EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER
PRENDRE EN COMPTE LES SPÉCIFICITÉS DES TERRITOIRES DE MONTAGNE ET RENFORCER LA SOLIDARITÉ NATIONALE EN LEUR FAVEUR
Chapitre Ier
Redéfinir les objectifs de l'action de l'État en faveur des territoires de montagne
Article 1er
(article 1er de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne)
Grands principes de la politique nationale de la montagne

Objet : cet article modernise et enrichit l'article 1 er de la loi montagne de 1985, qui définit les grands objectifs de la politique de la montagne, en insistant sur les particularités de la montagne et la nécessité d'assurer son développement dans une logique durable, à la fois économique, environnementale et sociale.

I. Le droit en vigueur

L'article 1 er de la loi montagne de 1985 reconnaît l'objectif d'intérêt national que représente le développement de la montagne et prévoit que l'action des collectivités publiques, État et collectivités territoriale, vise à atteindre cinq objectifs :

- un objectif de gouvernance : faire en sorte que les montagnards participent à la décision concernant leur territoire ;

- un objectif économique de développement, orienté vers la qualité et la diversification ;

- un objectif environnemental de préservation des espaces naturels, mais aussi du patrimoine culturel et du patrimoine bâti ;

- un objectif d'équilibre , visant à « une meilleure maîtrise de la gestion et de l'utilisation de l'espace montagnard par les populations et collectivités de montagne » ;

- et enfin un objectif de maintien des services dans ces territoires .

Ces dispositions constituent des objectifs généraux qui n'ont pas un caractère juridiquement contraignant mais qui orientent l'action des pouvoirs publics dans les territoires de montagne.

II. Le projet de loi initial

Le projet de loi procède à une réécriture complète de l'article 1 er de la loi montagne : il en conserve les dispositions essentielles, mais en les complétant par des éléments supplémentaires.

Tout d'abord, le texte prend en compte explicitement l'enjeu du changement climatique et de la reconquête de la biodiversité , ces notions ne figurant pas dans la loi de 1985.

Ensuite, la liste des objectifs de la politique de la montagne est élargie à l'encouragement des « innovations techniques, économiques, institutionnelles, sociales et sociétales » et aux « travaux de recherche et d'observation portant sur les territoires de montagne et leurs activités . »

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Les députés ont encore ajouté et précisé les objectifs de la politique de la Montagne par de multiples amendements.

Votre rapporteur pour avis sur cet article considère que les précisions apportées sont pertinentes, mais que les objectifs de la politique économique en faveur de la montagne pourraient être mieux précisés :

- il propose ainsi un amendement à l'alinéa 8 (n° 221) pour préciser que la politique de développement économique de la montagne vise les activités industrielles mais aussi artisanales .

- il propose ensuite un amendement après l'alinéa 9 (n° 225) pour demander d'adapter les normes applicables à l'agriculture, et plus particulièrement à l'élevage, à la situation spécifique de la montagne : ainsi, l'attache des animaux devrait être permise dans certaines conditions, la règlementation des travaux devrait être adaptée aux possibilités climatiques ; de même, les exigences en matière de création de retenues collinaires ou d'études d'impact pourraient être déclinées en fonction des particularités de la montagne.

Il propose un amendement à l'alinéa 13 (COM-222) précisant également que le développement de l'industrie du bois doit se faire à proximité des massifs forestiers , afin de ne pas multiplier les transports de grumes par camion sur de longues distances, qui ne profitent en rien à l'économie de montagne.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article dans la rédaction issue de ses travaux.

TITRE II
SOUTENIR L'EMPLOI ET LE DYNAMISME ÉCONOMIQUE EN MONTAGNE
Chapitre Ier
Favoriser le déploiement du numérique et de la téléphonie mobile
Article 9
(articles 16 et 16 bis à 16 quater [nouveaux] de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne)
Dispositions relatives aux communications électroniques en zone de montagne

Objet : cet article vise à orienter la politique numérique de l'État en zone de montagne.

I. Le droit en vigueur

L'alinéa 1 de l'article 16 de la loi « montagne » du 9 janvier 1985 , dispose que des « aménagements techniques particuliers » peuvent être autorisés en zone de montagne afin de permettre une bonne réception des émissions des services de radiodiffusion sonore ou de télévision par voie hertzienne . Ces dispositions sont justifiées par le relief propre aux zones de montagne, qui peut limiter la portée des émetteurs installés.

La loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a créé un second alinéa à l'article 16, disposant que de tels aménagements particuliers peuvent également être autorisés pour assurer le fonctionnement des moyens de télécommunications, « dans les meilleures conditions économiques » .

II. Le projet de loi initial

Prenant acte du développement d'autres technologies permettant la diffusion de la radio et de la télévision, le I de l'article initial supprime la référence à la « voie hertzienne » .

Il supprime également le second alinéa, l'intégralité de son contenu normatif étant répercutée au sein du nouvel article 16 bis de la loi « montagne » de 1985 créé par le II. Cet article 16 bis reformule l'objectif énoncé à l'alinéa 2 de l'article 16 actuellement en vigueur. Ainsi, il prévoit que l'État met en oeuvre, en zone de montagne, une politique de nature à assurer le bon fonctionnement des communications électroniques, fixes ou mobiles, et ce non seulement dans les meilleures conditions économiques (ancienne rédaction de l'alinéa 2 de l'article 16), mais également techniques .

L'article 16 bis confie, ensuite, sans préjudices des missions qui leurs sont assignées en la matière sur tout le territoire par le code des communications électroniques et des postes, aux ministres chargés de l'aménagement du territoire et des communications électroniques ainsi qu'à l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) la tâche de veiller :

- d'une part, à prendre en compte les contraintes physiques propres aux milieux montagnards dans les procédures de mise en oeuvre des investissements publics en matière d'équipement ou de maintenance ;

- d'autre part, à favoriser les expérimentations de solutions innovantes de nature à améliorer la couverture des zones de montagne . Il s'agit, par exemple, d'encourager les expérimentations en cours sur les usages fixes des réseaux 4G.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

1. L'Assemblée nationale a précisé les dispositions du projet de loi initial.

La commission des affaires économiques a adopté, outre trois amendements rédactionnels, divers amendements précisant les dispositions du texte :

- un amendement déposé par Lionel Tardy, Martial Saddié et Virginie Duby-Muller, complétant l'injonction faite aux ministres chargés de l'aménagement du territoire et des communications électroniques ainsi qu'à l'ARCEP de veiller à prendre en compte les contraintes physiques propres aux milieux montagnards dans les procédures de mise en oeuvre des investissements publics : ils doivent également y veiller dans les conventions conclues avec les opérateurs de communications électroniques ; cet amendement a été adopté avec l'avis favorable du ministre ;

- un amendement déposé par la rapporteure pour avis au nom de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, Martial Saddier, Charles-Ange Ginesy, Marie-Noëlle Battistel et Christophe Bouillon, mais également par de nombreux autres députés, et adopté après avis favorable du ministre, ajoute aux investissements publics en matière d'équipement et de maintenance ceux en matière de raccordement.

L'Assemblée nationale, en séance publique , a enfin adopté, outre un amendement rédactionnel, les trois amendements suivants :

- un amendement déposé par Joël Giraud et dix-sept collègues ainsi que par Charles-Ange Ginesy et dix-sept autres députés, et ayant recueilli un avis favorable du ministre, qui précise que l'exigence pour l'État de veiller à la prise en compte des contraintes physiques des territoires de montagne dans les procédures de mise en oeuvre des investissements publics doit « notamment » être effectuée « pour favoriser le déploiement du télétravail et des télécentres » ;

- un amendement déposé par les rapporteures Genevard et Laclais et ayant reçu un avis favorable du ministre précisant que les expérimentations de solutions innovantes de nature à améliorer la couverture des zones de montagne ne seront pérennisées que si elles permettent l'accès à un niveau de service au moins équivalent à celui du standard technologique retenu sur le reste du territoire , afin de garantir que la qualité de service sera similaire à celle obtenue par la fibre optique ;

- un amendement également déposé par les rapporteures ayant recueilli un avis favorable du ministre, qui établit un troisième point d'attention à la charge des ministres et de l'ARCEP, au-delà des investissements et des expérimentations : ils doivent veiller à développer des services numériques adaptés aux besoins et contraintes spécifiques des populations de montagne, en priorité dans le domaine de la formation numérique et à distance .

2. L'Assemblée nationale a introduit de nouvelles dispositions dans le projet de loi.

a) L'ARCEP se voit confier de nouvelles tâches.

La commission des affaires économiques a adopté , après avis favorable du ministre, deux amendements présentés par les rapporteures Genevard et Laclais qui confient de nouvelles tâches à l'ARCEP . Le premier introduit un nouvel alinéa 2 à l'article 16 de la loi « montagne », qui confie à l'ARCEP la mission de :

- décliner par zones de montagne les données et cartes numériques de couverture ;

- mettre à disposition du public des indicateurs de couverture en montagne par génération de réseaux fixes et mobiles et par opérateur .

Cette disposition précise donc, s'agissant des zones de montagne, les dispositions en matière de transparence issues de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, laquelle a confié à l'ARCEP la mission de mettre à disposition du public les cartes numériques de couverture du territoire et les données servant à les établir.

Le second amendement portant sur l'ARCEP adopté par la commission à l'initiative des rapporteures crée un article 16 ter au sein de la loi « montagne » de 1985 imposant à l'ARCEP de publier, dans les deux ans de la promulgation du projet de loi examiné, une étude comparant le déploiement des réseaux ouverts au public à très haut débit dans les zones de montagne avec celui constaté dans le reste du territoire et analysant les performances en la matière de chaque opérateur . Votre rapporteur s'interroge sur le fait de savoir si cette mission ne devrait pas plutôt relever de l'Agence du numérique.

b) Une priorité accordée aux zones de montagne dans la mise en oeuvre de la convention de couverture des zones blanches

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique, après avis favorable du ministre, plusieurs amendements identiques introduits par Marie-Noëlle Battistel, par Janine Dubié et dix-sept autres collègues, ainsi que par Martial Saddier et trois autres députés. Ils établissent une priorité au bénéfice des projets concernant les zones de montagne dans le cadre de la mise en oeuvre de la convention de couverture des zones blanches introduite à l'article L. 34-8-5 du code des postes et des communications électroniques par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015. Cette convention conclue entre l'État, les représentants des collectivités territoriales et les opérateurs de communications électroniques définit les conditions dans lesquelles la couverture des zones où aucun service mobile n'est disponible à la date de la publication de la loi est assurée.

c) L'introduction des radios locales dans la loi « montagne »

Janine Dubié et dix-sept autres collègues ainsi que Charles-Ange Ginesy et seize autres députés ont également déposé des amendements identiques adoptés en séance publique à l'Assemblée nationale après avis favorable du ministre introduisant des dispositions d'ordre général relatives aux radios locales en zone de montagne . Créant un article 16 quater dans la loi « montagne » de 1985, ils disposent que l'État doit y mettre en oeuvre une politique de nature à assurer le bon développement des radios locales dans les meilleures conditions économiques et techniques. À cette fin, ils enjoignent au ministre chargé de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales et au conseil supérieur de l'audiovisuel de veiller à prendre en compte les contraintes géographiques et démographiques propres au milieu montagnard.

IV. La position de votre commission

La commission salue les avancées obtenues à l'Assemblée. Là où la version initiale de l'article 9 se contentait d'actualiser les dispositions de la loi « montagne » de 1985, les députés ont introduit des dispositions qui visent à accélérer le déploiement des réseaux de communications électroniques en zone de montagne . Votre commission a décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 9 bis
(article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales)
Tarification préférentielle des réseaux d'initiative publique à très haut débit

Objet : cet article vise à autoriser les collectivités territoriales qui exploitent un réseau d'initiative publique à très haut débit à pratiquer des conditions tarifaires préférentielles en cas d'insuffisance des offres privées de commercialisation ayant recours à ce réseau.

I. Le droit en vigueur

Depuis 2004, les collectivités territoriales peuvent établir et exploiter des infrastructures et des réseaux de communications électroniques. Ces réseaux d'initiative publique (RIP) à très haut débit sont encadrés par l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a énoncé les principes de la régulation tarifaire des offres de gros - c'est-à-dire des offres proposées par les collectivités aux opérateurs pour commercialiser des offres ayant recours à leurs réseaux.

La tarification des RIP est en effet un enjeu essentiel, dans la mesure où elle est nécessaire à leur commercialisation, qui constitue la seconde étape du déploiement du très haut débit : après la construction de l'infrastructure, encore faut-il que celle-ci soit utilisée. L'enjeu concurrentiel de cette tarification avait été identifié par l'ARCEP en 2014, dans son rapport sur l'intervention des collectivités territoriales dans les communications électroniques. Des tarifs d'accès trop bas sont susceptibles de réduire les recettes que les collectivités et groupements pourraient tirer des réseaux engendrant un risque de dérive des finances publiques par un niveau de subventionnement public trop important. À l'inverse, des tarifs trop élevés limitent l'intérêt pour les opérateurs de communications de devenir clients des réseaux d'initiative publique pour fournir des services de communications aux utilisateurs finals.

La loi précitée dispose que les collectivités territoriales doivent communiquer à l'ARCEP les conditions tarifaires d'accès à leurs réseaux à très haut débit deux mois au moins avant leur entrée en vigueur . L'autorité peut, lorsqu'elle estime que les conditions tarifaires soulèvent des difficultés au regard des principes concurrentiels régissant les conditions tarifaires, émettre un avis - qui peut être rendu public - invitant la collectivité territoriale à les modifier . Les principes posés par le législateur sont les suivants : les conditions tarifaires doivent être objectives , transparentes, non discriminatoires et proportionnées et doivent garantir le respect du principe de libre concurrence et le caractère ouvert des infrastructures et réseaux . Enfin, le législateur a exigé le recours à une analyse comparative entre les zones faisant l'objet de subventions publiques et les zones du territoire comparables où l'initiative privée y est plus développée, en vue de favoriser une convergence de la tarification de l'accès de gros.

La loi du 6 août 2015 a confié à l'ARCEP le soin de rédiger des lignes directrices en la matière, qu'elle a publiées le 7 décembre 2015 . Ces lignes directrices, qui ne sont pas contraignantes, permettent aux collectivités de recourir à des conditions tarifaires et réglementaires préférentielles en période de lancement du projet . C'est ce qu'elles expriment, par exemple, dans la phrase suivante : « l'Autorité estime raisonnable que ces derniers puissent être en mesure de stimuler et d'accompagner la progression de la pénétration au travers de mécanismes de tarification adaptés ».

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement des rapporteures Genevard et Laclais, sur avis favorable du ministre, qui vise à compléter l'article L. 1425-1 en permettant aux collectivités territoriales de pratiquer des tarifs et conditions réglementaires préférentielles lorsque les opérateurs privés ne viennent pas commercialiser les RIP - ce qui est désigné par l'article comme un cas de carence de l'initiative privée.

Les députées précisent, dans l'exposé des motifs, vouloir ainsi remédier aux situations dans lesquelles les collectivités territoriales qui opèrent des RIP font face à l'absence de commercialisation d'offres d'accès à la fibre, alors même que les infrastructures sont opérationnelles et que les foyers sont raccordés.

III. La position de votre commission

L'esprit de l'article, qui vise à obtenir une présence accrue des opérateurs privés sur les RIP est conforme aux attentes des élus sur le terrain. Au surplus, il sécurise juridiquement la faculté donnée aux collectivités territoriales de proposer des conditions tarifaires préférentielles d'accès à leurs réseaux d'initiative publique. Votre commission a donc décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 9 ter
(article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales)
Obligation d'élaborer une stratégie de développement des usages et services numériques en zone de montagne

Objet : cet article rend obligatoire, dans les zones de montagne, l'adoption d'une stratégie de développement des usages et services numériques.

I. Le droit en vigueur

La loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique a introduit dans les schémas directeurs territoriaux d'aménagement du numérique régis par l'article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales une stratégie de développement des usages et services numériques. Cette stratégie vise à favoriser l'équilibre de l'offre de services numériques sur le territoire ainsi que la mise en place de ressources mutualisées, publiques et privées, y compris en matière de médiation numérique. Son adoption est optionnelle.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Au regard de l'importance des enjeux de formation au numérique et de développement du télétravail en montagne, les rapporteures Genevard et Laclais ont introduit, en séance publique, un amendement ayant recueilli l'avis favorable du ministre, et visant à rendre obligatoire l'insertion de cette stratégie de développement des usages et services numériques dans les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique en zone de montagne .

III. La position de votre commission

Cet article vise à répondre au besoin particulier de développer des usages et services numériques, tels que le télétravail ou la formation au numérique, en zone de montagne. Il complète les dispositions introduites en ce sens à l'article 9.

Il n'est pas ici question d'imposer une contrainte supplémentaire aux collectivités locales. Il s'agit de répondre à un besoin exprimé par le terrain. Votre commission a donc décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 9 quinquies
(article L. 34-8-2-1-1 [nouveau] du code des postes et des communications électroniques)
Publication périodique par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes d'informations sur la fourniture de services par les réseaux d'initiative publique

Objet : cet article rend obligatoire la publication périodique par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes d'indicateurs sur le taux de pénétration des réseaux d'initiative publique.

I. Le droit en vigueur

Comme évoqué à l'article 9 bis , depuis 2004, les collectivités territoriales peuvent établir et exploiter des infrastructures et des réseaux de communications électroniques. Ces réseaux d'initiative publique (RIP) sont encadrés par l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.

L'investissement financier des collectivités dans ce cadre est particulièrement important. Une fois l'infrastructure construite, encore faut-il qu'elle puisse être utilisée afin d'apporter des services aux utilisateurs finals. Pour cela, il est nécessaire que l'offre du RIP soit commercialisée. Or, les collectivités rencontrent aujourd'hui des difficultés à trouver un opérateur qui accepte de commercialiser leur offre.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'amendement adopté en séance publique par l'Assemblée nationale, sur proposition des rapporteures Genevard et Laclais et après avis favorable du ministre, vise à organiser une transparence incitative pour les opérateurs, en lien avec les amendements relatifs à l'ARCEP introduits à l'article 9.

En effet, il insère un article L. 34-8-2-1-1 dans le code des communications électroniques et des postes afin d'exiger de l'ARCEP la publication périodique d'indicateurs sur le taux de pénétration des RIP , afin de s'assurer que les infrastructures figurant dans les zones d'initiative publique ne soient moins utilisées que celles des zones d'initiative privée. Cette publication devra apporter une attention particulière aux zones rurales et de montagne.

Dans l'exposé des motifs, les rapporteures définissent le taux de pénétration comme le ratio de lignes actives par rapport aux lignes éligibles du réseau.

III. La position de votre commission

L'esprit de l'article, qui vise à obtenir une présence accrue des opérateurs privés sur les RIP est conforme aux attentes des élus sur le terrain. L'outil choisi est celui de la transparence. Votre commission a décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 9 sexies
(article L. 34-8-6 [nouveau] du code des postes et des communications électroniques)
Accès aux infrastructures passives du réseau de téléphonie mobile

Objet : cet article vise à contraindre les exploitants de réseaux ouverts au public à faire droit aux demandes raisonnables d'accès à leurs infrastructures passives de communications électroniques.

I. Le droit en vigueur

La loi n° 2016-990 du 6 août 2015 a créé un article L. 34-8-1-1 dans le code des communications électroniques et des postes, relatif à l'encadrement du partage des réseaux radioélectriques ouverts au public. Il prévoit que ce partage doit faire l'objet d'une convention, en régit le contenu, et confie le règlement des différends à l'ARCEP.

Dans le même temps, le droit des communications électroniques a vu s'épanouir la notion de droit d'accès au cours des dernières années. C'est par exemple le cas de l'article L. 34-8-2-1 du même code créé par l'ordonnance n° 2016-526 du 28 avril 2016 portant transposition de la directive 2014/61/UE relative à des mesures visant à réduire le coût du déploiement de réseaux de communications électroniques à haut débit, qui crée un droit d'accès aux infrastructures d'accueil pour les exploitants de réseaux ouverts au public à très haut débit. Le gestionnaire de l'infrastructure d'accueil doit ainsi faire droit aux demandes d'accès « raisonnables ». Cet accès est fourni dans des conditions « équitables et raisonnables ». Tout refus d'accès doit être justifié par des motifs limitativement énumérés et le règlement des différends relève de la compétence de l'ARCEP.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique, sur proposition des rapporteures Genevard et Laclais et après avis favorable du ministre, une disposition créant un nouveau droit d'accès, qui vise à contraindre là où le droit actuel encadre. Il s'agit en effet d' imposer aux exploitants de réseaux ouverts au public de faire droit, dans les zones de montagne, aux demandes raisonnables d'accès, en vue de l'exploitation d'un réseau ouvert au public :

- à leurs infrastructures passives comprenant un point haut support d`antenne ;

- à une alimentation en énergie ;

- ou à un raccordement à un réseau ouvert au public émanant des opérateurs .

L'accès devrait être fourni « dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires ». Tout refus d'accès serait motivé. L'accès ferait l'objet d'une convention entre les opérateurs et exploitants de réseaux concernés, qui serait communiquée à l'ARCEP, laquelle devrait régler les différends relatifs aux demandes d'accès comme à la conclusion ou l'exécution de la convention.

Les rapporteures justifient cette disposition par le fait que l'absence de contrainte à la mutualisation ne permet pas d'assurer le partage des infrastructures passives de communications électroniques entre opérateurs de téléphonie mobile.

III. La position de votre commission

Votre commission est favorable à la création de ce nouveau droit d'accès aux infrastructures passives du réseau de téléphone mobile en zone de montagne, car elle est de nature à accélérer le déploiement des réseaux mobiles dans ces zones. La mutualisation est l'un des outils du déploiement d'une couverture de qualité sur l'ensemble du territoire. Cet article complète opportunément la priorité instaurée à l'article 9 aux zones de montagne en matière de couverture des zones blanches. Votre commission a donc décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 9 septies
(article L. 34-9-1 du code des postes et des communications électroniques)
Allègement des procédures d'information et de concertation applicables aux installations radioélectriques

Objet : cet article vise à alléger l'obligation d'information du maire en cas de modification substantielle de l'installation radioélectrique, à exonérer d'obligation d'information les opérations de mutualisation, et à cantonner la procédure de concertation aux cas d'implantation de nouvelles installations radioélectriques.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 34-9-1 du code des postes et des communications électroniques dans sa version issue de la loi n° 2015-136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l'information et à la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques organise des procédures d'information du maire et de la population en cas d'installation ou de modification substantielle d'une antenne-relais soumise à accord ou avis de l'agence nationale des fréquences.

Toute implantation de station radioélectrique doit recueillir l'accord de l'agence (ou son avis si la décision d'implantation relève du conseil supérieur de l'audiovisuel) si sa puissance est supérieure à un certain niveau défini par arrêté.

Avant de procéder à cette implantation, le futur exploitant doit en outre :

- informer par écrit le maire ou le président de l'intercommunalité dès la phase de recherche ;

- lui transmettre un dossier d'information - qui comprend, si le maire en fait la demande, une simulation de l'exposition aux champs électromagnétiques générée par l'antenne - deux mois avant le dépôt de la demande d'autorisation.

Une fois l'installation effectuée, toute modification substantielle nécessitant une demande d'accord ou d'avis auprès de l'agence nationale des fréquences et susceptible d'avoir un impact sur le niveau de champs électromagnétiques émis par l'antenne doit également faire l'objet d'un dossier d'information remis au maire ou au président de l'intercommunalité deux mois avant le début des travaux.

Le contenu des dossiers d'information est défini par arrêté conjoint des ministres chargés des communications électroniques et de l'environnement.

Les maires et présidents d'intercommunalité doivent mettre à disposition du public ces informations par tout moyen, afin de donner la possibilité aux habitants de formuler des observations.

Lorsque le préfet de département estime qu'une médiation est requise, tant pour une nouvelle installation que pour la modification d'une installation existante, il réunit une instance de concertation. Cette réunion peut être demandée par le maire ou le président de l'intercommunalité.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

En séance publique, les députés ont adopté trois modifications de l'article L. 34-9-1 du code des postes et des communications électroniques, avec l'avis favorable du Gouvernement.

La première est issue de deux amendements identiques présentés par Marie-Noëlle Battistel ainsi que Jeanine Dubié et dix-sept autres députés. Il substitue à l'obligation de fournir un dossier d'information au maire en cas de modification substantielle d'une antenne-relais celle de fournir chaque année, au maire qui en ferait la demande, une information dont le contenu serait défini par arrêté conjoint des ministres chargés des communications électroniques et de l'environnement. Autrement dit, l'information du maire deviendrait optionnelle et ne serait effectuée qu'une fois par an, plutôt qu'à chaque nouvelle modification substantielle.

L'exposé des motifs justifiait cette disposition par le fait que l'agence nationale des fréquences vérifie déjà que la modification de l'antenne-relais ne risque pas d'élever le niveau d'exposition aux ondes électromagnétiques de la population au-delà des limites réglementaires. Cette garantie au regard des exigences sanitaires est considérée comme suffisante, alors que la lourdeur de la procédure actuelle ralentit l'installation des stations radioélectriques, dans un contexte où les pouvoirs publics souhaitent accélérer leur déploiement.

La seconde provient de trois amendements identiques présentés par Marie-Noëlle Battistel, Lionel Tardy et Jeanine Dubié et dix-sept autres députés et vise, comme l'article 9 sexies, à faciliter la mutualisation des infrastructures passives existantes. Elle entend ainsi exonérer les opérations de mutualisation des obligations d'information prévues avant l'installation de l'antenne et en cas de modification substantielle , dès lors que le support de l'antenne ne fait pas l'objet d'une extension ou d'une rehausse substantielle.

Enfin, la troisième est issue de deux amendements identiques présentés par Marie-Noëlle Battistel ainsi que Jeanine Dubié et dix-sept autres députés. Elle réduit le champ d'application de la procédure de médiation aux projets d'installations radioélectriques , alors que celle-ci s'applique aujourd'hui également aux installations existantes. Il s'agit, une fois encore, de faciliter le déploiement de nouvelles installations sur le territoire.

III. La position de votre commission

Ces articles recentrent les procédures d'information sur les opérations les plus susceptibles d'avoir un impact sur la population locale et les articule autour de l'avis de l'ANFR.

Il s'agit, conformément aux remontées de terrain, de trouver un équilibre entre la nécessité d'informer et de consulter la population et de déployer plus rapidement des nouvelles technologies permettant d'atteindre l'objectif d'une meilleure couverture sur l'ensemble du territoire.

Votre commission a décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 9 octies
(article 25 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication)
Prise en compte des contraintes géographiques spécifiques zones de montagne lors de l'encadrement de la puissance d'émission des services de communication audiovisuelle

Objet : cet article exige du Conseil supérieur de l'audiovisuel qu'il prenne en compte les contraintes géographiques spécifiques existant en zone de montagne pour définir la limite supérieure de puissance apparente rayonnée.

I. Le droit en vigueur

L'article 25 de la loi n° 86?1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication confie au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) la mission de définir les conditions techniques à respecter pour l'usage de la ressource radioélectrique en vue de diffuser des services de communication audiovisuelle par voie hertzienne terrestre.

Parmi ces conditions à définir figure la limite supérieure de puissance apparente rayonnée.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'Assemblée a adopté trois amendements identiques, déposés par Marie-Noëlle Battistel et treize autres députés, Jeanine Dubié et dix-sept autres collègues ainsi que par Charles-Ange Ginesy et seize autres députés, avec l'avis favorable du ministre. Ils précisent que la limite supérieure de puissance apparente rayonnée définie par le CSA doit être appréhendée en prenant en compte les contraintes géographiques des zones de montagne .

En lien avec la disposition introduite à l'article 9 relative aux radios locales, cette disposition vise à permettre à ces radios de diffuser via des émetteurs dont la puissance est majorée.

III. La position de votre commission

Les radios locales sont un élément du tissu économique de la montagne, mais également un élément de sociabilité. Cet article permet au CSA d'adopter une approche pragmatique sur la définition de la limite supérieure de puissance apparente rayonnée en zone de montagne. Votre commission a décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 9 nonies
Intégration des réseaux d'initiative publique par les opérateurs de communications électroniques

Objet : cet article contraint les opérateurs de communications électroniques nationaux à intégrer les réseaux d'initiative publique existants.

I. Le droit en vigueur

Dans le cadre du plan France très haut débit, les collectivités locales établissent et exploitent des réseaux d'initiative publique sur les zones géographiques non exploitées par les opérateurs privés, comme l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales les y autorise. Comme évoqué aux articles 9 bis et 9 quinquies , l'enjeu est aujourd'hui celui de la commercialisation de ces réseaux d'initiative publique.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le texte adopté par l'Assemblée en séance publique résulte de quatre amendements identiques déposés par Martial Saddier, Charle-Ange Ginesy et Jean-Pierre Vigier, ainsi que par Marie-Noëlle Battistel et quatorze collègues, Jeanine Dubié. Il impose aux « opérateurs de communications électroniques nationaux » d'« intégrer » les réseaux d'initiative publique existants.

Comme pour les articles 9 bis et 9 quinquies , l'objectif est ici de faire en sorte que les RIP puissent faire l'objet d'une commercialisation, afin que les infrastructures mises en place par les collectivités soient utilisées.

Néanmoins, là où ces articles utilisent une méthode qui favorise la venue des opérateurs privés sur les RIP, cet article envisage de les contraindre.

III. La position de votre commission

Cet article vise à répondre aux préoccupations des acteurs de terrain. Contrairement aux articles 9 bis et 9 quinquies , qui relèvent d'une démarche incitative, il entend contraindre les opérateurs. Même si votre rapporteur souscrit pleinement à l'initiative, force est de constater qu'elle emporte un risque d'inconstitutionnalité. La commission saisie au fond apporte une solution de compromis satisfaisante à ce sujet. C'est pourquoi votre commission a décidé de ne pas proposer de modification de cet article.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Chapitre II
Encourager la pluriactivité et faciliter le travail saisonnier
Article 14
(articles L. 301-4-1, L. 301-4-2 et L. 444-10 à L. 444-14 [nouveaux] du code de la construction et de l'habitation)
Convention pour le logement des travailleurs saisonniers

Objet : cet article comporte des dispositions visant à faciliter l'accès au logement des travailleurs saisonniers

I. Le projet de loi initial

L'article 14 comprend deux dispositifs destinés à encourager l'émergence d'une offre de logements pour les travailleurs saisonniers.

? Le premier oblige les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale touristiques de montagne à conclure une convention pour le logement des travailleurs saisonniers .

Cette obligation est posée par le nouvel article L. 301-4-1 du code de la construction et de l'habitation. La convention est passée avec l'Etat. Elle associe d'autres partenaires (l'EPCI, le département, Action logement, ainsi que, le cas échéant, les représentants de la Caisse des dépôts et consignations, les bailleurs sociaux et les organismes agréés qui exercent les activités d'intermédiation locative et de gestion locative sociale intervenant sur le territoire de la commune).

Cette convention comprend un diagnostic des besoins en logement des travailleurs saisonniers et fixe les objectifs et les moyens d'action à mettre en oeuvre pour les atteindre dans un délai de trois ans. Quand elle est établie à l'échelle intercommunale, elle comporte une déclinaison des besoins, des objectifs et moyens d'actions par commune. Enfin, elle prend en compte les objectifs en faveur du logement des travailleurs saisonniers contenus dans le plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées et dans le programme local de l'habitat, s'il existe.

Au terme des trois ans, la commune ou l'EPCI réalise un bilan de la convention, qui est transmis au préfet. À partir de là, s'ouvre un délai de trois mois pour étudier l'opportunité d'une adaptation du diagnostic des besoins et d'une redéfinition des objectifs et des moyens d'action dans une convention renouvelée pour une période de trois ans, ce en lien avec le préfet et les personnes associées à la convention.

Enfin, le nouvel article L. 301-4-2 prévoit les sanctions associées à ces différentes obligations. En cas de non conclusion ou de non renouvellement de la convention, le préfet peut suspendre la reconnaissance de commune ou de groupement touristique. Par ailleurs, si le bilan de la convention conclut que les objectifs fixés dans la convention n'ont pas été atteints et qu'aucune difficulté particulière ne le justifie, la reconnaissance de commune ou de groupement touristique peut être suspendue pour trois ans. Avant de prononcer l'une ou l'autre de ces suspensions, l'autorité administrative informe de la sanction envisagée la commune ou l'établissement public, qui peut présenter ses observations.

? Le second dispositif organise la sous-location des logements sociaux vacants au profit des saisonniers .

Il prévoit que les organismes d'habitations à loyer modéré et les sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux peuvent prendre à bail des logements vacants meublés pour les donner en sous-location à des travailleurs saisonniers (nouvel article L. 444-10 du code de la construction et de l'habitation). Il faut que le logement pris à bail appartienne à une ou des personnes physiques ou à une société civile immobilière constituée exclusivement entre parents et alliés (article L. 444-10).

L'article article L. 444-12 précise les protections dont bénéficie le sous-locataire en visant diverses dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

L'article L. 444-13 précise par ailleurs que le logement est attribué au sous-locataire sous conditions de ressources fixées et que le loyer fixé dans le contrat de sous-location ne peut excéder un plafond fixé selon les zones géographiques par l'autorité administrative.

Enfin, l'article L. 444-14 précise les conditions de sortie du contrat de sous-location. Le contrat est conclu pour une durée n'excédant pas six mois. Les occupants ne bénéficient pas du droit au maintien dans les lieux. Les occupants peuvent mettre fin au contrat à tout moment, avec un préavis d'un mois. Le congé ne peut être donné par l'organisme bailleur avant le terme du contrat de sous-location sauf pour un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par les occupants de l'une des obligations leur incombant.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Les députés ont adopté en commission 9 amendements sur cet article, dont 7 sont des amendements rédactionnels ou de précision de références. Les deux modifications de fond concernent :

- le champ d'application de la convention pour le logement des saisonniers. L'obligation de conclure la convention sur le logement des saisonniers a été étendue à l'ensemble des communes classées touristiques (amendement n° CE 320 de Mme Got) ;

- la procédure de congé dans le dispositif de sous-location (amendement n° CE 416 des rapporteurs). Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, signifié par acte d'huissier ou remis en main propre contre récépissé ou émargement. Pendant le délai de préavis, le sous-locataire n'est redevable du loyer et des charges que pour le temps où il a occupé réellement les lieux si le congé a été notifié par le bailleur. Il est redevable du loyer et des charges concernant tout le délai de préavis si c'est lui qui a notifié le congé. À l'expiration du délai de préavis, le sous-locataire est déchu de tout titre d'occupation des locaux loués.

III. La position de votre commission

La commission approuve la volonté de mettre en place des outils visant à développer l'offre de logement pour les travailleurs saisonniers en zone de montagne et, plus largement, dans les communes touristiques où l'accueil des saisonniers ne se fait pas dans des conditions satisfaisantes.

Sur proposition de votre rapporteur, la commission a adopté deux amendements pour améliorer la précision du dispositif de l'article 14 :

- l'amendement rédactionnel n° 258 ;

- l'amendement n° 257, qui clarifie la rédaction des dispositions relatives à la convention pour le logement des saisonniers. Il établit que la convention est conclue entre la commune et l'État. Les autres personnes mentionnées sont simplement associées à son élaboration. Il corrige une référence pour mettre le texte en cohérence avec l'ordonnance n°2016-1408 du 20 octobre 2016 relative à la réorganisation de la collecte de la participation des employeurs à l'effort de construction. Enfin et surtout, il distingue deux volets dans la convention : un volet "diagnostic" obligatoire et un volet relatif à la définition et à la mise en oeuvre de la politique pour le logement des travailleurs saisonniers. Ce second volet ne s'impose que si le diagnostic co-établi par la commune et l'État conclut à sa nécessité.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 14 bis A (nouveau)
(article 8-4 [nouveau] de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce)
Intermédiation locative en faveur des saisonniers

Objet : cet article crée un mécanisme de mandat permettant à une agence immobilière de déléguer des taches d'intermédiation locative pour faciliter le logement des saisonniers.

I. Le droit en vigueur

Le dispositif des agences immobilières à vocation sociale est un dispositif d'intermédiation locative en faveur des saisonniers : le propriétaire peut, avec le concours de l'agence, louer son logement à un employeur afin que ce dernier le sous-loue à ses salariés saisonniers. Toutefois, la location ou sous-location, saisonnière ou non, en nu ou en meublé d'immeubles est une activité réglementée qui suppose la détention d'une carte professionnelle en application du titre Ier de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce.

II. La position de votre commission

La commission a soutenu l'amendement n° 188 de Mme Estrosi-Sassone dont l'objectif est d'améliorer le dispositif des agences immobilières à vocation sociale. Cet amendement propose de mettre en place un mécanisme de mandat permettant à une agence immobilière de déléguer partiellement ces taches d'intermédiation locatives pour permettre au personnel de la collectivité territoriale de procéder, sous le contrôle de l'agence, aux opérations les plus courantes et les plus simple.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

Chapitre III
Développer les activités agricoles, pastorales et forestières

En première lecture à l'Assemblée nationale, l'intitulé du chapitre III a été enrichi par un amendement des rapporteures, Mmes Annie Genevard et Bernadette Laclais, pour ajouter l'objectif du chapitre tendant à développer les activités agricoles, et pas seulement les activités pastorales et forestières. Cet amendement est cohérent dans la mesure où le texte a été enrichi de dispositions propres supplémentaires propres aux activités agricoles.

Article 15 A
(article 18 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne)
Soutiens spécifiques à l'agriculture de montagne

Objet : cet article prévoit dans le cadre de la politique nationale de la montagne des soutiens spécifiques à l'agriculture de montagne destinés à compenser les handicaps naturels dans ces espaces.

I. Le droit en vigueur

L'article 18 de la loi montagne de 1985 indiquait que l'agriculture de montagne était reconnue d'intérêt général comme activité de base de la vie montagnarde. En conséquence, cet article 18 encourageait le Gouvernement à faciliter le développement agricole en montagne, en tenant compte des contraintes et potentialités de ces espaces, à mettre en oeuvre une politique agricole différenciée favorisant l'élevage et l'économie laitière, à promouvoir les productions de qualité en montagne, à assurer la préservation des terres agricoles et pastorales, à prendre en compte les handicaps naturels et favoriser les investissements, et enfin à favoriser la pluriactivité.

L'article 5 de la loi n° 92-1283 du 11 décembre 1992 relative à la partie législative du titre I er du code rural avait supprimé l'article 18 de la loi montagne mais en avait repris les dispositions au sein de l'article L. 113-1.

Cet article avait été ensuite enrichi :

- la loi d'orientation agricole de 2006 avait ajouté que la politique en faveur de l'agriculture de montagne devait favoriser la fonction environnementale de l'activité agricole en montagne ;

- la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche de 2010 avait ensuite demandé que le Gouvernement assure en montagne la pérennité des exploitations agricoles et le maintien du pastoralisme, en particulier en protégeant les troupeaux des attaques du loup et de l'ours dans les territoires exposés à ce risque.

Les dispositions réglementaires déclinent ces objectifs . En particulier, l'actuel article D. 113-13 du code rural et de la pêche maritime indique que les « zones agricoles défavorisées comprennent des zones de montagne ainsi que d'autres zones dans lesquelles l'activité agricole est nécessaire afin d'assurer le maintien d'un minimum de peuplement et la sauvegarde de l'espace naturel ». L'agriculture de montagne est donc reconnue comme connaissant des handicaps particuliers appelant une compensation ou mesures correctives.

La politique agricole commune (PAC) reconnaît également les spécificités de l'agriculture de montagne et son besoin d'un accompagnement spécifique. Ainsi, les articles 31 et 32 du règlement (UE) n° 1305/2013 du Parlement et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) instaurent un soutien spécifique à l'agriculture de montagne.

L'article 31, en particulier, indique que « les paiements destinés aux agriculteurs situés dans des zones de montagne et d'autres zones soumises à des contraintes naturelles ou autres contraintes spécifiques sont accordés annuellement par hectare de surface agricole, afin d'indemniser les agriculteurs pour tout ou partie des coûts supplémentaires et de la perte de revenu résultant de ces contraintes pour la production agricole dans la zone concernée ». En France, cette aide prends la forme de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), qui représente un montant d'environ 1 milliard d'euros par an pour les agriculteurs qui en sont bénéficiaires.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative des rapporteures, Mmes Genevard et Laclais, les députés ont adopté en commission des affaires économiques un amendement réintroduisant l'article 18 de la loi montagne, dans une rédaction différente de celle désormais reprise à l'article L. 113-1 du code rural et de la pêche maritime.

Cet article prévoit expressément dans la loi une obligation de compensation des handicaps naturels dont souffre l'agriculture de montagne.

L'article va même plus loin, puisqu'il précise que cette compensation prend une double forme :

- d'une part, une aide directe au revenu ;

- d'autre part un accompagnement aux constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ainsi qu'aux outils de production et de transformation.

Avec ce nouvel article, la loi donne donc un cadre national assez exigeant à la politique de soutien à l'agriculture de montagne , qui existe déjà dans les faits, en application des règlements européens.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur a souhaité que la forêt ne soit pas oubliée au sein de la loi montagne, et que de la même manière que pour l'agriculture, la loi prévoie des mesures spécifiques de soutien au développement de la forêt en montagne.

Toutefois, la forme prise par les soutiens à la forêt en montagne est nécessairement différente de celle prévue pour l'agriculture , dans la mesure où il n'existe pas d'équivalent de la PAC pour la forêt. En particulier, l'exploitation de la forêt n'est pas accompagnée d'aides directes au revenu, comme cela existe pour les agriculteurs, cette aide étant majorée en montagne à travers l'ICHN.

Un amendement (COM-223) en ce sens a ainsi été adopté, indiquant que, dans le cadre de la politique de la montagne, des mesures spécifiques devraient être prises pour :

- faciliter l'accès aux massifs forestiers en vue de leur exploitation ;

- encourager l'aménagement durable de la forêt en montagne ;

- encourager l'entreposage et le stockage de bois sur des sites appropriés ;

- et enfin, encourager la présence d'outils de transformation à proximité des massifs.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 15
(article L. 122-4 du code forestier)
Assouplissement des conditions d'engagement volontaire dans des documents de gestion de la forêt.

Objet : cet article permet à des propriétaires forestiers de s'engager dans des plans de gestion pour des surfaces à partir de 10 hectares comprises dans des territoires cohérents, quel que soit le nombre de propriétaires et même lorsque les parcelles sont situées sur plusieurs communes non limitrophes.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 122-3 du code forestier dresse la liste des documents de gestion de la forêt. Ces documents de gestion doivent être conformes aux directives d'aménagements et schémas régionaux arrêtés par le ministre chargé de la forêt. Il s'agit :

- dans les forêts publiques , soumises au régime forestier et donc gérées par l'Office national des forêts, des documents d'aménagement (DA) et des règlements types de gestion (RTG) ;

- dans les forêts privées , des plans simples de gestion (PSG), règlements types de gestion (RTG) et codes de bonnes pratiques sylvicoles (CPBS).

Ces documents de gestion durable permettent aux propriétaires d'être dispensés de la plupart des formalités administratives pour la réalisation des coupes et travaux , d'obtenir des subventions ou d'être éligibles aux principaux dispositifs fiscaux concernant la forêt (DEFI forêt, DEFI travaux) ou encore de pouvoir certifier la gestion durable du bois, certification qui peut être exigée par les acheteurs de bois.

Les PSG jouent un rôle très important en forêt privée : 3 millions d'hectares environ sont couverts par un tel document de gestion.

Des PSG sont obligatoires, en application de l'article L. 312-1 du code forestier, pour les bois et forêts d'au moins 25 hectares appartenant au même propriétaire et situés dans un même secteur géographique, que ces bois et forêts soient d'un seul tenant ou pas. Le PSG est soumis à l'agrément du centre régional de la propriété forestière (CRPF).

La loi permet aussi à des propriétaires de s'engager volontairement dans des PSG pour des bois et forêts de moindre ampleur : l'article L. 122-4 offre cette possibilité pour des surfaces d'au moins 10 hectares, appartenant à plusieurs propriétaires et situées dans une même commune ou des communes limitrophes. La même possibilité est donnée aux collectivités propriétaires de forêt et s'engageant dans un DA.

II. Le projet de loi initial

L'article 15 vient assouplir le régime des PSG et DA conclus volontairement. En effet, l'article L. 122-4, dans sa rédaction actuelle, est très restrictif :

- tout d'abord, il ne permet de s'engager dans un PSG que lorsqu'il existe une pluralité de propriétaires . La lecture littérale de l'article L. 122-4 laisse penser qu'il n'est pas possible de faire agréer un PSG lorsque les bois et forêts sont la propriété d'un seul, ce qui n'a pas beaucoup de sens. L'étude d'impact accompagnant le projet de loi souligne qu'il s'agit là d'une erreur de codification par l'ordonnance n° 2012-92 du 26 janvier 2012, dans la mesure où l'ancien article L. 6 du code forestier n'avait pas créé une telle restriction ;

- ensuite, l'actuel article L. 122-4 du code forestier n'offre la possibilité d'engagement volontaire dans un PSG que lorsque les parcelles forestières sont situées dans une seule commune ou dans des communes limitrophes , ce qui bride le développement de ce type de document de gestion.

L'article 15 vient donc lever ces deux restrictions :

- en proposant que l'engagement volontaire dans un PSG puisse se faire à partir de 10 hectares même lorsqu'il n'existe qu'un seul propriétaire forestier ;

- en prévoyant que les parcelles de bois et forêts incluses dans le PSG soient situées « sur un territoire géographique cohérent d'un point de vue sylvicole, économique et écologique ». Cette exigence de territoire géographique cohérent figure d'ailleurs déjà à l'article L. 332-7 du code forestier, qui définit les groupements d'intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF).

L'objectif de l'assouplissement du régime des PSG collectifs et volontaires consiste à les développer pour pouvoir, ensuite, faciliter la constitution de GIEEF. L'existence d'un PSG agréé est en effet une des conditions de reconnaissance des GIEEF créés par la LAAF de 2014.

LES GROUPEMENTS D'INTÉRÊT ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTAL FORESTIERS (GIEEF)

Créés par la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (LAAAF) de 2014, les GIEEF regroupent des propriétaires forestiers de manière assez large : au moins 300 hectares ou au moins 20 propriétaires sur au moins 100 hectares. Ce seuil de surface peut être abaissé en zone de montagne.

Les GIEEF peuvent être portés par des structures très diverses : associations, organisations de producteurs ... Ils peuvent poursuivre des buts variés : augmenter la production de bois, valoriser le patrimoine forestier, prendre en compte les enjeux environnementaux en forêt.

La reconnaissance du GIEEF est accordée par le préfet de région . Elle permet de bénéficier de majorations dans l'attribution d'aides publiques et dans le calcul de l'avantage fiscal du DEFI-forêt.

Deux ans après la mise en place des GIEEF, cet instrument n'est pas encore très utilisé : seul un GIEEF a fait l'objet d'une reconnaissance .

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Les députés n'ont pas modifié substantiellement l'article 15, adoptant simplement 2 amendements rédactionnels en commission et un amendement rédactionnel en séance.

IV. La position de votre commission

L'assouplissement des conditions requises pour entrer dans une démarche de PSG vise à développer l'exploitation du bois en forêt, pas seulement en montagne. La mobilisation plus forte de la forêt privée est en effet un objectif constant de la politique forestière, la forêt privée étant plutôt sous-exploitée.

Votre rapporteur soutient donc les mesures prévues à l'article 15, et ne propose pas d'amendement sur cet article.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 15 bis A
(article L. 481-1 du code rural et de la pêche maritime)

Durée minimale des conventions pluriannuelles de pâturage

Objet : cet article a pour objet de préciser la durée minimale des conventions pluriannuelles de pâturage qui peut être décidée par arrêté préfectoral, au-delà du régime de droit commun de cinq ans.

I. Le droit en vigueur

Il existe un régime particulier pour la location des terres situées dans l'espace pastoral . L'espace pastoral est défini par l'article L. 113-2 du code rural et de la pêche maritime comme « constitué par les pâturages d'utilisation extensive et saisonnière » situé dans les communes de montagne et dans des communes classées comme ayant des espaces pastoraux par l'autorité administrative.

Ce régime particulier, dérogatoire au statut du fermage, est fixé par les articles L. 481-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime.

Cet article permet de conclure des contrats d'exploitation sur ces terres soit sous le régime commun du statut du fermage, soit sous le régime particulier des conventions pluriannuelles de pâturage. Ces conventions définissent les travaux et aménagements devant être effectués par les différentes parties et fixent les montants des loyers dans les limites fixées par les préfets.

L'une des particularités de ces conventions tient à leur durée : elles sont conclues pour une durée de cinq ans et non neuf ans, comme les baux ruraux classiques. Un arrêté préfectoral peut prévoir des durées plus longues.

Les conventions pluriannuelles de pâturage ne font pas obstacle à une location des mêmes terres en dehors de la période de pâturage, par exemple lorsque les terres sont enneigées ou pour la chasse, à condition que ces activités soient compatibles avec la mise en valeur pastorale.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de Mme Jeanine Dubié, les députés ont adopté en séance un amendement qui a pour effet de maintenir la durée minimale de cinq ans des conventions pluriannuelles de pâturage, et de permettre une durée minimale plus longue, fixée par arrêté préfectoral après avis de la chambre d'agriculture compétente, en fixant une limite de cette durée minimale à 9 ans, qui est la durée du bail rural classique.

III. La position de votre commission

La nouvelle rédaction proposée ne change pas grand-chose au dispositif de l'article L. 481-1 du code rural et de la pêche maritime .

Elle permet à l'arrêté préfectoral de donner une durée minimale plus longue aux conventions pluriannuelles de pâturage, qui est de cinq ans faute d'arrêté. Un arrêté permettra de porter cette durée minimale à 9 ans, alors que le droit jusqu'à présent permet une durée minimale plis longue mais sans en préciser le terme.

Votre rapporteur souligne qu'il s'agit d'une durée minimale et non d'une durée maximale : il sera possible de conclure des conventions pluriannuelles de pâturage pour des durées plus longues que la durée minimale : 15, 20, 25 ans, ou même plus, si l'amortissement des investissements réalisés le justifie. Votre commission a adopté un amendement rédactionnel (n° 227) de votre rapporteur, et un amendement (n° 226) précisant que les loyers des conventions pluriannuelles de pâturage devraient être réactualisés chaque année selon l'indice national du fermage.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 15 bis
(article L. 124-3 du code forestier)
Présomption de gestion durable des forêts situées en site Natura 2000 couvertes par un code de bonnes pratiques sylvicoles

Objet : cet article fait bénéficier les forêts situées en site Natura 2000 d'une présomption de gestion durable lorsque le propriétaire a adhéré à un code de bonnes pratiques sylvicoles.

I. Le droit en vigueur

Les codes de bonnes pratiques sylvicoles (CBPS) sont des documents d'orientation élaborés par les centres régionaux de la propriété forestière (CRPF) et approuvés par le préfet de Région, qui comprennent des recommandations pour la gestion durable de leurs bois et forêts par les propriétaires privés.

Créés par la loi forestière de 2001, les CBPS sont moins contraignants que les PSG . Lorsque le propriétaire adhère à un CBPS pour une durée d'au moins dix ans, il bénéficie d'une présomption de gestion durable et peut alors bénéficier d'aides publiques et se dispenser de l'obligation de demander des autorisations pour les opérations de coupe ou travaux réalisés en forêt.

La loi agricole de 2014 encourage la gestion collective de leurs forêts par les petits propriétaires forestiers à travers la constitution de GIEEF, mais n'a pas supprimé pour autant les CBPS : l'article L. 124-2 du code forestier donnant une présomption de gestion durable pour les CBPS dans lesquels les propriétaires s'engagent pendant au moins 10 ans est maintenu jusqu'en 2022.

Pour les bois et forêts situés dans des sites Natura 2000, l'article L. 124-3 du code forestier prévoit que les propriétaires présentent des garanties de gestion durable lorsqu'ils sont couverts par un document de gestion (DA ou RTG en forêt publique, PSG ou RTG en forêt privée), hors CBPS.

Mais ils doivent aussi remplir une condition supplémentaire : soit avoir adhéré à la charte Natura 2000 ou passé un contrat Natura 2000, soit avoir fait reconnaître son document de gestion comme conforme aux exigences du document d'objectifs Natura 2000.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de Mme Pascale Got, les députés ont adopté en commission un amendement permettant de considérer que les propriétaires forestiers engagés pour au moins 10 ans dans un CPBS rempliraient les obligations de gestion durable exigées dans les sites Natura 2000.

La rédaction proposée ne dispense pas des conditions supplémentaires exigées des sylviculteurs dans les sites Natura 2000 : le propriétaire devra avoir adhéré à la charte Natura 2000 ou passé un contrat Natura 2000, ou le CBPS devra être conforme aux prescriptions prévues sur le site Natura 2000.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur considère que la solution proposée est équilibrée, en permettant aux propriétaires forestiers disposant d'un CBPS et dont les parcelles sont situées en zone Natura 2000, de ne pas à effectuer de démarches spécifiques pour exploiter celles-ci.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 15 ter
(article L. 142-9 du code forestier)
Recours à l'Office national des forêts pour l'instruction des dossiers de restauration des terrains de montagne

Objet : cet article prévoit que l'instruction des dossiers de restauration des terrains de montagne par l'Office national des forêts soit automatique, qu'il s'agisse de demandes émanant de l'État ou des collectivités territoriales.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 142-9 du code forestier donne mission à l'Office national des forêts (ONF) de faire l'instruction des dossiers consacrés à la restauration des terrains de montagne (RTM) des forêts domaniales et des forêts des collectivités territoriales.

Les services RTM jouent un rôle essentiel dans les territoires de montagne. On compte 3 agences de massif de l'ONF regroupant un peu plus d'une centaine d'agents.

La politique consacrée à la RTM couvre 380 000 hectares de forêts domaniales et 20 000 ouvrages de génie civil.

Le budget de fonctionnement consacré à la mission RTM s'élève à 5,5 millions d'euros et le budget d'investissement à 7,5 millions d'euros environ.

Les services RTM ont une mission essentielle d'observation des phénomènes naturels (comme la surveillance des couloirs d'avalanche) mais aussi d'appui méthodologique et d'appui technique aux préfets et aux collectivités territoriales.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de Bernadette Santais, rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale, et du député Martial Saddier, un amendement a été adopté pour modifier le texte de la commission en première lecture et insérer l'article 15 ter.

La modification apportée à l'article L. 142-9 du code forestier consiste à indiquer que l'ONF instruit systématiquement les demandes RTM présentées par l'État comme celles présentées par les collectivités territoriales, dans le cadre des procédures de déclaration d'utilité publique (DUP). Il s'agit de mettre sur un pied d'égalité les deux catégories de demandes.

III. La position de votre commission

La mesure proposée est intéressante. Elle ne représente pas une lourde activité pour les services RTM de l'ONF : les forêts acquises par les collectivités territoriales depuis 1988 dans le cadre des procédures de RTM ne représentent que 11 hectares.

En obligeant juridiquement les services RTM à instruire les demandes des collectivités territoriales, l'article 15 ter consolide la place de l'ONF dans le dispositif.

Il conviendra que les moyens de fonctionnement des services RTM suivent l'évolution des missions qui leur sont confiées.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 15 quater
(article L. 341-6 du code forestier)
Opérations de défrichement soumises à l'obligation de compensation forestière

Objet : cet article exonère de boisement compensateur ou de taxe de défrichement les opérations concernant les boisements spontanés depuis moins de quarante ans en zone de montagne.

I. Le droit en vigueur

Le droit forestier assure une protection forte des espaces boisés, en encadrant de manière très stricte les défrichements.

L'article L. 341-1 définit le défrichement comme « toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière ».

De telles opérations ne sont possibles qu'à deux conditions :

- tout d'abord, le défrichement doit faire l'objet d'une autorisation préfectorale : l'article L. 341-3 du code forestier pose le principe de l'autorisation administrative, dont les modalités sont précisées par voie réglementaire. L'article R. 341-4 du même code précise que l'autorisation est réputée donnée en cas d'absence de réponse du préfet sous deux mois à compter du dépôt d'un dossier complet de demande de défrichement, sauf pour les défrichements soumis à enquête publique ou demandés dans le cadre d'exploitation de carrières, pour lesquels l'autorisation est expresse. L'autorisation de défrichement doit faire l'objet d'un affichage par son bénéficiaire sur le site concerné et en mairie de la commune concernée. L'article L. 341-5 du code forestier dresse une liste des nombreux cas pour lesquels une demande de défrichement peut être rejetée : maintien des terres sur des terrains en pente, existence de sources ou zones humides, équilibre biologique du territoire etc...

L'article L. 341-2 définit une liste de cas qui ne sont pas considérés comme des défrichements :

- la mise en valeur d'anciens terrains de culture, de pacage ou d'alpages envahis par une végétation spontanée ;

- les opérations dans les noyeraies, oliveraies, plantations de chênes truffiers et vergers à châtaignes ;

- les opérations portant sur les taillis à courte rotation ;

- les opérations en vue de la création d'équipements en forêt destinés à l'exploitation forestière.

En outre, l'article L. 342-1 du code forestier définit en outre plusieurs dans lesquels les défrichements sont dispensés de la procédure d'autorisation :

- pour les petits parcelles forestières, entre 0,5 et 4 hectares, le seuil exact étant fixé dans chaque département ;

- pour les parcs et jardins clos à proximité d'une habitation principale ;

- pour les zones où la reconstitution de bois après coupe est interdite ou réglementée ;

- pour les jeunes bois de moins de 30 ans.

Ensuite, le défrichement fait l'objet de compensations : l'article L. 341-6 du code forestier pose le principe d'un boisement compensateur d'une surface au moins équivalente à la surface défrichée, et pouvant aller jusqu'à cinq fois la surface défrichée. D'autres conditions peuvent aussi être imposées au demandeur : exécution de travaux limitant les risques naturels (avalanches, incendies) ou travaux de génie civil ou biologique.

La loi donne cependant une souplesse sur la compensation, en permettant de dispenser de boisement compensateur par le versement d'une taxe de défrichement, dont le produit est affecté au fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB).

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de M. Martial Saddier et de Mme Jeanine Dubié, les députés ont adopté en commission des affaires économiques deux amendements identiques redéfinissant le défrichement en zone de montagne.

Ces amendements modifiaient le code forestier pour définir les terrains boisés comme étant seulement ceux identifiés comme tels au cadastre. La conséquence de cet amendement consistait à ne plus avoir besoin de demander d'autorisation de défrichement et d'effectuer de boisement compensateur (ou de payer la taxe de défrichement) pour couper les bois situés en zone de montagne sur des terrains n'étant pas classés au cadastre comme forestiers.

D'après les chiffres fournis à votre rapporteur, les terrains boisés non classés comme tels au cadastre représenteraient entre deux et trois millions d'hectares en France.

En séance, un amendement des rapporteures, Mmes Genevard et Laclais, a été adopté pour réduire l'étendue de l'assouplissement au droit général du défrichement dans les zones de montagne :

- l'exigence d'une autorisation de défrichement est conservée sur l'ensemble du territoire . En effet, des refus d'autoriser des défrichements peuvent rester nécessaires en montagne par exemple pour prévenir l'érosion des sols en pente et un certain contrôle administratif constitue une véritable précaution.

- l'exception au boisement compensateur ou à défaut, à la taxe de défrichement en zone de montagne s'applique sur un périmètre plus restreint que l'ensemble des terrains boisés non classés comme tels au cadastre : sont concernés les seuls boisements spontanés de première génération sans aucune intervention humaine depuis moins de 40 ans.

III. La position de votre commission

Lors des auditions, des interrogations sont apparues sur le critère retenu pour échapper à l'obligation de compensation des défrichements.

Permettre une telle souplesse sur les seuls terrains ayant fait l'objet d'un boisement spontané depuis moins de 40 ans peut se justifier pour conserver des forêts qui, après cette période, ont acquis un certain intérêt écologique . Toutefois, cela limite la portée de la mesure. Or, la remobilisation en montagne d'espaces progressivement abandonnés à la forêt à des fins agricoles et pastorales est stratégique pour développer l'autonomie fourragère des exploitations d'élevage dans ces territoires.

En outre, il existe des risques de divergences d'appréciation sur l'ancienneté des boisements spontanés , à l'origine de potentiels contentieux entre l'administration et les propriétaires des parcelles concernées sur l'application de l'exonération.

Il serait donc justifié de légèrement modifier l'article 15 quater , en indiquant que l'obligation de boisement compensateur ou à défaut de versement de la taxe de défrichement, ne s'applique pas sur tout terrain de montagne non classé au cadastre en nature de bois . Tous les terrains agricoles abandonnés ayant fait l'objet d'un boisement spontané pourraient ainsi retrouver une vocation agricole ou pastorale.

Votre rapporteur a proposé à votre commission un amendement (COM-224) visant à faciliter la reconquête des terres agricoles enfrichées en zone de montagne. De nombreuses parcelles qui étaient agricoles sont devenues de fait des bois et forêts, tout en restant considérées comme agricoles au cadastre.

Or, la reconquête en montagne de terrains agricoles ou pastoraux est décisive pour assurer une autonomie fourragère suffisante. L'obligation de boisement compensateur ou de taxe de défrichement est un frein à cette reconquête. L'amendement a donc proposé d'élargir l'assouplissement proposé par les députés, en exonérant de ces obligations les opérations menées sur des terres qui ne sont pas classées en nature de bois au cadastre.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 15 quinquies A (nouveau)
(articles L. 261-7 et L. 362-1 du code forestier)
Ajustement des sanctions pour coupe illicite de bois en forêt publique et privée.

Objet : cet article aligne les sanctions encourues pour coupe illicite en forêt publique sur les sanctions existantes en forêt privée et plafonne les amendes en cas de coupe illicite en fonction de la valeur des coupes effectuées.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 124-5 du code forestier soumet à autorisation des coupes de plus de 50 % des bois sur des parcelles forestières d'une surface supérieure à un seuil départemental, lorsque ces forêts ne sont pas couvertes par un document permettant de donner une garantie de gestion durable : code de bonnes pratiques sylvicoles, plan simple de gestion, document d'aménagement ....

Cette disposition s'applique aux forêts privées, mais aussi aux forêts publiques.

La coupe illicite consiste à procéder à des coupes sans autorisation, et fait l'objet de sanctions qui ne sont pas les mêmes selon que le propriétaire de la forêt concernés soit public ou privé :

- en forêt publique , l'article L. 261-7 du code forestier prévoit une amende de 1 200 € par hectare parcouru ;

- en forêt privée , l'article L. 362-1 du code forestier prévoit des amendes plus lourdes pour les coupes abusives : 20 000 € par hectare pour les deux premiers et 60 000 € par hectare supplémentaire.

II. La position de votre commission

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement (COM-228) pour rétablir une certaine cohérence dans le régime des sanctions pour coupes illicites.

Celles-ci avaient été revues suite à l'ordonnance prise en application de l'article 69 de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche, procédant à une nouvelle codification du code forestier.

La disproportion entre sanctions encourues en forêt publique et en forêt privée est contraire au principe constitutionnel d'égalité : d'où la modification proposée à l'article L. 261-7 du code forestier, qui aligne les sanctions existantes en forêt publiques sur celles existantes en forêt privée : 20 000 € d'amende par hectare pour les deux premiers et 60 000 € par hectare ensuite.

Par ailleurs, dans le but d'éviter une disproportion entre les peines encourues et l'ampleur du préjudice, la deuxième partie de l'amendement modifie l'article L. 362-1 du code forestier pour plafonner les amendes à 4,5 fois la valeur des bois coupés.

Ce plafonnement existait avant la refonte du code forestier. La rédaction retenue conduit en outre à supprimer la pénalisation forte des coupes illicites dans le cadre des groupements forestiers.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 15 quinquies
(article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime)
Priorité d'utilisation conférée aux exploitants agricoles regroupés dans un groupement pastoral

Objet : cet article donne une priorité générale d'utilisation des pâturages en montagne aux agriculteurs locaux.

I. Le droit en vigueur

Dans les communes de montagne et communes classées en espace pastoral par les préfets, l'article L. 135-1 du code rural et de la pêche maritime permet de créer des associations foncières pastorales (AFP) réunissant les propriétaires de terrains agricoles, pastoraux ou forestiers. Les collectivités territoriales peuvent participer à ces structures.

Parallèlement, dans les mêmes espaces, l'article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime permet la constitution de groupements pastoraux agréés (GPA) entre éleveurs, en vue de l'exploitation des pâturages.

Pour favoriser l'exploitation des pâturages par les éleveurs en proximité de leurs installations, et ainsi assurer le maintien du tissu économique local, l'article le troisième alinéa de l'article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime indique que lorsque les pâturages d'une AFP sont principalement situés en zone de montagne, il existe une priorité dans l'attribution de ces pâturages aux GPA comptant le plus d'agriculteurs locaux, ou, à défaut, le plus d'agriculteurs de montagne.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Les députés ont adopté en séance deux amendements identiques de Mme Jeanine Dubié et des rapporteures Mmes Annie Genevard et Bernadette Laclais, afin d'étendre le droit de priorité conféré aux agriculteurs locaux de montagne regroupés en GPA.

Ce droit de priorité ne vaut en effet aujourd'hui que pour les pâturages situés dans le périmètre d'une AFP.

La modification proposée par l'amendement étend le droit de priorité des agriculteurs locaux en montagne sur tous les pâturages, qu'ils soient gérés dans le cadre d'une AFP, qu'ils soient mis à disposition dans le cadre d'une convention pluriannuelle de pâturage, ou qu'ils fassent l'objet de baux ruraux classiques.

III. La position de votre commission

Cette disposition devrait permettre d'encourager le maintien d'éleveurs locaux en leur permettant d'être prioritaires dans l'exploitation des espaces pastoraux les plus proches de leurs installations.

Votre rapporteur est favorable à cette extension . On peut aussi souligner que cette priorité vaudra de manière systématique, quelle que soit la qualité du propriétaire : si le propriétaire des pâturages est une collectivité territoriale, celle-ci devra aussi donner une priorité d'attribution aux agriculteurs locaux, ce qui contribue au maintien du tissu économique local.

Il conviendra cependant de prévoir un accompagnement des propriétaires quant à la mise en oeuvre de cette disposition : en effet, la priorité d'utilisation se traduit par une obligation de solliciter les groupements pastoraux du territoire avant de louer tout pâturage, faute de quoi la convention conclue ne serait pas valable.

Cette nouvelle obligation conduira les propriétaires, y compris les petits propriétaires, à devoir effectuer des démarches préalables à la location qui peuvent être contraignantes.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 16
(article L. 1 du code rural et de la pêche maritime et article L. 427-6 du code de l'environnement)
Préservation face aux grands prédateurs des animaux d'élevage et prise en compte des contraintes de l'agriculture de montagne

Objet : cet article fixe un objectif de gestion différenciée des grands prédateurs dans les territoires de montagne et prévoit l'adaptation des mesures de destruction des animaux sauvages aux spécificités des territoires de montagne.

I. Le droit en vigueur

Espèce protégée au titre de la convention de Berne et de la directive européenne « habitat, faune et flore » de 1992 2 ( * ) , le loup est réapparu sur le territoire français en 1992.

D'abord résiduelle, sa présence s'est enracinée à partir du Sud-Est , et les secteurs géographiques où la présence du loup est attestée s'étendant même jusqu'aux frontières du Nord-Est, à tout le Massif-central et aux Pyrénées.

Le suivi hivernal 2015-2016 mis en place dans le cadre du plan loup a permis de recenser 49 zones de présence permanente (ZPP) du loup, alors qu'il y en avait moins d'une vingtaine en 2005-2006.

Le nombre de loup présents sur le territoire avoisinerait les 300, contre à peine 50 il y a une décennie . Le réseau loup identifie environ 35 meutes.

Cette croissance de la population des loups va de pair avec la croissance des attaques sur les troupeaux . La prédation ne cesse de progresser : d'un peu plus de 700 attaques en 2008, on est passés à plus de 2 200 attaques sur la période du 1 er janvier au 15 octobre 2016 3 ( * ) .

À ces attaques des loups, s'ajoutent les dommages causés par les autres prédateurs : lynx, ours. Les éleveurs soulignent également le rôle des vautours, qui sans attaquer directement les troupeaux, développent des actions nuisibles à la conduite de l'activité pastorale.

Plusieurs plans loup se sont succédé . Le dernier plan national d'action loup qui couvre la période 2013-2017 prévoit des mesures de suivi de la population des loups, des mesures de protection des troupeaux contre la prédation, d'indemnisation lorsque des dégâts sont constatés et comporte des mesures de régulation des populations à travers les tirs de prélèvement. Le plan repose sur un double principe : la gestion différenciée du loup selon les territoires, et la graduation de la réponse à la menace.

Des moyens croissants sont consacrés au loup, à travers les mesures de prévention et les mesures d'indemnisation des éleveurs touchés.

LE LOUP : UN COÛT CROISSANT POUR LES FINANCES PUBLIQUES

L'action des pouvoirs publics en direction des éleveurs touchés par les attaques de loup se déploie dans deux directions :

- des mesures de protection sont mises en place (clôtures, chiens de défense) dans les zones de présence permanente du loup, pour prévenir les attaques ;

- des mesures d'indemnisation sont prises lorsque les éleveurs sont victimes d'attaques.

Les mesures de protection représentent un coût croissant. Elles sont financées par les crédits du ministère de l'agriculture, complétés par des crédits européens en provenance du FEADER. L'enveloppe globale est passée de 1,32 millions d'euros en 2004 à 5 millions d'euros en 2009, 8,6 millions d'euros en 2012 et 18,8 millions d'euros en 2015. Pour l'année 2016, 2 238 dossiers ont été déposés pour un montant estimé à plus de 22 millions d'euros.

Les mesures d'indemnisation sont aussi de plus en plus coûteuses. Elles sont financées par les crédits du ministère de l'environnement. En 2015, près de 2 500 attaques ont fait l'objet d'indemnisations, représentant environ 9 000 animaux, pour un montant de 2,8 millions d'euros, contre 0,8 million d'euros en 2008.

Le droit applicable aux grands prédateurs répond à deux impératifs contradictoires : l'impératif écologique consistant à protéger des espèces sauvages fragiles, et l'impératif pastoral consistant à préserver les animaux d'élevage et limiter la prédation affectant les troupeaux.

Les engagements internationaux de la France n'interdisent pas de prendre des mesures vis-à-vis des grands prédateurs, mais les encadrent très strictement. Le loup est en effet une espèce protégée au titre de la convention de Berne et de la directive habitat 4 ( * ) , ce qui implique que les mesures de régulation de la population de loups répondent à deux conditions :

- d'une part, il doit s'agir de mesures de dernier recours , aucune autre solution n'étant satisfaisante ;

- d'autre part, les mesures de régulation ne doivent pas remettre en cause la présence sur le territoire des loups .

Les marges de manoeuvre législatives sont donc étroites.

En droit français, les dispositions sur les grands prédateurs sont dispersées entre plusieurs textes :

- l'article L. 1 du code rural et de la pêche maritime , qui fixe les grands objectifs de la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation, précise dans son paragraphe VI que cette politique, dans les territoires de montagne, tient compte des spécificités de ces territoires, et concourt au maintien de l'agriculture de montagne, en particulier en la préservant « des préjudices causés par les grands prédateurs ». La loi définit donc bien des limites à la protection de ces espèces : il convient de ne pas pénaliser l'activité agricole et pastorale en montagne ;

- les dispositions du code de l'environnement mettent en oeuvre la politique de protection des grands prédateurs de manière beaucoup plus précise mais aussi plus stricte : en vertu des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement, la destruction du loup est interdite, sauf dans des conditions précises définies par voie réglementaire. Dans le détail, c'est un arrêté interministériel du 30 juin 2015 qui encadre les dérogations pouvant être accordées par les préfets. Cet arrêté précise les moyens de défense pouvant être utilisés : tirs d'effarouchement, tirs de défense, tirs de défense renforcée et enfin tirs de prélèvement. Pour 2015, le nombre maximal de tirs de prélèvements autorisés a été fixé à 33.

En outre, l'article L. 427-6 du code de l'environnement qui donne un cadre juridique aux battues administratives pouvant être organisées par le préfet pour détruire des animaux sauvages a été modifié par la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014 , afin de préciser que, pour les loups, les préfets doivent délivrer sans délai à chaque éleveur ou berger une autorisation de tir de prélèvement de loup valable six mois lorsqu'une attaque avérée est survenue sur des animaux d'élevage. La loi d'avenir de 2014 visait ainsi un objectif de meilleure protection des troupeaux face à la multiplication des attaques.

II. Le projet de loi initial

L'article 16, dans sa rédaction initiale, prévoyait simplement d'inscrire dans les objectifs de la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation qui sont énumérés à l'article L. 1 du code rural et de la pêche maritime le principe de gestion différenciée dans ces territoires des moyens de lutte contre la prédation des troupeaux domestiques par les grands prédateurs.

Il s'agissait de donner une base juridique à une déclinaison spécifique du plan loup en zone de montagne :

- en adaptant les mesures de protection aux caractéristiques du territoire : pression de la prédation, systèmes d'exploitation mis en place ;

- en modulant les mesures de prélèvement du loup selon les secteurs, en particulier par un renforcement des mesures dans les zones de présence du loup où les actes de prédation sur les troupeaux sont récurrents.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Les députés ont adopté de nombreux amendements modifiant l'article 16, afin d'enrichir la liste des objectifs de la politique en faveur de l'agriculture de montagne prévue à l'article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, et pour étendre le principe de gestion différenciée des mesures de lutte contre les prédateurs, en particulier le loup.

En commission :

- un amendement de Mme Jeanine Dubié a été adopté pour améliorer la prise en compte des spécificités de l'agriculture dans les zones de montagne en modifiant le VI de l'article L. 1 du code rural et de la pêche maritime. Cet amendement précise aussi que les actions en faveur de l'agriculture de montagne visent à compenser les handicaps naturels et tenir compte des surcoûts inhérents à l'implantation en zone de montagne.

- un amendement de Mme Bernadette Santais, rapporteure de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, a également été adopté pour ajuster les dispositions relatives à la prédation : plutôt que de parler de prédation des troupeaux domestiques par les grands prédateurs, les députés ont préféré que le texte vise les grands prédateurs d'animaux d'élevage .

- enfin, un amendement des rapporteures Mmes Annie Genevard et Bernadette Laclais a visé à ce que les mesures mises en place dans le cadre de l'article L. 427-6 du code de l'environnement puissent être adaptées aux spécificités des territoires de montagne : cette disposition donne une base juridique à la lutte contre les campagnols , classés espèce nuisible par l'arrêté du 14 mai 2014.

En séance, outre des modifications rédactionnelles, d'autres apports ont été enregistrés :

- trois amendements identiques de M. Dino Cineri, de M. Arnaud Viala et de Mme Jeanine Dubié ont prévu que, dans le cadre de la gestion différenciée applicable à la montagne, les moyens de lutte contre les grands prédateurs devaient être adaptées aux spécificités de ces territoires ;

- un autre amendement déposé à titre personnel par Mme Bernadette Laclais, a modifié l'article L. 427-6 du code de l'environnement, afin de prévoir que les attaques avérées sur les animaux d'élevage ouvrent droit à indemnisation . Cette reconnaissance législative n'élargit pas les situations d'indemnisation, qui résultent d'une démarche volontaire de l'État mise en place dès 1993. La règle appliquée en cas de mortalité d'un animal liée à une prédation est que l'indemnisation est appliquée si la responsabilité du loup n'est pas écartée. Cet amendement a été sous-amendé par Mme Annie Genevard pour préciser que la gestion différenciée des nuisances occasionnées par les espèces non domestiques - comme les campagnols -, en zone de montagne, devait intégrer la protection des prairies permanentes , qui sont particulièrement exposées aux dommages occasionnés par les animaux nuisibles.

IV. La position de votre commission

Le développement du loup pose des problèmes croissants à l'élevage en France, dont le Sénat s'est déjà ému à de nombreuses reprises, et notamment en prenant l'initiative de la mise en place des zones de protection renforcée dans le cadre de la loi d'avenir agricole de 2014.

L'augmentation de la pression du loup pose en effet de nombreuses difficultés :

- pour les éleveurs, la présence du loup perturbe la conduite technique des élevages et engendre une augmentation de la charge de travail, surtout de nuit ;

- l'obligation de concentrer les bêtes au sein de parcs fermés présente des inconvénients environnementaux , en termes de pression sur les pâturages, ou encore en termes d'utilisation de l'eau ;

- sur le plan économique , les éleveurs supportent une charge résiduelle due à la présence des loups : même si les attaques font l'objet de mesures d'indemnisation, les préjudices indirects ne sont pas indemnisés, comme la baisse de productivité des animaux ayant subi le traumatisme des attaques de loup. En ce qui concerne les dépenses de prévention, une fraction de 20 % reste à la charge de l'éleveur ;

- sur le plan territorial , la présence du loup pousse à l'abandon du pâturage dans les zones éloignées et embroussaillées plus difficiles à surveiller, qui ont vocation à redevenir des friches inexploitées.

- enfin, les attaques de loup contribuent au découragement des bergers , et à l'abandon de cette activité, du fait de la pression psychologique qu'elle entraîne.

Votre rapporteur plaide donc en faveur d'une révision drastique des conditions d'application de la convention de Berne et de la directive habitat . Faut-il sortir le loup de la liste des espèces protégées ? La question se pose aujourd'hui.

Pour rappeler que, si la protection des grands prédateurs est un objectif au titre de la biodiversité, la protection des éleveurs face à ces grands prédateurs ne saurait être négligée, votre rapporteur a proposé à votre commission un amendement COM-267 modifiant l'article L. 1 du code rural et de la pêche maritime pour indiquer que la prédation devait être régulée, dans l'intérêt de la préservation des activités d'élevage en montagne.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

Article 16 bis
(article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime)
Possibilité de révision du prix en cas de préemption d'une société d'aménagement foncier et d'établissement rural sur des bâtiments agricoles

Objet : cet article permet d'utiliser la procédure de révision de prix dans le cadre des préemptions des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) portant sur des bâtiments agricoles.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime donne une arme très puissante aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) pour leur permettre d'exercer leurs missions : le droit de préemption.

Ce droit de préemption leur permet d'acquérir des terrains et bâtiments à usage agricole, y compris les bâtiments d'habitation.

La loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014 a modifié la législation relative aux SAFER, notamment en étendant et précisant ce droit de préemption : celui-ci s'applique ainsi aux bâtiments qui ont été utilisés pour une activité agricole dans les cinq ans ayant précédé l'aliénation, afin de leur rendre leur vocation agricole.

Or, la loi prévoit dans ce cas que la SAFER est privée de la possibilité offerte par l'article L. 143-10 du code rural et de la pêche maritime de demander une révision de prix, si le prix de vente lui paraît excessif.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de Dominique Potier, les députés ont adopté en séance un amendement (n° 299) qui permet d'utiliser la procédure de révision de prix si le bâtiment concerné par l'exercice du droit de préemption des SAFER n'a pas changé de destination.

En effet, la révision de prix paraît impossible à mettre en oeuvre lorsque le bâtiment change de destination , par exemple lorsqu'un bâtiment agricole est transformé en habitation : dans ce cas, le droit de préemption des SAFER demeure mais la préemption ne peut se faire qu'au prix prévu par les parties, faute de quoi le risque de spoliation serait élevé.

Mais la rédaction du deuxième et de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime est trop large et ne permet pas non plus d'utiliser la procédure de révision de prix pour les anciens bâtiments agricoles ayant été utilisés comme tels depuis moins de cinq ans au moins, et qui ont toujours un caractère agricole même s'ils ne sont plus utilisés.

L'amendement apporte donc une précision utile au dispositif de la préemption des SAFER sur les bâtiments , en indiquant que celles-ci pourront désormais utiliser la révision de prix, dès lors que le bâtiment n'a pas changé de destination.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur souscrit à cet amendement de précision, qui permet de prévenir la spéculation sur des bâtiments agricoles qui pourraient être transformés pour d'autres usages.

Il souscrit pleinement à l'objectif de préservation de la vocation agricole des bâtiments situés sur les exploitations agricoles.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 16 ter
(article L. 323-2 du code rural et de la pêche maritime)
Participation d'un groupement agricole d'exploitation en commun total à un groupement pastoral

Objet : cet article permet aux groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) de participer en tant que tels à un groupement pastoral, sans perdre leur qualité de GAEC.

I. Le droit en vigueur

Les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) constituent une catégorie particulière de société agricole, sous forme de société civile de personnes.

Le statut du GAEC permet à des agriculteurs de se regrouper pour travailler au sein d'une même structure, en mettant en commun l'ensemble de leurs activités agricoles, leurs équipements, le travail, et les fruits de la production. Ce statut interdit aux associés de se livrer aux activités mises en commun au sein du GAEC dans un autre cadre : le GAEC est donc une forme exclusive d'exploitation agricole.

Mais à l'inverse des regroupements opérés sous d'autres formes sociétaires d'exploitation agricole, les agriculteurs bénéficient avec le GAEC d'un régime dit de « transparence » : au regard du droit fiscal et des aides aux exploitations, chaque agriculteur associé au sein d'un GAEC est regardé comme une entité : il fait l'objet d'une imposition séparée, et le calcul des diverses aides aux exploitations s'effectue au niveau de l'agriculteur individuel et non du GAEC.

En contrepartie de ce statut avantageux, les agriculteurs en GAEC sont soumis à divers contrôles , et notamment ils doivent passer par une procédure d'agrément, prévue à l'article L. 323-11 du code rural et de la pêche maritime.

Le droit distingue les GAEC totaux des GAEC partiels, dans lesquels seule une partie des activités agricoles est mise en commun. Mais dans ce cas, les GAEC ne bénéficient pas de la transparence, ce qui leur fait perdre de leur intérêt.

Le caractère limité à l'exploitation agricole de l'objet des GAEC ne leur permet pas d'avoir d'autres activités. Cependant, l'article L. 323-2 du code rural et de la pêche maritime a précisé que les GAEC pouvaient, en tant que tels et sans perdre leur qualité, être associés à des sociétés de méthanisation agricole.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de Lionel Tardy, les députés ont adopté un amendement prévoyant une souplesse supplémentaire pour les GAEC, en leur permettant de participer, sans perdre leur qualité, à des groupements pastoraux agréés.

L'objectif de cet amendement consistait à sécuriser juridiquement la participation des GAEC à ce type de structure, sans perdre le bénéfice de la transparence.

III. La position de votre commission

Cet article apporte une précision utile pour éviter toute ambiguïté, même si cette ambiguïté ne constitue qu'un risque très faible aujourd'hui : la rédaction de l'article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime précise en effet expressément que les GAEC peuvent participer à des groupements pastoraux agréés. La loi est simplement silencieuse sur le caractère total ou partiel dans ce cas des GAEC.

L'article permet de lever les doutes, comme cela a été fait en loi d'avenir en 2014, pour préciser que la participation à des sociétés de méthanisation agricole ne faisait pas perdre leur qualité aux GAEC.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Chapitre IV
Développer les activités économiques et touristiques
Article 17
Habilitation à prendre par ordonnance des mesures relatives aux voyages à forfait et à l'organisation et la vente de voyages et séjours

Objet : cet article habilite le Gouvernement à transposer la directive 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées et à simplifier et moderniser le régime applicable aux activités d'organisation ou de vente de voyages et de séjours ainsi qu'aux services et prestations liés par ordonnance.

I. Le droit en vigueur

La directive 90/314/CEE du Conseil concernant les voyages, vacances et circuits à forfaits, actuellement en vigueur, « a permis l'émergence d'un marché unique pour les voyages à forfait et l'amélioration de la protection des consommateurs notamment en leur permettant de bénéficier de conditions comparables quel que soit l'État membre dans lequel ils achètent leur forfait » 5 ( * ) . Communément, on désigne les voyages à forfait par les termes de forfait touristique ou voyage organisé . Cette directive a été transposée en droit interne par la loi n° 92-645 du 13 juillet 1992 fixant les conditions d'exercice des activités relatives à l'organisation et à la vente de voyages ou de séjours, laquelle a été abrogée lors de la codification de ses dispositions par l'ordonnance n° 2004-1391 du 20 décembre 2004 relative à la partie législative du code du tourisme (articles L. 211-1 à L. 211-24), qui ont à leur tour été modifiées par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques.

Cette directive protège les consommateurs à travers : des obligations d'information précontractuelle et contractuelle (articles 3 et 4), la possibilité, dans certaines conditions, de céder sa réservation à une autre personne (article 4§3), l'encadrement des conditions de modification du prix ou des éléments essentiels du contrat et de résiliation du contrat (article 4 §4, §5, §6 et §7), la responsabilité des professionnels liée à l'exécution du contrat (articles 5 et 6) et la protection en cas d'insolvabilité d'un organisateur ou d'un détaillant (article 7).

Néanmoins, l'émergence d'internet a rendu cette directive peu adaptée aux évolutions des prestations de services de voyage. Par ailleurs, selon les termes de l'exposé des motifs de la directive de 2015, la directive de 1990 « confère aux États membres un large pouvoir discrétionnaire pour ce qui est de sa transposition. De fortes divergences persistent donc entre les législations des États membres . La fragmentation juridique accroît les coûts pesant sur les entreprises et multiplie les obstacles que rencontrent les professionnels désireux d'étendre leurs activités au-delà des frontières, limitant ainsi le choix des consommateurs » 6 ( * ) . En conséquence, « le potentiel transfrontalier du marché des voyages à forfaits de l'Union n'est pas pleinement exploité » 7 ( * ) .

C'est pourquoi, la Commission européenne a engagé un processus de révision de la directive de 1990 et adopté, le 9 juillet 2013, une proposition de directive relative aux voyages à forfaits et aux prestations de voyage liées. Le texte final de la directive 2015/2302, qui comporte 31 articles alors que la directive de 1990 n'en comportait que 10, a été approuvé par le Conseil Compétitivité du 28 mai 2015 et publié au Journal officiel de l'Union européenne le 11 décembre 2015.

II. Le projet de loi initial

L'article 17 du projet de loi ne comporte aucune disposition juridique directement applicable, puisqu'il consiste intégralement en une demande d'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, avant le 31 décembre 2017, pour :

- transposer la directive européenne ;

- et simplifier le code du tourisme en conséquence.

A. Le projet de loi habilite le Gouvernement à transposer une directive qui harmonise et modernise le droit positif.

1. Une directive d'harmonisation maximale

Là où la directive de 1990 permettait aux Etats membres d'adopter ou de maintenir des dispositions plus strictes que la directive pour protéger le consommateur (article 8), celle de 2015 pose un principe d'interdiction de conserver ou d'édicter des dispositions plus strictes ou plus souples visant à assurer un niveau différent de protection des voyageurs (article 4). Le maintien ou l'introduction de dispositions plus strictes ou plus souples dans son champ d'application n'est possible que lorsque la directive en dispose autrement.

C'est uniquement le cas à l'article 13, relatif à la responsabilité de l'exécution du forfait, qui dispose que les États membres peuvent conserver ou introduire, dans leur droit national, des dispositions en vertu desquelles le détaillant serait responsable de l'exécution du forfait comme l'organisateur , alors que ce même article pose le principe de la responsabilité exclusive de l'organisateur. Cette possibilité de mettre en oeuvre un système de co-responsabilité détaillant-organisateur a été demandée par la France dès le début des négociations . C'était également le sens de la résolution européenne adoptée par le Sénat le 4 mars 2014 8 ( * ) .

2. Une modernisation du droit de l'Union européenne

L'étude d'impact du Gouvernement considère que la directive vise, d'une part, « à mieux protéger les consommateurs, en définissant clairement les combinaisons de services de voyage qui bénéficient de la protection conférée par la législation de l'Union européenne relative aux voyages » et, d'autre part, « à créer des conditions égales entre les professionnels, en rétablissant une concurrence équitable entre les différents acteurs, opérateurs traditionnels ou agences de voyages en ligne ». Il s'agit donc, pour reprendre les termes de la directive 9 ( * ) , d'établir « un juste équilibre entre un niveau élevé de protection des consommateurs et la compétitivité des entreprises ».

a) La directive modifie le champ d'application du droit de l'Union européenne.

La notion de forfait ou de prestations de voyage liées peut désormais s'appliquer aux voyageurs d'affaires , lorsque ceux-ci n'organisent pas leurs déplacements en s'appuyant sur une convention générale : la notion de voyageur est ainsi préférée à celle de consommateur antérieurement retenue (article 2 §6).

En revanche, l'article 2 exclut du champ d'application de la directive trois types de forfaits ou de prestations de voyage liées , pour « éviter de faire peser une charge inutile sur les professionnels » 10 ( * ) :

- les voyages de moins de 24 heures, sauf si une nuitée est incluse - ce qui reprend la directive de 1990 ;

- les voyages proposés dans un but non lucratif, à un groupe limité de voyageurs ;

- les voyages achetés dans le cadre d'une convention générale conclue pour l'organisation d'un voyage d'affaires.

En conséquence, ces domaines qui n'entrent pas dans le champ de la directive restent de la compétence des Etats membres . C'est aussi le cas, par exemple, pour certains contrats indépendants concernant un service de voyage unique, tels que la location d'une maison de vacances (considérant 21).

b) La directive précise la notion de « voyages à forfait » et renforce la protection du voyageur liée aux contrats de voyage à forfait.


• De nouveaux critères de définition de la notion de « voyages à forfait »

La directive modifie la notion de « voyages à forfait » (article 3 §2), en se fondant sur des « critères objectifs qui portent principalement sur la manière dont les services de voyage sont présentés ou achetés ». La directive de 1990 retenait trois types de critères : le nombre de prestations (au moins deux parmi trois éléments : le transport, le logement, ou les autres services touristiques), la durée de la prestation (vingt-quatre heures au moins ou une nuitée) et la tarification (tout compris).

Dans la nouvelle directive, le critère du nombre de prestations est repris (au moins deux types différents de services de voyage - transport, hébergement, location de voitures, ou tout autre service touristique), et il est précisé que les services doivent être proposés aux fins du même voyage ou séjour de vacances . Le critère de durée est également repris pour exclure, comme vu précédemment, du champ de la directive les forfaits proposés pour moins de vingt-quatre heures ou ne comportant pas au moins une nuitée (article 2§2a)).

La nouvelle directive se distingue en revanche de la première en établissant l'existence d'un « forfait », une fois ces critères communs remplis, dans deux types d'hypothèses. Soit les prestations sont combinées par un seul professionnel - y compris si le voyageur le demande - et un contrat unique sera conclu pour l'ensemble des services proposés . Soit elles se traduisent par la conclusion de plusieurs contrats séparés avec des prestataires de services de voyages individuels , et alors un forfait existe dans cinq cas. Dans le premier, les services de voyage doivent avoir été achetés auprès d'un seul point de vente et choisis par le voyageur avant qu'il n'accepte de payer. Dans le deuxième, les services doivent être proposés, vendus ou facturés à un prix tout compris ou à un prix total - on retrouve ici le critère de la tarification. Dans le troisième, ils sont simplement vendus sous la dénomination de « forfait » ou une dénomination similaire. Dans le quatrième cas, les services sont combinés après la conclusion d'un contrat par lequel un professionnel autorise le voyageur à choisir différents types de services parmi une sélection. Enfin, la directive identifie un forfait lorsque les services sont achetés auprès de professionnels distincts grâce à des procédures de réservation en ligne liée, que les données relatives au voyageur sont transmises entre des professionnels et que des contrats sont conclus au plus tard vingt-quatre heures après la confirmation de la réservation du premier service de voyage.

Cette nouvelle définition devra être reprise en droit interne.


• Une protection accrue du voyageur

S'agissant des garanties apportées aux voyageurs, la directive de 2015 précise et renforce les protections établies par la précédente, aussi bien avant la conclusion du contrat que pendant son exécution.

Avant la conclusion du contrat, c'est le cas de l'information précontractuelle du voyageur, dont le contenu est à la fois précisé et élargi (article 5), et dont le caractère contraignant, prévu en droit interne depuis 1992, est rendu automatique par l'article 6 (alors que, sous l'empire de la précédente directive, seules les informations contenues dans les brochures éventuellement mises à la disposition des acheteurs engageaient le professionnel). Le fait de ne pas informer avant le contrat le voyageur sur les frais, redevances et autres coûts supplémentaires est, par ailleurs, automatiquement sanctionné par le fait que le voyageur n'en est pas redevable (article 6 §2). Les informations figurant dans le contrat de voyage à forfait et les documents à fournir avant le début du forfait sont précisés et complétés (article 7). La directive introduit une règle nouvelle en matière de charge de la preuve concernant le respect des obligations d'information, en disposant que cette charge incombe au professionnel (article 8).

Une fois le contrat conclu, la directive protège le voyageur avant et après le début du forfait. Avant le début du forfait , elle permet au voyageur, comme la précédente, de céder son contrat à un autre voyageur , moyennant un préavis raisonnable, le cédant et le cessionnaire étant alors solidairement responsables du paiement du prix (article 9).

La directive encadre la modification et la résiliation du contrat avant le début du forfait . Elle régit plus précisément les modifications de prix par l'organisateur postérieurement à la conclusion du contrat, en n'autorisant une majoration du prix que si elle est prévue dans le contrat et si l'organisateur la notifie et la justifie de manière claire et compréhensible au voyageur, au plus tard vingt jours avant le début du forfait. En contrepartie, le contrat doit également prévoir une baisse de prix le cas échéant (article 10).

Elle précise également les conditions dans lesquelles l'organisateur peut modifier unilatéralement les autres clauses du contrat avant le début du forfait. En principe, une telle modification n'est pas permise. S'il s'agit d'une modification mineure, la possibilité de résilier le contrat doit être mentionnée dans le contrat et le voyageur doit en être informé de façon claire et compréhensible sur un support durable - il s'agit d'une disposition nouvelle n'ayant, en droit interne, aucun équivalent. Comme la directive de 1990 l'esquissait, si la modification est significative - en ce qu'elle touche les caractéristiques principales des services de voyages ou les exigences particulières du voyageur ou qu'elle consiste en une augmentation de prix de plus de 8% -, le voyageur doit en être informé dans certaines conditions, et il peut alors l'accepter ou donner son accord pour un autre forfait, mais si la modification ou le nouveau forfait entraînent une baisse de qualité du forfait ou de son coût, le voyageur a droit à une réduction de prix. S'il n'accepte pas la modification ou un autre forfait, il peut résilier sans frais le contrat et obtenir un dédommagement en cas de préjudice subi (article 11).

L'organisateur peut résilier le contrat et alors rembourser intégralement les paiements effectués sans avoir à dédommager le voyageur si le nombre de personnes inscrites pour le forfait est inférieur au nombre minimal indiqué dans le contrat, ou s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables (article 12 §3). Il s'agit ici d'une simple modification des termes utilisés par la directive de 1990.

La nouvelle directive crée un droit de résiliation pour le voyageur avant le début du forfait contre paiement de frais dont les modalités de calcul sont définies, mais également sans frais en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables survenant au lieu de destination ou à proximité immédiate de celui-ci et ayant des conséquences importantes sur l'exécution du forfait ou le transport des passagers vers le lieu de destination, l'organisateur devant alors rembourser intégralement les paiements déjà effectués (article 12). Ces dispositions nécessiteront la création de nouveaux articles dans le code du tourisme.

Quant à la responsabilité de l'exécution des services de voyage , là où la précédente directive permettait aux Etats membres de prévoir que seul l'organisateur ou le détaillant ou les deux ensemble pouvaient être tenus responsables de l'exécution des services de voyage compris dans le contrat de voyage à forfait, la nouvelle directive pose un principe de responsabilité exclusive de l'organisateur, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires. Elle laisse cependant, comme vu précédemment, la possibilité aux Etats membres d'introduire des dispositions faisant du détaillant le co-responsable de cette exécution. En cas d'exécution d'un service de voyage non conforme au contrat , le voyageur doit immédiatement en informer l'organisateur et celui-ci doit y remédier - autrement dit, fournir une autre prestation - sauf si cela est impossible ou entraînerait des coûts disproportionnés, mais il doit alors dédommager le voyageur. Si l'organisateur n'y remédie pas, le voyageur peut y remédier lui-même et réclamer le remboursement des dépenses nécessaires. Lorsqu'une part importante des services prévus ne peut être fournie, l'organisateur doit proposer d'autres prestations appropriées et celles-ci ne peuvent être refusées par le voyageur que si elles ne sont pas comparable à ce qui avait été prévu ou si la réduction de prix octroyée pour compenser la qualité inférieure des services proposés n'est pas appropriée.

Si la non-conformité perturbe considérablement l'exécution du forfait et qu'il n'y est pas remédié, le voyageur peut alors résilier le contrat sans frais et demander une réduction de prix et/ou un dédommagement. En revanche, s'il s'avère impossible de proposer d'autres prestations ou en cas de refus du voyageur, celui-ci a droit, s'il y a lieu, à une réduction de prix et/ou un dédommagement sans possibilité de résilier le contrat. Et si le forfait comprend une prestation de transport de passagers, l'organisateur fournit au voyageur le rapatriement par un moyen de transport équivalent sans frais supplémentaires.

Enfin, en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables rendant impossible d'assurer le retour du voyageur, l'organisateur pourvoit à son hébergement pour une durée maximale de trois nuitées (article 13). Ces dispositions nouvelles n'ont actuellement pas d'équivalent dans le code du tourisme.

Toute période de non-conformité doit donner lieu à une réduction de prix , sauf si cette non-conformité est imputable au voyageur. De même, toute non-conformité entraînant un préjudice subi par le voyageur doit donner lieu à dédommagement sauf si elle lui est imputable ou si elle est imputable à un tiers étranger et revêt un caractère imprévisible et inévitable ou si elle est due à des circonstances exceptionnelles et inévitables (article 14).

Le voyageur en difficulté doit également obtenir une aide appropriée de la part de l'organisateur , y compris lorsqu'il doit assurer son hébergement en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables. Cette aide peut lui être facturée au coût réel si la difficulté provient du voyageur (article 16). Cette disposition ne connaît pas d'équivalent dans le code du tourisme.

Par ailleurs, la directive précise la protection du voyageur contre l'insolvabilité des professionnels (article 17). Elle assure, fait nouveau, la reconnaissance mutuelle de cette protection contre l'insolvabilité et organise la coopération administrative des États membres (article 18).

Enfin, elle établit un régime de responsabilité en cas d'erreur due à des défauts techniques du système de réservation (article 21). Cela nécessitera la création d'une disposition nouvelle en droit interne.

S'agissant des professionnels , lorsqu'un organisateur ou un détaillant doit verser un dédommagement ou une réduction de prix, ou doit s'acquitter d'obligations qui lui incombent en application de la directive, les Etats membres doivent veiller à ce qu'ils aient le droit de demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait qui en est à l'origine (article 22).

c) La directive crée la catégorie des « prestations de voyage liées » afin de protéger les consommateurs contre l'insolvabilité des professionnels facilitant ces prestations.

La catégorie des « prestations de voyage liées » correspond aux situations dans lesquelles les clients d'un premier professionnel sont conduits par ce professionnel à réserver des services de voyage supplémentaires auprès d'autres professionnels - au cours d'une seule visite du point de vente ou dans les 24 heures suivant la réservation du premier service de voyage - et concluent au moins deux contrats, distincts selon les prestataires, pour deux types de services de voyages différents.

Le voyageur bénéficie alors de la garantie contre l'insolvabilité des différents prestataires . La directive met également en place une obligation d'information précontractuelle à la charge du professionnel. A défaut de se conformer à ces exigences, certains droits et obligations prévues pour les voyages à forfait s'appliquent à la prestation de voyage liée . Le professionnel sera, par exemple, tenu responsable de l'exécution des services de voyage compris dans la prestation de voyage liée dans les mêmes conditions que l'organisateur ou le détaillant (article 19).

La catégorie n'existant pas en droit interne, il sera nécessaire de le modifier en ce sens.

B. Le projet de loi habilite le Gouvernement à simplifier et moderniser le droit français, parallèlement à la transposition de la directive.

Dans son étude d'impact, le Gouvernement justifie la nécessité d'être habilité à simplifier et moderniser le régime applicable aux activités d'organisation ou de vente de voyages et de séjours par la nécessité de « simplifier, clarifier, rationnaliser et sécuriser les dispositions » du code du tourisme relatives au régime de la vente de voyages et de séjours. Une telle habilitation apparaissait nécessaire, dans la mesure où les textes de droit interne qui ne sont pas modifiés dans le cadre de la transposition devront être modernisés pour assurer une cohérence avec les nouvelles dispositions directement issues de la transposition .

Cette habilitation a été réécrite par le Conseil d'Etat , qui l'a complétée par la définition des objectifs poursuivis, conformément aux exigences de la jurisprudence constitutionnelle. La simplification sera ainsi réalisée « pour tenir compte des évolutions économiques et technique du secteur et favoriser son développement ».

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

La commission des affaires économiques a introduit, à l'initiative de Michèle Bonneton, Brigitte Allain et Danielle Auroi, avec avis favorable de la rapporteure Genevard, le Gouvernement s'en étant remis à la sagesse de la commission, une disposition visant à préciser l'habilitation donnée au Gouvernement de moderniser le régime applicable aux activités d'organisation ou de vente de voyages et de séjours ainsi que des services et prestations liés. Elle invite le Gouvernement à simplifier « dans le respect des impératifs liés à la protection de l'environnement et à la lutte contre le changement climatique » . La députée Michèle Bonneton justifiait, en commission, son amendement de la façon suivante : « Les qualités environnementales des zones de montagne représentent un atout important pour leur développement économique. Mais elles sont particulièrement fragiles et, selon les spécialistes, seront plus touchées que d'autres territoires par le changement climatique ».

IV. La position de votre commission

Même si cette habilitation n'a qu'un lien relativement ténu avec les territoires de montagne, le principe du recours à la procédure de l'ordonnance est compréhensible dans la mesure où la directive est un texte particulièrement technique . Elle est, au surplus, d'harmonisation maximale et, en cela, laisse peu de marge de manoeuvre au Parlement. Sur le fond, votre commission approuve l'équilibre trouvé par la directive entre la nécessaire protection des consommateurs et la préservation de la compétitivité des entreprises .

L'habilitation à simplifier et moderniser les dispositions applicables aux activités d'organisation ou de vente de voyages à forfaits ou de prestations liées apparaît également nécessaire , dans la mesure où de nombreuses dispositions devront être adaptées pour mettre en cohérence les dispositions existantes avec les dispositions issues de la transposition. Votre commission sera vigilante sur le respect du périmètre de cette habilitation.

Votre commission a adopté l'amendement rédactionnel (n° 245) proposé par votre rapporteur.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 17 bis
(article 1er A de l'ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement)
Action de la Banque publique d'investissement en faveur du secteur touristique

Objet : cet article ajoute les entreprises du secteur touristique aux priorités d'action de Bpifrance.

I. Le droit en vigueur

Aux termes de l'article 1er A de l'ordonnance 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement (renommée depuis Bpifrance), Bpifrance « oriente en priorité son action vers l'entreprenariat féminin, les très petites entreprises, les petites et moyennes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire, en particulier celles du secteur industriel » . Cet article, dépourvu de portée normative, a pour objet d'établir la volonté du législateur quant aux priorités d'action de Bpifrance.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Soulignant les difficultés auxquelles doit actuellement faire face le secteur de l'hôtellerie, notamment en montagne, et le caractère croissant des coûts de mise en conformité, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a introduit, en adoptant un amendement déposé par Charles-Ange Ginesy et douze autres députés, et avec avis favorable de la rapporteure et du ministre, une disposition visant à ajouter à l'énumération des priorités d'action de Bpifrance les entreprises « relevant d'une activité saisonnière à faible rentabilité engageant des opérations de mise aux normes ».

Partageant le constat des difficultés connues par les petites exploitations hôtelières, l'Assemblée nationale a toutefois préféré, suivant en cela la proposition d'amendement des rapporteures Annie Genevard et Bernadette Laclais, et l'avis favorable du ministre, utiliser des termes plus larges, en substituant à la référence aux entreprises relevant d'une activité saisonnière à faible rentabilité engageant des opérations de mise aux normes celle des entreprises « du secteur touristique » en général. L'exposé sommaire de l'amendement adopté par l'Assemblée rappelle que la disposition modifiée « fixe les objectifs économiques globaux de Bpifrance » et « n'a pas pour objet de lister, de façon exhaustive l'ensemble des secteurs pouvant recevoir le soutien de Bpifrance ». De plus, il remarque que la rédaction adoptée par la commission faisait courir un risque contentieux au regard de la réglementation européenne en matière d'aides d'Etat. Enfin, il précise que, au demeurant, Bpifrance agit déjà en faveur du financement du secteur touristique en général et de l'hôtellerie en particulier.

III. La position de votre commission

Votre commission estime nécessaire que Bpifrance poursuive et amplifie son action en faveur du financement de la mise en conformité des petites exploitations hôtelières. C'est pourquoi elle a décidé de ne pas proposer de modifier cet article.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 17 ter
(article L. 342-20 du code du tourisme)
Servitudes d'urbanisme instituées en faveur de l'aménagement du domaine skiable

Objet : cet article étend au domaine skiable la possibilité d'instituer une servitude d'urbanisme en dehors des périodes d'enneigement.

I. Le droit en vigueur

L'article 53 de la loi « montagne » de 1985 a institué une servitude en vue de favoriser l'aménagement du domaine skiable. Aujourd'hui codifié à l'article L. 342-20 du code du tourisme, ses dispositions permettent à la commune, le groupement de communes, le département ou le syndicat mixte concerné 11 ( * ) , d'établir, sur les propriétés privées ou faisant partie du domaine privé d'une collectivité publique, une servitude destinée à assurer :

- le passage, l'aménagement et l'équipement des pistes de ski 12 ( * ) et des sites nordiques destinés à accueillir des loisirs de neige non motorisés organisés 13 ( * ) ;

- le survol des terrains où doivent être implantées des remontées mécaniques ;

- l'implantation des supports de lignes dont l'emprise au sol est inférieure à 4m² ;

- le passage des pistes de montée ;

- les accès nécessaires à l'implantation, l'entretien et la protection des pistes et des installations de remontée mécanique.

Cette servitude peut également être instituée, lorsque la situation géographique le nécessite, pour assurer les accès aux sites d'alpinisme, d'escalade en zone de montagne et de sports de nature au sens du code du sport 14 ( * ) , ainsi que les accès aux refuges de montagne.

Afin de favoriser les activités sportives et de loisirs également en période estivale (et notamment le vélo tout-terrain), la loi n° 2006-437 du 14 avril 2006 portant diverses dispositions relatives au tourisme a ajouté un alinéa 2 à l'article L. 342-20 du code du tourisme . C'est cet alinéa qui intéresse votre commission des affaires économiques. Il permet l'établissement d'une servitude destinée à assurer le passage, l'aménagement et l'équipement de pistes de loisirs non motorisés en dehors des périodes d'enneigement . Actuellement, une telle servitude ne peut être mise en place que sur un périmètre géographique restreint , correspondant aux sites nordiques - dont la définition est esquissée à l'alinéa premier de l'article (« sites nordiques destinés à accueillir des loisirs de neige non motorisés organisés »). Cette disposition avait d'ailleurs été introduite au Sénat par voie d'amendement sans qu'aucune restriction géographique ne soit visée. C'est au cours de la commission mixte paritaire (CMP) que le périmètre géographique des sites nordiques avait été défini, considérant que l'absence de restriction aurait porté une « atteinte excessive au droit de propriété », selon les termes du rapport de la CMP.

Enfin, la servitude de l'article L. 324-20 ne peut, en principe, être établie qu'à l'intérieur des zones délimitées dans les plans locaux d'urbanisme (article L. 342-18 du code du tourisme). Toutefois, cette restriction ne s'applique pas aux servitudes instituées en vue de faciliter la pratique du ski de fond ou l'accès aux sites d'alpinisme et d'escalade en zone de montagne et de sports de nature ainsi que l'accès aux refuges de montagne.

La servitude de l'article L. 342-20, qu'elle le soit en vertu de l'alinéa 1 ou de l'alinéa 2, est établie par décision motivée du préfet sur proposition de la collectivité intéressée, après enquête parcellaire effectuée comme en matière d'expropriation. L'enquête parcellaire a pour objet de confronter les positions de chacun, et en particulier celles des propriétaires concernés - le commissaire-enquêteur peut ainsi proposer un changement de tracé impliquant de nouvelles propriétés. En cas d'opposition du conseil municipal d'une commune intéressée, la servitude est créée par décret en Conseil d'État. Le dossier concernant la servitude doit être tenu à la disposition du public pendant un mois à la mairie de la commune concernée.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

S'inscrivant dans la logique du législateur de 2006, l'Assemblée nationale a adopté en séance publique, avec l'avis favorable du ministre, un amendement déposé par les rapporteures Annie Genevard et Bernadette Laclais, visant à élargir le champ d'application géographique de la servitude destinée à assurer le passage, l'aménagement et l'équipement de pistes de loisirs non motorisés en dehors des périodes d'enneigement en y incluant le domaine skiable , afin de permettre aux acteurs économiques de diversifier leur activité, notamment en développant les sports de loisir en dehors de la saison hivernale. Cette servitude ne pourrait être établie qu'à l'intérieur des zones délimitées dans les plans locaux d'urbanisme.

La disposition introduite par l'Assemblée nationale propose également un nouvel élément dans la procédure d'établissement de la servitude , mais uniquement lorsqu'elle serait établie dans le périmètre d'un site nordique ou d'un domaine skiable en vue d'assurer le passage, l'aménagement et l'équipement de pistes de loisirs non motorisés en dehors des périodes d'enneigement . Afin de concilier le développement du tourisme avec la préservation de l'activité agricole, la servitude ne serait instituée qu'après avis consultatif de la chambre de l'agriculture , lequel serait réputé favorable s'il n'intervient pas dans un délai de deux mois suivant la transmission de la demande. La procédure serait donc la suivante : l'organe délibérant de la collectivité en question adresserait sa demande au Préfet, lequel lancerait la procédure d'enquête parcellaire. Dans un délai de deux mois après transmission de la demande au Préfet, l'avis de la chambre d'agriculture serait connu.

Enfin, afin de clarifier les trois grands types d'hypothèses de mise en oeuvre de la servitude établie par l'article L. 342-20 du code du tourisme, elle distingue clairement la possibilité, lorsque la situation géographique le nécessite, d'instituer une servitude pour assurer les accès aux sites d'alpinisme, d'escalade en zone de montagne et de sports de nature ainsi que les accès aux refuges de montagne, en la déplaçant de l'alinéa premier à l'alinéa 3, sans que cela n'ait de conséquence sur le champ d'application de ces dispositions.

III. La position de votre commission

Votre commission, suivant l'avis du rapporteur, considère que le texte adopté par l'Assemblée nationale est parvenu à un équilibre satisfaisant entre le nécessaire développement des activités touristiques en été et la préservation des droits des agriculteurs . L'avis de la chambre d'agriculture n'est pas de nature à rallonger la procédure, dans la mesure où la procédure d'enquête parcellaire est déjà applicable. Le domaine skiable fait, par ailleurs, l'objet d'une définition dans la partie réglementaire du code de l'urbanisme.

C'est pourquoi votre commission a décidé de n'adopter que les amendements de nature rédactionnelle proposés par votre rapporteur. L'amendement n° 246 remplace la référence à un article abrogé par la référence à une disposition codifiée, l'amendement n° 247 clarifie la mention des « pistes de ski » à l'alinéa 1 de l'article L. 342-20 du code du tourisme en ajoutant le terme « alpin » (afin de distinguer les pistes de ski alpin des sites nordiques) et l'amendement n° 248, identique à l'amendement n° 281 du rapporteur pour avis de la commission des lois, procède à la codification d'une disposition de la loi « montagne » de 1985.

Elle a en conséquence proposé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de rejeter les amendements qui rompaient l'équilibre trouvé à l'Assemblée nationale , que ce soit en faveur du développement touristique (amendement COM-49) ou en faveur de la protection des agriculteurs (amendements COM-18, 98, 120, 157, 203).

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Chapitre V
Organiser la promotion des activités touristiques
Article 18
(article L. 134-1 du code du tourisme, articles L. 5214-16, L. 5216-5 et L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales)
Maintien de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » dans les stations classées de tourisme

Objet : cet article autorise les communes érigées en stations classées de tourisme ou ayant engagé une démarche de classement au 1 er janvier 2017, à conserver, par délibération municipale prise avant cette même date, la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'un office de tourisme » postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

I. Le droit en vigueur

1. La loi NOTRe transfère la compétence de promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme, des communes aux intercommunalités.

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe » a modifié l'article L. 134-1 du code du tourisme 15 ( * ) et les dispositions correspondantes du code général des collectivités territoriales 16 ( * ) pour confier de plein droit aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre que sont les communautés de communes et les communautés d'agglomération, en lieu et place des communes membres, la compétence de « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » . Elle poursuivait, ce faisant, le mouvement de transfert vers les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre engagé par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, précisée par l'ordonnance n° 2015-333 du 26 mars 2015 portant diverses mesures de simplification et d'adaptation dans le secteur touristique, qui avait confié cette compétence aux communautés urbaines et aux métropoles 17 ( * ) . Un tel transfert permet aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de redéfinir le maillage territorial des offices de tourisme de leur territoire.

La loi NOTRe organise également, pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre déjà existant à la date de sa publication, les modalités de ce transfert de compétences, en disposant que ces établissements « se mettent en conformité avec ses dispositions relatives à leurs compétences (...) avant le 1er janvier 2017 » 18 ( * ) selon les procédures de droit commun en la matière 19 ( * ) . A défaut de s'être mis en conformité avec les dispositions de la loi NOTRe régissant les compétences des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, c'est-à-dire d'avoir procédé au transfert à cette échéance, l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre exercera la compétence de promotion du tourisme au 1er janvier 2017 , « le ou les représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés (pouvant procéder) à la modification nécessaire de leurs statuts dans les six mois suivant cette date » 20 ( * ) .

2. Elle prévoit néanmoins plusieurs aménagements.

Deux aménagements de ce transfert de compétences ont toutefois été prévus par la loi NOTRe. Ils ne remettent pas en cause le transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » aux EPCI à fiscalité propre, mais permettent aux communes concernées créer ou de maintenir un office de tourisme sur leur territoire , dont la gouvernance relève cependant du niveau intercommunal.

Le premier aménagement concerne les communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre sur le territoire desquels coexistent plusieurs marques territoriales protégées (c'est-à-dire, selon une réponse ministérielle publiée au journal officiel le 18 octobre 2016, déposées auprès de l'Institut national de la propriété industrielle), « distinctes par leur situation, leur appellation ou leur mode de gestion » 21 ( * ) . La commune concernée est alors « autorisée à créer un office de tourisme pour chacun des sites disposant d'une marque territoriale protégée » 22 ( * ) . Toutefois, comme le précise la réponse ministérielle précitée, « cette faculté relèvera, à compter du 1er janvier 2017, de la seule compétence des EPCI à fiscalité propre », ce que confirme l'étude d'impact du projet de loi, qui évoque que « l'EPCI peut décider de maintenir des offices de tourisme distincts sur un même territoire communal ». Cet aménagement « cible essentiellement », selon l'étude d'impact accompagnant le projet de loi, « les communes dotées de plusieurs stations de sports d'hiver ».

Le second aménagement concerne les communes bénéficiant des statuts de « commune touristique » ou de « station classée de tourisme ». S'agissant des secondes, aux termes de l'article L. 134-2 du code de tourisme, tel que modifié par la loi NOTRe, « l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut (...) décider, au plus tard trois mois avant l'entrée en vigueur du transfert de la compétence (c'est-à-dire avant le 1er octobre 2016), de maintenir des offices de tourisme distincts pour des stations classées de tourisme, en définissant les modalités de mutualisation des moyens et des ressources des offices de tourisme intercommunaux existant sur son territoire ». Les offices de tourisme maintenus seraient des offices de tourisme « distincts » , c'est-à-dire dont la zone géographique d'intervention est cantonnée au territoire communal, mais non municipaux, c'est-à-dire « faisant l'objet d'une gestion intercommunale » (selon les termes de la réponse ministérielle précitée). Toujours selon les termes de la réponse ministérielle, ces offices constituent une « structure juridiquement autonome », même si l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale reste libre du choix de conférer ou non la personnalité morale à cet office.

S'agissant des communes dotées du statut de « commune touristique » comme de celles dotées du statut de « station classée de tourisme » lorsque l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ne décide pas de maintenir l'office de tourisme sur le territoire de ces dernières, leur transformation en « bureau d'information de l'office de tourisme intercommunal » est obligatoire , sauf lorsqu'ils deviennent le siège de cet office. Cette disposition contraint au maintien d'une présence minimale de l'office de tourisme intercommunal sur le territoire de la commune dotée de l'un des deux statuts précités. La notion de bureau d'information touristique figure à l'arrêté du 2 septembre 2008 relatif aux communes touristiques et aux stations classées de tourisme, qui exige, comme condition du classement en station de tourisme, la présence d'un bureau d'information touristique lorsque l'office de tourisme compétent sur le territoire faisant l'objet du classement est institué par un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. La circulaire du 3 décembre 2009 relative aux communes touristiques et aux stations classées mentionnées dans le code du tourisme précise le sens de ces dispositions : « lorsque l'office de tourisme communautaire est érigé par un établissement public de coopération intercommunale et que son siège est situé dans une autre commune que la commune touristique demanderesse, un bureau d'information doit être ouvert au public dans la commune touristique demanderesse. Il fait partie intégrante de l'office de tourisme communautaire : il en est en quelque sorte l'un de ses « guichets » ». Le bureau d'information se distingue de l'office dans la mesure où celui-ci est doté d'un organe délibérant 23 ( * ) et peut ainsi prendre des décisions stratégiques pour son périmètre d'intervention, alors que les bureaux ne font qu'appliquer la stratégie définie par l'office et n'exercent que des missions d'accueil et d'information.

3. Le régime des communes touristiques et des stations classées de tourisme

Le régime des communes touristiques et des stations classées, introduit au début du XX ème siècle, a été réformé par la loi n° 2006-437 du 14 avril 2006 portant diverses dispositions relatives au tourisme.

Pour être dénommé commune touristique , trois critères réglementaires sont exigés : disposer d'un office de tourisme classé, organiser, en périodes touristiques, des animations notamment dans le domaine culturel, artistique, gastronomique ou sportif et disposer d'une capacité d'hébergement d'une population non permanente. La dénomination est octroyée par le préfet pour cinq ans sur demande de la commune. Elle permet de se distinguer par une dénomination spécifique, mais également de pouvoir être candidat au statut de station classée de tourisme.

Le statut de station classée de tourisme ouvre droit à certains avantages, notamment fiscaux et en termes de rémunération des cadres et des élus municipaux. Seules les communes dotées du statut de commune touristique, peuvent être candidates au statut de station classée de tourisme, et sa procédure d'obtention est particulièrement lourde : il est octroyé pour douze ans par décret pris sur le rapport du ministre chargé du tourisme dans le délai d'un an à compter de la date de réception par le préfet de département du dossier de demande complet . Une cinquantaine de critères à satisfaire pour obtenir un classement sont édictés à l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 2008 relatif aux communes touristiques et aux stations classées de tourisme.

Parmi ces critères figure celui de disposer d'un office de catégorie I . La décision de classement d'un office de tourisme est prise par arrêté préfectoral dans un délai de deux mois à compter de la réception du dossier complet . Pour que le dossier soit accepté, il faut satisfaire à près de quarante critères édictés à l'annexe I de l'arrêté du 12 novembre 2010 fixant les critères de classement des offices de tourisme.

II. Le projet de loi initial

Lors du dernier conseil national de la montagne, organisé à Chamonix le 25 septembre 2015, les élus locaux présents ont fait part de leurs interrogations sur le nouveau cadre juridique issu de la loi NOTRe pour les offices de tourisme des stations de montagne. A cette occasion, le Premier ministre a confié au secrétaire d'Etat chargé de la réforme territoriale le soin de mener une concertation afin d'identifier les difficultés soulevées et de lever les obstacles éventuels. A l'issue d'une concertation de plusieurs mois, un débat s'est tenu en séance publique au Sénat le 4 mai dernier. Lors de ce débat, le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales affirmait : « certains élus de territoires de montagne considèrent que le transfert de la compétence « promotion du tourisme » ne peut s'appliquer pour leurs communes, supports de stations de ski, et souhaitent donc le maintien d'offices municipaux. S'il existe des problèmes bien identifiés, le Gouvernement est prêt à les régler ».

L'article 18 du projet de loi initial traduit cet engagement. Il étend, s'agissant des communes bénéficiant du statut de station classée de tourisme, le champ d'application du second aménagement prévu par la loi NOTRe au transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » aux communautés de communes et communautés d'agglomération. Pour ce faire, il modifie les articles L. 5214-16 et L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales, relatifs, respectivement, aux compétences des communautés de communes et aux compétences des communautés d'agglomération, afin de permettre aux communes touristiques classées comme stations de tourisme ou ayant engagé une démarche de classement avant le 1 er janvier 2017 de décider, par délibération intervenant avant le 1 er janvier 2017, de conserver leur office de tourisme communal institué avant l'entrée en vigueur de la loi NOTRe . En cas de refus de classement par l'autorité administrative compétence, la délibération de la commune devient caduque, et l'office de tourisme doit se transformer en bureau d'information, conformément aux dispositions de l'article L. 134-2 du code de tourisme déjà en vigueur.

Cette disposition concerne, selon l'étude d'impact du Gouvernement, 189 communes déjà classées stations de tourisme .

L'alinéa 1 de l'article 18 procède, enfin, à une modification de cohérence de l'article L. 134-1 du code du tourisme.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

1. Le texte de la commission des affaires économiques de l'Assemblée a établi que les communes concernées peuvent conserver la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme ».

La commission des affaires économiques de l'Assemblée a modifié les termes du projet de loi en adoptant un amendement de la rapporteure pour avis Béatrice Santais et plusieurs de ses collègues, qui instaure, plutôt qu'un aménagement, une exception au transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » , prenant acte de ce que l'exposé des motifs du projet de loi souhaiter permettre aux communes concernées « de conserver la compétence de promotion du tourisme », et non uniquement, comme les dispositions initiales du projet de loi le prévoyaient, un office de tourisme - ce qui faisait courir le risque que l'office de tourisme en question relèverait, en réalité, d'une gestion intercommunale, comme pour le régime d'aménagement prévu par la loi NOTRe.

Annie Genevard et Bernadette Laclais justifient ce choix dans leur rapport en ces termes : « il semble, en effet, nécessaire de ne pas scinder cette compétence et de garantir aux offices de tourisme municipaux, maintenus à titre dérogatoire, la possibilité d'exercer leur compétence traditionnelle, celle de la promotion du tourisme. Par ailleurs, il peut être souhaitable de permettre, au-delà du seul maintien, la création d'offices de tourisme dans ces stations classées ».

2. En séance publique, les députés ont défini l'engagement d'une démarche de classement d'une commune en station classée de tourisme.

Afin de permettre également aux communes ne disposant pas d'un office de tourisme de catégorie I , nécessaire pour bénéficier du statut de station classée de tourisme, les députés ont adopté en séance publique, à l'initiative des rapporteures de la commission des affaires économiques , et alors que l'avis du ministre n'a pas été émis, un amendement précisant la notion d'engagement dans une démarche de classement en station classée de tourisme. Selon cette disposition, l'engagement d'une démarche de classement en commune classée station de tourisme est matérialisé :

- soit par le dépôt auprès du représentant de l'État dans le département d'un dossier de classement de la commune en station classée de tourisme

- soit, à défaut, d'un dossier de classement de son office de tourisme dans la catégorie requise pour remplir les critères de classement de la commune en station classée de tourisme - autrement dit, en catégorie I.

Cette dernière possibilité a été élargie par un sous-amendement déposé par Charles-Ange Ginesy, et adopté contre l'avis de la rapporteure Genevard et du ministre, qui dispose que l'engagement d'une démarche de classement en commune classée station de tourisme est matérialisé par l'adoption d'une simple délibération par une commune, qui acte la préparation, en vue d'un dépôt avant le 1 er janvier 2018, d'un dossier de classement de son office en catégorie I.

Enfin, l'Assemblée nationale a également adopté, mais sur l'avis défavorable du ministre, un amendement déposé par les rapporteures de la commission des affaires économiques en vue d'étendre l'exception au transfert de compétence « promotion du tourisme, dont la création d'office de tourisme » aux communes classées stations de tourisme ou ayant engagé une démarche de classement membres de la métropole Aix-Marseille-Provence et n'ayant pas transféré la compétence au 1 er janvier 2018 .

Cette métropole avait, en effet, fait l'objet d'un traitement particulier lors de la loi NOTRe en matière de transferts de compétences. Si la loi MAPTAM avait prévu un transfert automatique à la métropole des compétences déjà transférées aux établissements publics de coopération intercommunale amenés à être fusionnés dans la métropole à la date de sa création, la loi NOTRe a précisé que certaines compétences qui n'avaient pas été transférées par les communes aux établissements publics de coopération intercommunale pouvaient toujours être exercées par les communes et ne faisaient pas l'objet d'un transfert de compétences à la métropole jusqu'au 1 er janvier 2018.

En l'espèce donc, les communes n'ayant pas transféré la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » à un établissement public de coopération intercommunale avant sa fusion dans la métropole peuvent donc toujours l'exercer jusqu'au 1 er janvier 2018. Les députés ont ainsi permis aux communes touristiques classées station classée de tourisme ou ayant engagé une démarche de classement dans cette situation de conserver cette compétence. Ils n'ont cependant pas défini l'engagement d'une démarche de classement.

IV. La position de votre commission

Votre commission approuve l'esprit du texte issu de l'Assemblée. Elle a en revanche considéré nécessaire d'en préciser la lettre, sur proposition de votre rapporteur. En effet, les communes touristiques déjà dotées d'un office de tourisme de catégorie I ne bénéficiaient pas du délai supplémentaire octroyé par le texte dans sa rédaction adoptée en séance publique.

Dès lors, afin de permettre à toutes les communes touristiques qui le souhaitent et qui s'estiment capables d'obtenir le statut de commune classée station de tourisme, l'amendement de votre rapporteur adopté par votre commission clarifie la rédaction du texte (amendement n° 261).

Selon ce texte, pourront bénéficier de cette dérogation, à condition d'en manifester le souhait par une délibération prise au plus tard avant le 1 er janvier 2017:

- les communes touristiques classées à ce jour stations de tourisme ;

- les communes touristiques qui auront déposé un dossier de classement en station de tourisme au plus tard avant le 1 er janvier 2017 ;

- les communes touristiques qui n'ont pas déposé de dossier de classement en station classée de tourisme au plus tard avant le 1 er janvier 2017, mais qui auront délibéré avant cette date dans l'intention de le faire avant le 1 er janvier 2018 ;

- enfin, les communes touristiques qui n'ont pas déposé de dossier de classement en station classée de tourisme au plus tard avant le 1er janvier 2017, mais qui auront délibéré avant cette date dans l'intention, d'abord, de déposer, avant le 1er janvier 2018, un dossier de classement de leur office de tourisme en catégorie I, puis, dans l'année qui suit - le cas échéant - l'obtention de ce classement, un dossier de classement en station classée de tourisme.

L'amendement tend également à préciser la situation lorsque la commune n'aura pas donné suite à ses intentions ou lorsque ses démarches n'auront pas abouti. Les délibérations des communes cesseront de produire leurs effets en l'absence de dépôt des dossiers de demandes de classement aux échéances fixées ou en cas de rejet, par le représentant de l'Etat dans le département, des demandes de classement (qu'il s'agisse des demandes de classement en station de tourisme ou de l'office de tourisme). En pareilles circonstances, l'effet de la dérogation sera annulé, et l'exercice de la compétence transféré à l'établissement public de coopération intercommunale concerné.

Enfin, il clarifie les dispositions applicables à la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Votre commission a, en conséquence, proposé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de rejeter l'amendement COM-282 du rapporteur de la commission des lois, qui était satisfait. Elle a également proposé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de rejeter les amendements COM-181 et COM-182 car ils souhaitaient étendre le champ d'application de la dérogation au-delà des communes déjà classées ou qui pourraient être in fine, si elles en font la demande, classées stations de tourisme.

Enfin, elle a proposé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de rejeter l'amendement COM-129, qui tendait à revenir sur une compétence déjà transférée dans le cadre de la loi MAPTAM précitée.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 18 bis
(section 4 du chapitre II du titre IV du livre III et articles L. 342-27 à L. 342-29 du code du tourisme, article L. 5211-25 du code général des collectivités territoriales)
Reconnaissance de l'association nationale dédiée à la coordination des sites nordiques

Objet : cet article organise la reconnaissance légale de l'association nationale de coordination des sites nordiques et harmonise la définition des sports nordiques figurant dans les articles du code du tourisme relatifs aux associations de promotion des sports nordiques.

I. Le droit en vigueur

1. La loi de 1985 a permis la création d'associations locales de promotion du ski de fond, qui sont aujourd'hui coordonnées par une structure nationale.

L'association nationale de coordination des sites nordiques, dénommée Nordic France, a été instituée en 1986 à l'initiative des associations locales - départementales, interdépartementales et régionales - de promotion du ski de fond reconnues par la loi « montagne » du 9 janvier 1985. Autorisant la perception par les communes d'une redevance en vue de financer l'extension des pistes de ski de fond, leur entretien et la promotion et le développement de ce sport (articles 81, 82 et 83), cette loi permet (article 84), de créer de telles associations, sur proposition des conseils départementaux ou du conseil régional concernés, et de leur confier la perception de la redevance . Aujourd'hui codifiées aux articles L. 342-27 à L. 342-29 du code du tourisme, les dispositions relatives aux associations locales de promotion du ski de fond déterminent qui peut en être membre, et en définissent l'objet, qui est de « contribuer sur le territoire des départements concernés à toutes actions propres à faciliter la pratique du ski de fond et notamment le développement des équipements, la coordination des actions de promotion et l'harmonisation du montant des redevances ».

L'association Nordic France assure une coordination nationale dans le développement des activités nordiques. Elle déploie, en lien avec France Montagnes, la promotion nationale des activités nordiques et exerce également une importante mission de formation des professionnels qui y concourent. Elle veille à la cohérence des tarifs d'accès aux pistes et offre, depuis 2006, des garanties de qualité au travers d'une charte et d'un label.

Elle n'est pas légalement reconnue, contrairement aux associations locales, alors qu'elle bénéficie de leurs financements.

2. Les associations locales sont financées par la redevance d'accès aux sites nordiques, notion introduite en 2006 et plus large que celle de ski de fond.

Depuis la loi du 9 janvier 1985, de nouvelles activités nordiques se sont développées, telles que les raquettes à neige, le skating ou encore le biathlon. Ces nouvelles activités ont nécessité la mise en place de nouvelles infrastructures, qui ont engendré de nouveaux besoins de financement. Les dispositions du code du tourisme et du code général des collectivités territoriales régissant la redevance d'accès aux sites nordiques 24 ( * ) ont donc été modifiées par la loi n° 2006-437 du 14 avril 2006 portant diverses dispositions relatives au tourisme pour y insérer une définition plus large des activités nordiques. C'est ainsi que sont considérées comme activités nordiques non seulement le ski de fond, mais également les « loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin » . Le produit de la redevance doit être affecté à l'entretien et à l'extension des pistes et aux opérations de promotion des activités nordiques.

Par ailleurs, l'article L. 5211-25 du code général des collectivités territoriales, issu de l'article 83 de la loi « montagne » de 1985, établit la possibilité, pour un établissement public de coopération intercommunale en ayant reçu la compétence, de créer, de fixer le taux, et de percevoir la redevance d'accès aux sites nordiques. Sa rédaction n'avait cependant pas fait l'objet d'une harmonisation en 2006, de telle sorte qu'il désigne toujours uniquement « la création et la gestion des pistes de ski de fond ».

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'article 18 bis a été introduit lors de l'examen du projet de loi par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale.

1. La reconnaissance légale de Nordic France

Il vise, d'abord, à assurer une reconnaissance légale à l'association nationale de coordination des sites nordiques, Nordic France . Cette disposition a été introduite en commission par deux amendements, l'un présenté par les rapporteures de la commission des affaires économiques, l'autre présenté par M. Charles-Ange Ginesy et onze autres collègues, avec l'avis favorable du ministre. Ces amendements disposent que les associations départementales, interdépartementales et régionales de promotion des sports nordiques peuvent se regrouper au sein d'une association nationale ayant pour objet la coordination des sites nordiques et qu'elles accomplissent leur objet « en liaison » avec la structure nationale de coordination. Enfin, il précise l'objet de l'association nationale, qui est « d'assurer la promotion et le développement des activités nordiques et des équipements nécessaires à leur déploiement ainsi que l'organisation de la formation des professionnels des sites nordiques ». La mission législative de l'association nationale se distinguerait donc de celle des associations locales surtout par le volet relatif à la formation des professionnels des sites nordiques . Selon l'exposé des motifs de l'amendement, cette reconnaissance légale permet d'officialiser la dimension nationale de l'association, de renforcer la consistance de ses actions et d'en faire l'interlocuteur privilégié de l'État pour les sujets relatifs aux sports et sites nordiques.

2. L'harmonisation de la définition des activités nordiques

L'article 18 bis entend également harmoniser la définition des activités nordiques figurant dans les dispositions du code du tourisme relatives aux associations de promotion de ces activités avec celle issue de la loi de 2006 et figurant dans les dispositions du code général des collectivités territoriales relatives à la redevance d'accès aux sites nordiques, afin de mettre en cohérence la définition légale des activités des associations concernées avec celle relative à la redevance qu'elles peuvent percevoir pour le compte des collectivités locales. Il remplace donc, aux articles L. 342-27 à 29 du code du tourisme, la référence au « ski de fond » par celle au « ski de fond et loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin ».

Enfin, il procède à la même harmonisation pour l'article L. 5211-25 du code général des collectivités territoriales.

Ces dispositions ont été introduites par un amendement de Béatrice Santais, rapporteure pour avis au nom de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, co-signé par Charles-Ange Ginesy et onze autres collègues

Outre cinq autres amendements rédactionnels, un amendement a été adopté en séance publique en vue de parfaire cette entreprise d'harmonisation des termes en renommant l'intitulé de la section du code du tourisme.

III. La position de votre commission

Votre commission est favorable aux dispositions introduites à l'Assemblée. La reconnaissance de l'association nationale Nordic France permettra de consolider les conditions de développement des sports nordiques en France, et l'actualisation des dispositions relatives au ski de fond rend le droit positif plus cohérent.

C'est pourquoi votre commission n'a adopté qu'un amendement rédactionnel proposé par votre rapporteur (amendement n° 249).

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

TITRE III
RÉHABILITER L'IMMOBILIER DE LOISIR PAR UN URBANISME ADAPTÉ
Chapitre Ier
Rénover la procédure des unités touristiques nouvelles
Article 19
(articles L. 104-1, L. 121-13, L. 122-15 à L. 122-27, L. 141-23, L. 143-20, L. 143-25, L. 143-26, L. 143-28, L. 151-4, L. 151-6, L. 151-7, L. 153-16, L. 153-25, L. 153-27, L. 472-2, L. 472-4 du code de l'urbanisme, articles L. 333-2, L. 341-16, L. 563-2 du code de l'environnement, article L. 342-6 du code du tourisme, article 74 bis [nouveau] de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne)
Procédure de création des unités touristiques nouvelles

Objet : cet article réforme la procédure des unités touristiques nouvelles

I. Le droit en vigueur

? Qu'est-ce qu'une unité touristique nouvelle (UTN) ?

La procédure UTN a été créée pour assurer un droit de regard de l'Etat sur les projets d'aménagement touristique en zone de montagne. Ce contrôle est mené de manière indirecte lors de l'élaboration et de l'entrée en vigueur des schémas de cohérence territoriale (SCoT) pour ce qui concerne les UTN prévues par ces schémas. Il est mené directement sous la forme d'une autorisation administrative préalable aux permis d'aménager ou de construire dans le cas des UTN non prévues par un SCoT.

Le champ de la procédure UTN est délimité à l'article L. 122-26 du code de l'urbanisme. Est considérée comme unité touristique nouvelle toute opération de développement touristique en zone de montagne ayant pour objet ou pour effet, en une ou plusieurs tranches :

1° Soit de construire des surfaces destinées à l'hébergement touristique ou de créer un équipement touristique comprenant des surfaces de plancher ;

2° Soit de créer des remontées mécaniques ;

3° Soit de réaliser des aménagements touristiques ne comprenant pas de surfaces de plancher dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État.

À partir de cette définition générique, la législation distingue entre deux types d'UTN en fonction de la dimension du projet :

- les UTN de massif . Ce sont les opérations visées au 1° de l'article L. 122-19 et précisées à l'article R. 122-6. Elles sont soumises à autorisation du préfet coordonnateur de massif, après avis de la commission spécialisée du comité de massif ;

- les UTN départementales . Elles sont visées au 2° de l'article L. 122-19 et précisées à l'article R. 122-7.

Il est à noter que les projets situés sous les seuils correspondant aux deux cas précédents ne relèvent pas de la législation sur les UTN et sont donc soumis aux règles d'urbanisme de droit commun.

LES DIFFÉRENTS TYPES D'UTN

Les UTN de massif (article R. 122-6) sont les opérations ayant pour objet :

1° La création, l'extension ou le remplacement de remontées mécaniques, lorsque ces travaux ont pour effet :

a) La création d'un nouveau domaine skiable alpin ;

b) L'augmentation de la superficie totale d'un domaine skiable alpin existant, dès lors que cette augmentation est supérieure ou égale à 100 hectares ;

2° Des opérations de construction ou d'extension d'hébergements et d'équipements touristiques d'une surface de plancher totale supérieure à 12 000 mètres carrés, à l'exclusion des logements à destination des personnels saisonniers ou permanents des équipements et hébergements touristiques ;

3° Lorsqu'ils sont soumis à étude d'impact en application de l'article L. 122-1 du code de l'environnement :

a) L'aménagement, la création et l'extension de terrains de golf ;

b) L'aménagement de terrains de camping ;

c) L'aménagement de terrains pour la pratique de sports ou de loisirs motorisés ;

d) Les travaux d'aménagement de pistes pour la pratique des sports d'hiver alpins, situés en site vierge au sens du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement d'une superficie supérieure à 4 hectares.

Les UTN départementales (article R. 122-7) sont ayant pour objet :

1° La création, l'extension ou le remplacement de remontées mécaniques, lorsqu'ils ont pour effet :

a) L'augmentation de plus de 10 hectares et de moins de 100 hectares d'un domaine skiable alpin existant ;

b) La création d'une remontée mécanique, n'ayant pas pour objet principal de desservir un domaine skiable, pouvant transporter plus de dix mille voyageurs par jour sur un dénivelé supérieur à 300 mètres.

2° Les opérations suivantes, lorsqu'elles ne sont pas situées dans un secteur urbanisé ou dans un secteur constructible situé en continuité de l'urbanisation :

a) La création ou l'extension, sur une surface de plancher totale supérieure à 300 mètres carrés, d'hébergements touristiques ou d'équipements touristiques ;

b) L'aménagement de terrains de camping comprenant plus de 20 emplacements ;

c) La création de refuges de montagne mentionnés à l'article L. 326-1 du code du tourisme, ou leur extension sur une surface de plancher totale supérieure à 100 mètres carrés.

Le régime juridique des UTN comprend plusieurs traits :

- les UTN sont soumises au respect de « grands » principes de l'aménagement touristique en zone de montagne définis à l'article L. 122-15. Les UTN doivent ainsi prendre en compte les communautés d'intérêt des collectivités territoriales concernées et contribuer à l'équilibre des activités économiques et de loisirs, notamment en favorisant l'utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant et des formules de gestion locative pour les constructions nouvelles. La localisation, la conception et la réalisation d'une UTN doit également respecter la qualité des sites et les grands équilibres naturels ;

- les UTN ne sont pas soumises au principe d'extension de l'urbanisation en continuité de l'urbanisation existante . En application de l'article L. 122-17, les articles L. 122-5 à L. 122-7 ne s'appliquent en effet pas aux UTN ;

- elles sont en principe intégrées à la planification territoriale du SCoT . En application de l'article L. 122-18, la création et l'extension d'unités touristiques nouvelles doivent en effet être prévues par un schéma de cohérence territorial exécutoire, qui en définit les caractéristiques. L'article L. 141-23 précise que le document d'orientation et d'objectifs du SCoT définit la localisation, la consistance et la capacité globale d'accueil et d'équipement des UTN de massif. Il définit les principes d'implantation et la nature des UTN départementales ;

- toutefois, en l'absence de SCoT, il est possible de créer une UTN sur autorisation préfectorale préalable en l'absence de SCoT . (article L. 122-19). La collectivité pétitionnaire doit constituer un dossier de demande d'autorisation transmis au préfet de département (R. 122-10) et permettant d'apprécier les différents impacts du projet (R. 122-11). Les éléments du dossier sont mis à disposition du public dans les conditions prévues à l'article R. 122-13. Dans le cas des UTN de massif, le dossier est transmis au préfet coordonnateur de massif qui décide après avis de la commission compétente du comité de massif. Dans les cas des UTN départementales, l'autorisation est donnée par le préfet de département après avis de la formation spécialisée des unités touristiques nouvelles de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS). Il est à noter que cette autorisation préfectorale préalable permet de pallier l'absence de définition d'un projet d'UTN par un SCoT, mais ne permet pas de se passer totalement de document de planification urbanistique. En application de l'article L. 122-23, les autorisations d'occupation du sol nécessaires à la réalisation d'une UTN ne peuvent être délivrées en l'absence d'un PLU ou d'une carte communale.

II. Le projet de loi initial

Le I de l'article 19 modifie les dispositions relatives aux UTN dans le code de l'urbanisme.

Le 1° et 2° procèdent à des corrections de références dans le code de l'urbanisme en cohérence avec les modifications apportées dans le reste de l'article 19.

Le réécrit le premier alinéa de l'article L. 122-15 relatif aux « grands » principes de l'aménagement touristique en zone de montagne. Par rapport au droit actuel, il est précisé que le développement touristique et la création des UTN doivent prendre en compte la vulnérabilité de l'espace montagnard au changement climatique et favoriser la diversification des activités touristiques .

Le 4° et le 5° créent un chapitre du code consacré à la définition des UTN et comprenant trois articles :

- l'article L. 122-16 modifie la définition générique des UTN . Celles-ci sont désormais définies comme toute opération de développement touristique effectuée en zone de montagne et contribuant aux performances socio-économiques de l'espace montagnard ;

- l'article L. 122-17 définit les UTN structurantes , qui se substituent aux UTN de massif. Sont structurantes les UTN dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État ou celles définies comme telles par le document d'orientation et d'objectifs du SCoT ;

- l'article L. 122-18 définit les UTN locales , qui se substituent aux UTN départementales. Sont locales les UTN dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État ou celles définies comme telles par le PLU.

Les 6°, 7°, 8° et 9° créent un chapitre du code consacré au régime d'implantation des UTN et comprenant sept articles :

- 'article L. 122-19 ne fait que reprendre le contenu de l'actuel article L. 122-17, qui permet aux UTN de déroger au principe d'extension de l'urbanisation en continuité de l'urbanisation existante ;

- l'article L. 122-20 indique que la création ou l'extension d'une UTN structurante est prévue par le SCoT . Si elle n'est pas située en continuité de l'urbanisation existante, elle fait l'objet de l'étude prévue à l'article L. 122-7. Si la création ou l'extension d'une UTN structurante n'est pas prévue par le SCoT, elle est soumise à une autorisation administrative. À noter que l'avis du comité de massif est supprimé dans le texte initial ;

- l'article L. 122-21 indique que la création ou l'extension d'une UTN locale est prévue par le PLU. Si elle n'est pas située en continuité de l'urbanisation existante, elle fait l'objet de l'étude prévue à l'article L. 122-7. Si la création ou l'extension d'une UTN locale n'est pas prévue par le PLU, elle est soumise à une autorisation administrative rendue après avis de la CDNPS ;

- l'article L. 122-22 ne fait que transposer aux UTN structurantes et locales les dispositions actuellement prévues par l'article L. 122-20 pour les UTN de massif et départementales en ce qui concerne la mise à disposition du public pendant un mois du projet d'UTN ;

- l'article L. 122-23 indique que l'autorisation préfectorale nécessaire à la création d'une UTN lorsque l'opération n'est pas prévue par un SCoT ou un PLU « porte sur la réalisation de logements destinés aux salariés de la station, notamment aux travailleurs saisonniers, et en impose la réalisation, le cas échéant ». Cette autorisation peut prévoir des dispositions pour l'accueil et l'accès aux pistes des skieurs non-résidents. À noter que cette rédaction du texte initial est curieuse, car elle implique que la décision porte uniquement sur la réalisation de logements destinés aux salariés de la station, notamment aux saisonnier ;

- l'article L. 122-24 concerne la caducité des autorisations préfectorales de création ou d'extension des UTN. Il reprend l'essentiel de l'actuel article L. 122-2 en prévoyant : a) un délai de caducité de quatre ans à compter de la notification au bénéficiaire si les équipements et les constructions autorisés n'ont pas été entrepris ; b) la suspension de ce délai en cas de recours ; c) une caducité de l'autorisation en cas d'interruption des travaux pendant plus de quatre ans pour les équipements ou constructions qui n'ont pas été engagés. Un élément nouveau par rapport au droit actuel est que ce délai peut être prorogé une seule fois de quatre ans, alors qu'actuellement il peut être prorogé pour quatre ans renouvelables ;

- l'article L. 122-25 reprend les dispositions de l'actuel article L. 122-23 tout en procédant aux adaptations rédactionnelles nécessaires pour tenir compte du fait que les UTN de massif deviennent des UTN structurantes et les UTN départementales, des UTN locales. Ainsi, les autorisations d'occupation du sol nécessaires à la réalisation des UTN structurantes ne pourront être délivrées que dans les communes dotées d'un PLU et les autorisations d'occupation du sol nécessaires à la réalisation des UTN locales ne peuvent être délivrées que dans les communes dotées d'une carte communale ou d'un PLU.

Le réécrit la section du chapitre relatif à l'aménagement et à la protection de la montagne qui concerne les prescriptions particulières de massif . Les deux articles de cette nouvelle section ne font que reprendre les deux articles de l'actuelle section, mais avec des numéros d'articles différents : les actuels articles L. 122-24 et L. 122-25 deviennent les nouveaux articles L. 122-26 et L. 122-27 sans changement de fond.

Les 8° à 13° modifient le titre IV du livre Ier relatif aux SCoT pour apporter au régime de ces schémas les changements nécessaires à la mise en place du nouveau dispositif des UTN :

- le modifie l'article L. 141-3 relatif au rapport de présentation du SCoT pour indiquer que le diagnostic établi dans ce rapport devra, en zone de montagne, tenir compte des besoins répertoriés en matière de réhabilitation de l'immobilier de loisir et d'unités touristiques nouvelles structurantes ;

- le modifie l'article L. 141-23 relatif au contenu du document d'orientation et d'objectifs (DOO) du SCoT en zone de montagne. Les UTN locales étant désormais du ressort des PLU, le DOO est recentré sur la définition des seules UTN structurantes. À ce titre, le DOO devra définir la localisation, la nature et la capacité globale d'accueil et d'équipement, notamment en matière de logement des salariés, y compris les travailleurs saisonniers, des UTN structurantes ;

- le 10° modifie l'article L. 143-20 relatif aux avis rendus sur le projet de SCoT arrêté. Il prévoit que ce projet sera désormais soumis au comité de massif lorsque le SCoT est totalement ou partiellement situé en zone de montagne ainsi que lorsqu'il prévoit la création d'une ou plusieurs UTN structurantes ;

- le 11° procède à une correction de référence ;

- le 12° abroge l'article L. 143-26, ce qui met fin au contrôle renforcé qu'exerçait jusqu'à présent l'État sur les projets de SCoT prévoyant la création d'une UTN avant leur entrée en vigueur ;

- le 13° modifie l'article L. 143-28 relatif à l' évaluation du SCoT pour prévoir que cette évaluation porte également, dans le cas des SCoT situés en zone de montagne, sur ses résultats en matière de réhabilitation de l'immobilier de loisir et d'unités touristiques nouvelles structurantes.

Les 14° à 18 ° modifient le titre V du livre I er relatif aux PLU pour apporter au régime de ces plans les changements nécessaires à la mise en place du nouveau dispositif des UTN locales :

- le 14° modifie l'article L. 151-4 relatif au rapport de présentation du PLU pour indiquer ce que le diagnostic établi dans ce rapport devra, en zone de montagne, tenir compte des besoins répertoriés en matière de réhabilitation de l'immobilier de loisir ;

- le 15° modifie l'article L. 151-6 relatif aux orientations d'aménagement et de programmation (OAP) du PLU pour prévoir que ces dernières comportent, zone de montagne, des dispositions sur les UTN locales ;

- le 16° complète l'article L. 151-7 pour indiquer qu'en zone de montagne, les OAP définissent la localisation, la nature et la capacité d'accueil et d'équipement des UTN locales ;

- le 17° complète l'article L. 153-16 relatif aux avis rendus sur le projet de PLU arrêté. Il prévoit que ce projet sera désormais soumis à la formation spécialisée de la CDNPS, lorsque le projet de plan local d'urbanisme prévoit la réalisation d'une ou plusieurs UTN. Cet avis porte uniquement sur les UTN locales ;

- le 18° modifie l'article L. 153-27 relatif à l' évaluation du PLU pour prévoir que cette évaluation porte également, dans le cas des SCoT situés en zone de montagne, sur les UTN locales.

Les II modifie le code de l'environnement pour y apporter plusieurs corrections de références en cohérence avec les changements opérés dans le I.

Le III fait de même dans le code du tourisme.

Le IV précise les modalités d'entrée en vigueur de l'article :

- l'article entre en vigueur 6 mois après la publication de la loi ;

- les demandes de création ou d'extensions déposées avant l'entrée en vigueur de l'article 19 sont régies par les dispositions actuellement en vigueur ;

- les schémas de cohérence territoriale ou les plans locaux d'urbanisme approuvés avant l'entrée en vigueur de l'article 19 demeurent régis par les dispositions antérieurement applicables. Il en est de même pour les projets de schéma de cohérence territoriale ou de plan local d'urbanisme arrêtés avant l'entrée en vigueur de cet article ;

- si un SCoT ne prévoit pas d'UTN locales, celles-ci pourront malgré tout être réalisées dans une commune couverte par un PLU dès lors que ce PLU le prévoit en application des articles L. 151-4 à L. 151-7.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Outre de nombreux amendements rédactionnels ou de correction de références (21 en commission et 2 en séance publique), les députés ont procédé à plusieurs modifications de fond.

? Certaines de ces modifications portent sur le régime des exceptions au principe d'extension de l'urbanisation en continuité de l'urbanisation existante :

- alinéa 4 : l'amendement 491 des rapporteurs dispose que l'étude intégrée à un SCoT ou à un PLU et justifiant une dérogation à l'urbanisation en continuité est soumise par le préfet à l' avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS), ou à celui de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), ou à celui de ces deux commissions . Dans le droit actuel, cette étude est soumise d'office à la CDNPS et à elle seule ;

- alinéa 20 : l'amendement de commission CE 526 des rapporteurs a apporté une précision qui lève une ambiguïté du texte initial s'agissant de l'étude prévue par le SCoT ou le PLU pour justifier la création d'une UTN en discontinuité par rapport à l'urbanisation existante. La rédaction initiale pouvait laisser penser qu'une étude spécifique pour les UTN, différente de celle déjà prévue par l'article L.122-7, pourrait être nécessaire. La nouvelle rédaction des alinéas 20 et 23 de l'article 19 indique désormais clairement que les UTN structurantes ou locales situées en discontinuité de l'urbanisation sont prises en compte dans l'étude prévue à l'article L. 122-7 .

? Alinéa 22 : un amendement a permis de préciser le champ d'application de la procédure UTN en excluant les projets de faible dimension . L'amendement de séance 457 des rapporteurs a en effet complété les articles L. 122-20 et L. 122-21, dans leur rédaction proposée par le projet de loi, pour indiquer que les extensions limitées à une UTN structurante ou locale existante ne sont pas soumises à la procédure UTN lorsqu'elles n'excèdent pas des seuils définis par décret en Conseil d'Etat . C'est une disposition qui existe dans le droit actuel mais qui avait été supprimée par le projet de loi dans sa rédaction initiale.

? Certaines modifications concernent les procédures de consultation relatives à la création ou à l'extension d'une UTN :

- alinéa 21 : l'amendement de commission CE 527 des rapporteurs a prévu que la décision du préfet d'autoriser la création ou l'extension d'une UTN structurante située sur le territoire d'une commune non couverte par un SCoT ne pouvait intervenir qu' après avis de la commission spécialisée du comité de massif . Cette avis, qui existe dans le droit actuel, avait été supprimé par erreur dans le projet de loi initial ;

- alinéa 24 : l'amendement de séance 496 des rapporteurs permet que la décision du préfet d'autoriser la création ou l'extension d'une UTN locale située sur le territoire d'une commune non couverte par un PLU ne puisse intervenir qu' après avis d'une formation spécialisée de la CDNPS, ou d'une formation spécialisée de la CDPENAF, ou de ces deux formations spécialisées -dans le droit actuel, l'avis de la CDNPS et d'elle seule est requis en cas de création d'une UTN départementale. Cet amendement est cohérent avec l'amendement 491 précédemment évoqué ;

- alinéa 61 : l'amendement de séance 524 des rapporteurs a pour effet de modifier l'article L. 153-16 du code de l'urbanisme de façon à soumettre le projet de PLU arrêté à l'avis de la CDNPS ou de la CDPENAF ou de ces deux commissions lorsque le projet de PLU prévoit la réalisation d'une UTN locale.

? Alinéa 59 : l'amendement de commission CE 259 a permis de préciser que les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) du PLU définissent la capacité globale d'accueil et d'équipement des UTN locales . Cela lève une ambiguïté de la rédaction initiale, qui pouvait laisser penser que les OAP devaient définir la capacité d'accueil UTN par UTN lorsque le PLU prévoit la création de plusieurs UTN.

? Alinéas 76 à 80 : l'amendement de séance 525 du Gouvernement a créé une procédure intégrée pour les unités touristiques nouvelles permettant d'a ccélérer la mise en compatibilité d'un PLU ou d'un SCoT avec un projet d'UTN lorsque les règles de ces documents d'urbanisme font obstacles à la réalisation de l'UTN . Calquée sur la déclaration de projet ou la procédure intégrée pour l'immobilier économique, cette procédure prévoit que :

- l'enquête publique concernant cette opération porte à la fois sur l'utilité publique ou l'intérêt général de l'opération et sur la mise en compatibilité du schéma qui en est la conséquence ;

- les dispositions proposées pour assurer la mise en compatibilité du schéma font l'objet d'un examen conjoint de l'État, et des personnes publiques associées.

La procédure intégrée pour les UTN est conduite dans un délai de quinze mois à compter de son engagement pour les UTN structurantes et dans un délai de douze mois à compter de son engagement pour les UTN locales. À défaut d'achèvement dans ce délai, le préfet de département finalise la procédure de mise en compatibilité du PLU ou du SCoT.

? Enfin, alinéas 65 à 69 : l'amendement de séance 485 des rapporteurs a renforcé les exigences nécessaires pour l'autorisation de construction ou d'extension des remontées mécaniques prévue aux articles L. 472-1 et suivants du code de l'urbanisme :

- l'autorisation d'exécution des travaux est assortie d'une obligation de démantèlement des remontées mécaniques et de leurs constructions annexes, ainsi que de remise en état des sites. Ce démantèlement et cette remise en état doivent intervenir dans un délai de trois ans à compter de la mise à l'arrêt définitive de ces remontées mécaniques (article L. 472-2 du code de l'urbanisme) ;

- lorsque des remontées mécaniques n'ont pas été exploitées durant cinq années consécutives, le représentant de l'État dans le département met en demeure l'exploitant de procéder à leur mise à l'arrêt définitive .

IV. La position de votre commission

? Les avancées de la réforme des UTN et leurs limites:

Le principal progrès réside dans l'établissement de ce qu'on pourrait appeler une règle de subsidiarité entre SCoT et PLU pour ce qui concerne les UTN. Le projet de loi confie en effet aux SCoT le soin de définir les projets d'UTN les plus conséquents, tandis que les PLU prennent en charge les projets d'UTN de moindre ampleur. Cela permettra de stabiliser les SCoT qui, jusqu'à présent, pouvaient être entraînés dans une procédure de révision complète pour rendre possible des créations ou des extensions d'UTN, alors même que ces projets n'étaient pas de nature à changer les grands équilibres du territoire régi par le SCoT. C'est une mesure de simplification administrative utile.

Les procédures de consultation, telles qu'elles résultent de l'article 19, apparaissent plus complexes que précédemment . Pour les UTN locales, le projet de PLU ou l'autorisation préfectorale préalable sont soumis à l'avis de la CDNPS ou de la CDPENAF ou de ces deux commissions. Dans le droit actuel, l'avis de la CDNPS et d'elle seule est requis en cas de création d'une UTN départementale.

Il y a aussi une complexification en ce qui concerne les études de discontinuité nécessaires à la création d'UTN . L'actuel article L. 122-17 permet aux UTN de déroger au principe d'extension de l'urbanisation en continuité de l'urbanisation existante. L'article L. 122-19 nouveau reprend certes cette dérogation mais, bizarrement, il impose aux SCoT et aux PLU une étude pour justifier du non-respect de la continuité de l'urbanisation en application de l'article L. 122-7. C'est un choix discutable car un SCoT ou un PLU qui prévoit des constructions en discontinuité de l'urbanisation doivent le justifier de toute façon -qu'il s'agisse d'une UTN ou d'un autre type d'aménagement. Donc la référence à l'étude prévue à l'article L. 122-7 introduit une formalité dont l'utilité est discutable.

La procédure intégrée pour les UTN , qui permet la mise en compatibilité d'un SCoT ou d'un PLU nécessaire à la réalisation d'un projet d'UTN, constitue un outil d'accélération de la réalisation des projets dont la valeur ajoutée par rapport aux procédures existantes (déclaration d'utilité publique, déclaration de projet) n'apparaît pas clairement . Son encadrement dans des délais stricts, avec comme sanction en cas de dépassement la reprise en main de la procédure par le préfet, témoigne d'un souci louable d'accélérer les projets, mais il faut souligner que des délais procéduraux incompressibles peuvent compromettre le respect de ces délais et que le préfet, s'il reprend la procédure, sera de toute façon soumis à ces mêmes délais procéduraux.

L a reprise en main d'office de la procédure par le préfet en cas de dépassement du délai de 15 mois (s'agissant des UTN structurantes) ou de 12 mois (pour les UTN locales) apparaît brutale . Elle se justifierait en cas de volonté d'obstruction par une collectivité mais pas dans le cas général.

? Les amendements adoptés par la commission des affaires économiques :

Sur cet article qui est parvenu à un point d'équilibre politique, la commission a adopté sur proposition de son rapporteur plusieurs amendements visant à supprimer quelques complexités procédurales superflues sans toucher au coeur du dispositif :

- l'amendement n° 231 supprime la saisine de la CDPENAF sur les projets d'UTN, qui n'existe pas dans le droit actuel. Cette intervention de la CDNPS se justifie par le fait que l'aménagement en discontinuité réalisé dans une UTN doit apprécier principalement l'impact du projet sur le paysage et l'environnement montagnard. Au demeurant, même si la question de l'atteinte aux espaces agricoles devait malgré tout se poser lors de l'examen d'un projet d'UTN, on doit rappeler que les chambres d'agriculture sont consultées lors de la création ou de l'évolution d'un SCoT ou d'un PLU : elles peuvent donc se prononcer sur la création d'une UTN dans ce cadre. Par ailleurs, lorsqu'une UTN est créée par autorisation préfectorale, c'est certes la CDNPS qui se prononce, mais les professionnels de l'agriculture y sont représentés ; rien n'interdit au préfet, s'il l'estime utile, de saisir aussi la CDPENAF dans ce cas. On peut souligner enfin que le champ d'intervention des CDPENAF s'est récemment beaucoup développé et que l'article 20 A du projet de loi va contribuer à intensifier encore leur activité. Dans ces conditions, il n'apparaît pas opportun de leur donner aussi une compétence consultative en matière d'UTN que les professionnels du monde agricole ne revendiquent même pas ;

- l'amendement n° 232 est un amendement de précision juridique . Il rétablit la rédaction en vigueur du code de l'urbanisme qui indique sans ambiguïté que les UTN dérogent aux dispositions relatives à la construction en continuité dans les zones de montagne.

- l'amendement n° 235 supprime la possibilité pour le SCoT ou le PLU de définir des UTN sous les seuils définis par décret . Cette disposition avait été introduite pour permettre aux projets d'aménagement touristiques de faible ampleur de bénéficier des souplesses propres aux UTN concernant l'aménagement en discontinuité de l'urbanisation. Toutefois, cela a pour inconvénient de faire passer dans une procédure de validation intercommunale des projets qui n'ont d'impact que sur un territoire communal. Dans un contexte où la tendance à la généralisation d'un urbanisme intercommunal n'est pas toujours simple ni unanimement acceptée, il ne paraît pas opportun d'étendre ainsi le champ des procédures UTN. Il est préférable d'en rester au droit actuel, dans lequel les projets situés sous les seuils définis par décret échappent au régime des UTN et sont soumis au droit de l'urbanisme commun ;

- l'amendement n° 233, identique au n° 285 du rapporteur pour avis de la commission des lois, supprime l'obligation de soumettre la création d'une UTN dans le cadre d'un SCoT ou d'un PLU à l'étude de discontinuité prévue à l'article L. 122-7 du code de l'urbanisme. On peut imaginer que cette nouvelle obligation, répondait à un souci d'élever le niveau d'exigences des justifications à ce type d'opération dans les documents d'urbanisme. Cependant, outre que cette obligation revient à mettre en cause a priori le sérieux avec lequel les collectivités réalisent leurs documents d'urbanisme et évaluent leurs impacts paysagers et environnementaux, on peut rappeler que l'État est étroitement associé à ces procédures de planification et qu'il peut, le cas échéant, en cas d'insuffisance des justifications, demander les modifications ou les précisions nécessaires ;

- l'amendement n° 234 a apporté une clarification rédactionnelle et fait remonter dans le rapport de présentation du SCoT ce que l'alinéa 47 inscrivait plutôt dans le document d'orientation et d'objectifs. En effet, ce type de disposition explicative relève davantage du rapport de présentation que du DOO. Placée dans le DOO, elle prend une valeur opposable qui peut fragiliser le SCoT ;

- l'amendement n° 236 est rédactionnel ;

- l'amendement n° 237 supprime l'obligation de remise en état après démontage des remontées mécaniques , qui implique des travaux extrêmement lourds et potentiellement préjudiciables pour l'espace montagnard. Cela impose notamment de faire disparaître les fondements en béton enterrés des installations démontées. En tout état de cause, ces travaux de remise en état de l'environnement nécessiteront eux-mêmes une étude d'impact et une autorisation préalable et pourraient se voir interdits... au nom même de la préservation de l'environnement. L'amendement propose également par cohérence de remplacer la notion de démantèlement par celle de démontage ;

- l'amendement 259 précise le déroulement de la procédure intégrée pour les UTN en l'alignant sur les dispositions existantes en matière de déclaration de projet et de procédure intégrée pour l'immobilier d'entreprise ;

- l'amendement 238 précise les conditions de la reprise en main de la procédure intégrée pour les UTN par le préfet en cas de dépassement du délai de 15 mois (s'agissant des UTN structurantes) ou de 12 mois (pour les UTN locales). Il transforme la reprise en main d'office en simple faculté que le préfet exerce seulement après avoir mis les collectivités territoriales concernées en capacité de lui communiquer les motifs justifiant la méconnaissance des délais légaux ;

- enfin, les amendements n° s 239, 240 et 241 sécurisent les dispositions transitoires .

Par ailleurs, votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter les amendements proposés par le rapporteur de la commission des lois :

- l'amendement n° 288 augmente de quatre à cinq ans le délai autorisé pour l'interruption des travaux UTN , harmonisant ainsi les délais de caducité d'une autorisation d'UTN dans le cas où d'interruption des travaux et dans le cas de non engagement des travaux après l'autorisation initiale. En outre, cet amendement conserve le droit en vigueur en confirmant la compétence du conseil municipal - et non du préfet - pour renouveler l'UTN ;

- l'amendement rédactionnel n° 289 ;

- l'amendement n° 292 qui prévoit que la procédure intégrée de mise en compatibilité des SCoT et PLU soit évaluée dans un délai de trois ans - au lieu de deux ans - à compter de la promulgation de la présente loi.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Chapitre II
Adapter les règles d'urbanisme aux particularités de certains lieux de montagne
Article 20 A
(article L. 122-5 du code de l'urbanisme)
Autorisation de la construction d'annexes de la taille limitée aux constructions isolées en zone de montagne

Objet : cet article inclut les constructions d'annexes de taille limitée parmi les exceptions à la règle d'urbanisation en continuité en zone de montagne

I. Le droit en vigueur

L'article L. 122-5 du code de l'urbanisme crée une obligation d'urbanisation en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants au sein des zones de montagne. Échappent cependant à cette obligation les constructions réalisées en vue de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes.

Les annexes ne font donc pas partie des exceptions au principe d'urbanisation en continuité énumérées à l'article L. 122-5.

Du fait que les dispositions du code de l'urbanisme spécifiques à l'aménagement et protection de la montagne s'imposent non seulement aux autorisations individuelles de travaux mais également aux documents d'urbanisme (SCoT, PLU et cartes communales), l'interdiction des annexes aux constructions existantes dans les zones de montagne concerne non seulement les communes de montagne soumises au règlement nationale d'urbanisme, mais aussi les communes de montagne couvertes par un PLU . Ces dernières ne bénéficient donc pas de l'assouplissement permis par l'article 80 de la loi Macron, dont on peut rappeler qu'il a rendu possible, dans les zones agricoles, naturelles ou forestières des communes couvertes par un PLU, la construction d'annexes, dès lors que ces dernières ne compromettent pas l'activité agricole ou la qualité paysagère du site.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

En séance publique, les députés ont adopté l'amendement 254 des rapporteurs, qui propose de modifier l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme pour autoriser les constructions d'annexes de taille limitée, telles que garages, piscines ou abris de jardin, autour des constructions situées en zone de montagne.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur approuve l'assouplissement introduit par cet article concernant la possibilité de construction des annexes aux bâtiments existants en zone de montagne. Il note que, compte tenu de son inscription dans l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme, cet assouplissement est applicable aussi bien dans les communes de montagne couvertes par un PLU que dans celles qui n'en sont pas dotées. Il appelle toutefois à la vigilance pour que les constructions d'annexes n'entrainent pas un mitage des paysages et qu'elles ne compromettent pas l'activité agricole.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 20 BAA (nouveau)
(article L. 122-5 du code de l'urbanisme)
Assouplissement des règles d'urbanisation en zone de montagne

Objet : cet article étend les dispositions de l'article 20 A à toutes les communes et assouplit les critères d'interprétation de la règle d'urbanisation en continuité en territoire de montagne.

I. Le droit en vigueur

Sur la question de l'urbanisation en continuité en zone de montagne et sur la construction des annexes en particulier, se reporter à la partie « droit en vigueur » de l'article 20 A.

II. La position de votre commission

Si votre rapporteur se félicite de l'assouplissement introduit par l'article 20 A concernant la possibilité de construction des annexes aux bâtiments existants en zone de montagne, il constate cependant que cela crée une inégalité au détriment des communes non dotées d'un PLU qui ne sont pas situées en zone de montagne. Paradoxalement, avec la rédaction proposée pour l'article 20A, le régime d'autorisation des annexes devient en effet plus souple en zone de montagne que les communes de plaine .

Comme il n'y a aucune raison d'avantager les communes de montagne par rapport aux autres concernant le droit d'autoriser les constructions annexes, la commission souhaite donc rétablir l'égalité entre les collectivités et en conséquence propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'amendement n° 37 de M. Genest qui étend aux communes non situées en zone de montagne et non couvertes par un PLU la possibilité d'autoriser les annexes aux constructions existantes .

Possibilité de construction des annexes

Droit actuel

Droit modifié par l'article 20 A tel que rédigé par les députés

Droit tel qu'issu des délibérations de la commission des affaires économiques

Communes non couvertes par un PLU et non situées en zone de montagne

interdit

interdit

autorisé

Communes non couvertes par un PLU et situées en zone de montagne

interdit

autorisé

autorisé

Communes couvertes par un PLU et non situées en zone de montagne

autorisé

autorisé

autorisé

Communes couvertes par un PLU et situées en zone de montagne

interdit

autorisé

autorisé

Par ailleurs, votre commission propose également à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'amendement n° 35 de M. Genest, qui est la reprise de l'article 5 de la proposition de loi visant à relancer la construction en milieu rural. Cette disposition permet de mettre à profit des équipements ou des acquisitions déjà effectuées par des communes, et qui ont déjà grevé leur budget, en ouvrant à l'urbanisation les secteurs déjà desservis mais dans lesquels des constructions n'ont pas été édifiées.

Cela constitue une utilisation qui conjugue bon sens et bonne gestion des fonds publics.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 20 BA
(article L. 122-5-1 [nouveau] et L.122-6 du code de l'urbanisme)
Appréciation du principe de continuité

Objet : cet article précise les conditions d'appréciation du principe de continuité en zone de montagne

I. Le droit en vigueur

L'article L. 122-5 du code de l'urbanisme pose le principe d'urbanisation en continuité de l'urbanisation existante : l'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées.

L'article L. 122-6 précise ensuite la manière d'apprécier la mise en oeuvre de ce principe de continuité. Deux cas sont distingués :

- lorsque la commune est dotée d'un PLU ou d'une carte communale, ce document peut délimiter les hameaux et groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants en continuité desquels il prévoit une extension de l'urbanisation, en prenant en compte une liste de critères suivants : les caractéristiques traditionnelles de l'habitat, les constructions implantées et l'existence de voies et réseaux (alinéa 1 er de l'article) ;

- lorsque la commune n'est pas dotée d'un PLU ou d'une carte communale, l'appréciation se fait au cas par cas, mais en utilisant exactement les mêmes critères que dans un PLU, à savoir que la notion de hameau doit être apprécié en fonction des caractéristiques traditionnelles de l'habitat, des constructions implantées et de l'existence de voies et réseaux (alinéa 2 de l'article).

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

En séance publique, les députés ont adopté cinq amendements identiques (n°112, 132, 156, 265 et 297), provenant d'auteurs représentant la diversité des sensibilités politiques de l'assemblée, qui modifient la présentation des dispositions figurant actuellement à l'article L. 122-6. L'objet de ces amendements indique clairement que leur finalité n'est pas de bouleverser sur le fond les règles encadrant l'appréciation du principe de continuité, mais simplement d'en rendre la présentation plus visible (« Le présent amendement a pour but de mettre en exergue les éléments constitutifs du principe de continuité »).

III. La position de votre commission

La mise en exerce des éléments constitutifs du principe de continuité dans un article dédié du code de l'urbanisme (article L. 122-5-1 nouveau) implique de faire des coordinations à l'article L. 122-6. La commission y a procédé en adoptant l'amendement n° 244 de votre rapporteur.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 20 B
(article L. 122-10 du code de l'urbanisme)
Préservation particulière des terres agricoles, pastorales et forestières situées dans les fonds de vallée

Objet : cet article précise que le principe de préservation des terres concerne en particulier les fonds des vallées.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 122-10 du code de l'urbanisme institue un principe de général de préservation des terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières. La nécessité de préserver ces terres s'apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d'exploitation locaux (critères économiques). Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l'exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition (critères physiques).

Le principe de préservation des terres nécessaires à l'agriculture et aux activités pastorales et forestières trouve à s'appliquer lors de l'élaboration ou de l'évolution des documents d'urbanisme. En particulier, le zonage et les orientations d'aménagement d'un PLU doivent être compatible avec l'objectif de préservation. L'urbanisation de ces terres est possible pour satisfaire des besoins justifiés dans une mesure compatible avec le maintien et le développement des activités agricoles, pastorales et forestières (CE  6 février 1998 Cne de Favergues). Ce principe de préservation des terres est également directement opposable aux demandes d'occupation du sol, même lorsque la commune est dotée d'un PLU.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Lors de l'examen en séance publique, les députés ont adopté l'amendement 255 des rapporteurs qui indique que le principe de préservation des terres concerne en particulier celles qui se situent dans les fonds des vallées.

III. La position de votre commission

Le droit actuel précise déjà que sont pris en compte, pour l'application du principe de préservation des terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières, des critères comme le relief, la pente et l'exposition, ce qui autorise une protection pour les fonds de vallée.

Votre commission propose donc à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'amendement n° 295 de suppression de l'article présenté par le rapporteur pour avis de la commission des lois.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de supprimer cet article.

Article 20
(article L. 122-11 du code de l'urbanisme)
Subordination des travaux sur des chalets d'alpage ou des bâtiments d'estive à une servitude administrative

Objet : cet article clarifie les conditions d'institution d'une servitude administrative interdisant l'utilisation du bâtiment en période hivernale ou limitant son usage pour tenir compte de l'absence de réseaux

I. Le droit en vigueur

En application de l'article L. 122-11 du code de l'urbanisme, les anciens chalets d'alpage ou les bâtiments d'estive peuvent faire l'objet de travaux de restauration, de reconstruction ou d'extensions limitées dans un objectif de protection et de mise en valeur du patrimoine montagnard, lorsque la destination est liée à une activité professionnelle saisonnière.

L'autorisation est délivrée par l'autorité administrative compétente de l'Etat après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites.

Cette autorisation préfectorale est indépendante de l'autorisation d'occuper le sol (permis de construire ou déclaration préalable).

Par ailleurs, lorsqu'un chalet d'alpage ou un bâtiments d'estive n'est pas desservi par les voies et réseaux, ou lorsqu'il est desservi par des voies qui ne sont pas utilisables en période hivernale, l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire peut subordonner la réalisation des travaux faisant l'objet d'un permis de construire ou d'une déclaration préalable à l'institution d'une servitude administrative, publiée au fichier immobilier, interdisant l'utilisation du bâtiment en période hivernale ou limitant son usage pour tenir compte de l'absence de réseaux . Cette servitude précise que la commune est libérée de l'obligation d'assurer la desserte du bâtiment par les réseaux et équipements publics. Lorsque le terrain n'est pas desservi par une voie carrossable, la servitude rappelle l'interdiction de circulation des véhicules à moteur édictée par l'article L. 362-1 du code de l'environnement. La collectivité n'est plus obligée d'effectuer, notamment l'hiver, de coûteux travaux de déneigement, en limitant l'occupation du chalet d'alpage, seulement durant la période estivale.

Cette servitude administrative est une décision distincte de la décision préfectorale et de la décision d'autorisation individuelle de travaux . Le législateur n'a pas précisé les conditions de mise en oeuvre de cette servitude administrative, mais la jurisprudence considère qu'il s'agit d'une décision administrative distincte, susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Cette servitude est générale et impersonnelle et présente le caractère d'une décision de portée réglementaire (CAA de Lyon du 19 mai 2011, n° 09LY01441). Si l'autorisation préfectorale est délivrée préalablement à l'octroi du permis de construire (ce qui n'est pas une nécessité) et si le maire a instauré la servitude administrative, le permis de construire comporte en visa :

- l'autorisation préfectorale,

- l'arrêté du maire instaurant la servitude administrative.

II. Le projet de loi initial

L'article 20 modifie le dernier alinéa de l'article L. 122-11 du code de l'urbanisme pour préciser l'articulation entre les trois décisions administratives impliquées l'autorisation de la rénovation, de la reconstruction ou de l'extension des anciens chalets d'alpage ou des bâtiments d'estive :

- lorsque le bâtiment n'est pas desservi par les voies et réseaux, ou lorsqu'il est desservi par des voies qui ne sont pas utilisables en période hivernale, l'institution de la servitude administrative établie par décision du maire devient obligatoire et constitue un préalable à la décision préfectorale. In fine, il devient impossible d'autoriser les travaux par permis de construire ou déclaration préalable en ayant omis d'instaurer cette servitude ;

- logiquement, la décision préfectorale ne peut plus être tacite, puisque elle dépend de la décision du maire d'instaurer la servitude administrative.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Cet article n'a pas été modifié par les députés.

IV. La position de votre commission

Votre rapporteur approuve cette clarification de l'articulation entre les procédures administratives. Elle va le sens de la sécurité juridique et économique des collectivités territoriales.

Votre commission a fait le choix de soutenir l'adoption de l'amendement n° 293 de re-rédaction globale de l'article proposé par le rapporteur pour avis de la commission des lois.

Il pourrait être utile cependant, au cours des étapes de l'examen du texte, d'approfondir l'analyse de l'impact de la rédaction proposée par cet amendement. En effet, elle remplace l'actuelle obligation pour le maire de subordonner la délivrance d'un permis de construire à l'instauration d'une servitude administrative par un droit des collectivités à s'affranchir de toute obligation de donner accès aux réseaux. Or, l'instauration de la servitude fait l'objet d'une décision au cas par cas et peut-être attaquée devant le juge, alors que ce droit à s'affranchir de toute obligation de desservir ne serait pas attaquable et pourrait porter donc une atteinte indirectement au droit de propriété, en ne respectant pas l'exigence de proportionnalité (voir la décision du CC Décision n° 2016-540 QPC du 10 mai 2016). Cette rédaction pourrait également soulever des difficultés au regard du droit au service universel pour l'électricité consacré par la directive de 2009 sur le marché intérieur de l'électricité, décliné en droit au raccordement dans le droit français.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 20 bis A
Périmètre dérogatoire des schémas de cohérence territoriale en zone de montagne

Objet : cet article invite à adapter la démarche des schémas de cohérence territoriale aux spécificités des territoires de montagne

I.  Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'article 20 bis A résulte de l'adoption de l'amendement n° 230 de M. Viala adopté contre l'avis des rapporteurs et du Gouvernement. Il vise à donner corps à la notion de SCoT rural en permettant aux territoires de montagne qui font la démonstration de la cohérence de leur proposition de schéma de s'engager dans l'élaboration d'un SCoT sur un périmètre relativement restreint. C'est du moins ce qu'on peut comprendre de la lecture de l'objet de cet amendement, le dispositif juridique lui-même n'apparaissant pas parfaitement limpide.

II. La position de votre commission

Considérant que l'article 20 bis A ne présente qu'une portée incantatoire et qu'il présente certaines ambiguïtés comme la référence aux communes de moins de 5 000 habitants (alors que les « SCoT ruraux » s'adressent également aux agglomérations de moins de 100 000 habitants) ou le renvoi erroné à l'article L. 142-2 du code de l'urbanisme, l'amendement COM-35 de suppression de cet article a été adopté.

On peut noter par ailleurs que l'article 20 bis A n'aborde pas la question des plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi) valant SCoT, alors qu'il s'agit d'une solution pertinente pour les territoires ruraux souhaitant s'engager dans une démarche de planification.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de supprimer cet article.

Article 20 bis
(article L. 480-13 du code de l'urbanisme)
Faculté donnée au juge judiciaire d'ordonner la destruction d'une construction conforme à un permis de construire

Objet : cet article inclut les espaces, paysages et milieux remarquables de montagne dans le champ de l'action en démolition.

I. Le droit en vigueur

L'action en démolition est définie à l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme. L'article 111 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques en a fortement réduit le champ. Précédemment, le propriétaire pouvait être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique lorsque le permis avait été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative. Cette action en démolition pouvait être engagée dans le délai de deux ans suivant la décision devenue définitive de la juridiction administrative. Depuis la loi « Macron », cette action ne peut être engagée qu'à l'encontre des constructions situées dans des espaces sensibles limitativement énumérés à l'article L. 480-13. Parmi ces espaces sensibles, figurent les « les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard mentionnés au II de l'article L. 145-3, lorsqu'ils ont été identifiés et délimités par des documents réglementaires relatifs à l'occupation et à l'utilisation des sols ».

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'amendement CE485 des rapporteurs a étendu le champ de démolition pour y inclure les espaces, paysages et milieux remarquables désignés par décret, sur proposition des comités de massif, en application du 2° de l'article L. 122-24 du code de l'urbanisme (renuméroté L. 122-26 par l'article 19 du projet de loi). Ces éléments remarquables du patrimoine naturel et culturel montagnard peuvent être des gorges, grottes, glaciers, lacs, tourbières, marais, lieux de pratique de l'alpinisme, de l'escalade et du canoë-kayak, cours d'eau de première catégorie et leurs abords.

III. La position de votre commission

Cette disposition répare un oubli de l'article 111 la loi Macron, qui aurait dû inclure les espaces, paysages et milieux remarquables définis sur proposition des comités de massifs. Une protection restreinte aux seules zones sensibles définies par les PLU rend vulnérables aux constructions illicites les espaces remarquables nombreux situés sur des communes non couvertes par un PLU.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 20 ter
(article L. 324-2 du code de l'urbanisme)
Prise en compte des spécificités de la montagne lors de la décision relative à la création d'un établissement public foncier

Objet : cet article oblige la motivation de la décision du préfet à tenir compte des spécificités liées au classement en zone de montagne lors de la création d'un établissement foncier local.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 324-2 du code de l'urbanisme précise la procédure de création d'un établissement public foncier : la décision est prise par le représentant de l'Etat dans la région au vu des délibérations concordantes des organes délibérants d'établissements publics de coopération intercommunale, dotés de la compétence en matière de programme local de l'habitat, ainsi que, le cas échéant, de conseils municipaux de communes non membres de l'un de ces établissements. Le préfet dispose d'un délai de trois mois à compter de la transmission des délibérations pour donner son accord ou motiver son refus. Cette motivation est fondée sur les données locales relatives aux périmètres existants ou proposés d'établissements publics fonciers ou de schémas de cohérence territoriale et à l'évaluation des besoins fonciers correspondant aux enjeux territoriaux en matière d'urbanisme, d'habitat, de développement économique, de déplacements et d'environnement.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

En séance publique, les députés ont adopté l'amendement 250 de M. Folliot (UDI), avec accord de la commission et du Gouvernement. Il complète l'article L. 324-2 pour préciser que la motivation du préfet, quand il est amené à se prononcer sur la création d'un établissement public foncier, tient compte des spécificités liées au classement en zone de montagne.

III. La position de votre commission

Ni l'objet de l'amendement n° 250 ni les débats en séance publique à l'Assemblée nationale ne permettent d'appréhender vraiment les enjeux de la disposition introduite à l'article 20 ter.

La rédaction actuelle de l'article L. 324-2 du code de l'urbanisme permet déjà au préfet de prendre en compte la spécificité des territoires de montagne lors de la création d'un établissement public foncier (EPF). Compte tenu des contraintes propres à la mobilisation du foncier en zone de montagne, et notamment des contraintes normatives issues de la loi montagne, il paraît en effet peu vraisemblable qu'un préfet statue sans, de facto, avoir pris en compte les spécificités liées au classement en zone de montagne. Est-il utile d'obliger par la loi le Préfet à faire preuve d'une vigilance particulière lorsqu'il statue dans ce cas particulier, comme le fait la disposition de l'article 20 ter ? Il n'est pas sûr qu'on ne perde pas plus qu'on ne gagne à apporter ce type de précision. En effet, la disposition introduite par les députés contraint davantage la rédaction de la motivation du préfet lors de la décision de création, puisqu'il faudra que le préfet explique comment sa décision intègre les problématiques du foncier en zone de montagne. Cela ne changera rien au fond des décisions prises mais cela fragilisera ces décisions, dans la mesure les requérants pourront se saisir d'un nouveau moyen pour les contester.

Votre commission propose donc l'adoption de deux amendements de suppression du présent article, le n° 242 présenté par votre rapporteur et le n° 297 présenté par le rapporteur pour avis de la commission des lois.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de supprimer cet article.

Chapitre III
Encourager la réhabilitation de l'immobilier de loisir
Article 21 A
(article L. 141-12 du code de l'urbanisme)
Intégration de la réhabilitation de l'immobilier de loisir au document d'orientation et d'objectifs du SCoT

Objet : cet article fixe au SCoT des objectifs en matière de réhabilitation de l'immobilier de loisir en zone de montagne.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 141-12 du code de l'urbanisme prévoit que le document d'orientation et d'objectifs (DOO) d'un SCoT précise les objectifs d'offre de nouveaux logements, et les objectifs de la politique d'amélioration et de la réhabilitation du parc de logements existant public ou privé. Rien n'est en revanche prévu en ce qui concerne l'immobilier de loisir.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

La commission des affaires économiques a adopté l'amendement CE486 des rapporteurs, qui propose de modifier l'article L. 141-12 pour obliger le DOO du SCoT à préciser les objectifs de la politique de réhabilitation de l'immobilier de loisir en zone de montagne.

III. La position de votre commission

L'article L. 141-4 du code de l'urbanisme prévoit d'ores-et-déjà que le projet d'aménagement et de développement durables du SCoT fixe les objectifs des politiques publiques de développement économique, touristique et culturel. La définition d'objectifs dans le domaine de la réhabilitation de l'immobilier de loisir est donc cohérente avec la vocation du SCoT.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 21
(article L. 318-5 du code de l'urbanisme)
Priorité d'acquisition pour constituer des lots contigus en faveur de la réhabilitation

Objet : cet article rénove le dispositif des opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisir.

I. Le droit en vigueur

? Qu'est-ce qu'une opération de réhabilitation de l'immobilier de loisir ?

Les opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisir (ORIL) sont régies par l'article L. 318-5 du code de l'urbanisme.

Elles ont pour objet l'amélioration du parc immobilier touristique et l'amélioration des espaces publics, du stationnement, des équipements d'infrastructures et du traitement de l'environnement. Sont visés plus particulièrement l'amélioration l'offre qualitative des logements locatifs à destination de la clientèle touristique et du personnel saisonnier ainsi que le maintien ou de développement de l'offre de services de proximité.

Elles sont créées par délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent. La délibération précise :

- le périmètre de l'opération ;

- les conditions de financement de l'opération, le cas échéant les aides susceptibles d'être accordées par les collectivités territoriales ou leurs groupements ;

- l'objectif et le délai maximal de réhabilitation de logements ;

- les actions d'accompagnement et d'amélioration du cadre de vie prévues.

Les bénéficiaires des aides sont :

- les propriétaires bailleurs. En contrepartie de l'aide, ces derniers sont engagés contractuellement pour une durée d'au moins neuf ans dans une mise en marché locatif auprès d'un professionnel ou d'un organisme local de tourisme agréé ;

- les personnes physiques ou morales ayant la charge des travaux de réhabilitation et la mise en marché locatif durable ;

- la copropriété ayant la charge des travaux relatifs aux parties communes.

? Le bilan de la mise en oeuvre des ORIL

Le dispositif des ORIL a été mis en place par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain dans le but d'inciter les propriétaires à engager ou à faire engager des travaux de réhabilitation et à mettre leurs appartements sur le marché.

D'après l'étude d'impact jointe au projet de loi, le bilan de la mise en oeuvre de ce dispositif apparaît extrêmement modeste : rénovation de 1 300 logements représentant 7 000 à 8 000 lits, essentiellement en montagne, sur un potentiel de meublés classés pouvant être estimé à 170 000 logements.

Deux causes sont avancées pour expliquer le peu de fortune de ce dispositif :

- la réticence des propriétaires à adhérer au dispositif. Elle est due à la rigidité des conditions imposées par le droit actuel. Le propriétaire est en effet tenu de mettre en location, par le biais d'une agence, son logement pendant une durée équivalente ou supérieure à neuf ans. D'une part, la durée apparaît dissuasive. D'autre part, l'obligation de passer par l'intermédiaire d'une agence plutôt que par une plateforme d'intermédiation sur internet ne correspond plus aux pratiques actuelles. Enfin, le dispositif ne répond pas au souhait des propriétaires d'avoir un usage mixte de leur bien (mise en location alternant avec jouissance en propre) ;

- l'inadaptation de l'offre de logements à la demande actuelle. Construits dans les années 1960-1980, les logements du parc de loisir en montagne sont souvent de petites tailles et ne correspondent plus aux exigences en matière de confort et d'espace.

II. Le projet de loi initial

L'article 21 modifie l'article L. 318-5 du code de l'urbanisme.

Le 1° de l'article précise l'objet des ORIL en indiquant qu'elles ne visent pas seulement à améliorer l'offre qualitative des logements locatifs mais aussi « l'occupation du parc immobilier ».

Le 2° apporte une correction rédactionnelle.

Le 3° modifie les conditions d'octroi des aides aux propriétaires bailleurs. Le dispositif actuel (aide conditionnée à l'engagement contractuel du propriétaire à mettre son logement réhabilité sur le marché locatif auprès d'un professionnel ou d'un organisme local de tourisme agréé pendant une durée de neuf ans) est remplacé par un dispositif qui conditionne l'octroi et la conservation de l'aide au fait que les propriétaires respectent les obligations d'occupation et de location de logements définies par la délibération de la commune ou de l'EPCI qui met en place une ORIL .

Le 4° assouplit la contrainte imposée à la personne en charge des travaux en contrepartie des aides qu'elle reçoit. Dans le droit actuel, l'aide est ouverte à la condition que la même personne prenne en charge des travaux de réhabilitation et la mise en marché locatif durable. Désormais, l'aide pourra être octroyée à la personne qui prend en charge les travaux de réhabilitation ou bien la mise en marché locatif durable.

Le 5° ouvre les aides aux personnes physiques ou morales qui s'engagent à acquérir des lots de copropriétés et à réaliser des travaux de restructuration et de réhabilitation dans le but de réunir des lots contigus . Il s'agit ainsi d'inciter à la transformation des logements construits dans les années 1960-1980, souvent de petites tailles et inadaptés aux exigences de confort et d'espace exprimées par la demande actuelle.

Le 6° procède à une correction de précision en visant le « syndicat des propriétaires » plutôt que la « copropriété » comme bénéficiaire des aides.

Enfin, le 7° complète le dispositif que la délibération créant une ORIL doit préciser :

- les engagements souscrits par les bénéficiaires des aides accordées par les collectivités en matière de travaux, d'occupation et de mise en location des logements ;

- les modalités de remboursement des aides en cas de non-respect de ces engagements .

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

En commission, les députés ont simplement adopté deux amendements rédactionnels au texte initial (CE 366 et CE 367).

IV. La position de votre commission

Le dispositif proposé conduit à un assouplissement significatif de la procédure des ORIL, ce qui devrait la rendre plus attractive aux yeux des propriétaires-bailleurs des stations de montagne. Les communes ou les EPCI pourront définir eux-mêmes les engagements des bénéficiaires des aides, ainsi que les modalités de contrôle et de remboursement de ces aides. La durée minimale de mise en location pourra ainsi être inférieure à neuf ans. Les propriétaires bailleurs ne seront plus tenus de passer par un organisme local de tourisme agréé pour louer leur bien réhabilité. Enfin, les propriétaires de résidences secondaires qui louent occasionnellement leur bien, notamment via une plateforme sur internet, pourront participer au dispositif.

Votre commission a simplement soutenu l'adoption de l'amendement n° 298, présenté par le rapporteur pour avis de la commission des lois, pour procéder à une coordination du présent article avec le code du tourisme.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 21 bis
(article L. 318-6 du code de l'urbanisme)
Obligation d'information du syndic de copropriété en cas de mise en vente d'un lot situé dans le périmètre d'une opération de réhabilitation de l'immobilier de loisir

Objet : cet article institue une obligation d'information pour les propriétaires vendant un lot de copropriété d'un immeuble situé dans le périmètre d'une opération de réhabilitation de l'immobilier de loisir

I. Le droit en vigueur

Se reporter à la partie « droit en vigueur » du commentaire de l'article 21 concernant la procédure des opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisir.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'article 21 bis résulte de l'amendement de séance n° 258 des rapporteurs.

Il institue une obligation d'information pour les propriétaires qui vendre un lot de copropriété d'un immeuble situé dans le périmètre d'une opération de réhabilitation de l'immobilier de loisir et soumis aux dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Le propriétaire vendeur est tenu de notifier, avant toute publicité, son intention de vendre au syndic de la copropriété, en indiquant le prix souhaité et les conditions de la vente projetée. Cette information est notifiée dans un délai de dix jours ouvrés par le syndic à chaque copropriétaire par tout moyen permettant d'en accuser réception, aux frais du syndic.

Lors de sa notification aux copropriétaires, le syndic précise que cette information est donnée par le vendeur à titre indicatif et ne constitue pas une offre de vente.

Cette obligation d'information s'applique également aux cessions d'usufruit ou de nue-propriété, pour lesquelles sont notamment précisées la consistance et la valeur des biens concernés.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur comprend l'objectif poursuivi par cet amendement : il y a un vrai enjeu à encourager la réunion de lots de copropriétés au sein d'immeubles situés dans le périmètre d'une ORIL, car les logements du parc actuel, en raison de leur taille trop faible, ne correspondent plus aux normes exigées par les locataires et demeurent donc inoccupés.

Si l'objectif est louable, le dispositif proposé soulève cependant plusieurs objections de fond :

- une objection tenant au coût et à la lourdeur du dispositif . Coût pour le propriétaire qui devra informer le syndic, ce qui ajoute une obligation de plus à celles déjà créées par la loi ALUR. Coût surtout pour le syndic (et par ricochet pour les copropriétaires), puisque le syndic est tenu d'informer l'ensemble des copropriétaires dans les dix jours par tout moyen permettant d'en accuser réception . Dans certains copropriétaires de montagne, ce sont ainsi plusieurs centaines de courrier avec demande d'accusé de réception qui devraient ainsi être envoyées avant chaque vente d'un lot ;

- une objection tenant à l'inefficacité . On crée une obligation d'information de tous les copropriétaires alors que, si l'objectif est de réunir plusieurs lots dans un lot unique, seuls les propriétaires des lots mitoyens au lot mis en vente devraient être prévenus. À tout le moins faudrait-il recentrer le dispositif sur eux ;

- une objection tenant à la sécurité juridique . On ne sait pas quels seraient les effets sur la vente du non respect des obligations d'information créées par ce dispositif. Si le propriétaire n'informe pas le syndic, la vente est-elle annulée ? Si le syndic ne s'acquitte pas de son obligation d'informer les autres copropriétaires, le propriétaire vendeur peut-il voir sa vente contrariée ? Et si oui, qu'est-ce qui justifie qu'il supporte personnellement les conséquences d'une erreur commise par le syndic ? De même, si un des copropriétaires conteste avoir été informé de l'intention de vendre, cela peut-il avoir un effet sur la légalité de la vente ? Soit l'on assortit l'obligation d'information d'aucune sanction et elle en devient inutile. Soit on en crée une sanction et elle risque bien de créer une insécurité sur les ventes ;

- une objection tenant à la constitutionnalité de la mesure . Contrairement à ce que soutiennent les auteurs de l'amendement, le dispositif proposé constitue bel et bien une atteinte au droit de propriété. Il s'agit même d'une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif d'intérêt général qui la justifie. Ce dispositif crée des formalités préalables à la vente et insécurise la procédure de vente sans qu'on puisse en attendre contrepartie un effet positif sur l'aménagement touristique des zones de montagne. Il présente donc un fort risque d'inconstitutionnalité.

La commission a donc adopté l'amendement n° 243 de votre rapporteur qui supprime le présent article.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de supprimer cet article.

Article 22
(article L. 323-1 du code de tourisme)
Abrogation du dispositif des villages résidentiels de tourisme

Objet : cet article met fin au dispositif des villages résidentiels de tourisme.

I. Le droit en vigueur

? Les villages résidentiels de tourisme (VRT) sont issus de la loi n° 98-1233 du 10 décembre 1998 de finances pour 1999. Les dispositions qui les concernent sont codifiées à l'article L. 323-1 du code du tourisme et, pour leur aspect fiscal, aux articles 261 D et 199 decies F du code général des impôts.

Un VRT est un établissement commercial d'hébergement classé par Atout France, qui s'inscrit dans le périmètre d'une opération de réhabilitation de l'immobilier de loisirs (ORIL). Il est constitué d'un ensemble de locaux d'habitation meublés et est doté d'équipements et de services communs dans des locaux situés à proximité. Ces locaux d'habitation sont proposés à la location à une clientèle touristique pour une occupation à la journée, à la semaine ou au mois. Le VRT est géré par un exploitant dans le cadre d'un contrat de location d'une durée au moins égale à neuf ans. Durant cette période, les propriétaires des locaux peuvent bénéficier d'un droit de réservation prioritaire pour une période limitée à l'intérieur de l'année.

? L'attractivité du dispositif pour les propriétaires des locaux qui constituent un VRT repose sur un dispositif d'incitation fiscale. L'article 199 decies F du code général des impôts a institué une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France qui réalisent des travaux de reconstruction, d'agrandissement, de réparation ou d'amélioration, entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2012, sur des locaux confiés à l'exploitant d'un VRT en vue d'être loués à une clientèle touristique. Cette réduction s'applique aux dépenses afférentes à un logement, achevé depuis quinze ans au moins et faisant partie d'un village résidentiel de tourisme classé inclus dans le périmètre d'une opération de réhabilitation de l'immobilier de loisir (ORIL). La réduction d'impôt est accordée au titre de l'année du paiement des dépenses de travaux. Le propriétaire doit s'engager à louer son logement nu pendant au moins neuf ans à l'exploitant du village résidentiel de tourisme classé.

II. Le projet de loi initial

L'article 22 comprend une seule disposition qui abroge le dispositif des VRT.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

En séance publique, les députés ont adopté l'amendement n° 521 des rapporteurs qui précise qu'aucune reprise de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 decies F du code général des impôts n'est effectuée si l'absence de classement d'un VRT résulte de l'abrogation des dispositifs des VRT par le présent article du projet de loi.

En effet, la réduction d'impôt accordée au titre de l'article 199 decies F est conditionnée au fait que le propriétaire loue pendant 9 ans son logement à l'exploitant d'un VRT. Or, l'abrogation du classement en VRT fin 2016 a pour effet que cet engagement ne peut être tenue par les propriétaires louant des logements ayant fait l'objet de travaux fiscalement aidés entre fin 2007 et fin 2012. En l'absence de précision expresse par la loi que l'abrogation du dispositif ne constitue pas un motif de reprise de l'avantage fiscal octroyé, il y a donc un risque que les propriétaires doivent rembourser les sommes correspondant à la réduction d'impôt dont ils ont bénéficié.

IV. La position de votre commission

L'abrogation des VRT est présentée comme une mesure de simplification. Votre rapporteur estime cependant que les véritables mesures de simplification consistent à faciliter l'usage des outils qu'utilisent effectivement les acteurs et non pas à faire disparaître des outils inusités. De ce point de vue, l'abrogation des VRT apparaît davantage comme une mesure de toilettage du code du tourisme que comme une disposition de nature à faciliter le développement des activités touristiques en zone de montagne.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article sans modification.

Article 22 bis
(article L. 326-1 du code de tourisme)
Accueil des mineurs d'âge scolaire dans les refuges

Objet : cet article modifie la définition légale des refuges de montagne.

I. Le droit en vigueur

La définition des refuges de montagne figure à l'article L. 326?1 du code du tourisme : « Un refuge est un établissement recevant du public, en site isolé de montagne, gardé ou non gardé. Ses caractéristiques sont définies par décret. »

Des précisions de nature réglementaire sont apportées à cette définition par l'article D. 326-2 du code du tourisme. Il est indiqué notamment que des mineurs peuvent y être hébergés.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'article 22 bis résulte de l'amendement n° 157 de M. Giraud (radical). Des amendements quasi identiques avaient cependant été déposés par la plupart des groupes politiques.

Cet amendement complète la définition du refuge de montagne figurant à l'article L. 326-1 du code du tourisme en apportant deux précisions :

- il indique expressément que parmi le public des refuges figurent les mineurs d'âge scolaire. Ces derniers doivent être encadrés dans des conditions établies conjointement par les ministères chargés de l'éducation et de la jeunesse et des sports ;

- les normes de sécurité et d'hygiène applicables aux refuges de montagne sont adaptées aux spécificités des zones de montagne. Elles sont définies par décret.

III. La position de votre commission

Sur proposition du rapporteur pour avis de la commission des lois, votre commission a apporté son soutien à l'adoption de l'amendement n° 299 qui précise l'interprétation de l'article 22 bis . Il dispose que les mineurs peuvent être accueillis dans un refuge gardé lorsqu'ils ne sont pas accompagnés ou bien dans un refuge gardé ou non gardé lorsqu'ils ne sont accompagnés. Un décret permettra de préciser cette notion d'accompagnement. En outre, cet amendement supprime la notion de « mineur d'âge scolaire » en raison des difficultés d'interprétation qu'elle peut soulever.

Votre commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter cet article ainsi modifié.

TITRE IV
RENFORCER LES POLITIQUES ENVIRONNEMENTALES À TRAVERS L'INTERVENTION DES PARCS NATIONAUX ET DES PARCS NATURELS RÉGIONAUX
Article 23 A
(articles L. 213-8 et L. 213-10-9 du code de l'environnement)
Prise en compte des spécificités de la montagne dans les décisions financières des agences de l'eau et exonération de redevance pour prélèvement pour les petits canaux d'irrigation de montagne

Objet : cet article vise à ce que les agences de l'eau prennent en compte les spécificités de la montagne dans leurs décisions financières et exonère de redevance pour prélèvement d'eau les petits canaux d'irrigation de montagne gérés collectivement.

I. Le droit en vigueur

L'article L 213-8 du code de l'environnement définit la composition des comités de bassin et précise que les comités de bassin définissent « les orientations de l'action » des agences de l'eau et participent « à l'élaboration des décisions financières de cette agence ».

L'article L. 213-10-9 du code de l'environnement, pour sa part, institue une redevance pour prélèvement sur la ressource en eau . Il s'agit là du principal outil économique pour la gestion quantitative de l'eau. Le tarif de la redevance est modulé selon les utilisations de l'eau : irrigation, alimentation en eau potable, refroidissement industriel ....

Par ailleurs, certains prélèvements sont exonérés : prélèvements effectués en mer, prélèvements pour l'aquaculture, pour la géothermie, petits prélèvements pour l'alimentation de fontaines,...

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de M. Philippe Folliot, les députés ont adopté en commission un amendement réclamant la prise en compte des spécificités de la montagne comme la faible densité ou encore les surcoûts engendrés par les travaux sur les réseaux, pour prendre les décisions financières au sein des agences de l'eau, comme par exemple les décisions de subventions.

Le rapport de l'Assemblée nationale souligne qu'il s'agit là d'une disposition plutôt déclaratoire.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur n'a pas remis en cause l'article voté à l'Assemblée nationale mais l'a enrichi en ajoutant une disposition concernant la redevance pour prélèvement d'eau.

En effet, le maintien des petits canaux d'irrigation gravitaire traditionnels en montagne est essentiel pour garantir la survie de certaines productions et l'accès à l'eau de certains espaces.

Or, ces canaux, souvent gérés collectivement sont soumis à la redevance pour prélèvement d'eau. Il s'agit de très petites structures avec peu de ressources.

Le risque en montagne est que ces organismes abandonnent les équipements d'irrigation, qui finiront par ne plus fonctionner.

C'est pourquoi un amendement COM-229 a été déposé pour proposer une exonération de redevance pour prélèvement d'eau pour les canaux d'irrigation gravitaires traditionnels gérés de manière collective à petit débit .

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

Article 23 B
(article L. 211-1 du code de l'environnement)
Objectif de promotion d'une politique active de stockage de l'eau au sein de la politique visant à assurer la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau

Objet : cet article ajoute un objectif de promotion du stockage de l'eau dans la liste des objectifs visant à assurer, grâce à la politique de l'eau, une gestion équilibrée et durable de la ressource.

I. Le droit en vigueur

L'article L. 211-1 du code de l'environnement fixe les différents objectifs poursuivis dans le cadre de la politique de gestion équilibrée et durable de la ressource en eau.

Les aides publiques et les mesures règlementaires prises par les pouvoirs publics s'inscrivent dans ce cadre. Il s'agit d'assurer :

- la prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ;

- la protection des eaux et la lutte contre les pollutions ;

- la restauration de la qualité des eaux et leur régénération ;

- le développement, la mobilisation, la création et la protection de la ressource en eau ;

- la valorisation de l'eau comme ressource économique, notamment à travers l'hydroélectricité ;

- la promotion d'une utilisation efficace, économe et durable de l'eau ;

- le rétablissement de la continuité écologique au sein des bassins hydrographiques.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

À l'initiative de Martial Saddier, un amendement (n° 94) a été adopté en séance, affecté d'un sous-amendement (n° 537) des rapporteures, Mmes Annie Genevard et Bernadette Laclais, pour enrichir les objectifs de la politique de l'eau au stockage de celle-ci, afin de permettre l'irrigation aux fins de favoriser la production agricole, maintenir l'étiage des rivières et subvenir aux besoins des populations locales.

Cet amendement, qui ne se limite pas d'ailleurs à la montagne, répond à une préoccupation croissante de mise en place de retenues d'eau dans les zones difficiles, condition de la survie de l'agriculture dans certains territoires.

Un tel élargissement des objectifs de la politique de l'eau était d'ailleurs demandée dans le rapport de nos collègues Rémy Pointereau et Henri Tandonnet intitulé « Eau : urgence déclarée ».

III. La position de votre commission

Votre rapporteur est en plein accord avec la mise en avant de l'objectif de développement d'ouvrages destinés à gérer la ressource en eau en faveur de l'agriculture.

Cet objectif doit être combiné avec les autres objectifs de la politique de l'eau, ce que prévoit le code de l'environnement. Il n'y a donc aucune raison de remettre en cause la disposition votée par les députés.

Au demeurant, la mise à l'index de l'irrigation constitue un mauvais procès fait à des pratiques qui sont souvent très respectueuses de l'environnement, et assurent le maintien sur le territoire d'une agriculture familiale, bénéfique pour l'entretien de l'espace rural.

Depuis quelques années, de nombreux rapports réclament une évolution, sinon de la législation sur l'eau, au moins de ses conditions d'application, pour mieux concilier les objectifs environnementaux, qui ont été priorisés jusqu'ici, avec les objectifs économiques et notamment de maintien de l'activité agricole, trop négligés.

Cet article va en ce sens et doit être adopté sans modification.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 23
(articles L. 331-3 et L. 333-2 du code de l'environnement)
Création de zones de tranquillité dans les parcs nationaux et renforcement de la prise en compte des spécificités des territoires de montagne dans les parcs naturels régionaux

Objet : cet article permet aux parcs nationaux de créer en leur sein des zones de tranquillité garantissant l'absence de nuisances pour les espèces animales et végétales sauvages ; en outre, les syndicats mixtes d'aménagement des parcs naturels régionaux en zone de montagne se voient attribuer un rôle accru de coordination, puisqu'ils doivent prendre en compte les spécificités de la montagne et contribuer à la mise en cohérence des politiques publiques sur ces territoires.

I. Le droit en vigueur

Le statut des parcs nationaux est défini aux articles L. 331-1 et suivants du code de l'environnement.

Créés par décret, les parcs nationaux sont aujourd'hui au nombre de dix, dont 7 en métropole 25 ( * ) , et 3 outre-mer 26 ( * ) . Une large partie de ces parcs est située en zone de montagne.

Ces parcs sont gérés par l'Agence française de la biodiversité, qui a repris les missions de l'établissement public Parcs nationaux de France.

Le périmètre des parcs est constitué d'une part des zones en « coeur de parc », où il existe des normes strictes visant à protéger le patrimoine naturel, et d'autre part des zones plus périphériques, dénommées « aires d'adhésion » : dans ces zones, les communes peuvent choisir d'adhérer ou de ne pas adhérer au parc national.

Chaque parc dispose d'une charte, établie pour 12 ans, qui définit les objectifs et orientations du parc. Les articles L. 331-4 et L. 331-4-1 prévoient une protection accrue des coeurs de parc avec notamment des interdictions de construction hors zone déjà urbanisée du parc ou encore des prescriptions particulières pour les travaux, constructions et installations. Des interdictions de chasse, de pêche, d'activités commerciales, d'extraction de minéraux, d'utilisation des eaux, de circulation, de survol peuvent également être édictées. Les activités industrielles et minières sont strictement interdites par la loi dans les coeurs de parc.

L'article L. 331-4-1 prévoit aussi que la réglementation du parc national peut, dans le coeur de parc, réglementer l'exercice des activités agricoles, pastorales ou forestières . L'article L. 331-4-2 indique, pour sa part, que des dispositions plus favorables aux résidents des coeurs de parc qui exercent ces activités ou des activités saisonnières peuvent être prévues.

Les parcs naturels régionaux (PNR) présentent moins de contraintes : leur régime juridique est défini par la loi aux articles L. 333-1 et suivants du code de l'environnement. La gestion des PNR est confiée à un syndicat mixte d'aménagement et de gestion et repose sur une charte approuvée par un décret qui définit les objectifs du parc et son périmètre. Ces chartes sont valables elles aussi pour 12 ans. Il existe 51 PNR aujourd'hui, qui couvrent plus de 12 % du territoire national. Près de la moitié des communes classées partiellement ou totalement en montagne font partie d'une PNR et au total, un quart des communes de montagne sont membres d'un PNR.

L'article L. 333-2 du code de l'environnement précise que, pour les PNR situés au moins en partie dans des territoires de montagne, les représentants des parcs siègent dans les instances de gouvernance de la montagne.

II. Le projet de loi initial

L'article 23 vise à renforcer la politique environnementale dans les zones de montagne à travers la création de zones de tranquillité dans les parcs naturels régionaux et les parcs nationaux.

Il poursuit également un objectif de renforcement du rôle des syndicats mixtes d'aménagement des parcs naturels régionaux en matière de mise en cohérence des politiques publiques, visant à une meilleure prise en compte des spécificités de la montagne, dans les parcs naturels régionaux couvrant des territoires de montagne.

Sur le premier point , le projet de loi initial crée un nouvel instrument juridique : la zone de tranquillité. Il prévoit que de telles zones peuvent être créées pour les parcs nationaux situés en zone de montagne ou les parcs naturels régionaux (PNR) situés aussi en zone de montagne. Cette création est facultative.

L'objet de ces zones de tranquillité consiste à garantir la priorité aux espèces animales et végétales sauvages et l'absence de nuisances susceptibles de gêner le libre déroulement des processus écologiques de ces espèces. Ces zones de tranquillité peuvent prévoir la réduction ou l'interdiction de toute exploitation non compatible avec le déroulement des processus écologiques.

Une zone de tranquillité peut donc, potentiellement, interdire toute activité agricole, pastorale, ou forestière, si cette activité perturbe l'équilibre écologique, en zone de montagne, sur le périmètre d'un parc naturel régional ou d'un parc national, de la faune et de la flore sauvage.

Sur le second point , le projet de loi propose que les syndicats mixtes d'aménagement et de gestion des PNR se voient confier par la loi une mission spécifique dans les territoires de montagne, consistant à prendre en compte les spécificités de ces territoires et à mettre en cohérence les différentes politiques publiques. Concrètement, la nouvelle disposition introduite au sein de l'article L. 333-2 du code de l'environnement permet à ces syndicats de dédier des moyens à la coordination des politiques publiques dans les zones de montagne, à mettre en place des réseaux et à les piloter.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Les députés ont conservé la notion de « zones de tranquillité », en restreignant le champ de celles-ci.

En commission, deux amendements ont été adoptés, retouchant légèrement le dispositif initial :

- un amendement des rapporteures, Mmes Annie Genevard et Bernadette Laclais, visant à remplacer l'objectif de priorité aux espèces végétales et animales sauvages par un objectif de préservation de celles-ci .

- un autre amendement de Mme Béastrice Santais, rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, a conservé la notion de zones de tranquillité dans les parcs naturels régionaux , en amoindrissant la portée de ce zonage pour les autres activités : alors que dans les parcs nationaux, ces zones, définies par les chartes, se caractérisent par l'absence de nuisance pour la faune et la flore sauvages, dans les parcs naturels régionaux, ces zones seraient des zones de nuisances limitées, et devraient permettre le développement des différentes activités en zone de montagne, y compris les activités économiques.

En séance, les députés ont trouvé un nouvel équilibre à l'article 23 en supprimant purement et simplement la disposition prévoyant la création de zones de tranquillité dans les territoires de montagne situés dans le périmètre des parcs naturels régionaux, à travers trois amendements identiques des rapporteures, de M. Philippe Folliot et de Mme Jeanine Dubié.

Plusieurs arguments plaidaient en faveur d'une telle suppression :

- d'abord, le code de l'environnement permet déjà , dans les chartes, de préserver les espèces sauvages par une série de mesures, pouvant aller jusqu'à l'interdiction de certaines activités, à condition que de telles restrictions soient justifiées ;

- ensuite, imposer les mêmes contraintes pour les PNR que pour les parcs nationaux paraissait excessif , dans la mesure où les PNR sont plutôt des espaces de concertation entre acteurs, et notamment avec les collectivités territoriales, en vue d'une démarche plutôt contractuelle et non des espaces où sont mises en place des règlementations environnementales très restrictives ;

- enfin, la sanctuarisation de l'environnement au détriment des activités agricoles, pastorales et forestières est apparue comme excessive , susceptible de produire des effets néfastes : fermeture d'espaces agricoles en montagne, enfrichement, fin de l'occupation humaine du territoire.

IV. La position de votre commission

Si les instruments à disposition des parcs nationaux pour préserver les espaces naturels existent déjà pour préserver la faune et la flore sauvages, on peut s'interroger sur l'opportunité de créer un nouveau zonage, dont l'objectif est bien d'interdire toute activité dans le périmètre des parcs.

La rédaction retenue est en effet très explicite : il s'agit avec ces zones de tranquillité de garantir l'absence de nuisance pour la faune et la flore sauvages. Cette absence de nuisance ne peut avoir que pour conséquence une interdiction des activités agricoles, pastorales ou forestières.

L'article L. 331-4-1 du code de l'environnement permet déjà dans les coeurs de parc qu'une réglementation des activités agricoles, pastorales et forestières peut être édictée. L'interdiction n'est donc qu'une mesure en dernière extrémité.

Les zones de tranquillité vont donc beaucoup plus loin, en mettant en place, d'emblée, des zones où tout peut être interdit.

Or, la sanctuarisation d'espaces n'est sans doute pas la meilleure solution pour les zones de montagne : la protection des espèces sauvages ne doit pas faire obstacle aux activités pastorales, agricoles ou forestières, qui peuvent même contribuer à la biodiversité.

Il serait regrettable qu'en conséquence de la création de telles zones, des bergers devaient cesser d'utiliser des pâtures situées dans des parcs nationaux.

Votre rapporteur a hésité entre deux solutions :

- celle consistant à supprimer purement et simplement les zones de tranquillité, dès lors qu'il existe d'autres outils qui permettent d'assurer la protection des espèces sauvages dans les parcs nationaux ;

- celle consistant à préciser que la création de telles zones de tranquillité ne peut faire obstacle à l'existence ou au maintien d'activités agricoles, pastorales ou forestières .

C'est la seconde solution, plus souple, qui a été privilégiée, à travers un amendement COM-230 proposé par votre rapporteur .

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article dans la rédaction issue de ses travaux.


* 2 Directive 95/43/CEE.

* 3 Données DREAL Auvergne-Rhône-Alpes.

* 4 Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

* 5 Comme le soulignait une proposition de résolution de notre collègue Colette Mélot : proposition de résolution européenne présentée au nom de la commission des affaires européennes (1), en application de l'article 73 quater du Règlement, sur les voyages à forfait et les prestations de voyage assistées (COM (2013) 512)

* 6 Considérant 4 de la directive 2015/2302 du 25 novembre 2015

* 7 Considérant 6 de la même directive

* 8 Résolution européenne du 4 mars 2014 sur les voyages à forfait et les prestations de voyage assistées [COM (2013) 512 final]

* 9 Considérant 5

* 10 Selon les termes du considérant 19 de la directive

* 11 La loi n° 2006-437 du 14 avril 2006 portant diverses dispositions relatives au tourisme a permis d'étendre aux départements et aux syndicats mixtes cette possibilité.

* 12 Les notions d'aménagement et d'équipement des pistes de ski, introduites par la loi Urbanisme et habitat du 2 juillet 2003 recouvrent les installations de production ou de dispersion de neige de culture liées à ces pistes.

* 13 C'est la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux qui a ajouté la mention des sites nordiques.

* 14 Il s'agit d'un ajout de la loi de 2006.

* 15 Article 68 de la loi NOTRe

* 16 L'article 64 de la loi NOTRe modifie l'article L. 5214-16 du code pour les communautés de communes, et l'article 66 modifie l'article L. 5216-5 pour les communautés d'agglomération.

* 17 S'agissant des communautés urbaines, l'article 71 modifiait en ce sens les articles L. 5215-20 et L. 5215-20-1 du code général des collectivités territoriales. Quant aux métropoles, l'article 43 modifiait en ce sens l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales - pour le droit commun des métropoles - et l'article 26 inscrivait une disposition similaire à l'article L. 3641-1 du même code - pour la métropole de Lyon.

* 18 Article 68 de la loi NOTRe

* 19 La loi NOTRe renvoie aux procédures de transfert de compétences régies par les articles L. 5211-17 et L. 5211-20 du code général des collectivités territoriales.

* 20 Idem

* 21 Article L. 133-1 du code du tourisme tel que modifié par l'article 68 de la loi NOTRe.

* 22 Idem

* 23 Article R. 133-19 du code du tourisme

* 24 Les articles L. 2333-81 à L. 2333-83 reproduits aux articles L. 422-8 et L. 422-9 du code du tourisme, relatifs à la redevance fixée par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent, et l'article L. 5722-5 relatif à la redevance fixée par un syndicat mixte.

* 25 Parc national de la Vanoise, Parc national de Port-Cros, Parc national des Pyrénées, Parc national des Cévennes, Parc national des Écrins, Parc national du Mercantour, Parc national des Calanques.

* 26 Parc national de la Guadeloupe, Parc national de Guyane et Parc national de La Réunion.

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