AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Déposé le 15 novembre 2017 à l'Assemblée nationale, le projet de loi relatif à l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 transmis au Sénat le 21 décembre 2017, comporte désormais 29 articles.

L'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques qui se dérouleront en 2024 à Paris suppose des adaptations juridiques pour permettre à la France de respecter les engagements pris dans son dossier de candidature. En lien avec ces objectifs, le présent texte porte sur des dispositions très diverses, en matière d'aménagement du territoire, d'environnement, de sécurité et d'urbanisme.

Votre commission a reçu une délégation au fond de la commission des lois pour quatre articles relatifs aux transports , ajoutés en séance publique à l'Assemblée nationale, pour trois d'entre eux à l'initiative du Gouvernement (articles 13 bis A à 13 bis C) et pour l'un à l'initiative de la commission des affaires culturelles et de l'éducation (13 bis D).

Votre commission s'est également saisie pour avis de l' article 6 du projet de loi, qui prévoit un allégement des procédures de participation du public pour les projets, plans et programmes nécessaires au déroulement des Jeux.

Au-delà de leurs aspects techniques, les articles que notre commission a examinés visent à accompagner l'organisation par la France des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024, sur le volet transport-mobilité.

La France doit se montrer à la hauteur tant de sa réputation que des engagements qu'elle a pris pour l'accueil des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024.

C'est à la lumière de ces impératifs que votre commission a examiné ce texte, lors de sa réunion du 30 janvier 2018.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE CONTENU DU PROJET DE LOI

A. CDG EXPRESS : UN PROJET ESSENTIEL EN COURS DE FINALISATION DANS LA PERSPECTIVE DES JEUX OLYMPIQUES ET PARALYMPIQUES

1. Un projet d'intérêt général indispensable

Le projet « Charles de Gaulle Express » ou « CDG Express » vise à réaliser une infrastructure ferroviaire adaptée aux besoins des passagers aériens, entre Paris et l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle. La plupart des grandes villes européennes et mondiales, comme Londres, Oslo, Stockholm, Hong-Kong ou encore Tokyo, disposent d'une liaison ferroviaire express entre leur centre-ville et leurs aéroports.

Or, à l'heure actuelle, la desserte du principal aéroport parisien et neuvième aéroport du monde pour le nombre de passagers aériens, n'est pas au niveau des grandes capitales européennes. Cette situation a des conséquences négatives sur la première impression des passagers aériens, en particulier étrangers, qui arrivent dans notre pays pour voyage d'affaires ou de tourisme. Le trafic des autoroutes A1 et A3 est l'un des plus encombrés d'Île-de-France et le temps pour rejoindre l'aéroport CDG depuis la capitale oscille entre 30 minutes et 2 heures. Les cars dédiés à la desserte de l'aéroport sont, dans une moindre mesure, tributaires de ces encombrements et le temps de trajet est généralement supérieur à 1 heure. Les taxis font face aux mêmes difficultés, à un coût nettement supérieur compris entre 50 et 55 euros au prix du forfait « rive droite » ou « rive gauche ». Enfin, le RER B (870 000 voyageurs par jour), outre les perturbations occasionnelles qu'il connaît, ne semble pas non plus adapté pour répondre aux besoins des passagers aériens, du fait de l'insuffisance des équipements et services qu'il leur offre.

Dès lors, le projet CDG Express présente des avantages incontestables au regard de l'offre de transports existante. Il vise, en effet, à instituer une desserte quotidienne de l'aéroport, tous les quarts d'heure depuis la gare de l'Est, de 5 h à minuit et pour un temps de parcours de 20 minutes .

Le tracé du CDG Express s'étend sur trente-deux kilomètres : vingt-quatre kilomètres de voies existantes auxquels s'ajouteront huit kilomètres de voies nouvelles entre Mitry-Mory et l'aéroport, dont quatre nouveaux ponts et un tunnel sous les pistes. Le trafic attendu est estimé à 7 millions de passagers par an, voire plus de 9 millions en 2050, compte tenu d'une croissance du trafic aérien estimée à environ 5 % par an à Roissy-Charles-de-Gaulle.

Source : Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM).

Au-delà de son coût financier, qui devrait atteindre in fine près de 2 milliards d'euros après plusieurs réévaluations et constitutions de provisions pour trésorerie 1 ( * ) , le CDG Express présente de nombreux avantages.

En premier lieu, il contribue à la politique de report modal en augmentant sensiblement la part du ferroviaire dans la desserte de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle. La part du mode routier dans la desserte de l'aéroport, actuellement de 56 %, devrait donc baisser, de même que les émissions de gaz à effet de serre et les nuisances sonores liées à la congestion des autoroutes A1 et A3. En outre, son empreinte environnementale est limitée car il utilise 75 % de voies existantes.

En second lieu, le CDG Express conforte le RER B dans sa vocation de transport collectif régional du quotidien. Le transport vers l'aéroport par le RER B est aujourd'hui difficile et les services ne correspondent pas à ce que les passagers aériens attendent d'une telle liaison (zones d'accueil dédiées, espace bagages, informations pratiques et touristiques, accès WIFI par exemple). Le CDG Express s'inscrit ainsi en complémentarité des autres réseaux de transport d'Île-de-France existants ou en projet.

Enfin, en proposant des conditions de transport idéales aux passagers aériens, le CDG Express renforce l'attractivité de Paris et de sa région, qui figurent parmi les espaces les plus visités au monde en 2017. Il permettra d'absorber la croissance anticipée du trafic aérien, qui devrait atteindre 80 millions de passagers en 2025 pour Roissy-Charles-de-Gaulle (65 millions à l'heure actuelle).

Le prix du billet pourrait coûter 24 euros, aux conditions économiques de 2023, ce qui situe le CDG Express dans la moyenne des autres lignes ferroviaires express de ce type. Le prix pour Londres Heathrow est de 28,10 euros en valeur 2023, à comparer aux 30,20 euros de Stockholm et aux 24,10 euros d'Oslo 2 ( * ) .

2. L'historique du projet

L'idée d'une telle liaison est ancienne : dès le début des années 2000 ont eu lieu les premières concertations préalables sur la base d'un projet de tracé de CDG Express (de septembre 2001 à février 2002), suivies d'un débat public (d'août à décembre 2003).

Une enquête publique s'est déroulée du 19 novembre au 21 décembre 2007 dans les quinze communes concernées. Sur la base du rapport rendu le 18 avril 2008 par la commission d'enquête, l'arrêté interpréfectoral n° 2008/2250 du 19 décembre 2008 a déclaré d'utilité publique, au profit de l'État, les travaux et aménagements nécessaires à la réalisation de la liaison. Cet arrêté a emporté la mise en compatibilité des dispositions des plans locaux d'urbanisme de Paris (75) et de Mitry-Mory (77) et des plans d'occupation des sols du Bourget (93) et de Tremblay-en-France (93).

Cette déclaration d'utilité publique a fait l'objet d'une prorogation 3 ( * ) pour une durée de cinq ans à compter du 18 décembre 2013, soit une durée égale à la durée initiale de la déclaration d'utilité publique.

Les modifications apportées au projet depuis 2008, en particulier relatives au montage juridique qui sépare la réalisation-exploitation de l'infrastructure et l'exploitation du service de transport 4 ( * ) , ont été présentées au public en 2016 afin de confirmer l'utilité publique du projet. Une enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique modificative du projet CDG Express a été organisée du 8 juin au 12 juillet 2016. Elle s'est déroulée sur le territoire des communes de Paris (10 ème et 18 ème arrondissements), Aubervilliers, Aulnay-sous-Bois, Drancy, La Courneuve, Le Blanc-Mesnil, Le Bourget, Saint-Denis, Sevran, Tremblay-en-France, Le Mesnil-Amelot, Mitry-Mory, Villeparisis et Villepinte, ainsi que dans les services des préfectures de Paris, Saint-Denis et de Seine-et-Marne.

La commission d'enquête a rendu, le 29 septembre 2016, un avis favorable au projet, assorti de deux réserves et trois recommandations. Les réponses apportées par les maîtres d'ouvrage sur ces points ont permis de lever les réserves. L'utilité du projet étant confirmée, l'arrêté inter-préfectoral 75-2017-03-31-010 de déclaration d'utilité publique modificative du projet CDG Express a été signé le 31 mars 2017.

3. Les principales caractéristiques du projet arrêtées en 2013 : un montage juridique et financier complexe

Après l'échec, en 2011, d'un premier projet de concession confiant la réalisation et l'exploitation de l'infrastructure à un groupement conduit par Vinci, un nouveau montage a été prévu par l'État.

Ce montage est défini par l'accord interministériel de décembre 2013, confirmé par la loi n° 2016-1887 du 28 décembre 2016 relative à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle, qui ratifie l'ordonnance n° 2016-157 du 18 février 2016 prise sur le fondement de l'article 8 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Pour la construction de l'infrastructure, une concession de travaux est attribuée, sans mise en concurrence, à une société de projet détenue majoritairement par SNCF Réseau et Aéroports de Paris (ADP), dont une part minoritaire du capital peut être ouverte aux tiers aux termes de l'article L. 2111-3 du code des transports. À ce titre, la Caisse des Dépôts et Consignations devrait participer au capital de cette société. Cette société de projet assume les missions de conception, financement, réalisation et exploitation de l'infrastructure.

Ces missions, incluant la maîtrise d'ouvrage, sont réparties par tronçons entre SNCF Réseau, ADP et SNCF Mobilités. SNCF Réseau effectue l'aménagement des sections existantes, l'installation et la maintenance des équipements ferroviaires sur l'ensemble de l'infrastructure. ADP assure l'aménagement et la maintenance de la partie de la section nouvelle située dans l'emprise de l'aéroport Paris-Charles de Gaulle et des volumes qui lui appartiennent dans la gare de l'aéroport. Enfin, SNCF Mobilités s'occupe de l'aménagement de la gare de l'Est et des volumes qui lui appartiennent dans la gare de l'aéroport.

Chaque entité peut confier tout ou partie des travaux à un ou plusieurs opérateurs économiques, en dérogeant aux règles de publicité et de mise en concurrence, conformément à ce que prévoit l'article 5 de l'ordonnance précitée du 18 février 2016.

La gestion de l'infrastructure fait l'objet d'une convention entre SNCF Réseau et la société de projet pour la répartition des capacités et du produit des péages. SNCF Réseau, déjà gestionnaire d'infrastructure du réseau ferré national, intervient pour la gestion des 24 kilomètres de voies existantes, tandis que la société de projet assure la gestion des 8 kilomètres de voies nouvelles.

La société de projet percevra les redevances d'utilisation versées par le futur exploitant. Néanmoins, les études de billetterie ayant montré que ces ressources seraient insuffisantes au regard des coûts supportés par le concessionnaire des travaux, une taxe sur les passagers aériens a été instituée en loi de finances rectificative pour 2016 et plafonnée à 1,40 euro par passager embarqué ou débarqué.

En outre, une dérogation à la règle d'or de SNCF Réseau, prévue par l'article L. 2111-10-1 du code des transports, a été introduite par la loi précitée du 28 décembre 2016 pour permettre à SNCF Réseau de participer au projet en fonds propres. À l'heure actuelle, le modèle financier de la société de projet est en cours de finalisation mais les échanges avec les sociétés concernées ont permis de confirmer que le montant total des fonds propres à apporter équitablement par les trois actionnaires devrait être de l'ordre de 400 millions d'euros, en complément de la dette contractée auprès de l'État (1,7 milliard d'euros), prévue dans un compte de concours financiers en loi de finances pour 2018 5 ( * ) .

Pour l'exploitation du service de transport de personnes, aux termes de l'article L. 2111-3-1 du code des transports, un contrat de service est attribué par l'État à un opérateur, dans le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence.

La validité de ce montage a été confirmée par la Commission européenne par courrier en date du 6 novembre 2015 puis dans un communiqué du 26 juin 2017, qui relève que le projet « permettra de mieux coordonner différents modes de transport, conformément aux objectifs de la politique des transports de l'UE ».

La désignation de l'exploitant du service de transport devrait intervenir courant 2018. Les services de l'État travaillent actuellement sur les critères de sélection des offres.

Dans ce contexte, les articles 13 bis A et 13 bis B du présent projet de loi, introduits par le Gouvernement en séance publique à l'Assemblée nationale, visent à conforter et sécuriser le montage retenu en 2013. Le Gouvernement a, en effet, jugé nécessaire de préciser l'articulation de ces dispositions dérogatoires avec le droit des concessions issu de l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016.


* 1 Initialement estimé à 600 millions d'euros aux conditions économiques de 2007, soit 760 millions d'euros aux conditions économiques de janvier 2014, le coût de l'infrastructure a ensuite été porté à 1,4 milliard d'euros aux conditions économiques de 2014 puis 1,7 milliard d'euros en 2016, auxquels s'ajoutent 300 millions d'euros de constitution de trésorerie. (Rapport n° 77 (2016-2017) de M. Louis Nègre fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable).

* 2 Source : Direction générale de l'aviation civile.

* 3 Arrêté inter-préfectoral n° 2013336-0013 du 2 décembre 2013.

* 4 Ces modifications ont été entérinées par la loi n° 2016-1887 du 28 décembre 2016 relative à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle, qui ratifie l'ordonnance n° 2016-157 du 18 février prise sur le fondement de l'article 8 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 5 Article 54 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017.

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