L'ensemble d'entre elles se caractérisent, par rapport à la loi de finances initiale pour 2014, par une diminution des crédits, à l'exception de celle destinée au pilotage de la politique de santé publique.

Cette dernière vise principalement à mieux coordonner et relayer les actions de santé publique, à travers, par exemple, le renforcement des systèmes d'information de gestion des crises ou l'amélioration du fonctionnement de la Conférence nationale de santé.

Figure n° 2 : Evolution des crédits des actions du programme 204 entre 2014 et 2015 (à périmètre constant)

(en millions d'euros en AE et en CP)

Intitulé de l'action

LFI 2014

PLF 2015

Variation

11 Pilotage de la politique de santé publique

85,2

93,2

+ 9,3 %

12 Accès à la santé et éducation à la santé

26,3

25,2

- 4,3 %

13 Prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins

8,8

7,9

- 10,0 %

14 Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades

65,9

62,1

- 5,6%

15 Prévention des risques liés à l'environnement, au travail et à l'alimentation

21,0

18,1

- 13,9%

16 Réponse aux alertes et gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises sanitaires

18,2

11,6

- 36,4%

17 Qualité, sécurité et gestion des produits de santé et du corps humain

144,9

138,6

- 4,3%

18 Projets régionaux de santé

130,9

123,9

- 5,3%

19 Modernisation de l'offre de soins

189,4

170,1

- 10,2%

Total

690,6

650,66

- 5,8%

Source : Commission des finances du Sénat (à partir des données du projet annuel de performance 2015 de la mission « Santé » et des réponses au questionnaire du rapporteur spécial)

La diminution des crédits du programme 204 s'explique assez largement par l'importance des efforts de rationalisation et de baisse des dépenses de fonctionnement auxquels sont appelées les agences sanitaires. A cet égard, l'évolution de l'enveloppe budgétaire tient également compte des orientations définies par le projet de loi relatif à la santé présenté en Conseil des ministres le 15 octobre 2014 dans le prolongement de la stratégie nationale de santé lancée par le Gouvernement en 2013.

Votre rapporteur juge légitime et logique qu'une contribution soit demandée aux opérateurs sanitaires en particulier comme à l'ensemble des opérateurs de l'Etat. Il relève cependant que l'ampleur des efforts demandés atteint progressivement un stade critique si l'on en juge d'après les profondes inquiétudes exprimées par chacun d'entre eux. Ces tensions apparaissent d'autant plus fortes qu'elles interviennent dans un contexte de relative incertitude sur la refonte du paysage des agences sanitaires telle qu'envisagée par le Gouvernement dans le projet de loi relatif à la santé.

A. D'IMPORTANTES BAISSES DE MOYENS DANS LE CONTEXTE D'UNE RESTRUCTURATION À VENIR PAR LA PROCHAINE LOI DE SANTÉ

1. Huit agences sanitaires aux caractéristiques diverses financées en partie sur le programme 204

A travers le programme 204, le projet de loi de finances pour 2015 finance, à titre principal ou complémentaire, huit opérateurs de l'Etat participant à la mise en oeuvre des politiques nationales de prévention et de sécurité sanitaire.

De tailles diverses, ces opérateurs créés au fil du temps, sans schéma d'organisation global, sont tous placés sous la tutelle exclusive du ministère de la santé et des affaires sociales à l'exception de trois d'entre eux - l'Anses, l'Inca et l'EHESP - dont la tutelle reste partagée.

Figure n° 3 : Présentation des huit agences sanitaires subventionnées par le programme 204 en 2015

Opérateur

Missions

Budget

Agence nationale
de sécurité du médicament ( ANSM )

Instituée par la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé, elle s'est substituée le 1 er mai 2012 à l'Agence française de sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé (Afssaps).

Sa mission est double : garantir la sécurité des produits de santé tout au long de leur cycle de vie et garantir à tous les patients un accès équitable à l'innovation.

Son budget (environ 135 M €) est couvert principalement par une subvention de l'Etat qui représente 86 % des crédits de l'action 17 .

Les autres ressources de l'agence sont constituées de produits provenant de l'agence européenne du médicament (EMA), de l'OMS, du Conseil de l'Europe ainsi que de conventions d'études et de recherche.

Agence nationale
de sécurité sanitaire de l'alimentation, du travail et de l'environnement ( Anses )

Créée le 1 er juillet 2010 par la fusion de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset), elle fournit une expertise scientifique indépendante et pluridisciplinaire. Elle peut être saisie par les associations de consommateurs, de protection de l'environnement et de défense des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP).

La tutelle de l'agence étant partagée entre plusieurs ministères (santé, agriculture, environnement, travail, consommation), son budget (environ 130 M €) est couvert par des subventions issues de différents programmes. La subvention inscrite au programme 204 compte pour environ 75 % des crédits de l'action 15 .

Les autres ressources de l'agence sont issues notamment de taxes sur les produits phytosanitaires et de crédits de recherche.

Agence de la biomédecine ( ABM )

Outre les missions relatives au prélèvement et à la greffe d'organes, de tissus et de cellules confiées depuis 1994 à l'Etablissement français des greffes (EFG), elle assure, en application de la loi relative à la bioéthique de 2004 , des missions transversales (scientifiques, éthiques et régaliennes) dans quatre grands domaines de la biologie et de la médecine humaine (reproduction, embryologie, diagnostic prénatal, génétique, recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires). La loi de bioéthique de 2011 lui assigne de nouveaux objectifs (baisse du taux d'opposition au don d'organes, élargissement du cercle des donneurs vivants et de recours au don croisé, évaluation des pratiques du dépistage de la trisomie 21).

Son budget (environ 87 M €) est couvert à hauteur d'environ 16 % par la subvention du programme 204 qui représente environ 10 % de l'action 17 .

Ses recettes sont en outre constituées d'une dotation globale versée par l'assurance maladie, de ressources propres (registre France Greffe de moelle et Eurocord), et d'autres subventions versées dans le cadre du plan Cancer et par des organismes internationaux.

Opérateur

Missions

Budget

Institut national
de prévention et d'éducation pour
la santé ( Inpes )

Institué par la loi relative à la politique de santé publique de 2004 , il met en oeuvre, pour le compte de l'Etat et de ses établissements publics, des programmes de santé publique et apporte son concours à la mise en oeuvre des projets régionaux de santé (PRS).

Son budget (environ 84 M €) est constituée d'une subvention qui représente 96 % des crédits de l'action 12 , d'une dotation de l'assurance maladie, de recettes fiscales, d'une subvention de la Cnav et de ressources propres.

Etablissement
de préparation
et de réponse aux urgences sanitaires ( Eprus )

Créé par la loi de 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur , il assure la gestion des moyens de lutte contre les menaces graves, tant du point de vue humain (réserve sanitaire) qu'au plan matériel (produits de santé).

Son budget (environ 143 M €) est constitué d'une subvention qui représente 92 % des crédits de l'action 16 .

Institut national
de veille sanitaire ( InVS )

Créé par la loi du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et au contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme , il a pour mission la surveillance et l'observation permanentes de l'état de santé de la population, la veille et la vigilance sanitaires, l'alerte sanitaire et une contribution à la gestion des situations de crise sanitaire.

Son budget (environ 60 M €) est constitué à hauteur de 92 % de la subvention inscrite au programme 204 où elle représente environ 58 % des crédits de l'action 11.

Institut national du cancer (INCa)

Créé en 2005 sous la forme d'un GIP entre l'État et les principaux acteurs de la lutte contre le cancer (Cnam, INSERM, CNRS, fédérations hospitalières, associations de patients), il est chargé de coordonner les actions de lutte contre le cancer.

Sa tutelle étant partagée entre plusieurs ministères (santé, recherche), son budget (environ 97 M €) est constitué de plusieurs subventions. Celle inscrite au programme 204 représente environ 87 % des crédits de l'action 14 .

Ecole des hautes études en santé publique ( EHESP )

L'EHESP assure la formation des personnes ayant à exercer des fonctions de direction, de gestion, d'inspection ou de contrôle dans les domaines sanitaires, sociaux ou médico-sociaux et assure un enseignement supérieur et des activités de recherche en santé publique.

Sa tutelle étant partagée par plusieurs ministères (santé, enseignement supérieur et recherche), son budget (environ 57 M €) est constitué de plusieurs subventions. Celle inscrite au programme 204 représente environ 13 % des crédits de l'action 11. L'établissement dispose par ailleurs de ressources propres.

Source : commission des affaires sociales

2. La poursuite de la réduction des subventions pour charges de service public et des plafonds d'effectifs

Dans la continuité des précédents exercices, les agences sanitaires relevant du programme 204 devront s'astreindre à de nouveaux efforts de productivité et d'efficience pour prendre leur part dans les mesures de redressement des finances publiques. La poursuite de cette démarche de rationalisation se traduit par la réduction tant des subventions pour charges de service public allouées aux agences que des plafonds d'emplois auxquels ces dernières sont soumises.

Pour 2015, le projet de loi de finances réduit de près de 14 millions d'euros les crédits dédiés aux subventions pour charges de service public inscrits sur le programme 204. Leur montant total est ainsi ramené de 315 millions cette année à 301 millions d'euros l'année prochaine, soit une baisse de 4,4 % à périmètre constant . A l'horizon 2017 selon la programmation pluriannuelle, la réduction devrait atteindre 12,9 %.

Le taux de réduction des subventions est ainsi largement supérieur à l'objectif fixé par la lettre de cadrage du Premier ministre du 7 mai 2014. Celle-ci prévoyait en effet une contraction d'au moins 2 % en 2015.

Figure n° 4 : Evolution des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs du programme 204

(en millions d'euros)

Opérateur

Exécution 2013

LFI 2014

PLF 2015

Variation 2014/2015

Agence de la biomédecine (ABM)

13,6

15,1

14,9

- 1,3 %

Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM)

116,4

123,3

119,3

- 3,2 %

Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses)

13,3

13,7

13,6

- 0,7 %

Ecole des hautes études en santé publique (EHESP)

10,3

10,4

10,0

- 3,8 %

Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus)

15,2

17,3

10,7

- 38,2%

Institut national du cancer (INCa)

52,3

55,6

54,2

- 2,5 %

Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES)

12,9

24,1

24,0

- 0,4 %

Institut national de veille sanitaire (InVS)

53,7

55,5

54,3

- 2,2 %

Total à périmètre constant

315,0

301,0

- 4,4 %

Source : Commission des finances du Sénat (à partir du projet annuel de performance de la mission « Santé » pour 2015)

Si tous les opérateurs sans exception sont concernés par la baisse des subventions, l'Eprus, l'ANSM, l'Inca et l'InVS sont particulièrement touchés.

La très forte réduction de la subvention de l'Eprus, qui atteint 38 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2014, tient compte, selon le projet annuel de performance de la mission « Santé », « des économies réalisées par l'établissement sur le dispositif de stockage, sur le programme de rationalisation du renouvellement des produits et sur ses dépenses de fonctionnement ainsi que de l'objectif de diminution du niveau de son fonds de roulement prévisionnel à horizon 2015 ». Depuis 2011, l'établissement s'est en effet engagé dans une démarche de rationalisation du renouvellement des stocks de produits de santé visant à lisser ses acquisitions sur plusieurs exercices. La réduction de la subvention inscrite au programme 204 s'inscrit plus généralement dans la perspective de la fusion de cet établissement avec l'InVS et l'INPES au sein d'un opérateur unique qui devrait être opérationnel à compter de 2016.

En 2015, la subvention allouée à l'ANSM, qui constitue quasiment la seule ressource de l'agence, devrait quant à elle s'élever à un peu plus de 119 millions d'euros, ce qui correspond à une baisse de 3,2 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances pour 2014 et de 7,2 % par rapport à ceux votés pour 2013. La dotation destinée à l'Inca diminue quant à elle de 1,4 million d'euros, soit une baisse de 2,5 % par rapport à 2014.

Parallèlement à cette baisse des subventions, la diminution des plafonds d'autorisations d'emplois devrait atteindre 2 % en 2015, tous opérateurs confondus. Le plafond d'ETPT autorisés passe ainsi de 2 579 ETPT en 2014, à 2 527 ETPT en 2015, soit une suppression de 52 emplois.

Figure n° 5 : Evolution du nombre d'emplois des opérateurs rémunérés par le programme 204

Opérateur

LFI 2014

PLF 2015

Variation 2014 et 2015

(sous plafond)

sous plafond

hors plafond

sous plafond

hors plafond

Agence de la biomédecine (ABM)

256

15

251

16

- 5 (- 2,0 %)

Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM)

1 003

6

983

6

- 20 (- 2,0 %)

Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses)

1255

70

1281

70

+ 26 (+ 2,0 %)

Ecole des hautes études en santé publique (EHESP)

337

64

329

71

- 8 (- 2,4 %)

Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus)

30

0

30

0

0,0 %

Institut national du cancer (INCa)

154

10

151

12

- 3 (-1,9 %)

Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes)

129

4

127

5

- 2 (- 1,6 %)

Institut national de veille sanitaire (InVS)

402

9

392

9

- 10 (- 2,5 %)

Total sous plafond

2 579

110

2 527

121

- 52 (- 2,0 %)

Source : Projet annuel de performance (PAP) de la mission « Santé » pour 2015

En volume, l'ANSM demeure l'opérateur le plus touché par la baisse du nombre d'ETPT . Son plafond d'emplois est fixé à 989 ETPT pour 2015, soit une diminution de 20 ETPT - c'est-à-dire 2 % de ses effectifs - au regard du plafond inscrit en loi de finances initiales pour 2014. Par rapport à 2013, la baisse atteint 28 ETPT. Dans la perspective de sa fusion avec l'INPES et l'Eprus en 2015, l'InVS devra composer avec une baisse de 10 ETPT, les effectifs de deux autres agences restant quasiment stables.

Dans le cadre d'une seconde délibération sur le projet de loi de finances pour 2015, l'Assemblée nationale a adopté à l'initiative du Gouvernement un amendement qui minore encore davantage les crédits du programme 204. Une baisse supplémentaire de 3 millions d'euros est en effet prévue, justifiée par « la poursuite de l'effort de rationalisation des missions portées par les opérateurs sanitaires ».

B. DES INQUIÉTUDES CROISSANTES SUR LA CAPACITÉ À ASSURER DES MISSIONS DE PLUS EN PLUS EN PLUS NOMBREUSES

S'il paraît normal que les agences sanitaires contribuent elles aussi aux efforts d'économies budgétaires, la poursuite des efforts de rationalisation engendre aujourd'hui des tensions croissantes dans la mesure où ils interviennent dans le cadre de la montée en charge de certaines compétences ou de l'attribution de missions nouvelles.

L'« effet ciseau » résultant de la discordance de plus en plus importante entre les ressources allouées aux agences et les missions que celles-ci doivent assumer, impacte tout particulièrement l'activité de l'ANSM. Celle-ci bénéficie d'une large délégation de puissance publique qui lui permet de prendre, au nom de l'Etat, plus de 80 000 décisions par an, en particulier dans le cadre des procédures d'autorisation et d'interdiction des médicaments. Elle possède à ce titre un pouvoir de sanction assorti d'amendes financières. Outre ses activités d'évaluation avant et après la mise sur le marché, de contrôle des produits en laboratoires, d'inspection sur les sites de production, de distribution en gros ou d'essais cliniques, l'agence a pour mission de définir et de diffuser auprès des professionnels de santé et des patients des informations destinées à favoriser le bon usage des produits de santé. Les fortes contraintes budgétaires auxquelles l'opérateur est exposé ne doivent pas remettre en cause sa capacité à réaliser l'ensemble de ses missions, actuelles et nouvelles. Sa force de réactivité pour prévenir et faire face aux urgences sanitaires liées aux produits de santé doit être préservée.

Or l'activité de l'ANSM est en croissance continue : outre la montée en puissance de son activité de pharmaco-épidémiologie, elle devra s'approprier la mise en oeuvre du nouveau règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain 1 ( * ) ainsi que l'application de la future réglementation européenne visant à renforcer la sécurité des dispositifs médicaux. A cela s'ajoutent les évolutions qui seront rendues nécessaires par la mise en oeuvre de la future loi de santé, au titre notamment de la sécurisation de la chaîne d'approvisionnement en médicaments (article 36) ou de l'enjeu non moins négligeable de la création d'un accès ouvert aux données de santé (article 47). L'exercice est rendu d'autant plus difficile qu'étant une agence « de guichet », elle ne possède pas la totale maîtrise de son flux d'activité.

Les autres opérateurs du programme 204 sont confrontés à des difficultés comparables. L'Inca, en particulier, fait part de ses inquiétudes grandissantes quant à la poursuite des évolutions budgétaires en cours et ses conséquences sur les politiques de prévention et de sécurité sanitaire. La direction de l'institut considère la situation comme inédite au regard des enjeux soulevés non seulement par l'obligation de faire face à l'ensemble des engagements pluriannuels qui découlent de sa mission de soutien à la recherche mais aussi de la nécessité d'engager dès aujourd'hui la mise en oeuvre du troisième plan cancer, qui couvre la période 2014-2019 et mobilisera 1,5 milliard d'euros au total, afin de se donner les moyens d'atteindre les objectifs impartis à l'échéance fixée. L'institut indique qu'en l'absence de financement complémentaire en provenance de l'Etat, il sera conduit à mobiliser son fonds de roulement pour pouvoir faire face aux dépenses prévues par ce plan, d'autant plus que certaines actions sont nouvelles, en particulier l'extension du financement des centre d'essais cliniques de phase précoce (Clip) ou de la mise en place d'essais sur le séquençage de l'exome tumoral. Or de façon générale, les fonds de roulement des divers opérateurs ont été fortement mis à contribution au cours des derniers exercices et sont aujourd'hui proches de leurs niveaux prudentiels.

De même, l'ABM qui souligne qu'elle a dû s'adapter aux premières restrictions budgétaires au moment où la montée en charge de ses activités n'était pas encore achevée, comme dans le domaine de l'embryologie, devrait se voir confier de nouvelles missions par la future loi de santé, notamment en matière de biovigilance des activités de prélèvement et de greffe d'organes, de tissus et de cellules.

L'Inpes indique également être « confronté à des contraintes contradictoires : faire des campagnes plus puissantes et visibles en appui des plans de santé publique et donc très coûteuses tout en poursuivant ses actions sur l'ensemble des autres thèmes, voir sur des thématiques nouvelles, avec des ressources en diminution ». Quant à l'InVS, « la poursuite de la diminution de la subvention pour charges de service public obligera à réviser très fortement le programme d'activités et les financements apportés aux réseaux de partenaires constituant le réseau national de santé publique (RNSP), pour réduire les dépenses de personnel et d'intervention » 2 ( * ) .

De façon générale, l'ensemble des agences auditionnées par votre rapporteur ont souligné la nécessité de maintenir une taille critique suffisante pour pouvoir disposer d'une expertise de qualité.

Dans ces conditions, il conviendra de se montrer particulièrement attentif aux éclairages que devra apporter le Gouvernement sur les mesures envisagées dans le projet de loi relatif à la santé, s'agissant tout particulièrement de l'articulation des missions des différents opérateurs et des moyens qui leur seront attribués.

Le projet de réforme du système d'agences sanitaires

L'article 42 du projet de loi de loi relatif à la santé entend habiliter le Parlement à prendre par ordonnances un grand nombre de mesures relevant du domaine de la loi afin de réformer le système d'agences sanitaires.

Ce projet part du constat selon lequel les agences sanitaires ont été mises en place par strates successives en fonction des enseignements tirés des crises sanitaires sans vision d'ensemble, ce qui les rend difficiles à piloter.

Cependant, l'étude d'impact reste relativement sibylline sur les aménagements envisagés par le Gouvernement. Elle indique que ceux-ci doivent permettre :

- de renforcer la coordination des opérateurs sanitaires afin de « réaffirmer la tutelle de l'Etat sur ses opérateurs ». Cela passe notamment par l'officialisation du « comité d'animation du système d'agences » (Casa) présidée par le directeur général de la santé et par la recherche d'une plus grande cohérence de leurs programmes de travail annuels ;

- et de faciliter la mutualisation de fonctions transversales d'appui ou de soutien entre agences sanitaires « dans le cadre de la politique d'optimisation budgétaire de l'Etat ».

Le Gouvernement indique qu'il « importe également que les missions et l'organisation des agences sanitaires soient réexaminées et réorganisées, dans un schéma global cohérent. » Mais seuls sont précisément évoquées la création d'un nouvel établissement public dénommé « Institut national de prévention, de veille et d'intervention publique », issu de la fusion de l'INPES, de l'InVS et de l'EPRUS et actuellement en phase de préfiguration sous la coordination du directeur de l'InVs, et plusieurs mesures de simplification qui concernent l'ANSM et l'EFS , notamment par la suppression de procédures administratives devenues obsolètes.

Aucune étude détaillée des économies attendues ne figure dans l'étude d'impact qui reste particulièrement vague. Le document indique en effet seulement que les projets « se feront, en cible, dans le respect des plans d'économie du gouvernement, tant en matière d'effectifs que de moyens globaux de l'ensemble des structures publiques concernées. Les aspects sociaux liés à la création du nouvel institut, et concernant les personnels de ces différents établissements (changement de fonctions ou de lieu de travail, départs...) seront évalués et gérés de façon très suivie ».

II. LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER LA MAÎTRISE DE L'AIDE MÉDICALE DE L'ETAT DANS LE RESPECT DE SON OBJECTIF SANITAIRE

Placé sous la responsabilité de la direction de la sécurité sociale, le programme « Protection maladie » se voit doté de 687,5 millions d'euros par le projet de loi de finances pour 2015, contre 604,9 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2014. Ses crédits connaissent ainsi une augmentation très soutenue, qui atteint 13,7 %.

Cette forte progression résulte en quasi-totalité de l'évolution des crédits dédiés au financement de l'aide médicale de l'Etat (AME). Ces derniers représentent 98,5 % des crédits du programme, le reliquat (10 millions d'euros) correspondant à la contribution de l'Etat au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva).

L'aide médicale de l'Etat (AME)

L'AME, qui fait l'objet de l'action n° 02 du programme 183, regroupe de fait trois dispositifs distincts : l'AME de droit commun, l'AME « soins urgents » et l'AME dite « humanitaire ».


L'AME de droit commun, entrée en vigueur le 1 er janvier 2000 parallèlement à la couverture maladie universelle (CMU), permet la prise en charge des soins des personnes étrangères en situation irrégulière résidant en France de façon ininterrompue depuis plus de trois mois et disposant de ressources inférieures à un plafond identique à celui fixé pour le bénéfice de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) 3 ( * ) . Financé par l'Etat, le dispositif est géré par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnam). L'AME de droit commun représente 93 % des crédits de l'action n° 02 en loi de finances initiale pour 2014.


L'AME « soins urgents » concerne les étrangers en situation irrégulière ne justifiant pas de la condition de résidence nécessaire pour bénéficier de l'AME de droit commun et nécessitant des soins urgents « dont l'absence mettrait en jeu le pronostic vital ou pourrait conduire à une altération grave et durable de l'état de santé de la personne ou d'un enfant à naître ». Sont également considérés comme urgents les soins destinés à éviter la propagation d'une pathologie à l'entourage ou à la collectivité ainsi que les soins liés à la maternité et à l'IVG. Les soins sont assurés par les hôpitaux et réglés aux établissements de santé par la Cnam à partir d'une subvention forfaitaire de l'Etat fixée à 40 millions d'euros depuis plusieurs années.


L'AME « humanitaire » est quant à elle accordée au cas par cas par décision individuelle du ministre compétent à des personnes ne résidant pas sur le territoire français de façon habituelle (personnes étrangères en situation régulière ou françaises). Elle représente environ une centaine d'admissions pour soins hospitaliers.

L'action n° 02 regroupe également des dispositifs connexes tels que les évacuations sanitaires d'étrangers résidant à Mayotte vers des hôpitaux de La Réunion ou de la métropole et les frais pharmaceutiques et soins infirmiers des personnes gardées à vue.

Le montant total des dépenses publiques exécutées au titre de l'AME sous ses différentes formes s'est élevé à 846 millions d'euros en 2013, soit une progression de 20,3 % par rapport à 2012. A l'exception de l'exercice 2012, les crédits consommés ont toujours été supérieurs aux crédits votés, ce qui appelle la recherche d'une meilleure maîtrise du dispositif.

A. UNE FORTE CROISSANCE DES DÉPENSES

1. Evolution du nombre de bénéficiaires

Comme le montre le graphe ci-dessous, le nombre de bénéficiaires de l'AME a crû d'environ 130 000 depuis 2002.

Figure n° 6 : Evolution du nombre d'usagers concernés par l'AME
(pour la France entière)

Source : Projet annuel de performance (PAP) de la mission « Santé » du PLF pour 2015

Selon le projet annuel de performance 2015 de la mission « Santé », les bénéficiaires de l'AME de droit commun étaient au nombre de 282 425 au 31 décembre 2013, après 215 763 en 2009. Leur nombre a ainsi progressé de 30 % en l'espace de quatre ans. On relève une forte accélération de l'augmentation entre 2011 et 2013, avec plus de 73 000 nouvelles ouvertures de droit. Environ 20 000 bénéficiaires de l'AME résident en outre-mer.

Votre rapporteur regrette que le projet annuel de performances pour 2015 ne comporte aucune information sur l'évolution du nombre de bénéficiaires au cours de l'exercice 2014.

Les caractéristiques des bénéficiaires restent relativement stables au cours du temps : 57 % sont des hommes, plutôt jeunes (4 sur 10 sont âgés de 18 à 35 ans et 19 % sont mineurs). Dans huit cas sur dix, les « foyers bénéficiaires » sont composés d'une personne seule.

Dans leur rapport conjoint de novembre 2010, l'inspection générale des finances (IGF) et l'inspection générale des affaires sociales (Igas) 4 ( * ) précisent que si une forte proportion des bénéficiaires de l'AME recourt aux soins de ville, la dépense moyenne des bénéficiaires de l'AME se caractérise par un poids élevé des dépenses hospitalières. La part des dépenses d'hospitalisation des bénéficiaires de l'AME s'élève en effet environ 70 % contre un peu plus de 50 % pour l'ensemble des assurés sociaux. Ces dépenses d'hospitalisation se font pour 93 % à l'hôpital public (soit 10 points de plus que pour les assurés sociaux). Ces différences expliquent que la dépense moyenne par bénéficiaire (entre 1 800 et 2 300 euros) soit plus élevée que la dépense moyenne d'un assuré du régime général (1 800 euros).

Quant à la répartition géographique des dépenses, elle apparaît très concentrée. Parmi les 106 caisses gestionnaires (caisses primaires d'assurance maladie en métropole et caisses générales de sécurité sociale dans les départements d'outre-mer), 10 concentrent 69 % de la dépense. Les caisses franciliennes représentent en effet 56 % de la dépense totale, la Cpam de Paris comptant pour un quart de la dépense d'AME totale. La CGSS de Guyane regroupe quant à elle 6 % de la dépense.

2. Evolution des crédits

Pour 2015, le montant total des crédits dédiés à l'AME s'élève à 677,5 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations d'engagement, en progression de 12 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014. Il se décompose comme suit :

- 632,6 millions d'euros au titre de l'AME de droit commun ;

- 40 millions d'euros au titre de l'AME « soins urgents » ;

- 4,9 millions d'euros pour les autres dépenses d'AME .

Votre rapporteur relève que la progression des crédits de l'AME explique à elle seule la hausse des crédits de la mission « Santé » en 2015. Cette mission ne respectera pas la norme d'évolution « zéro valeur » fixée pour les dépenses de l'Etat. Année après année, le rythme d'augmentation des dépenses d'AME se révèle supérieur au rythme de progression des dépenses d'assurance maladie.

Selon le rapport annuel de performance 2013 de la mission « Santé », l'AME de droit commun a représenté l'année dernière un montant exécuté de 715 millions d'euros contre 582 millions en 2012. Dépassant de loin la somme forfaitaire allouée en loi de finances, l'AME pour soins urgents a quant à elle atteint 129 millions après 120 millions d'euros en 2012. Les dépenses liées à l'AME humanitaire se sont élevées à 1,7 million d'euros contre 1,3 million d'euros en 2012.

B. DE NÉCESSAIRES ÉVOLUTIONS

1. Une insuffisante maîtrise des crédits

Comme en témoignent les sous-budgétisations récurrentes dont elles font l'objet, les dépenses liées à l'AME se caractérisent par une totale absence de fiabilité des prévisions budgétaires. Depuis l'origine, l'enveloppe budgétaire allouée à l'AME (233,5 millions d'euros en loi de finances pour 2003) souffre en effet du grand écart entre un coût prévisionnel sous-estimé, qui détermine les inscriptions de crédits en loi de finances, et la dépense réelle, facturée par la Cnam à l'Etat.

Le tableau ci-dessous retrace les écarts entre les crédits prévisionnels et les crédits exécutés pour les années 2009 à 2013.

Figure n° 7 : Ecart entre les crédits prévisionnels et les dépenses exécutées au titre de l'AME entre 2009 et 2013

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

LFI

490

535

588

588

588

Exécution

591

635

626

587,5

744

Ecart (%)

+ 20,7

+ 18,8

+ 6,5

- 0,1

+ 26,5

Source : Rapports annuels de performance (RAP) de la mission « Santé »

Cette sous-évaluation chronique des dépenses d'AME engendre traditionnellement des abondements de crédits dans la loi de finances rectificative en fin d'exercice. Mais ces crédits supplémentaires ne couvrent la plupart du temps qu'une partie des dépenses non anticipées, le reste à payer dû par l'Etat à l'assurance maladie continuant d'augmenter.

Le manque de fiabilité des prévisions budgétaires et le maintien de restes à charge de l'Etat à l'égard de l'assurance maladie ont conduit la Cour des comptes, dans son analyse de l'exécution du budget de la mission « Santé » pour l'exercice 2013, à considérer les dépenses d'AME comme des dépenses « dynamiques qui compromettent la soutenabilité de la mission ».

Les critiques de la Cour des comptes
sur le risque d'insoutenabilité du programme 183

« Le budget 2013 a été bâti sur une stabilisation des dépenses d'aide médicale d'Etat (AME) à 588 M€. Leur augmentation tendancielle de 3,5 % par an (+ 19 M€), du fait notamment de la suppression par la LFR 2012 du droit de timbre et de la procédure d'agrément pour les soins hospitaliers coûteux programmés instaurés par la LFI 2011, devrait être compensée par la mise en oeuvre en année pleine de la réforme de la tarification des prestations hospitalières des personnes bénéficiant de l'AME de droit commun, estimée à 24 M€.

La difficulté à apprécier l'impact sur les flux des demandeurs des réformes intervenues depuis 2011, des prévisions trop imprudentes quant à l'évolution du nombre de bénéficiaires et un report de deux mois de facturation de séjours hospitaliers de 2012 sur 2013 ont imposé une ouverture de crédits supplémentaires à hauteur de 156 M€ en LFR 2013. Ceux-ci ont toutefois été insuffisants pour faire face à l'augmentation de 23 % des dépenses d'AME , de sorte que la dette cumulée de l'Etat à l'égard de la Cnamts est passée de 38,7 M€ fin 2012 à 51,7 M€ en décembre 2013. Ni la LFR 2013, ni la LFI 2014 n'ont cependant prévu de financement pour couvrir cette dette, en méconnaissance du principe de sincérité budgétaire. Une telle irrégularité pourrait entacher la programmation de la LFI 2014 qui n'a procédé qu'à une augmentation limitée des crédits d'AME (604,9 M€), compromettant ainsi de nouveau la soutenabilité du programme 183 . »

Source : Cour des comptes, analyse de l'exécution du budget de l'Etat, mission « Santé », mai 2014

Pour 2014, le projet de loi de finances rectificative déposée le 12 novembre dernier à l'Assemblée nationale prévoit l'ouverture de 155,1 millions d'euros complémentaires au titre de l'AME. Il indique que cette « hausse de la dépense s'explique principalement par une progression du nombre de bénéficiaires de l'AME, qui n'a pu être que partiellement compensée par une baisse du coût moyen par patient liée à la mise en oeuvre de la réforme de la tarification des soins hospitaliers pris en charge au titre de l'AME. »

Quant au montant actualisé de la dette cumulée de l'Etat vis à vis de la Cnam au titre de l'AME (52 millions d'euros fin 2013), il devrait figurer dans le prochain projet de loi de règlement du budget et des comptes de l'année 2014.

Votre rapporteur relève que les crédits dédiés au financement de l'AME de droit commun dans le projet de loi de finances pour 2015 s'élèvent à 632,6 millions d'euros, soit 82,4 millions d'euros de moins qu'en 2013 et 84,4 millions d'euros de moins que la prévision actualisée pour 2014. Le projet annuel de performance indique lui-même que la dépense tendancielle d'AME de droit commun s'élèverait à 717 millions d'euros l'année prochaine . Cette prévision prend en compte la forte hausse de la dépense constatée en 2013 (715 millions d'euros, soit + 23 % par rapport à 2012) et retient l'hypothèse d'une même évolution tendancielle des effectifs de bénéficiaires de l'AME que celle observée entre 2008 et 2013, soit + 3,9 % en moyenne chaque année, et d'une stabilité des coûts moyens des dépenses de santé prises en charge.

2. De nécessaires ajustements

Compte tenu de ce contexte budgétaire difficile, l'AME a fait l'objet de plusieurs réformes depuis sa création.

Dans la période récente, les modalités de facturation des prestations hospitalières délivrées au titre de l'AME ont tout d'abord fait l'objet d'une réforme progressive, conformément aux recommandations formulées par l'IGF et l'Igas dans leur rapport conjoint de novembre 2010 5 ( * ) . Ce dernier préconisait un passage à une facturation selon le droit commun de la tarification à l'activité (T2A). Le gain pour le budget de l'Etat était estimé à 130 millions d'euros sur une dépense de 540 millions d'euros en 2009. Le manque à gagner pour les hôpitaux devait faire l'objet de mesures de compensation transitoire.

La loi de finances rectificative pour 2011 6 ( * ) a ainsi prévu l'alignement par étapes des modalités de tarification spécifiques à l'AME pour les séjours hospitaliers sur les tarifs nationaux appliqués pour les prestations en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO). Alors que ces séjours étaient facturés en fonction du prix de journée propre à chaque hôpital (tarif journalier de prestation), systématiquement plus élevé que les tarifs issus de la tarification à l'activité, ils sont, depuis le 1 er janvier 2012, facturés en partie selon les règles de droit commun (80 % sur la base du tarif T2A et 20 % sur la base du TJP). Une majoration transitoire est prévue jusqu'à la fin de l'année 2014 7 ( * ) . Dans le cadre de la convergence tarifaire, les coefficients de majoration des tarifs liés à l'activité (T2A) disparaîtront à compter du 1 er janvier 2015, ce qui devrait engendrer une réduction de 55 millions d'euros en 2015 sur la dépense tendancielle d'AME de droit commun.

Le Gouvernement a ensuite reprécisé les critères d'éligibilité à l'AME de droit commun et le champ des prestations prises en charge . Un décret en date du 17 octobre 2011 8 ( * ) soumet le bénéfice des prestations à une condition de stabilité de résidence, l'intéressé devant avoir en métropole ou dans un département d'outre-mer son foyer ou son lieu de séjour principal. Il limite en outre le champ de prise en charge aux actes, produits et prestations destinés directement au traitement ou à la prévention d'une maladie et exclut expressément les frais relatifs aux cures thermales et à l'assistance médicale à la procréation.

Enfin, l'article 49 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 prévoit une réforme, à compter du 1 er janvier 2015, des règles de facturation et de tarification hospitalière applicable pour l'AME « soins urgents » afin de faire rapprocher celle-ci des règles appliquées à l'AME de droit commun . Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, la mesure permettrait de réaliser 46 millions d'euros d'économies pour l'assurance maladie en 2015 et 50 millions d'euros en 2017.

Dans le même esprit, le projet de loi de finances pour 2015 prévoit à son article 59 sexies un alignement des délais de facturation des séjours des bénéficiaires de l'AME en établissement de santé sur ceux du droit commun (cf. infra ).

L'Assemblée nationale a en outre adopté en seconde délibération sur le projet de loi de finances pour 2015 un amendement du Gouvernement par lequel celui-ci s'engage à générer un million d'euros d'économies supplémentaires sur les dépenses d'AME par l'intensification des contrôles et de la lutte contre la fraude.

Votre rapporteur considère que ces réformes, dont les dernières en date constituent des mesures techniques de bonne gestion, représentent un motif de satisfaction. Elles apparaissent cependant insuffisantes. En particulier, si les dépenses hospitalières représentent 70 % des dépenses d'AME, la réforme de la tarification des soins hospitaliers ne permettra pas d'absorber l'évolution future des dépenses d'AME.

Des ajustements complémentaires apparaissent donc nécessaires. Ils devront bien sûr préserver le double objectif humanitaire et sanitaire du dispositif : protéger les personnes concernées en leur permettant l'accès aux soins et éviter que des affections contagieuses non soignées ne s'étendent dans la population. Votre rapporteur propose en particulier d'instituer pour les bénéficiaires de l'AME une contribution forfaitaire annuelle comparable à la participation plafonnée à laquelle sont aujourd'hui soumis les assurés lorsqu'ils recourent à des soins médicaux (soit 50 euros).

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 59 sexies (art. L. 253-3 du code de l'action sociale et des familles) - Alignement sur le droit commun des délais de facturation des séjours des bénéficiaires de l'AME en établissement de santé

Objet : Cet article aligne le délai de facturation des séjours des bénéficiaires de l'AME en établissement de santé sur celui de droit commun. Ce délai passe ainsi de deux ans à un an.

I. Le dispositif proposé

Cet article, inséré en première lecture à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement avec l'avis favorable de la commission des finances, ramène le délai de facturation des séjours des patients AME en établissement de santé de deux ans à un, ce qui correspond à un alignement sur le droit commun. Il modifie pour ce faire l'article L. 253-3 du code de l'action sociale et des familles.

En l'état actuel du droit , ce dernier prévoit que les demandes de paiement des prestations fournies au titre de l'AME par les médecins, chirurgiens, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, établissements de santé et autres collaborateurs de l'aide sociale doivent, sous peine de forclusion, être présentées dans un délai de deux ans à compter de l'acte générateur de la créance .

Le paragraphe I du présent article modifie ce délai pour les séjours en établissement de santé par un renvoi au commun droit défini à l'article L. 162-25 du code de la sécurité sociale . Celui-ci prévoit que l'action des établissements de santé pour le paiement des prestations de l'assurance maladie « se prescrit par un an à compter de la date de fin de séjour hospitalier ou, pour les consultations et actes externes (...) à compter de la date de l'acte réalisé ».

Le paragraphe II précise que ce dispositif s'applique aux prestations fournies à compter du 1 er janvier 2015 .

Selon les évaluations du Gouvernement, l'accélération du rythme de facturation aura dans un premier temps un impact de 7,2 millions d'euros en 2015. Dans un second temps, à compter de 2016, le dispositif devrait générer une économie pérenne de l'ordre de 0,8 million d'euros par an.

II. La position de la commission

Votre commission ne peut accueillir que favorablement cette mesure de clarification et de bonne gestion qui s'inscrit dans le prolongement de la réforme de la tarification des actes effectués pour les bénéficiaires de l'AME de droit commun par la loi de finances rectificative pour 2011.

Le dispositif proposé devrait contribuer à une meilleure lisibilité budgétaire, en permettant en particulier de rattacher plus clairement la dépense publique à l'exercice auquel elle se rapporte. La mesure n'ouvre cependant la voie qu'à de faibles économies et demeure donc insuffisante pour renforcer la maîtrise du dispositif de l'AME.

Sous cette réserve, la commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

___________

La commission examine le rapport pour avis de M. René-Paul Savary sur la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2015.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis . - Pour 2015, le projet de loi de finances fixe les crédits de la mission « Santé » à 1,2 milliard d'euros, en hausse de 3 % à périmètre constant par rapport à la loi de finances initiale pour 2014. Cette évolution résulte de deux tendances contraires :

- les crédits du programme 204 relatif à la « prévention, à la sécurité sanitaire et à l'offre de soins », qui retrace en particulier les subventions pour charges de service public versées à certains opérateurs sanitaires de l'Etat, diminuent de 5,8 % ;

- à l'inverse, les crédits du programme 183 relatif à la « protection maladie », qui assure essentiellement le financement de l'aide médicale de l'Etat (AME), progressent de 13,7 %. Cette croissance soutenue explique, à elle seule, la hausse générale des crédits de la mission ; j'y reviendrai.

Permettez-moi de préciser que la mission « Santé » ne retrace ainsi qu'une partie limitée des dépenses publiques en matière sanitaire. L'essentiel des dépenses engagées dans ce domaine relève en effet des lois de financement de la sécurité sociale. La mission ne comporte en outre pas de dépenses de personnels et ne concerne que certains établissements publics du champ sanitaire dont la tutelle est au moins partiellement assurée par le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Cette précision étant faite, je souhaiterais faire porter mon intervention sur deux points saillants qui caractérisent l'évolution des crédits de la mission. Il s'agit, d'une part, des contraintes budgétaires croissantes qui pèsent sur les agences sanitaires à un moment où celles-ci doivent assurer des missions toujours plus nombreuses, et d'autre part, de la croissance non maîtrisée des crédits de l'AME.

Le programme 204 finance, à titre principal ou complémentaire, huit opérateurs de l'Etat qui participent à la mise en oeuvre des politiques nationales de prévention et de sécurité sanitaire. Depuis maintenant plusieurs exercices, ces agences sanitaires sont appelées à réaliser des efforts d'efficience et de productivité croissants. En conséquence :

- le PLF pour 2015 propose de ramener le montant total des subventions pour charges de service public qui leur sont allouées de 315 millions d'euros cette année à 301 millions d'euros en 2015, soit une baisse de 4,4 %, largement supérieure au taux de réduction d'au moins 2 % fixé par la lettre de cadrage du Premier ministre en date du 7 mai 2014 ;

- parallèlement, la diminution des plafonds d'autorisations d'emplois atteindra environ 2 % l'année prochaine, tous opérateurs confondus. Le plafond d'ETPT autorisés passe ainsi de 2 579 en 2014 à 2 527 en 2015, soit une suppression de 52 emplois.

Il est tout à fait légitime et logique que les opérateurs de l'Etat, y compris les agences sanitaires, prennent leur part dans les mesures de redressement des finances publiques. La poursuite des efforts de rationalisation suscite cependant aujourd'hui des inquiétudes d'autant plus fortes qu'elles s'ajoutent à l'attribution de nouvelles missions et aux incertitudes liées aux dispositions du projet de loi relatif à la santé que nous examinerons l'année prochaine.

La situation de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) est particulièrement éloquente. Comme vous le savez, cette jeune agence - elle s'est substituée à l'Afssaps le 1 er mai 2012 - a pour mission principale de garantir la sécurité des produits de santé tout au long de leur cycle de vie. Elle bénéficie à ce titre d'une large délégation de puissance publique qui lui permet de prendre, au nom de l'Etat, plus de 80 000 décisions par an. Depuis 2012, son budget est couvert principalement par une subvention de l'Etat qui a été réduite de plus de 9 % au cours des trois dernières années.

En 2015, la subvention allouée à l'ANSM s'élève à un peu plus de 119 millions d'euros, ce qui correspond à une baisse de 3,2 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances pour 2014. Son plafond d'emplois est quant à lui fixé à 989 ETPT, soit une diminution de 20 ETPT par rapport à 2014.

Ces fortes contraintes budgétaires ne doivent pas conduire à remettre en cause la capacité de l'agence à réaliser les missions que le législateur lui a assignées. Sa force de réactivité pour prévenir et faire face aux urgences sanitaires liées aux produits de santé doit être préservée. Or l'ANSM est progressivement appelée à exercer de nouvelles missions : outre la montée en puissance de son département de pharmaco-épidémiologie, elle devra assurer des missions aussi diverses et fondamentales que la mise en oeuvre du nouveau règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain, l'application de la future réglementation européenne visant à renforcer la sécurité des dispositifs médicaux, mais aussi l'application des mesures de la prochaine loi de santé, au titre notamment de la sécurisation de la chaîne d'approvisionnement en médicaments (article 36) ou encore de la création d'un accès ouvert aux données de santé (article 47).

Lors de son audition, la direction de l'ANSM a fait part des tensions grandissantes engendrées par cet « effet ciseau ». Les autres opérateurs que j'ai auditionnés - en particulier l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), l'Institut national du cancer (Inca) ou encore l'Agence de la biomédecine (ABM) sont confrontés à des difficultés similaires. Tous ont souligné la nécessité de garder une taille critique suffisante pour maintenir une expertise de qualité. Ils ont également insisté sur les avantages que présenterait l'adoption d'une programmation pluriannuelle de leurs moyens.

De ce point de vue, il nous faudra être particulièrement attentifs à l'article 42 du projet de loi relatif à la santé qui entend habiliter le Gouvernement à agir par ordonnances pour réformer le système d'agences sanitaires. La fusion de l'InVS, de l'INPES et de l'EPRUS est d'ores et déjà programmée.

Des mesures visant à une mutualisation des fonctions support des différentes agences sont par ailleurs annoncées. Mais le projet de loi et son étude d'impact restent relativement sibyllins sur les intentions exactes du Gouvernement en ce qui concerne l'articulation des missions des différents opérateurs et les moyens qui leur seront attribués.

J'en viens au programme 183 dont la quasi-totalité des crédits, je l'ai dit, sont relatifs à l'AME.

Comme vous le savez, l'AME de droit commun, entrée en vigueur le 1 er janvier 2000, permet la prise en charge des soins des personnes étrangères en situation irrégulière résidant en France de façon ininterrompue depuis plus de trois mois et disposant de ressources inférieures à un plafond identique à celui fixé pour le bénéfice de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C). Financé par l'Etat, le dispositif est géré par l'assurance maladie.

Selon le projet annuel de performances (PAP) de la mission « Santé », le nombre de bénéficiaires de l'AME de droit commun s'élevait à un peu plus de 282 400 fin 2013, contre environ 215 700 fin 2009 ; il a ainsi progressé de 30 % en l'espace de quatre ans. La part des dépenses d'hospitalisation des bénéficiaires de l'AME est de 70 % contre un peu plus de 50 % pour l'ensemble des assurés sociaux.

Les dépenses liées à l'AME de droit commun se caractérisent par une augmentation continue et très soutenue - leur rythme d'augmentation est supérieur à celui des dépenses d'assurance maladie - et surtout par une absence totale de fiabilité des prévisions budgétaires. En pratique en effet, l'AME fait l'objet de sous-budgétisations récurrentes. En 2013, les dépenses exécutées se sont élevées à 744 millions contre une prévision de 588 millions d'euros en loi de finances initiale.

Pour 2015, les crédits ouverts au titre de l'AME de droit commun s'élèveraient à 632,6 millions d'euros - soit 82,4 millions d'euros de moins qu'en 2013 et 84,4 millions d'euros de moins que la prévision actualisée pour 2014 - alors que la dépense tendancielle est de 717 millions d'euros. Comme chaque année, le Gouvernement sera ainsi conduit à ouvrir des crédits supplémentaires dans le collectif budgétaire de fin d'exercice. Parallèlement, les restes à charge de l'Etat vis-à-vis de l'assurance maladie se cumulent : ils atteignaient 52 millions d'euros fin 2013.

La nécessité de renforcer davantage la maîtrise du dispositif de l'AME apparaît donc évidente. La révision du dispositif ne doit bien sûr remettre en cause ni la nécessité de protéger les personnes concernées en leur permettant l'accès aux soins préventifs et curatifs qui leur sont nécessaires, ni la capacité à éviter que des affections non soignées ne s'étendent au sein de la population.

Plusieurs ajustements ont déjà été entrepris. Je pense notamment à l'alignement progressif - et qui sera total à compter du 1 er janvier 2015 - des modalités de tarification spécifiques à l'AME sur les tarifs nationaux appliqués pour les prestations en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO).

Dans le même esprit, l'article 59 sexies du PLF pour 2015 aligne les délais de facturation des séjours des bénéficiaires de l'AME en établissement de santé sur ceux du droit commun. Selon les prévisions du Gouvernement, cette mesure se traduira par une économie pérenne de seulement 0,8 million d'euros à compter de 2016, après 7,2 millions d'euros en 2015.

Le dispositif prévu va donc dans le bon sens mais il est largement insuffisant et doit faire l'objet de mesures complémentaires. Je vous proposerai ainsi un amendement qui entend envoyer un signal responsable, par l'institution d'une contribution forfaitaire comparable à la participation plafonnée de droit commun à laquelle sont aujourd'hui soumis les assurés lorsqu'ils recourent à des soins médicaux.

Pour conclure et compte tenu de l'ensemble de ces considérations, les orientations budgétaires définies par le Gouvernement pour la mission « Santé » me paraissent appeler une position plus que réservée. Je vous propose donc de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de cette mission.

M. Jean-Noël Cardoux . - Je partage la conclusion du rapporteur sur l'AME mais je me concentrerai sur les agences. Il est louable de souhaiter faire des économies mais vouloir qu'elles soient uniformes et les faire sans discernement n'est pas de bonne politique. Il faut s'interroger sur le rôle des agences, leur utilité et leurs relations mutuelles, c'est pourquoi je pense qu'il faut être très prudent face à la volonté du Gouvernement d'aborder cette question par ordonnance. Les agences ont un budget de fonctionnement de près de 3,5 milliards d'euros et emploient 24 000 personnes. Je pense qu'il faut approfondir la question de leur organisation, éliminer les doubles compétences et remettre en cause l'existence de telle ou telle agence si nécessaire.

Mme Catherine Deroche . - Je m'interroge sur le budget de la Haute Autorité de santé : apparaît-il dans la mission Santé du PLF ?

M. Yves Daudigny . - La mission Santé du PLF engage une réduction des dépenses tout en préservant l'exercice des missions par les opérateurs dont la réforme structurelle doit intervenir dans la loi relative à la santé. On peut aussi relever le rétablissement de la participation de l'Etat au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante pour un montant de 10 millions d'euros.

S'agissant de l'AME, cette aide permet de financer l'accès aux soins de personnes qui ne sont pas des assurés sociaux. Cela est conforme à nos valeurs mais aussi à un intérêt de santé publique. L'AME est d'abord une question de pragmatisme.

M. Gilbert Barbier . - Nous assistons, s'agissant des agences, à un empilement de structures qui empêche de distinguer exactement qui fait quoi, spécialement dans le domaine du médicament où l'on a du mal à suivre le cheminement d'une instance à l'autre. La nécessité de modifier les structures apparaît quand on constate que les agences traitent de sujets sur lesquels le nombre d'experts est limité et que ce sont donc les mêmes personnes qui sont appelées à siéger, par exemple, à l'ANSM et au sein de la commission de la transparence de la Haute Autorité de santé. Cette réforme est d'autant plus nécessaire que nombre de décisions se prennent aujourd'hui au niveau européen. Je suis donc favorable à ce que le budget de fonctionnement des agences baisse. Par ailleurs, je soutiens l'amendement tendant à mettre en place une participation de ceux qui reçoivent les soins au titre de l'AME.

M. Michel Amiel . - Je suis d'accord avec l'idée d'une participation financière des patients car rien n'est gratuit en ce bas monde. Cependant sur le programme 183, il y va également de notre tradition républicaine.

L'idée de mutualiser les agences remonte à la loi HPST et peut-être faudrait-il engager une nouvelle RGPP sur ces structures. Les ARS sont issues du rapprochement de sept instances préexistantes, nous pourrions avoir la même logique de mutualisation et de clarification des rôles pour les autres agences. Sans qu'il soit nécessaire de toutes les réunir, on pourrait envisager la création d'une agence nationale de santé. Je pense qu'il faut aborder ce problème de fond.

Mme Isabelle Debré . - La mise en place d'une franchise sur l'AME avait ralenti la progression des dépenses. Nous partageons tous l'humanisme qui est au fondement de cette mesure, mais il y a aussi un problème d'équité entre les étrangers en situation régulière qui paient les franchises et les personnes en situation irrégulières qui ne les paient pas. La question de la responsabilisation des patients se pose d'ailleurs également pour la CMU.

Par ailleurs, le Défenseur des droits avait défendu l'idée d'une fusion de la CMU et de l'AME. Où en sommes-nous ?

Mme Nicole Bricq . - J'étais, il y a quelques années, rapporteur de la mission « Sécurité sanitaire » qui contenait notamment les crédits pour faire face au risque d'épidémie de grippe aviaire et concernait des organismes en charge de la santé animale et ceux liés à la santé humaine. J'avais été frappée par le nombre des agences et je crains qu'il n'ait encore augmenté depuis. Elles ont été mises, il est vrai, sous plafond d'emploi mais je suis d'accord pour dire qu'une réforme structurelle est préférable à un coup de rabot uniforme. J'ai eu l'occasion, au Gouvernement, de rapprocher deux agences. Je peux vous assurer que cela exige du temps et de l'argent. Les différences de culture ne peuvent s'aplanir facilement et les structures administratives regimbent.

Sur l'AME, je crains, quelles que soient vos intentions, que vous n'ouvriez la porte à un débat dans lequel certains demanderont la suppression du dispositif et je pense qu'il faut éviter de l'instrumentaliser.

Mme Aline Archimbaud . - Je propose que nous auditionnions le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) qui est placé auprès du Premier ministre. Plusieurs experts y ont étudié le gisement d'économies que représente le moins de maladie au travers d'un suivi de cohorte, d'une part, d'une population bénéficiant de la CMU c et, de l'autre, d'une population ayant des revenus situés juste au-dessus du niveau de perception. Ils ont constaté qu'en un an, la population à la CMU-c est moins malade, ce qui entraine une moindre dépense de 500 euros par an, soit plus que le coût de la CMU. Le suivi régulier permet la stabilisation des pathologies et limite les dépenses de santé. C'est le gaspillage lié à la non-prise en charge qu'il faut arrêter.

S'agissant de la responsabilisation des patients, il y a peut-être une certaine désinvolture qui se développe mais je trouve la stigmatisation des populations fragiles tout-à-fait injustifiée.

Sur l'AME, il faut entendre les soignants qui sont auprès de ces populations, et notamment Médecins du Monde. 50 euros est une somme très importante pour ces malades. Ce n'est pas là que l'on peut faire une économie grâce à la prévention. Je pense que cela fait partie de nos valeurs républicaines.

M. Olivier Cadic . - Je vois la proposition du rapporteur comme une volonté d'éviter la dérive budgétaire. Je pense qu'il faut discuter de l'endroit où placer le curseur mais surtout nous rendre compte que c'est là un problème européen. Pour éviter les discours malsains, je pense que nous devons voir comment les pays qui nous entourent abordent cette question.

Mme Catherine Génisson . - Je pense qu'il faut simplifier le fonctionnement des agences et sans doute réduire leur nombre. Je partage sur l'AME ce qu'a dit Yves Daudigny. Il faut certainement lutter contre les filières illégales. Mais les migrants de Calais, par exemple, ne viennent pas se faire soigner. Ils sont transportés aux urgences quand leur état devient tellement grave qu'il n'y a pas d'alternative. Dans ce contexte, demander 50 euros n'a guère de sens et entraînera des difficultés réelles de recouvrement. Je ne vois donc pas où sera l'économie. Surtout, le dispositif répond à un enjeu de santé publique. Il vise à éviter que ne se propagent des maladies épidémiques comme la gale.

Je rappelle que c'est à l'Assemblée nationale que Claude Goasguen a émis des critiques sur le montant de l'AME. Mais celle-ci ne figurait pas au départ dans le budget de l'Etat car on estimait que ces soins devaient être pris en charge par les hôpitaux dans le cadre de leur mission de service public. Je trouve normal que l'on quantifie désormais l'AME. Par ailleurs je ne pense pas que ce soit une bonne idée de la fondre avec la CMU car elle doit rester ponctuelle.

M. Michel Vergoz . - Le souvenir de l'Afssaps et du Mediator est encore très présent à mon esprit et j'attends que l'ANSM fasse ses preuves avant de considérer qu'il faut protéger ses emplois. En effet, si nous ne voulons pas augmenter les impôts, il faut bien baisser les dépenses. Des réformes doivent être menées et je ne comprends pas que l'on octroie une autorisation de mise sur le marché à des médicaments qui n'ont pas d'apport thérapeutique.

Sur l'AME, l'augmentation de 30 % du nombre de bénéficiaires est le résultat direct du contexte de crise internationale. Pour échapper aux conflits, ces personnes viennent en France, dans ce qui leur paraît être un Eldorado. Il faut donc peser nos mots et ne pas jouer avec le feu. Tous ici, nous sommes conscients de l'enjeu de santé et je crois que nous partageons le fait que l'on ne peut laisser des personnes malades sans soins. Le problème est celui de l'immigration illégale. N'hésitons pas à traiter ce problème et ne laissons pas les extrémistes s'en emparer.

M. Alain Milon, président . - Je suis sûr que tous nous pensons qu'un être humain malade doit être soigné et aucun professionnel de santé ne refusera de prodiguer ces soins. Je m'étais opposé à l'idée d'une participation forfaitaire au moment de son introduction. J'ai évolué car le contexte économique a changé et que la situation internationale s'est aggravée. Comme d'autres ici, j'ai pu mesurer, lors de la campagne des sénatoriales, l'ampleur des interrogations des élus locaux sur ce sujet et je crois qu'il faut rassurer la population.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - L'expérience des uns ne vaut pas nécessairement pour les autres et, pour ma part, je n'ai jamais été interrogé sur l'AME par les élus.

Je souhaite d'abord souligner la complexité du système d'agences et le fait que les rapprochements ne sont pas simples. Il faut d'abord redéfinir les objectifs dans le domaine de la santé pour réformer le système. C'est notre rôle en tant qu'élus. L'empilement des structures au fil du temps a rendu la compréhension de l'ensemble difficile, et sans doute pour les agences elles-mêmes. Nous avons relevé au cours du débat sur le PLFSS la nécessité pour notre commission de se pencher sur la question du médicament.

Sur l'AME, évitons tout procès d'intention. Le rapporteur a clairement indiqué qu'il n'est pas question d'empêcher les personnes en cause d'être soignées ni de ne pas prendre en compte l'enjeu de santé publique. La question est financière et je note d'abord l'incohérence des chiffres du Gouvernement qui va nécessairement conduire à une sous budgétisation. La commission des finances, de son côté, semble vouloir proposer un plafonnement des dépenses à 450 millions. Je ne crois pas que tout cela soit de bonne gestion car, en l'occurrence, on sait qu'il ne suffira pas d'afficher un objectif de réduction de la dépense pour pouvoir l'atteindre.

Sur la question de la contribution forfaitaire, je note que l'AME est soumise, comme la CMU, à des conditions de ressources et que les bénéficiaires de la CMU sont exonérés de franchise. J'entends dire qu'il faut lancer un signal mais celui-ci me semble avoir une portée concrète assez faible et être surtout psychologique.

M. Jean-Pierre Caffet . - Le sujet de l'AME est récurrent, difficile et sensible. On peut l'aborder sous deux angles. Le premier est celui du public auquel s'adresse cette aide. Il s'agit d'étrangers en situation irrégulière, ce qui pose la question des flux migratoires. Il y a un sens à s'attaquer à ce problème qui taraude la société au travers de la question de l'immigration et du droit d'asile. Des textes seront discutés sur ces sujets. Mais une mesure sur l'AME ne réglera rien et risque d'ouvrir la boîte de Pandore.

Le sujet peut aussi être abordé sous l'angle budgétaire. La mesure proposée par le rapporteur sera-t-elle ou non efficace. Un forfait de 50 euros rapportera au mieux 12,5 millions d'euros, ce qui n'est pas proportionné à une dépense de plus de 700 millions. Il n'y a pas non plus de preuve évidente qu'un forfait limite la consommation de soins. Le forfait de 30 euros qui avait été mis en place avait certes fait baisser la consommation en soins de ville, mais avec un report sur les soins hospitaliers.

M. Jean-Marie Morisset . - Sur le programme 204, je souhaite savoir s'il y a une ligne spécifique cette année pour le financement de la partie sanitaire du plan de lutte contre les maladies, neuro-dégénératives annoncé par la ministre.

Mme Colette Giudicelli . - Je viens d'une ville frontière dans laquelle le ministre de l'intérieur s'est rendu récemment et a été surpris d'apprendre que 2 500 immigrés clandestins étaient passés en l'espace de quelques semaines, souvent dans des situations dramatiques. Il est trop tard pour aborder ce problème une fois que ces personnes sont sur le territoire car il faut bien les aider. C'est au niveau européen qu'il convient de régler ce problème.

Mme Patricia Schillinger . - J'ai pu constater également les interrogations des élus sur l'AME et la CMU mais ceci reflète aussi le sentiment de délaissement qu'une partie de notre population âgée ressent face à l'importance de leur reste à charge sur certains soins. Il y a des réformes à faire mais il faut éviter toute stigmatisation.

Mme Laurence Cohen. - Je m'interroge sur le fait que le budget des ARS et la question de l'amiante n'aient pas été abordés par le rapporteur. S'il faut rationaliser les agences et mieux déterminer les missions de chacun, je ne crois pas que des suppressions d'emploi arrangent les choses, surtout dans un contexte de forte demande de la sécurité sanitaire. On prend, à mon avis, le problème à l'envers.

Sur l'AME, je crains que l'on ne traite la question selon l'air du temps. Je relève par ailleurs que certains médecins de ville refusent de donner des rendez-vous aux bénéficiaires de la CMU.

M. Daniel Chasseing . - Si des praticiens refusent les bénéficiaires de la CMU, c'est inadmissible. Le problème est la charge budgétaire de l'AME sachant, de toute façon, que les médecins soigneront les personnes. La mesure proposée me semble relever du principe que la santé a un coût, ce qu'il est nécessaire de rappeler même si les sommes sont peu récupérées.

M. Alain Milon, président . - Je tiens simplement à préciser que l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) est issue de la fusion de l'agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset). Il y a eu mutualisation des administrations, mais sans porter atteinte à la capacité de recherche. Par ailleurs, l'ANSM a été créée en remplacement de l'Afssaps.

M. René-Paul Savary, rapporteur . - Le budget de la Haute Autorité de santé (HAS), qui est d'environ 60 millions d'euros, relève désormais d'une dotation de la Cnam. Le budget des ARS n'est, pour sa part, doté par la mission « Santé » du PLF que de 125 millions d'euros qui sont des crédits du fonds d'intervention régional, destinés à la prévention.

L'action 14, qui vise la prévention des maladies chroniques, est dotée de 62,15 millions d'euros en 2015, en baisse de 5,6 % par rapport à 2014.

Certes la France est un Eldorado dans un monde particulièrement troublé mais un Eldorado à crédit, et c'est pour cela que nous souhaitons envoyer un signe sur l'AME. Il y a un problème de filières mais il ne faut pas que notre système les encourage. C'est pour cela que je pense que la fusion de la CMU et de l'AME serait une mauvaise idée. Elle n'a d'ailleurs plus eu d'actualité depuis qu'elle a été proposée en 2010. Il n'est évidemment pas question de supprimer l'AME mais de prendre une mesure raisonnable. S'agissant des pays comparables, on peut constater que ceux-ci ont eu tendance à limiter ces dernières années leur prise en charge aux soins urgents que personne ne peut contester.

Pour moi, la responsabilisation des patients n'est pas une question de revenus. Elle s'applique tant à ceux qui sont entièrement pris en charge par la solidarité nationale qu'à ceux qui estiment qu'ils doivent, parce qu'ils payent des assurances chères, rentabiliser le système de santé. C'est pour cela que je suis opposé au tiers payant généralisé.

Pour les agences, l'essentiel est de mutualiser les fonctions support et de favoriser la mise en réseau.

Mon avis sur le budget de la mission Santé est défavorable pour le programme 204 en raison du recours aux ordonnances prévu par le projet de loi relatif à la santé et pour le programme 183 en raison de la sous-budgétisation de l'AME.

La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2015.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS

___________

• Direction de la sécurité sociale (DSS)

Denis Le Bayon , adjoint à la sous-directrice du financement

Jeanne Lanquetot-Moreno , adjointe à la cheffe du bureau de la synthèse financière

• Direction régionale de la santé (DGS)

Christian Poiret , secrétaire général

Frédérique Pelletier , cheffe du bureau du budget, de la performance et du contrôle interne budgétaire

• Direction générale de l'offre de soins (DGOS)

Martine Laborde Chiocchia , sous-directrice par intérim de la stratégie et des ressources

Robert Touret , adjoint au chef de la mission chargée de l'administration générale

• Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM)

Dominique Martin , directeur général

François Dazelle , directeur de l'administration et des finances

• Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses)

Marc Mortureux , directeur général

Alima Marie , directrice information, communication et dialogue avec la société

• Institut national du cancer (INCa)

Agnès Buzyn, présidente

Thierry Breton , directeur général

Céline Gateau-Leblanc , directrice administrative et financière

• Agence de la biomédecine

Eric Delas , directeur par intérim

Karim Laouabdia , directeur général adjoint chargé de la politique médicale et scientifique

Brigitte Voisin , directrice administrative et financière


* 1 Règlement (UE) n°536/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain et abrogeant la directive 2001/20/CE.

* 2 Réponses au questionnaire de votre rapporteur.

* 3 Soit 720 euros pour une personne seule et 1 081 euros pour deux personnes au 1 er juillet 2015 en métropole.

* 4 Analyse de l'évolution des dépenses au titre de l'aide médicale d'Etat, novembre 2010.

* 5 Igas-IGF, « Analyse de l'évolution des dépenses au titre de l'AME », novembre 2010.

* 6 Article 50 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011.

* 7 Ce coefficient est passé de 1,3 (30 % de survalorisation des actes) à 1,15 (15 % de survalorisation des actes) au 1 er janvier 2014.

* 8 Décret n° 2011-1314 du 17 octobre 2011 relatif à la prise en charge des frais de santé par l'AME ainsi qu'au droit au service des prestations.

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