III. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉS DE VOYAGEURS »

A. L'ÉVOLUTION DE L'OFFRE DES TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE

Depuis 2011, l'État est l'autorité organisatrice des trains d'équilibre du territoire, qui désignent les services nationaux de transport conventionnés de voyageurs assurés par les trains Corail et Intercités. En conséquence, il en définit la consistance et verse à SNCF Mobilités une subvention pour couvrir le déficit d'exploitation. Ces éléments sont définis dans une convention conclue entre l'État et l'opérateur de transport . La première convention, signée en 2010 pour trois ans (2011-2013), a été prorogée à deux reprises, jusqu'au 31 décembre 2015.

Ces services ont fait l'objet de nombreuses critiques ces dernières années. L'offre proposée, héritée de l'histoire et non définie en fonction des besoins, apparaissait inadaptée et souffrait d'une absence de coordination avec l'offre proposée par les régions dans le cadre du transport express régional (TER). Le matériel roulant vieillissant - âgé de plus de 35 ans en moyenne - ainsi que la qualité du service rendu ont également détourné nombre de voyageurs de ce mode de transport, qui a subi une baisse de fréquentation notable. Aujourd'hui, le taux de remplissage de ces trains est de 33 %.

Les carences du pilotage de cette offre par l'État ont notamment été soulignées par la Cour des comptes dans son rapport particulier de juillet 2014 sur les trains d'équilibre du territoire, rendu public le 13 février 2015.

En conséquence, l'État a entamé un travail de redéfinition de cette offre. En novembre 2014, une commission sur « l'avenir des trains d'équilibre du territoire », présidée par Philippe Duron et composée de parlementaires, d'élus régionaux et de personnalités qualifiées, a été créée à cet effet. Elle a remis ses conclusions le 25 mai 2015, en soulignant elle aussi la nécessité d'un exercice effectif, par l'État, de son rôle d'autorité organisatrice.

Une mission de concertation avec les régions a ensuite été confiée au préfet François Philizot, pour discuter des évolutions de desserte à mettre en oeuvre en articulation avec les services de TER.

Ces travaux ont abouti à l'élaboration d'une nouvelle stratégie pour les trains d'équilibre du territoire , et à une redéfinition de l'offre . L'État a conservé six lignes structurantes, dont trois érigées en lignes « à haute performance », dans son giron 15 ( * ) , ainsi que deux lignes de nuit 16 ( * ) . Les autres lignes de nuit ont été supprimées.

Pour les autres lignes de jour, l'État a conclu six accords prévoyant la reprise par les régions de nombreux services de TET d'intérêt régional ou local , en contrepartie d'une participation de l'État au renouvellement des matériels roulants, à leur entretien, ou à la couverture de leur déficit d'exploitation .

CONTENU DES ACCORDS CONCLUS ENTRE L'ÉTAT ET LES RÉGIONS SUR LA REPRISE DES TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE

Région Normandie

La région récupérera les cinq lignes de TET desservant la Normandie (Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville, Paris-Rouen-Le Havre, Paris-Evreux-Serquigny, Caen-Le Mans-Tours, Paris-Granville) le 1 er janvier 2020. En contrepartie, l'Afitf doit financer le renouvellement du matériel roulant des lignes Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville et Paris-Rouen-Le Havre pour 720 millions d'euros. La région reverse quant à elle 70 millions d'euros à l'Afitf correspondant à deux années de déficit des lignes reprises. Une convention de financement entre l'État, l'Afitf et la région a été conclue en novembre 2016 en application de cet accord. La commande des nouvelles rames a, depuis, été passée à Bombardier.

Régions Grand-Est, Bourgogne-Franche-Comté et le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif)

La région Grand Est a repris les lignes Hirson-Metz et Reims-Dijon le 1 er janvier 2017 et récupérera la ligne Paris-Troyes-Belfort le 1 er janvier 2018. En contrepartie, l'État finance via l'Afitf l'acquisition de 19 rames Coradia Liner Alstom pour la ligne Paris-Troyes-Belfort et participe à ses coûts de fonctionnement à hauteur de 13 millions d'euros par an. La région Bourgogne-Franche-Comté et le Stif se sont engagés à appuyer la région Grand Est dans son rôle d'autorité organisatrice de ces lignes.

Région Nouvelle-Aquitaine

La région reprendra les services Bordeaux-La Rochelle, Bordeaux-Limoges et Bordeaux-Ussel le 1 er janvier 2018. L'État doit financer en contrepartie, par l'Afitf, cinq rames Régiolis Alstom, et participer aux coûts de fonctionnement de ces services à hauteur de 6,7 millions d'euros par an en 2018 et 2019, et de 5 millions d'euros par an en 2020, 2021 et 2022.

Région Occitanie

La région reprendra la ligne Clermont-Ferrand-Nîmes (dite du Cévenol) le 1 er janvier 2018, et la ligne Clermont-Ferrand-Béziers, dite de l'Aubrac, fera l'objet d'une cogestion par l'État et la région en 2017 et 2018, avec cofinancement. En contrepartie, l'État finance, par l'Afitf, l'acquisition de trois rames Coradia Liner Alstom pour le Cévenol, et participe aux coûts de fonctionnement de cette ligne à hauteur de 4,5 millions d'euros par an entre 2018 et 2022.

Région Hauts-de-France

La région reprendra les lignes Paris-Amiens-Boulogne et Paris-Saint-Quentin-Maubeuge/Cambrai le 1 er janvier 2019. En contrepartie, l'État doit financer via l'Afitf le renouvellement du matériel roulant de ces lignes, avec d'une part l'acquisition de 10 rames de type Régiolis Alstom, et d'autre part le versement à la région de 250 millions d'euros destinés notamment à l'acquisition de matériels à deux niveaux. L'État doit également participer aux coûts de fonctionnement des lignes reprises à hauteur de 15 millions d'euros par an.

Région Centre-Val de Loire

La région reprendra les lignes Paris-Orléans-Tours, Paris-Bourges-Montluçon et Paris-Montargis-Nevers le 1 er janvier 2018. En contrepartie, l'État doit financer, par l'Afitf, le renouvellement du matériel roulant de ces lignes, avec d'une part l'acquisition de trois rames Régiolis Alstom, et d'autre part les versements à la Région de 480 millions d'euros destinés principalement à l'acquisition de matériels à deux niveaux. L'État doit également participer aux coûts de fonctionnement des lignes reprises à hauteur de 49 millions d'euros par an en 2018 et 2019, 39,2 millions en 2020, 34,3 millions en 2021 et 24,5 millions par an à compter de 2022.

Source : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

Des incertitudes ont pesé sur le financement du renouvellement des matériels roulants promis par l'État dans les régions Centre-Val de Loire (soit 480 millions d'euros) et Hauts-de-France (soit 250 millions d'euros). Quelques jours avant la présentation de son avis, votre rapporteur avait obtenu un document du ministère indiquant que la confirmation précise de ces opérations de renouvellement « dépendra[it] toutefois des financements mobilisables sur le budget de l'Afitf. »

Ces incertitudes ont été levées par un engagement de la Ministre chargée des transports lors de son audition devant votre commission , en réponse à une question de votre rapporteur. La Ministre a précisé que les conventions relatives au renouvellement des matériels roulants dans ces deux régions seraient soumises au conseil d'administration de l'Afitf au début de l'année 2018.

L'État a également signé, le 27 février 2017, une nouvelle convention avec SNCF Mobilités pour l'exploitation des trains d'équilibre du territoire, couvrant la période 2016-2020.

En parallèle, l'État a poursuivi sa politique de renouvellement des matériels roulants engagée en 2013 :

- en application d'un accord conclu en décembre 2013, 34 nouvelles rames Coradia Liner, d'un montant total de 510 millions d'euros, ont été financées par l'Afitf et sont en cours de déploiement sur les lignes Paris-Troyes-Belfort, Nantes-Bordeaux et Nantes-Lyon ;

- en application d'un accord conclu en février 2017, 30 autres rames Alstom, d'un montant de 362 millions d'euros, doivent être financées par l'Afitf et livrées entre 2018 et 2019 sur les lignes Paris-Boulogne, Toulouse-Hendaye, Bordeaux-La Rochelle, Bordeaux-Limoges, Bordeaux-Ussel, le Cévenol et la desserte de Montluçon ;

- en application d'un accord conclu en avril 2016 avec la région Normandie, une quarantaine de rames Omneo Premium de Bombardier, d'un montant de 720 millions d'euros, doivent être livrées entre 2019 et 2021 sur les lignes Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville et Paris-Rouen-Le Havre, avec une participation de la région de 70 millions d'euros.


* 15 Les trois lignes à haute performance sont les suivantes : Paris-Orléans-Limoges-Toulouse ; Paris-Clermont-Ferrand ; Bordeaux-Toulouse-Marseille. Les autres lignes restant gérées par l'État sont : Nantes-Bordeaux, Toulouse-Hendaye et Nantes-Lyon. Pour une vision globale de l'évolution de l'offre des trains d'équilibre du territoire, cf. supra, annexe I.

* 16 Paris-Briançon et Paris-Rodez/Latour de Carol.

Page mise à jour le

Partager cette page