Avis n° 149 (2018-2019) de MM. Ladislas PONIATOWSKI et Bernard CAZEAU , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 22 novembre 2018

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N° 149

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2018

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , pour 2019 ,

TOME I

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT :
ACTION DE LA FRANCE EN EUROPE ET DANS LE MONDE

Par MM. Ladislas PONIATOWSKI et Bernard CAZEAU,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon , président ; MM. Pascal Allizard, Bernard Cazeau, M. Robert del Picchia, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Cédric Perrin, Gilbert Roger , Jean-Marc Todeschini, vice-présidents ; M. Olivier Cigolotti, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, M. Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont , secrétaires ; MM. Jean-Marie Bockel, Gilbert Bouchet, Michel Boutant, Olivier Cadic, Alain Cazabonne, Pierre Charon, Mme Hélène Conway-Mouret, MM. Édouard Courtial, René Danesi, Jean-Paul Émorine, Bernard Fournier, Jean-Pierre Grand, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Jean-Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Rachel Mazuir, François Patriat, MM. Gérard Poadja, Ladislas Poniatowski, Mmes Christine Prunaud, Isabelle Raimond-Pavero, MM. Stéphane Ravier, Hugues Saury, Bruno Sido, Rachid Temal, Raymond Vall, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Jean-Pierre Vial, Richard Yung .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 1255 , 1285 , 1288 , 1302 à 1307 , 1357 et T.A. 189

Sénat : 146 et 147 à 153 (2018-2019)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS POUR AVIS

1. - Sur les 2,9 milliards de CP de la mission « Action extérieure de l'État », avec 1,7 milliard d'euros, le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » est le coeur du budget du ministère . Les crédits de la mission diminuent de 4,8 %, malgré la hausse des crédits du programme 347 « Présidence française du G7 » . Dans le même temps, les crédits de l'aide publique au développement augmentent à un rythme soutenu, soit 280 millions d'euros supplémentaires.

Les dépenses contraintes représentent plus de 40 % des crédits du programme, la capacité de pilotage politique de la mission est donc très réduite. En réponse aux observations de la Cour des comptes, le ministère « indique que la marge de manoeuvre pour le pilotage [de la mission] joue essentiellement sur les économies de constatation et la reprogrammation ». La réforme prévue est donc une manière de retrouver une marge de gestion.

2. - L'année 2019 est ainsi marquée par la réorganisation des modes de gestion des réseaux de l'État à l'étranger -et non seulement des réseaux du seul ministère des affaires étrangères-, première étape d'une réforme plus large supposée placer les ambassadeurs en capacité de piloter l'ensemble des réseaux de l'État à l'étranger. La mutualisation prévue sur 4 ans, de 2019 à 2022, se traduit dès 2019 par le transfert au P105 de 387 ETP versés au Quai d'Orsay, 15 millions d'euros de frais de fonctionnement et 215 biens immobiliers . Le PLF 2019 prévoit également une économie de masse salariale de 13 millions d'euros et de 130 ETP . Cela ne pourra pas se faire à périmètre de missions constant et votre commission, inquiète des potentielles répercussions sur le rayonnement et l'influence françaises à l'étranger, sera attentive à ce que tous les ministères concernés participent sincèrement à l'effort de diminution de la masse salariale.

Dans le même temps le Royaume-Uni et l'Allemagne font au contraire le chemin inverse, développant leurs réseaux diplomatiques, augmentant leur budget et leurs effectifs. Il ne s'agit pas de s'opposer à la réduction de la masse salariale mais bien de veiller à préserver le pouvoir d'influence de la France , alors que semble peu à peu s'imposer l'idée, fausse , que l'on peut avoir un réseau diplomatique universel, une politique étrangère efficace, capable notamment d'assurer ses nouvelles fonctions de diplomatie économique, avec un service diplomatique plus faible.

3. - Les contributions internationales obligatoires et les opérations de maintien de la paix (CIOMP) dues par notre pays, soit 38,5 % du programme 105, diminuent de 73,8 millions d'euros (sur un montant total de 683,8 millions d'euros), soit 9,7 % . Cette évolution que votre commission appelle de ses voeux chaque année s'explique principalement par la forte diminution des crédits dédiés aux opérations de maintien de la paix (OMP) , un gain au change, et la poursuite de l'ajustement à la baisse du barème des contributions de la France du fait de la baisse relative de son poids économique . Il s'agit d'économies de constatation , qui témoignent de la perte de poids économique de la France qui recule au classement économique international.

4.- Dans le même temps, les efforts en faveur de la sécurité au sens large se poursuivent, mais leur financement soulève de nombreuses interrogations . Vos rapporteurs pour avis se félicitent de la stabilisation des crédits de la coopération de défense et de sécurité, à un étiage bas, depuis toujours une priorité de la commission. Il s'agit là d'un rééquilibrage, essentiel à la cohérence de la politique française étrangère. Ils veilleront au maintien à un niveau satisfaisant des crédits alloués à cette politique au fort effet de levier et appellent à ce que la loi d'orientation et de programmation de l'aide publique au développement permette d'assurer le financement du continuum entre la sécurité et le développement .

En 2019, les crédits budgétaires dédiés à la sécurisation des emprises françaises à l'étranger, diminuent passant de 75 à 44 millions d'euros. Cette réduction de crédits est compensée par une avance de 100 millions d'euros sur deux ans du compte d'affectation spéciale « gestion du patrimoine immobilier de l'État » 723. Votre commission souhaite la définition d'un programme d'investissement à hauteur des besoins de financement et la réforme des dépenses éligibles au CAS . Elle veillera à ce que le MEAE garde toute latitude et indépendance pour définir le programme de cessions dont le produit remboursera l'avance .

5.- Vos rapporteurs pour avis jugent critiquable le modèle de gestion immobilière qui fait dépendre l'entretien normal des bâtiments des recettes exceptionnelles de cessions d'immeubles . Elle repose sur un modèle économique non vertueux et en voie d'essoufflement dans la mesure où les produits de cession diminuent d'année en année, les ventes « faciles » ayant déjà été réalisées. A minima, cette gestion doit viser la rationalisation des implantations, leur mutualisation avec nos partenaires européens, sans envolée des coûts , et le renforcement du rayonnement de notre pays.

Le besoin de financement pour l'entretien des bâtiments à l'étranger, qui donne lieu à une budgétisation à hauteur de 12 millions d'euros sur le P105, reste insuffisant face au besoin certes mal connu, mais probablement compris entre 40 millions et 80 millions d'euros par an . Vos rapporteurs pour avis souhaitent que le ministère établisse ou mette à jour des plans de programmation pluriannuelle des cessions immobilières à l'étranger et des travaux de restructuration et d'entretien lourd .

Sous le bénéfice de ces observations, vos rapporteurs pour avis émettent un avis favorable sur les crédits inscrits dans le PLF 2019 pour le programme 105.

À l'issue de sa réunion du 14 novembre, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'État ».

* C'est également l'objet du deuxième amendement qui a été adopté et réduit de 3,1 millions d'euros les crédits destinés à une réunion ministérielle « affaires étrangères » du G7 sur l'action 2 « Action de la France en Europe et dans le monde ».

Mesdames, Messieurs,

Au sein de la mission « Action extérieure de l'État », le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » était jusqu'ici le coeur du budget du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE), portant plus de la moitié des emplois du Quai d'Orsay mais aussi l'intégralité du réseau diplomatique français qui est le 3 e dans le monde. Sa nette diminution, à mettre en perspective avec l'augmentation des crédits de l'aide au développement publique, pose la question de la place que nous souhaitons pour la France dans le monde.

La structure du programme est particulière, partageant le programme entre les dépenses contraintes et les dépenses pilotables qui représentent moins d'un quart des crédits du programme. Dans ce contexte, la capacité de pilotage du ministère a souvent été interrogée. L'année 2019 sera caractérisée par la mise en oeuvre de la réorganisation des réseaux de l'État à l'étranger, première étape d'une réforme plaçant les ambassadeurs en capacité de piloter l'ensemble des réseaux. Cette mutation en cours fera l'objet d'un suivi très attentif de votre commission.

Le ministère n'a, par définition, que peu de prise sur les dépenses contraintes. Cette année, la réduction de 9,7 % des contributions obligatoires organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix (CIOMP) est une économie de constatation découlant de la diminution du budget des OMP, d'un gain au change et de la poursuite des ajustements à la baisse du barème des CI, témoin de la réduction du poids économique de la France, qui nous interroge encore sur le rayonnement de notre pays.

Enfin, si la stabilisation des crédits dédiés à la sécurisation au sens large se poursuit, les modalités du financement du plan de sécurisation des emprises à l'étranger feront l'objet de toutes les attentions. Le remboursement par des produits de cessions ne doit pas avoir pour effet de contraindre le MEAE à céder certaines emprises à l'étranger pour rembourser l'avance consentie. En effet, la politique d'implantation à l'étranger de l'État ne doit en aucun cas dépendre d'abord de considérations économiques. Au contraire, les enjeux d'influence et de rayonnement doivent rester l'élément central des décisions prises dans ce domaine.

Cette remarque vaut également pour la politique immobilière du ministère, qui en voie d'essoufflement, soulève toujours de réelles inquiétudes. La sous-budgétisation des crédits nécessaires à l'entretien lourd des emprises et l'épuisement des ressources liées aux cessions des emprises à l'étranger conduisent le ministère à laisser se dégrader, contre son gré, faute de crédits d'entretien, le patrimoine de l'État dont il a la charge. Vos rapporteurs pour avis souhaitent à nouveau attirer l'attention du gouvernement sur ce sujet.

I. UN BUDGET DU P105 EN NETTE DIMINUTION

Le budget du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » diminue nettement alors que les crédits du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères augmentent de 3,2 % par rapport à la loi de finances initiales pour 2018 pour atteindre 4,891 milliards d'euros , soit une progression de 151 millions d'euros .

A. LA CONTRACTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 105 ET DE LA MISSION BUDGÉTAIRE DANS UN CONTEXTE D'AUGMENTATION DES CRÉDITS DU MINISTÈRE

Les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » stables en 2018 1 ( * ) , diminuent de façon significative en 2019. Les crédits de paiement sont ainsi réduits de 4,8 % .

La mission se compose de trois programmes pérennes, décrits dans l'encadré suivant, auxquels s'ajoute, en 2018, un programme dédié à la présidence française du G7, dont les crédits augmentent en 2019, sans que cela ne suffise à modifier la réduction du total des crédits de la mission.

Les trois programmes pérennes de la mission « Action extérieure de l'État »

- le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde », qui retrace les contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix dues par notre pays, les crédits d'état-major du ministère chargé des affaires étrangères et les coûts du réseau diplomatique ;

- le programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence », qui finance le réseau culturel des ambassades et d'autres dépenses de « rayonnement », ainsi que les opérateurs de la mission (Campus France, Agence pour l'enseignement français à l'étranger [AEFE], Institut français et, à partir de l'année prochaine, Atout France) ;

- enfin, le programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires », qui regroupe les crédits du réseau consulaire, des services aux Français établis hors de France (dont les bourses scolaires des élèves français de l'étranger) et du traitement des visas.

1. Diminution en crédits de la mission au sein d'un budget ministériel en forte progression
a) La mission « Action extérieure de l'État » régresse alors que le budget de l'APD s'envole

Les crédits prévus au titre de la mission « Action extérieure de l'État » dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2019 s'élèvent à 2,871 milliards d'euros en autorisation d'engagement (AE), et à 2,872 milliards en crédits de paiement (CP), soit une réduction de 4,28 % par rapport à l'année dernière ( -127,5 millions d'euros ).

Évolution des crédits de la mission « Action extérieure de l'État »

(CP, en millions d'euros)

LFI 2018

PLF 2019

Évol. 2018-2019

Mission « Action extérieure de l'État »

3 000,9

2 872,6

-4,28%

Programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde »

1 901,7

1 774,4

-6,7%

Programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence »

718,5

699,6

-2,6%

Programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires »

368,7

374,2

1,5%

Programme 347 « Présidence française du G7 »

12

24,4

103,3%

Source : Projet annuel de performance (PAP) de la mission « Action extérieure de l'État » annexé au PLF 2019

Ce montant est ramené à 2,72 milliards d'euros hors contributions directes de l'État au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ». Dans ce format, la mission représente ainsi 1,1 % du budget général pour 2019 , hors charge de la dette et pensions , établi pour l'année prochaine (243,43 milliards), contre 1,18 % en 2018.

Dans le même temps, le programme 209 « Aide publique au développement » se caractérise par une augmentation de 280 millions d'euros en crédits de paiement, représentant 41 % du budget du MEAE et 1,26 % du budget général pour 2019 2 ( * ) .

b) L'effet lié au programme dédié à la Présidence française du G7

En 2018, la maquette de la mission « Action extérieure de l'État » voyait son périmètre modifié par la création d'un programme à vocation temporaire : le programme 347 « Présidence française du G7 » afin de rendre lisible les dépenses ainsi engagées, et identifier les responsabilités de gestion à travers un programme à vocation interministérielle , placé sous la responsabilité de M. Frédéric Billet, chef du Protocole.

Ce programme regroupe les crédits de l'État destiné à financer l'exercice par la France de la présidence du G7 à partir du 1 er janvier 2019. Établi à titre temporaire pour les exercices budgétaires 2018 et 2019 il sert de réceptacle aux dépenses au titre de la présidence française évaluée à 36,4 millions d'euros pour ces deux années : soit 12 millions de CP et 14,4 millions d'AE en 2018 et 24,4 millions de CP et 22 millions d'AE en 2019. Ces crédits serviront à préparer et organiser le sommet du G7 et les réunions ministérielles (soit 23 millions d'euros) et à financer la communication et le fonctionnement du secrétariat général (soit 1,392 million d'euros).

La réunion interministérielle du 15 juin 2018 relative à la préparation de la Présidence française du G7 a prévu que les réunions ministérielles seraient directement financées sur le budget de chacun des ministères concernés. En conséquence, l'action « Organisation des réunions ministérielles » et ses deux sous-actions ont été supprimées.

La très nette augmentation des crédits de ce programme, soit 100 % en 2019, au format toutefois modeste au regard de la mission, n'enraye pas la diminution globale de la mission.

La commission des finances du Sénat a adopté un amendement ramenant à 21,2 millions d'euros (soit -3,2 millions d'euros) les crédits du programme 347, soit un coût au plus près du coût du G8 qui s'était tenu à Deauville en 2011, actualisé. Il s'agit d'encadrer ce budget trop largement doté. C'est également l'objet du deuxième amendement de la commission des finances adopté qui réduit de 3,1 millions d'euros les crédits destinés à une réunion ministérielle « affaires étrangères » du G7 sur l'action 2 « Action de la France en Europe et dans le monde ».

2. Les questions posées par l'architecture budgétaire
a) Les observations de la Cour des comptes

Les observations de la Cour des comptes sur la mission, dans le cadre de sa note d'analyse de l'exécution budgétaire pour 2017 sont alarmantes. La Cour estime en effet que : « le budget de la mission reste fragile, sa soutenabilité étant menacée par le poids des CIOMP , la dégradation des parités et l'augmentation des prix, alors qu'aucune mesure d'économie structurelle n'est proposée par le ministère à la hauteur du risque encouru . Il convient également de signaler, cette année encore, les fortes interrogations pesant sur la programmation à moyen terme des dépenses de personnel et des dépenses immobilières .

Les deux déterminants principaux de la soutenabilité de la mission, la masse salariale et les interventions du programme 105 , sont aussi les postes les plus importants, pour lesquelles la Cour, à l'occasion de contrôles récents sur les dépenses de personnel et les contributions internationales, a formulé des recommandations pour en améliorer l'efficacité de la gestion. D'autres sources d'économies pourraient être davantage explorées afin de renforcer la soutenabilité, notamment par la poursuite de la rationalisation des dépenses de fonctionnement. Les dépenses immobilières font quant à elles l'objet d'une recommandation renouvelée. »

Comme le note votre commission depuis plusieurs années, la structure du programme 105 est particulière, partagée entre d'une part les dépenses contraintes que sont la masse salariale, les contributions de la France aux organisations internationales et la participation de notre pays aux opérations de maintien de la paix ainsi que les crédits de l'action européenne 3 ( * ) , et, d'autre part, les dépenses pilotables . Le ministère n'a, par définition, que peu de prise sur les dépenses contraintes. La Cour des Comptes estime que la capacité de pilotage politique de la mission est très réduite . En réponse aux observations de la Cour, le ministère « indique que la marge de manoeuvre pour le pilotage [de la mission] joue essentiellement sur les économies de constatation et la reprogrammation. ».

Le pilotage par la performance semble, dans cette perspective, difficile à mettre en oeuvre , alors même que lors de la conférence des ambassadeurs, le Président de la République l'appelait de ses voeux : « Nous avons encore trop tendance à considérer que tout est prioritaire et ne pas suffisamment avoir une culture du résultat . Même en diplomatie, le succès se mesure -certes pas en un jour et même sans doute jamais en un jour- à la capacité néanmoins d'infléchir des attitudes, de construire des amitiés et des alliances, de remporter des marchés. En un mot, de faire avancer les intérêts de la France et des français et de faire partager un peu de notre vision et conception du monde » 4 ( * ) .

b) L'évolution de la maquette budgétaire : à la recherche d'une meilleure appréciation de la performance

Les objectifs et indicateurs de performance du programme 105 ont évolué entre 2018 et 2019. La nouvelle maquette est présentée dans l'encadré suivant.

Objectifs et indicateurs de performance du programme 105

1) Objectif 1 : Renforcer la sécurité internationale et la sécurité des Français

Indicateur 1.1 (Nouveau) : Accroître la sécurité de la France au travers de celle de nos partenaires

Indicateur 1.2 : Veiller à la sécurité des Français à l'étranger

2) Objectif 2 : Promouvoir le multilatéralisme et construire l'Europe

Indicateur 2.1 : Optimiser l'effort français en faveur du maintien de la paix

3) Objectif 3 : Assurer un service diplomatique efficient et de qualité

Indicateur 3.1 : Part des bénéficiaires de l'obligation d'emploi prévue par la loi n° 87-517 du 10 juillet 1987

Indicateur 3.2 : Efficience de la fonction support

Indicateur 3.3 : Efficience de la gestion immobilière

Indicateur 3.4 : Respect des coûts et délais des grands projets d'investissement

Indicateur 3.5 : Efficience de la fonction achat

Les trois objectifs de performance sont inchangés, mais les indicateurs de performance évoluent pour être plus représentatifs de l'activité du programme et permettre une meilleure appréciation de la performance :

- S'agissant de l'objectif 1, l'indicateur 1.1 « Évaluation de la politique de coopération, de sécurité et de défense » est supprimé et remplacé par l'indicateur « Accroître la sécurité de la France au travers de celle de nos partenaires ». Il comprend un sous-indicateur 1.1.1 « Part des actions concourant à la priorité politique assignée à l'année N à la direction de la coopération de sécurité et de défense ». Ce dernier doit permettre de mesurer le succès de la France dans la compétition qui se joue entre les grandes puissances pour former les hauts responsables d'un certain nombre de pays.

- L'indicateur « Optimiser l'effort français en faveur du maintien de la paix » de l'objectif 2 s'enrichit d'un nouveau sous-indicateur 2.1.2 « Effectifs totaux des fonctionnaires internationaux français et comparaison avec autres effectifs » qui doit permettre de comparer le nombre des administrateurs français au sein de l'ONU par rapport aux autres États.

Vos rapporteurs pour avis seront attentifs à l'évolution de ces nouveaux sous-indicateurs, et à leur apport à un pilotage des dépenses du P105 par la performance.

B. LA DIMINUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 105 ET L'AUGMENTATION DES DÉPENSES DE PERSONNEL

Le programme 105 porte plus de la moitié des emplois du Quai d'Orsay, mais aussi l'intégralité du réseau diplomatique français 5 ( * ) qui est le troisième dans le monde. Les moyens du programme 105 représentent 36 % des crédits, 59 % des emplois du ministère et 67 % des équivalents temps plein travaillé (ETPT) de la mission.

Les crédits du programme 105 diminuent nettement par rapport à 2018, de 6,7 % en crédits de paiement, qui s'élèvent à 1,774 milliard d'euros et de 6,5 % en autorisations d'engagement, qui atteignent 1,776 milliard d'euros. Toutefois, de nombreux transferts de crédits modifient le périmètre du programme en 2019 et rendent peu lisible son évolution.

1. Une évolution rendue peu lisible par de multiples transferts

Il convient de distinguer les transferts qualifiés de technique des transferts induits par l'application au ministère du plan de transformation Action publique 2022 6 ( * ) .

En 2019, les transferts « techniques » suivants affecteront le programme 105 :

- un débasage de 92,6 millions d'euros correspondants aux crédits auparavant inscrits sur le programme au titre des loyers budgétaires. Cette évolution tient au fait que l'information sur la valeur économique des biens de l'État occupés sera désormais traitée dans le cadre d'instruments non budgétaires 7 ( * ) ,

- un transfert interne de 0,277 million d'euros vers le programme 209 pour couvrir des coûts annexes relatifs au transfert des experts techniques internationaux vers l'AFD et expertise France.

Dans le cadre des évolutions liées à Action Publique 2022, les transferts suivants impactent le programme 105 en 2019 :

- un transfert au profit du programme 105 de crédits de fonctionnement dits crédits de support dans le réseau, c'est-à-dire les frais de représentation et de déplacements des consuls et des conseillers de coopération du programme 151, soit 2,076 millions d'euros , et du programme 185, soit 1,55 million d'euros ,

- le transfert des crédits de fonctionnement en provenance des autres ministères pour leurs services à l'étranger au titre de ses fonctions support s'élèvent à 15,22 millions d'euros affectés au programme 105,

- le transfert sur le programme 105 de 383 emplois supports en provenance des autres ministères pour une masse salariale de 10,9 millions d'euros. Le tableau suivant retrace ces transferts.

Origine du transfert au profit du P105

Masse salariale

(en millions d'euros)

ETPT transférés

Ministère des armées (P212)

4,929

157

Direction générale du Trésor

2,229

79

Direction générale des finances publiques

0,555

6

Direction générale des douanes et droits indirects (P302)

0,086

3

Ministère de l'intérieur (P176)

2,387

121

Ministère de la justice (P310)

0,330

10

Ministère de l'agriculture (P215)

0,242

3

Ministères sociaux (P124)

0,086

2

Direction générale de l'aviation civile (P613)

0,046

1

Ministère de la transition écologique et solidaire (P2 117)

0,043

1

TOTAL

10,9

383

Ces transferts font l'objet d'un commentaire ultérieur.

2. La structure du P 105 : le poids des dépenses contraintes
a) L'augmentation des dépenses de personnel pèse sur les autres dépenses du programme

En 2019, les crédits de paiement s'élèvent à 762,6 millions d'euros en dépenses d'intervention (-8,6%), 661 millions d'euros en dépenses de personnel (+6,2%), 305 millions d'euros en dépenses de fonctionnement (-17,1%) et 46 millions d'euros en dépenses d'investissement (-40,3%) .

Au titre de 2019, la répartition par titre des crédits de paiement du programme 105 évolue par rapport à 2018, au profit des dépenses de personnel qui augmentent de 6,2 %, et au détriment des dépenses d'intervention, de fonctionnement et d'investissement qui diminuent de 13 %. Les dépenses d'investissement et d'intervention semblent une fois de plus constituer la variable d'ajustement du P105.

Enfin, la diminution conséquente des crédits d'investissement tient à la diminution de 30 millions d'euros sur le programme 105 au titre des nouvelles modalités de financement de la sécurisation des emprises à l'étranger, qui feront l'objet d'un développement ultérieur.

b) La répartition des crédits par action du programme 105

Le tableau suivant présente l'évolution des crédits par action du programme. Les actions « Contributions obligatoires », « Soutien » et « Réseau diplomatique » connaissent d'importantes diminutions qui font l'objet de développements spécifiques.

Répartition des crédits du programme par action (en millions d'euros) et évolution

NB : Les sommes de colonnes peuvent être différentes du total en raison des arrondis.

Source : chiffres du PAP de la mission « Action extérieure de l'État » annexé aux PLF 2019, mis en perspective

En revanche, les crédits des actions suivantes progressent :

- de 11,2  % pour « Coordination de l'action diplomatique » (99,88 millions d'euros). Cette action finance le Centre de crise (3,793 millions d'euros), la communication (2,853 millions d'euros), les dépenses d'état-major (9,4 millions d'euros) au même niveau qu'en 2018. En revanche, les dépenses de protocole ont nettement augmenté , passant de 8,95 à 17,594 millions d'euros entre 2018 et 2019. Cette hausse de crédits financera la Présidence française du Conseil de l'Europe en 2019, le sommet France Océanie, ainsi que la préparation, en fin d'année, du sommet Afrique-France qui se tiendra en 2020,

- de 4,1 % pour l'« Action européenne » (54,377 millions d'euros). L'évolution budgétaire est due à la hausse du budget du Conseil de l'Europe , et notamment aux dépenses structurellement dynamiques liées au paiement des retraites , ainsi qu'au moindre reliquat des contributions des années antérieures dans un contexte de trésorerie tendu résultant d'une part des arriérés de paiement de la Russie et d'autre part de la décision de la Turquie de renoncer à son statut de « grand contributeur »,

- de 1,6 % pour la « Coopération de sécurité et de défense » (104 millions d'euros).

Le graphique suivant présente le poids de chacune des actions du programme en son sein et leur évolution.

Source : CAED

Comme pour le montant des crédits, la structure de leur répartition par action au sein du programme se caractérise par une assez forte stabilité par rapport à la structure du programme en 2018, ce qui est conforme à l'importance des dépenses contraintes.

Les évolutions visibles concernent les actions dont les crédits augmentent par rapport à 2018. Par ailleurs, il est intéressant de noter, qu'alors que leurs crédits diminuent, les actions « Soutien » et « Réseau diplomatique » voient leur poids au sein du P105 augmenter, ce qui s'explique en fait par la contraction des crédits de l'action « Contributions obligatoires ».

3. Des diminutions de dépenses qui ne correspondent pas à une action volontaire
a) La forte diminution des contributions obligatoires

Les crédits consacrés aux contributions internationales et aux opérations de maintien de la paix, soit 38,5 % du programme 105, diminuent de 73,8 millions d'euros (sur un montant total de 683,8 millions d'euros), soit 9,7 %.

Cette évolution que votre commission appelle de ses voeux chaque année s'explique principalement par la forte diminution des crédits dédiés aux opérations de maintien de la paix (OMP).

Le tableau ci-après présente l'évolution des principales contributions obligatoires et leur évolution entre 2018 et 2019.

Contributions

PLF 2018 en M€

PLF 2019 en M€

Evol.
en %

Opérations de maintien de la paix

384,9

326,3

-15,21

ONU, organisation des Nations-Unies

113,9

103,1

-9,44

OTAN, organisation du traité de l'Atlantique Nord

27,9

27,9

0

OSCE, organisation pour la sécurité et la coopération en Europe

23,5

23,5

0

OAA/FAO, organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture

21,3

20,3

-4,65

AIEA, agence internationale de l'énergie atomique

21,5

21,6

+0,53

OCDE, organisation de coopération et de développement économique

21,2

21,2

-0,07

OMS, organisation mondiale de la santé

19,6

20,5

+4,28

OIT, organisation internationale du travail

16,8

16,1

-4,70

UNESCO, organisation des Nations-Unies pour l'éducation, la science et la culture

14,3

13,4

-6,32

CPI, cour pénale internationale

12,2

12,9

+8

IMA, institut du monde arabe

12,3

12,3

0

CICR, comité international pour la Croix-Rouge

7,5

7,5

0

PNUE 700, programme des Nations unies pour l'environnement

6,8

6,4

-5,93

OMC, organisation mondiale du commerce

6,8

6,4

-5,70

Total hors OMP

325,8

313,3

-3,84

Total

710,7

648,3

-10

Les OMP connaissent donc une diminution de plus de 15 % par rapport à 2018. En juillet 2018, le budget des OMP a été adopté à la baisse pour la 4 ème année consécutive. Plusieurs évolutions prévisibles expliquent cette diminution des deux-tiers du budget des OMP en 2018 :

- la fermeture de la MINUL 8 ( * ) , la baisse des effectifs de la MONUSCO 9 ( * ) et la réduction de format de la FISNUA 10 ( * ) ,

- la forte pression maintenue par l'administration américaine.

Pour 2019, le maintien de la pression baissière sur les budgets et les effectifs des OMP a été anticipé. Le budget de trois missions dépassant le milliard de dollars a été fortement réduit : celui de la MONUSCO a été réduit de 39 millions de dollars celui de la MINUSS 11 ( * ) de 30 millions et celui de la MINUSMA 12 ( * ) au Mali de 25 millions. La baisse s'explique également par la transformation de la MINUSTAH 13 ( * ) en MINUJUSTH 14 ( * ) avec des effectifs en réduction et un mandat recentré sur le renforcement des institutions et de l'État de droit, l'appui à la police nationale et le suivi de la situation en matière de droits de l'Homme.

Enfin, selon les informations communiquées par le ministère, les chiffres prévisionnels présentés dans le tableau ci-dessus, sont basés sur l'hypothèse 15 ( * ) d'une quote-part française à 5,74 % pour les OMP, (contre précédemment 6,28 %). Les dépenses en devise ont été anticipées par l'achat à terme de 478 millions de dollars et 35 millions de francs suisses. Comme en 2018, cette année 80 % des contributions payables en devises en 2019 verront leur risque de change couvert dans le cadre de la convention entre le ministère et l'agence France Trésor.

Votre commission se félicite d'avoir été entendue sur ce point. En revanche, elle constate que la diminution de la quote-part française , si elle permet de réaliser des économies, témoigne de la perte de poids économique de la France qui recule au classement économique international 16 ( * ) .

La diminution de la contribution au budget ordinaire de l'ONU est elle aussi conséquente, atteignant 9,44 % par rapport à 2018. Elle est la conséquence de la décision de décembre 2017 de l'Assemblée générale des Nations-Unies de baisser le budget de l'exercice biennal 2018-2019. Cette initiative combiné à des effets favorables du taux de change a contribué à la de la contribution française. Par ailleurs, la politique active du ministère pour obtenir des organisations la mise en oeuvre de l'objectif de croissance nominale zéro en valeur de leur budget porte ses fruits notamment auprès d'organisations comme la FAO .

Enfin, la diminution de la contribution à l'UNESCO n'est que nominale. Selon les informations communiquées par le ministère, dans le PLF 2018, la budgétisation de la contribution de l'UNESCO était réalisée pour partie en euros et pour partie en dollars. Il est désormais possible pour chaque État d'acquitter la totalité de sa contribution dans une seule de ces deux monnaies. En conséquence et pour la première fois, au titre du PLF 2019, la budgétisation de la totalité de la contribution est effectuée en euros uniquement. Exprimée en dollars, le niveau de la contribution française reste inchangé .

Les contributions les plus importantes qui augmentent sont :

- la contribution au budget de la Cour pénale internationale , en hausse de 8 % . Cette augmentation est le résultat d'éléments statutaires propres à l'activité de la Cour au caractère impératif,

- la contribution à l'OMS . L'augmentation de 4,28 % tient au fait que la contribution pour 2018 était particulièrement basse en raison du remboursement d'un trop perçu (de 1,7 million de dollars et 1,6 million de francs suisses). En 2019, la contribution n'est pas de nouveau minorée .

Enfin, s'agissant des contributions obligatoires, votre commission prend acte de ce que la Cour des Comptes n'a pas maintenu sa recommandation relative au réaménagement de l'architecture budgétaire de la mission visant à créer un programme consacré aux contributions internationales obligatoires et volontaires . Dans sa note d'exécution budgétaire pour 2017, la Cour a pris acte du rôle que devait jouer le comité de pilotage interministériel des contributions internationales en tant qu'instance destinée à la fois à mieux anticiper l'évolution du niveau des contributions dues aux organisations internationales et à envisager d'éventuelle rationalisation dans les choix faits par la France. « Sous réserve que ce comité, qui devra inclure la direction du budget, se donne les moyens d'atteindre les objectifs qui lui sont assignés, notamment en se réunissant suffisamment régulièrement et en se dotant des outils nécessaires, la cour ne réitère pas sa recommandation. »

b) La réduction des crédits des actions « Réseau diplomatique » et «  Soutien » : des effets de périmètre

L'action « Soutien » , dotée de 222,09 millions d'euros, finance le fonctionnement de l'administration générale (17,66 millions d'euros), les dépenses liées à la gestion des ressources humaines (9,47 millions d'euros) et aux systèmes d'information et de télécommunication (38,67 millions d'euros), ainsi que la politique immobilière en France (25,77 millions d'euros) et la sécurité en France (12,25 millions d'euros). L'évolution la plus notable concerne la réduction des crédits dédiés à la politique immobilière en France qui sont passés de 60,7 millions d'euros en 2018 à 25,77 millions d'euros en 2019, soit une diminution de 34,9 millions d'euros correspondant au débasage des loyers budgétaires en France 17 ( * ) auparavant imputés sur cette ligne de crédits.

L'action « Réseau diplomatique » voit ses crédits diminuer de 15,5 % soit, -24% hors masse salariale par rapport à 2019. Les crédits de cette action sont dédiés :

- aux moyens de fonctionnement des ambassades qui passent de 83,66 à 102,169 millions d'euros entre 2018 et 2019. Cette différence de 18,5 millions d'euros tient à deux mesures de périmètre en faveur du P105 : l'inscription des frais de représentation et de tournée des P151 (2,08 millions d'euros) et P185 (1,55 million d'euros) sur cette action du P105 et le regroupement des crédits de fonctionnement courant et d'investissement des huit ministères représentés à l'étranger sur le seul budget du P105 (15,22 millions d'euros),

- à l'immobilier à l'étranger , dont les crédits passent de 104,89 millions d'euros en 2018 à 47,04 millions d'euros en 2019. Là encore, le débasage de 57 millions d'euros de loyers budgétaires explique l'évolution de cette ligne de dépenses. Est maintenue l' enveloppe de 12 millions d'euros dédiés à l'entretien lourd et courant du parc immobilier du ministère à l'étranger 18 ( * ) , soit les ambassades, les résidences des ambassadeurs, les consulats, les résidences des consuls généraux, les centres culturels, les instituts français : environ 1 500 biens répartis dans 160 pays, pour une valeur estimée à 4,3 milliards d'euros. Cette enveloppe est insuffisante comme il sera indiqué ci-après.

- aux indemnités de changement de résidence qui restent stables à 18,95 millions d'euros,

- enfin aux dépenses de sécurité à l'étranger qui diminuent nettement, passant de 75,7 à 44,24 millions d'euros . La diminution de 31,46 millions d'euros d'un PLF à l'autre résulte de la décision de financer la sécurisation des ambassades et lycées français par une avance sur le programme 723 intitulé, «Opérations immobilières nationales et des administrations centrales » du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » (dit CAS immobilier). Cette évolution n'est pas sans poser de réelles questions sur les dépenses qui seront ainsi financées et sur les modalités de remboursement de cette avance (qui seront examinées ultérieurement).

II. LES TROIS POINTS D'ATTENTION DU PLF 2019

A. L'APPLICATION PRÉCIPITÉE DE LA RÉFORME « ACTION PUBLIQUE 2022 »

Aux termes des auditions menées par vos rapporteurs, l'application de la réforme au ministère des affaires étrangères semble avoir été préparée dans l'urgence sans que ses conséquences soient parfaitement évaluées.

1. Une réforme menée à marche forcée

Le programme de transformation Action publique 2022 (AP2022) se veut être une réflexion stratégique sur l'organisation et les missions de l'État. Son application au MEAE annoncée à l'été 2018 avec la diminution de 10 % de la masse salariale des personnels à l'étranger a été précisée à l'occasion de la conférence des ambassadeurs qui s'est tenue du 27 au 31 août 2018.

Les orientations présentées lors de la conférence des ambassadeurs

Le Premier Ministre a précisé les difficultés concrètes rencontrées par les ambassadeurs à au moins deux niveaux :

- l'impossibilité de pouvoir proposer la composition des équipes et les modalités de leurs actions communes aboutissant à l'hypertrophie des fonctions dites support qui représentent 30 % des ETPT à l'étranger,

- l'incapacité d'avoir une vision claire de la présence des effectifs à l'étranger, de leur métier et de leurs objectifs, le réseau « CORINTE », censé répondre à cette nécessité, ne s'étant jamais réuni au niveau politique, n'est pas pleinement opérationnel.

La réforme annoncée consiste à donner à l'ambassadeur les moyens de gérer son ambassade et à le placer au coeur de l'organisation interministérielle de l'État dans sa projection internationale. Elle s'organise en trois étapes :

- le PLF 2019 est la première étape. Elle prévoit le regroupement des crédits de façon à assurer aux ambassadeurs la capacité de piloter les fonctions support de l'ensemble des réseaux de l'État à l'étranger,

- la seconde étape concerne le pilotage des réseaux de l'État à l'étranger : le MEAE sera chargé chaque année au début du printemps de proposer une évolution de réseaux de l'État l'étranger par métiers par géographie, sur la base des analyses transmises par les ambassadeurs. Après consultation des ministères concernés, un schéma d'emploi global, décliné par payés par fonction sera arrêté sous arbitrages de Matignon,

- la troisième étape est présentée comme la conséquence logique de cette réforme et porte sur les économies attendues . Elles doivent s'élever à 10 % de la masse salariale d'ici 2022 soit environ 110 millions d'euros. Les fonctions support doivent rapidement baisser en deçà de 25 % des ETPT à l'étranger au lieu de 30 % aujourd'hui. Quand cela se justifie, il doit être envisagé de remplacer des fonctionnaires expatriés par des agents de droit local, par l'exemple dans les services culturels et économiques en particulier encore en Europe.

Comme l'a indiqué le secrétaire général du ministère devant votre commission le 3 octobre 2018, cette réforme prévoit la réorganisation des modes de gestion des réseaux de l'État - et non seulement des réseaux du seul ministère des affaires étrangères - à l'étranger, par la création d'une agence de l'État à l'étranger . Elle renforcera le rôle du ministère dans le pilotage de l'action extérieure. La mutualisation des fonctions support annoncée devrait donc être la première étape d'une réforme plus large plaçant les ambassadeurs en capacité de piloter les réseaux de l'État à l'étranger.

Cette réforme pose des questions. La réforme est pilotée par le MEAE. Dans ce but, une « task-force » sur la réforme des réseaux de l'État à l'étranger a été placée auprès du Ministre, sous la responsabilité de M. Alain Le Roy, Ambassadeur de France, en charge de la coordination interministérielle en lien étroit avec le Cabinet du Premier ministre et avec l'appui des services du ministère. Cette coordination devra faire coïncider une double analyse : celle des ambassadeurs qui feront des propositions d'évolution de leurs dispositifs et celle des administrations centrales qui feront elles-mêmes des propositions. Prévue pour se dérouler sur 4 ans, de 2019 à 2022, elle se traduit dès 2019 :

- le PLF 2019 prévoit la mutualisation des fonctions supports . Les fonctions support 19 ( * ) - chauffeurs, secrétaires, interprètes, agents d'entretien - seront regroupées sous un même chapeau. Ainsi unifiées sous l'autorité de l'ambassadeur, la gestion devrait être simplifiée et le coût de leur fonctionnement rationnalisé. Conséquence de ce transfert des fonctions support au ministère des Affaires étrangères, 387 ETP sont versés au Quai d'Orsay, soit 11 millions d'euros de dépenses de personnel ainsi que 15 millions d'euros de frais de fonctionnement et 215 biens immobiliers 20 ( * ) ,

- le PLF 2019 prévoit également une économie de masse salariale de 13 millions d'euros et 130 ETP pour le MEAE ,

Interrogés début octobre, les ambassadeurs ont été appelés à rendre leurs propositions d'économie dans ce domaine au mois de novembre, avec des objectifs différenciés. La baisse de masse salariale demandée varie selon les postes : ceux dans un pays en crise ou de sortie de crise, ou dont la fragilité institutionnelle justifie de maintenir intacte l'empreinte française seront le moins impactés, en théorie à 7 %. Les postes de présence diplomatique, avec un effectif de trois à cinq personnes - dont l'ambassadeur - ne contribueront pas à l'effort. Les postes de nos principaux partenaires stratégiques, situés dans des pays à intérêt diplomatique fort dans leur environnement régional, seront taxés à 7 %. Enfin, les grands postes auprès de nos partenaires multilatéraux, les États du P5, les postes européens ou certains grands postes de pays émergents seront mis fortement à contribution, avec 13 % de réduction des effectifs. Les autres postes seront taxés à 10 %.

Ce délai de réponse paraît extrêmement court. La volonté d'affichage d'économies imposée par le gouvernement semble primer sur le temps d'analyse approfondie nécessaire à la réussite d'une telle réforme, notamment parce qu'il n'existe pas de recette simple uniformément applicable pour réaliser des économies. Lors de son audition, le 3 octobre 2018, devant votre commission, le secrétaire général du MEAE apportait deux précisions :

- une diminution de la masse salariale et des effectifs ne permettra pas de poursuivre les mêmes missions. C'est la raison pour laquelle il a été spécifiquement demandé aux ambassadeurs de préciser les conséquences des réorganisations qu'ils proposeront sur leurs charges de travail, et sur leurs attributions. Votre commission sera attentive à ce que les retours des ambassadeurs sur les impossibilités de maintenir l'intégralité de leurs missions soient réellement entendus.

- les solutions évidentes n'existent pas : parfois, licencier un agent de recrutement local peut coûter plus cher qu'un expatrié : au Japon, par exemple, l'indemnité de licenciement correspond à un mois de salaire par année exercée. De même, lors de son audition devant votre commission le 9 octobre 2018, le ministre indiquait que la masse salariale était dépendante de l'inflation à l'étranger, qui s'élève en moyenne à 4 % par an.

2. Des évolutions peu lisibles dans le PLF 2019

Le programme 105, qui porte les effectifs concourant à l'action diplomatique de la France en Europe et dans le monde (fonctions politiques et soutien transversal à l'action du ministère) regroupe la majorité des effectifs ministériels. En valeur absolue, il est donc aussi celui qui contribue le plus à l'effort de rationalisation (52% en 2016, 49% en 2017 hors plan de sécurité, 50% en 2018 et 47% en 2019).

a) Le plafond d'emploi du P105 diminue de 61 ETP

Le schéma d'emploi du ministère prévoit une réduction de 100 ETPT pour chaque exercice budgétaire de 2018 à 2022 . Pour le programme 105, 50 ETP ont été supprimés en 2018 et 61 le seront le 2019 :

Schéma d'emplois 2019

Titulaires et CDI en administration centrale (G1)

0

Titulaires et CDI à l'étranger (G2)

-15

Agents contractuels et VI (G3)

-1

Militaires (G4)

-5

Agents de droit local (G5)

-40

TOTAL

-61

Dans le cadre de la réforme Action publique 2022, la réforme des réseaux de l'État à l'étranger prévoit également le regroupement des effectifs consacrés au soutien des réseaux de l'État à l'étranger, avec un transfert de 411 ETP de2019 à 2022, dont 387 en 2019. Elle fixe une trajectoire de réduction de 10% de la masse salariale des ministères et des opérateurs employeurs d'agents à l'étranger d'ici 2022.

Mais, et cela confirme la trop grande précipitation dans cette réforme, en octobre, lorsque vos rapporteurs pour avis ont interrogé le ministère les travaux n'étaient pas suffisamment avancés pour préciser la cible selon le périmètre des ministères et de leurs opérateurs ainsi que pour donner une répartition des postes qui seront supprimés par zone géographique, par métiers et par grade. Bien loin du pilotage par la performance appelé de ses voeux par votre commission, il s'agit d'un pilotage à l'emporte-pièce où l'on décrète le taux de diminution de la masse salariale.

b) Les crédits du titre 2 augmentent de 6,2 %

La hausse des dépenses de personnel de 6,2 % est partiellement liée aux transferts ci-dessus présentés, qui font l'objet d'un développement ultérieur. Elle est préoccupante selon la Cour des comptes qui, dans sa note d'exécution budgétaire pour 2017 note une sur-exécution des dépenses de personnels « due à l'effet change-prix rendant nécessaire l'ouverture de crédits en fin d'exercice 21 ( * ) ». Le même phénomène de surconsommation des crédits du titre 2 caractérisera l'exécution du PLF 2018, soit un dépassement d'exécution de 16 millions d'euros pour le P105 . Votre commission appelle à la prise en compte de cet effet change-prix au moment de l'élaboration du PLF afin de réduire son impact sur la gestion des crédits en fin d'exercice et d'améliorer la rationalisation des dépenses de personnels du MEAE.

C'est bien là que doit porter l'effort , en effet, entre 2014 et 2017 les effectifs de fonctionnaires à l'étranger ont diminué de 7 % en ETP pour le MEAE 22 ( * ) alors que la masse salariale a augmenté de 6% . Cette décorrélation entre l'évolution de ces deux variables s'explique par l'effet change, d'une part, et l'inflation mondiale, d'autre part, qui, entre 2014 et 2017, ont gonflé mécaniquement la masse salariale des fonctionnaires à l'étranger . Selon le système de protection du pouvoir d'achat des fonctionnaires affectés à l'étranger et l'indemnité de résidence à l'étranger (IRE), leur rémunération augmente ou diminue en fonction :

- de l'évolution des taux de change entre l'euro et les monnaies locales. La baisse de la valeur de l'euro post-2008, avec la crise de la dette, notamment grecque, a induit une compensation de la perte de pouvoir d'achat de la monnaie européenne par rapport aux autres monnaies.

- et de l'évolution du coût de la vie dans le pays de résidence. L'inflation mondiale a été largement supérieure à l'inflation France et donc il a fallu compenser la perte de pouvoir d'achat des expatriés. De plus, la géographie des affectations a évolué au profit des pays dits grands émergents où le coût de la vie augmente encore plus vite qu'ailleurs. Depuis 2011, un mécanisme de couverture de perte au change pour les rémunérations, versées en devises, des agents de droit local a également été prévu.

La réduction de la masse salariale dépend donc :

- de l'inflation hors de France, sur laquelle nous n'avons pas de prise,

- du nombre de fonctionnaires et d'agents locaux et des mesures de garantie de leur pouvoir d'achat,

- de l'évolution des taux de change.

Dans ce contexte, votre commission appelle à une réflexion sur les moyens d'étendre la couverture du risque de change, actuellement limité aux seules contributions internationales, au paiement en devises locales des agents en poste à l'étranger.

Elle note également que l'IRE doit faire l'objet d'un examen approfondi . Dans sa note d'exécution budgétaire, la Cour a déjà constaté que « le MEAE disposait encore de marges de manoeuvre sur les rémunérations, notamment concernant le recrutement d'agents de droit local à la place d'expatriés ou le versement des indemnités de résidence à l'étranger (IRE). À cet égard, la direction du budget a indiqué, lors de l'examen de l'exercice précédent, que la justification au premier euro serait insuffisamment détaillée concernant la réalisation du schéma d'emplois et les dépenses indemnitaires : en particulier, aucune information ne serait apportée sur le volume de dépenses relatives à l'IRE servie (40 % du titre 2 environ), ni sur son nombre de bénéficiaires. Le MEAE a précisé qu'une réflexion avait été ouverte sur l'IRE, mais qui semble pour le moment limitée à quelques sujets circonscrits 23 ( * ) ».

3. Des conséquences non évaluées mais potentiellement dommageables
a) Pour la mise en oeuvre d'une culture de l'évaluation des réformes au MEAE

Les conséquences de la réforme action 2022 ne semblent avoir fait l'objet d'une réelle évaluation, ce qui n'est pas une procédure inhabituelle.

En effet, plusieurs réformes menées par le MEAE ont été évaluées de façon interne et sans restitution publique des résultats : c'est le cas des deux principales transformations que sont l'exercice « Grand formats » et le déploiement des postes de présence diplomatique qui devaient permettre une rationalisation des dépenses tant de fonctionnement que de personnel dans les postes concernés. Malgré les demandes répétées de votre commission 24 ( * ) , le bilan de ces réformes n'a pas été présenté au Parlement 25 ( * ) .

La réforme mise en oeuvre devrait s'étaler sur 4 ans et faire l'objet d'ajustements, notamment en termes de transfert des effectifs dès 2020. Ces ajustements n'auront d'efficacité que si une vraie culture d'évaluation est mise en place . Il est notamment regrettable que la piste de couverture de l'effet de change sur l'évolution de la masse salariale n'ait pas fait l'objet de propositions à l'impact évalué . L'effet recherché aurait peut-être été obtenu sans fragiliser le formidable outil d'influence qu'est le réseau universel français.

b) Le risque de fragilisation du réseau universel français

Car il ne s'agit pas de s'opposer à la réduction de la masse salariale mais bien de préserver le pouvoir d'influence de la France , alors que semble peu à peu s'imposer l'idée que l'on peut maintenir un réseau diplomatique universel, une politique étrangère efficace, capable notamment d'assurer ses nouvelles fonctions de diplomatie économique, avec un service diplomatique plus faible .

Diminuer la masse salariale de 10 %, c'est diminuer les effectifs et notre poids dans le monde, alors que les budgets des affaires étrangères de l'Angleterre et de l'Allemagne, ainsi que leur nombre d'ambassades et leurs effectifs, augmentent. Le Foreign and Commonwealth Office (FCO) a annoncé le 21 mars 2018 la création de 250 postes de diplomates supplémentaires avec une augmentation de 15% des effectifs ce qui viendrait confirmer une réorientation des réformes précédentes.

Si la taille de notre réseau international nous place depuis l'an dernier au troisième rang mondial - car après les Américains, les Chinois nous sont passés devant -, nous n'arrivons à rester devant l'Angleterre que grâce à nos consulats. L'Angleterre et l'Allemagne ont cependant plus d'agents dans leurs ambassades et leurs consulats que nous, comme le montre le tableau suivant :

Les principaux chiffres pour 2016 des réseaux français, allemand et britannique 26 ( * )

France - MEAE

Allemagne - Auswärtiges Amt (AA) (développement suivi par le BMZ+ agences)

Royaume Uni- FCO (à noter que le DFID suit l'action extérieure Développement)

Ambassades

160

153 (+ bureau Ramallah et Taipei)

150

Représentations Permanentes

16

12

9

Consulats

89

61

70

Antennes/Bureaux

2

4

-

Total des postes :

267

232 (Bangui, Banjul, Bissau, Mbabane)

229

Consulats honoraires

500

338

207

Effectifs

11 946 agents pour action extérieure sur un total de 13864 agents au MAEDI

(1918 agents sont sur le programme 209 aide au développement)

entre 14 000 en 2017 chiffres du AA et 11 782 agents (selon publication 2016)

(Le Min pour le développement (BMZ) dispose de 1025 agents et s'appuie sur des agences (KfW, DEG, GIZ)

13 600 ou 12563 selon les sources (le site du FCO indique de l'ordre de 14000 agents

baisse des effectifs de plus de 15% entre 2007 et 2016

baisse des effectifs de plus de 7% entre 2008 et 2016

baisse de plus de 20% des effectifs depuis 2008

Administration centrale

3460 (25% du total)

2983 (soit 25% du total)

4295 (titulaires centrale et expat)

Agents à l'étranger

10404

8799

10000

Recrutés locaux

dont 4751

dont 5731

dont 8268

France - MEAE

Allemagne-Auswärtiges Amt (AA)

Royaume Uni- fco (pour mémoire le DFID suit l'APD)

c) La question du pilotage politique de la réforme

L'un des points d'achoppement possible de la réforme est la compétition entre les ministères cherchant à préserver leur réseau à l'étranger. Comment seront gérés les éventuels désaccords avec les autres ministères ? Il est prévu qu'un contrat de transformation soit établi par le MEAE en lien avec les ministères présents dans les réseaux à l'étranger et le ministre de l'Action et des Comptes publics qui établira le plan stratégique d'évolution des réseaux , les modalités d'atteinte des 10% de réduction de masse salariale et une convention interministérielle de gestion .

Vos rapporteurs pour avis estiment que cette réforme ne produira d'effets qu'aux conditions suivantes :

- chaque ministère participe sincèrement à l'effort de réduction de la masse salariale de ses effectifs à l'étranger. Il ne saurait être question que le seul ministère des affaires étrangères absorbe l'intégralité de l'effort demandé ,

- cet arbitrage doit être rendu au plus haut niveau comme s'y est engagé le Premier ministre lors de la conférence des ambassadeurs. La réforme des fonctions support posera sans doute un certain nombre de difficultés qui seront décuplées lorsque les efforts devront porter sur les autres personnels en poste à l'étranger . Chaque ministère ayant ses propres objectifs, l'analyse des ambassadeurs sera certainement contestée . Or cette réforme n'a de sens, au vu des sacrifices qu'elle exige pour une économie relativement modeste et assez incertaine tant que l'effet de change et l'inflation pesant sur les rémunérations des agents en poste à l'étranger ne seront pas mieux maîtrisées, que si les ambassadeurs obtiennent réellement les moyens de gérer leur ambassade et sont placés au coeur de l'organisation interministérielle de l'État dans sa projection internationale .

B. LA SÉCURITÉ : UNE PRIORITÉ AUX MOYENS INCERTAINS

La sécurisation est présentée comme l'un des grands axes prioritaires du ministère. Elle se décline en plusieurs piliers :

- la coopération de défense et de sécurité, politique au fort effet de levier, constitue notre « premier bouclier au loin », illustration parfaite du continuum entre sécurité intérieure et sécurité extérieure,

- les crédits de sécurisation des emprises françaises à l'étranger pour la protection des communautés françaises et de l'ensemble du réseau.

1. La coopération de défense et de sécurité, levier essentiel du ministère

Les crédits de la coopération de défense et de sécurité (CDS), définie dans l'encadré suivant, stabilisés depuis quelques années, augmentent en 2019 pour atteindre 104 millions d'euros , retrouvant enfin quasiment le niveau de 2007.

Le budget de la coopération de défense et de sécurité est passé de 106,41 millions d'euros en 2007 à 83,52 millions d'euros en 2016 . Après une longue diminution de 51,4 % de ses crédits entre 2007 et 2016 et une diminution de 18,6 % pour la seule année 2016, que votre commission n'a pas manqué de le dénoncer avec force, la CDS a bénéficié de moyens en augmentation de 38 % en 2017. Depuis, une certaine stabilisation au niveau de 2017 semble de mise, 102,3 millions d'euros en 2018 et 104 millions d'euros en 2019 .

La coopération de sécurité et de défense

La coopération de sécurité et de défense, dite coopération « structurelle » - par opposition à la coopération « opérationnelle » en la matière, qui relève du ministère de la défense -, constitue un important outil diplomatique d'influence et de prévention des conflits. En effet, cette politique associe les enjeux de sécurité à ceux du développement : elle contribue au maintien de la paix par le renforcement des capacités des pays bénéficiaires à assumer eux-mêmes la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée, le trafic de stupéfiants ou l'insécurité des flux maritimes ; et elle tend à permettre à ces pays d'assurer en propre des missions, non seulement de type militaire, mais aussi de protection civile : lutte contre les catastrophes naturelles (inondations, sécheresse, cyclones...), déminage, dépollution, etc.

En pratique, cette action consiste en une aide à structurer, dans le long terme, les élites nationales concernées. Elle s'exerce :

- soit par des formations, au moyen de missions de renfort temporaire (MRT) et de stages en France ou dans les « écoles nationales à vocation régionale » (ENVR) soutenues par notre pays qui accueillent chaque année environ 2 500 stagiaires en provenance d'une trentaine de pays ;

- soit par le conseil qu'assurent, sur place, des coopérants intégrés dans les structures hiérarchiques des États partenaires.

Les dépenses engagées à ce titre sont considérées comme disposant d'un fort effet de levier . Par exemple, l'impact d'un directeur des études français dans une école régionale africaine s'avère très supérieur aux crédits nécessaires pour financer sa mission. Plus généralement, en organisant et en structurant leurs forces, en planifiant leurs opérations, la coopération de sécurité et de défense permet aux pays bénéficiaires d'accomplir de considérables progrès, dans la mesure où les capacités dans le domaine du génie, de la santé, du transport, de la logistique ou encore des transmissions, bien souvent, sont présentes sur le terrain, mais éparpillées.

Bien évidemment, ces réductions de crédits n'ont pas été sans conséquence sur l'ampleur de la coopération qui peut être conduite. Pour en réduire les incidences, l'action du ministère s'est recentrée, par force, sur certains axes prioritaires : le renforcement de l'architecture de paix et de sécurité en Afrique, les grands enjeux de sécurité 27 ( * ) , la formation et le conseil de haut niveau. Néanmoins, ces actions prioritaires elles-mêmes ne peuvent que pâtir de la baisse continue du nombre de coopérants engendrée par celle des crédits. Entre 2007 et 2016, la diminution du nombre de coopérants militaires a été de plus de 20 %. En 2008, on dénombrait encore 322 coopérants, dont près de 80 % se trouvaient dans des pays de l'Afrique subsaharienne. À partir de 2013 , le nombre des coopérants est symboliquement passé sous la barre des 300 coopérants .

En 2018, il ne s'établissait plus qu'à 257. En 2019, la DCSD participera, par la diminution du nombre de ses coopérants (-5 ETP, 3 pris sur le groupe G4, militaires et 2 pris sur le groupe G3, personnels venant du ministère de l'intérieur) à l'effort demandé au ministère de réduction du réseau de ses agents à l'étranger 28 ( * ) . Celui-ci sera très certainement reconduit chaque année jusqu'en 2022, le portant à moins 15 ETP supplémentaires de 2020 à 2022 , soit moins 20 ETP de 2019 à 2022 .

L'effort demandé placerait la direction dans une situation intermédiaire, plus proche de 7 % de diminution de ses effectifs que des 10 % demandés en moyenne. On peut toutefois regretter que l'objectif ne soit cette fois pas exprimé en masse salariale mais en ETP. La DCSD aurait pu choisir de remplacer des colonels par des militaires moins gradés, réduisant ainsi sa masse salariale sans supprimer de nouveaux postes. Vos rapporteurs spéciaux souhaitent que la réduction soit exprimée en masse salariale et non en ETP. Vos rapporteurs pour avis seront attentifs à l'évolution des moyens consacrés à la coopération militaire structurelle, essentielle à la cohérence de la politique étrangère de la France . Le réseau de coopérants français, sans équivalent chez nos alliés, doit être renforcé par cette politique interministérielle rénovée au service de la réalisation des objectifs de notre pays en faveur de la paix. Votre commission veillera année après année à la préservation des moyens de ce formidable outil , souple, réactif, réorientable, qui a été malheureusement laminé ces dernières années.

La direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) 29 ( * ) gère l'attrition des effectifs. Elle a mis en place en 2017 une gouvernance interministérielle de la coopération de sécurité et de défense fondée sur un comité de direction (CODIR) 30 ( * ) . Il a vocation à se tenir deux à trois fois l'an. Il vise à mettre en oeuvre les décisions du comité d'orientation stratégique réunissant le MEAE, le ministère de l'intérieur et le ministère des armées.

Le CODIR a permis, alors que la situation internationale l'exigeait, de réorienter les priorités géographiques et thématiques. Ainsi, la liste des priorités comprend :

- l'appui à la force conjointe du G5 Sahel qui s'est vue doter d'un poste de commandement (PC),

- l'anticipation de la sortie de crise au Levant avec le Liban comme point focal. En 2018, 1,22 million d'euros devrait être consacré aux actions en faveur des forces de sécurité intérieure,

- enfin, la dernière priorité est la participation aux feuilles de routes migratoires .

Le CODIR a également permis de constater l'avancée de projets emblématiques tels que la mise en place de nouvelles écoles nationales à vocation régionale en 2018 dans les domaines suivants :

- « police judiciaire » : suite à la fermeture à l'été 2014 du centre de perfectionnement de la police judiciaire au Bénin, une étude pour la création, à Djibouti , d'une école de police judiciaire a été engagée ; elle est en passe d'être achevée ;

- « cybersécurité » : une école de cybersécurité ouvrira à Dakar fin 2018 afin de répondre à un besoin de renforcement des capacités des États africains dans un secteur où les enjeux sécuritaires et économiques sont cruciaux. Elle offrira à partir de 2019 des formations sur la dimension juridique et la gouvernance de la cybersécurité, la lutte contre la cybercriminalité et la sécurité des systèmes d'information et de communication.

- « forces d'intervention » : une académie internationale de lutte contre le terrorisme verra le jour à Abidjan dès la fin 2018 afin de répondre à une demande croissante des partenaires au Sahel comme dans le golfe de Guinée. Conduit dans un cadre interministériel, ce projet concernera autant les forces armées que les forces de sécurité intérieure et les ministères de la justice des pays participant.

Vos rapporteurs pour avis souhaitent que la DCSD soit en mesure de faire face à la montée en puissance de ces ENVR malgré la stagnation de ses crédits globaux et la réduction de ses effectifs .

Ils recommandent que la loi d'orientation et de programmation de l'aide publique au développement permette d'assurer le financement du continuum entre la sécurité et le développement. De nombreuses actions menées par la DCSD sur des crédits du programme 105 visent à renforcer les capacités des États partenaires dans les domaines de la sécurité intérieure et de la protection civile. Elles représentent près de 17 millions d'euros sur les 36 millions d'euros de l'action « Coopération de sécurité et de défense » du P105, hors titre 2. Votre commission appelle de ses voeux depuis de nombreuses années la remontée du financement de la DCSD par le programme 209 de la mission « Aide publique au Développement ». Les crédits prévus pour le financement des actions de la DCSD sur le Fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI) à hauteur de 2,5 millions d'euros devraient être portés au moins à 19,5 millions d'euros. Les 17 millions du P105 pourraient ainsi être réorientés vers des actions ne relevant pas de l'aide publique au développement selon les critères du comité d'aide au développement de l'OCDE.

2. L'effort particulier de sécurisation des postes : un contestable financement « à crédit » ?

Le réseau français doit répondre à plusieurs facteurs de risque en matière de sécurisation des réseaux français à l'étranger. Le premier est d'ordre structurel et tient à l'ampleur de la représentation française. Il s'agit en effet de sécuriser :

- le troisième réseau diplomatique et consulaire au monde, après ceux des États-Unis et de la Chine,

- le premier réseau culturel, avec près de 1 000 sites, instituts culturels, instituts français de recherche, Alliances françaises,

- et enfin le premier réseau scolaire au monde, avec 500 établissements scolaires.

La politique étrangère de la France, indépendante, affirmée et en cohésion avec sa politique de défense et le caractère laïc de la République française constituent l'autre facteur de risque, faisant de la France une cible des attaques terroristes.

Depuis dix ans, les représentations de la France à l'étranger, tant diplomatiques que consulaires ou culturelles, et les personnels qui y travaillent, ont ainsi fait l'objet de menaces ou de passages à l'acte qui impliquent de continuer d'affiner la veille sécuritaire, et de poursuivre la politique de sécurisation des implantations françaises à l'étranger. L'atteinte la plus grave subie par le réseau français au cours des douze derniers mois a été l'attaque terroriste du 2 mars 2018 contre l'ambassade française à Ouagadougou , menée par quatre assaillants munis de fusils d'assaut AK47 et de grenades, ainsi que de couteaux et d'appareils vidéo. Grâce aux personnels de sécurité et aux dispositifs de sécurité passive (d'importants travaux de sécurisation du site avaient été menés par le ministère en 2014 pour un montant total d'environ 3 millions d'euros), les terroristes n'ont pas pu pénétrer dans l'emprise et ont été neutralisés par des militaires français.

Le renforcement de la sécurisation du parc immobilier du ministère à l'étranger est un effort nécessaire, urgent et sans doute de long terme . Il est certain que l'on ne peut plus aujourd'hui se contenter de renforcer les postes dits exposés, l'action terroriste peut frapper n'importe quelle emprise. On ne peut que regretter dans ce contexte une différence entre la loi de finances initiale et l'exécution de plus de 10 millions en 2018 31 ( * ) , pour la seconde année consécutive.

Dans le cadre du PLF 2019, les crédits budgétaires consacrés à la sécurité des implantations diplomatiques, consulaires et culturelles (Instituts français) diminuent nettement , passant de 75,73 millions d'euros en LFI2018 à 44,23 millions d'euros . Cette réduction de crédits est présentée comme une contrepartie au financement sur deux ans du plan de sécurisation des emprises à l'étranger 32 ( * ) par une avance du compte d'affectation spéciale « gestion du patrimoine immobilier de l'État » 723 géré par le ministère de l'Action et des Comptes publics (MAC), dans la limite de 100 millions d'euros .

Ce mode de financement pose de nombreuses questions :

- sur le niveau de dépenses . Il est prévu de consacrer 100 millions d'euros sur les deux prochaines années aux dépenses de sécurisation alors qu'en 2017 et en 2018 une sous-exécution d'environ 10 millions d'euros a été observée. Lors de son audition devant votre commission, le ministre a d'ailleurs invité à aider à consommer cette avance de 100 millions d'euros en signalant les besoins de sécurité que les sénateurs pourraient être amenée à constater lors de leur mission à l'étranger. Il semble en fait que ce montant de 100 millions d'euros ait été déterminé de façon extrêmement théorique et ne corresponde nullement à un besoin avéré de financement, à des projets de travaux de sécurisation ou de dépenses de sécurité recensées . Vos rapporteurs pour avis souhaiteraient qu'un programme d'investissement soit rapidement défini afin que les crédits prévus soient utilisés de façon judicieuse ,

- sur les dépenses éligibles . Lors de leurs auditions, vos rapporteurs pour avis ont été alertés sur le fait que les dépenses actuellement éligibles au CAS 723, selon sa charte de gestion, ne comprennent pas les systèmes de vidéo-surveillance notamment qui constituent pourtant un outil essentiel de la mise en sécurité des emprises à l'étranger. La charte de gestion du CAS doit être adaptée au programme d'investissement qui aura été défini ,

- sur les modalités de remboursement . Le remboursement de ces avances devrait intervenir à compter de 2021 et jusqu'en 2025 grâce aux produits de cession touchés par le MEAE, notamment lors de la vente des biens immobiliers transférés à l'issue de la réforme du réseau de l'État, selon un programme que le ministère devra transmettre en 2019. En l'absence de charte de gestion toutefois, les modalités de remboursement restent incertaines , en particulier la question se pose de savoir si des mises en réserve pourraient être effectuées sur les cessions réalisées dès 2019 pour garantir le remboursement. Ce ne serait pas un principe de bonne gestion dans la mesure où les investissements nécessaires à l'entretien du parc immobilier à l'étranger pour 2019 ont déjà été programmés et dépendent de la mobilisation des produits de cession,

- sur la capacité même de remboursement du MEAE. Cette question se pose dans la mesure où le produit des cessions en 2017 et en 2018 était de l'ordre de 30 millions d'euros, ce qui correspond d'ailleurs aux prévisions pour 2019. Dans ce contexte, le remboursement de la dépense prendrait plus de trois ans et grèverait totalement la capacité du ministère des affaires étrangères de financer par les produits de cessions d'autres investissements sur cette durée . Votre commission veillera à ce que le MEAE ne se trouve pas contraint de céder certaines emprises à l'étranger pour rembourser l'avance du CAS. Le mécanisme mis en place ne doit en aucun cas donner au MAC la tentation de s'immiscer dans la programmation des cessions du MEAE. En ce sens, votre commission émet quelques réserves sur la recommandation de la Cour des comptes visant à « mettre à profit la création d'un outil interministériel de programmation pluriannuelle de l'ensemble des dépenses immobilières, pour apprécier, au plan physico-financier comme au plan de la pertinence, les dépenses et opérations (sur l'ensemble des programmes concernés-723 et 105) découlant de la stratégie d'implantation du ministère ». En effet, la politique d'implantation à l'étranger de l'État ne doit en aucun cas dépendre des seules considérations économiques. Les enjeux d'influence et de rayonnement ne doivent pas être relégués au second rang, ils doivent au contraire rester l'élément central des décisions prises dans ce domaine.

C. LE FINANCEMENT DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE : VERS L'IMPASSE ?

D'une manière générale, la politique immobilière du MEAE 33 ( * ) semble ne plus pouvoir longtemps éviter l'impasse financière vers laquelle elle est contrainte de se diriger depuis de nombreuses années, en dépit des alarmes de votre commission.

1. La rationalisation des sites parisiens tarde et assèche les produits de cession des ventes d'immobilier à l'étranger

Avec cinq sites franciliens : le Quai d'Orsay, Convention, la Courneuve, Les Invalides et Châtillon, la rationalisation sur trois sites d'implantation, décidée il y presque 10 ans, reste un voeu pieux . Le MEAE a renoncé dans un premier temps au projet de transfert de la valise à la Courneuve puis au projet de colocalisation des deux services (archives et valise) dans un même bâtiment, au profit d'un projet d 'installation du service de la valise sur le site de La Courneuve, dans un bâtiment indépendant qui serait construit sur le foncier disponible non bâti après 2021. Les rapporteurs pour avis suivront avec attention l'évolution de ce projet et de ses coûts .

Le projet de rénovation du Quai d'Orsay, dit Quai d'Orsay 21 34 ( * ) , estimé à 80 millions d'euros repose, presque pour moitié, sur des recettes issues du compte d'affectation spéciale, alimenté par les produits des cessions des biens immobiliers du ministère à l'étranger . Votre commission regrette le choix qui a été fait de financer de tels travaux par la cession des biens immobiliers du ministère situés à l'étranger, alors que le produit de ces cessions n'atteint plus que 30 millions d'euros par an.

2. Une politique immobilière à l'étranger à réinventer urgemment

La politique immobilière du ministère à l'étranger est lourdement grevée par :

- le choix de faire dépendre l'entretien normal des bâtiments des recettes exceptionnelles de cessions d'immeubles . Ce modèle, en termes économiques, n'est pas vertueux : il revient à faire financer des dépenses de fonctionnement par des recettes patrimoniales, ce qui tend à appauvrir le patrimoine de l'État . De plus, ce système a été en parti capté par le désendettement de l'État et est en voie d'essoufflement (cf. encadrés suivant). Ceci amène les rapporteurs pour avis à formuler de t rès sérieuses réserves sur la politique immobilière ici menée,

L'essoufflement du rythme et la baisse des produits des cessions

De 2006 à 2014, 194 ventes ont été signées pour un montant total de 503,12 millions d'euros, soit 12 % de la valeur actuelle du parc immobilier du ministère. Le rythme s'est ralenti puisque, entre 2012 et 2014, 35 % des biens vendus avaient une valeur inférieure à 1 million d'euros , 30 % des biens vendus avaient une valeur comprise entre 500 000 euros et 1 million d'euros et 35 % des biens vendus avaient une valeur inférieure à 500 000 euros . Certes, d'importants produits de cession ont encore été réalisés en 2015, année telle que la vente d'une partie du vaste campus diplomatique en Malaisie, à Kuala Lumpur, amenant le produit de cessions, pour 2015, à un peu plus de 230 millions d'euros . En 2016, les ventes les plus importantes portaient sur le palais Clam-Gallas à Vienne pour 22 millions d'euros et de la résidence consulaire à Munich pour 12 millions d'euros, pour un total de cessions réalisées de 66,3 millions d'euros . Les prévisions de recettes étaient de 29,77 millions d'euros en 2017 et 30 millions d'euros en 2018.

La surcontribution au désendettement de l'État

À la raréfaction de la manne financière s'ajoute le fait que le ministère n'est pas autonome dans l'utilisation des produits de cession des ventes de biens immobiliers à l'étranger. Le retour dérogatoire à 100 % sur le produit des cessions à l'étranger prévu jusqu'au 31 décembre 2017 a été aménagé, le ministère ayant accepté de « surcontribuer » forfaitairement au désendettement de l'État* , à hauteur de 25 millions d'euros par an en 2015, 2016 et 2017 . Cette contribution exceptionnelle était de 22 millions d'euros en 2014 et de 25 millions d'euros en 2015. En 2016, pour tenir compte des recettes exceptionnelles de Kuala Lumpur , la contribution a été portée à 100 millions d'euros** . Pour 2017, la contribution a été portée à 60 millions d'euros alors qu'aucune recette exceptionnelle « n'expliquait » une telle contribution au tonneau des Danaïdes de la dette de l'État. Ce sont ainsi 207 millions d'euros en 4 ans qui ont abondé le CAS au titre du désendettement , ce qui pourrait finalement représenter 50 % du montant des cessions réalisées à l'étranger sur cette période !

Depuis la modification des règles de fonctionnement du CAS immobilier, par la loi de finances pour 2017, les produits de cessions de vente ne font plus l'objet d'aucune ponction au bénéfice du désendettement de l'État. Vos rapporteurs veilleront à ce qu'il en soit ainsi à l'avenir, même si une nouvelle vente exceptionnelle devait générer une recette importante. Cette perspective est toutefois peu probable, le rythme des cessions s'essoufflant.

* Sur le programme 721 « Contributions des cessions immobilières à l'étranger au désendettement de l'État » du compte d'affectation spéciale (CAS) immobilier, adossé au programme 723.

** Alors même que la perte de plus de 20 millions d'euros résultant de l'effondrement de la monnaie malaisienne au moment de la vente, non couverte par un mécanisme limitant le risque de change a déjà été supportée par le Quai d'Orsay et non Bercy.

- l'absence de lisibilité et de prévisibilité que votre commission regrette vivement. Vos rapporteurs pour avis ne disposent pas de la prévision des cessions pour 2019 ni d'une programmation pluriannuelle des opérations de cession envisagées par le ministère ainsi que d'une présentation claire des critères de sélection des emprises dont la vente est envisagée,

- l'insuffisance chronique des crédits dédiés à l'entretien lourd des bâtiments . La dotation réservée au gros entretien des immeubles à l'étranger est de 12 millions d'euros en 2018 35 ( * ) . Faute de ressources en 2018, de nombreuses rénovations n'ont pas pu être financées 36 ( * ) . Les demandes des postes en matière d'entretien lourd remontées pour 2019 représentent 27 à 28 millions d'euros pour 2018 .

Votre commission estime le montant des crédits inscrits au P105 insuffisant pour financer les opérations d'entretien lourd pluriannuelles telles que les grosses réhabilitations, les mises aux normes générales et les réaménagements d'ensemble, les études en 2019 pour permettre de lancer des travaux liés à de gros projets d'entretien lourd pluriannuels, et les travaux de désamiantage découlant des diagnostics réglementaires amiante réalisés en 2018 sur le réseau à l'étranger. Ainsi, l'ordre de grandeur des besoins annuels du MEAE devrait être compris entre 40 et 80 millions d'euros par an 37 ( * ) .

La vente des biens immobiliers détenus par le ministère à l'étranger ne semble devoir être soutenue , selon vos rapporteurs pour avis, qu'aux conditions suivantes :

1/ interdire les nouvelles ponctions pour désendettement , aussi alléchant que soit le prix de la cession ;

2/ se baser sur un schéma pluriannuel à jour . Cette programmation pluriannuelle a été demandée par la Cour des Comptes et par tous les rapporteurs du budget. Alors qu'elle se met en place, en raison des modalités d'exercice du droit de tirage sur le CAS, on arrive à cette situation contre-productive où le ministère peut engager plus de 300 000 euros pour un projet en phase « études » sans savoir s'il pourra ensuite financer les travaux prévus l'année suivante, faute de visibilité sur son droit de tirage ;

3/ ne pas se séparer des emplacements symboliques , dont la vente nuit indubitablement à l'image de notre pays. Il ne faut continuer de vendre que pour améliorer le rayonnement de la France . Lorsqu'une vente permet de regrouper sur un même plateau tous les services français, les services consulaires, les services culturels, le poste économique, etc. et de garder une résidence bien placée, et bien calibrée , le rayonnement de la France y gagne ;

4/ acheter et interdire une opération si elle se conclut par la location 38 ( * ) qui nous fait jeter l'argent par les fenêtres à long terme. À titre d'exemple, la résidence à Bruxelles du représentant permanent auprès du comité politique et de sécurité de l'Union Européenne a été vendue en avril 2007 pour 1,63  million d'euros. Le bail souscrit après cette vente atteint un montant annuel de 77 820 euros par an. À ce rythme-là, dans une dizaine d'années, on constatera non plus une économie mais une charge nette du loyer. Or, une dizaine d'années à l'échelle d'un réseau diplomatique représente une durée extrêmement courte, pour une représentation qui n'a aucune vocation à disparaître ;

5/ développer les mutualisations et les colocalisations 39 ( * ) , en veillant à ce qu'elles ne se traduisent pas par une dépense supérieure, comme c'est le cas à Khartoum où l'ambassade construite sous maîtrise d'ouvrage allemande reviendra beaucoup plus cher qu'une localisation française 40 ( * ) selon les informations transmises à vos rapporteurs pour avis lors de leurs auditions.

***

À l'issue de sa réunion du 14 novembre, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'État ».

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 14 novembre 2018, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, a procédé à l'examen des crédits du programme 105 - Action de la France en Europe et dans le monde - de la mission « Action extérieure de l'Etat» inscrits dans le projet de loi de finances pour 2019.

À l'issue de la présentation des co-rapporteurs, un débat s'est ouvert.

M. Olivier Cadic . - Je partage pleinement l'analyse de nos rapporteurs, la politique immobilière est à bout de souffle. Elle est incohérente et illogique : on ne met pas les crédits nécessaires à l'entretien courant puis on se trouve avec des besoins énormes parce que le patrimoine s'est détérioré. Ce défaut d'entretien coût une fortune. S'agissant de la baisse de 10 % de la masse salariale, elle est vécue comme un coup de rabot. Nous avons tous l'occasion de rencontrer le personnel diplomatique lors de nos déplacements à l'étranger, on assiste à une perte de foi des agents dans l'avenir de leur action. Je pense que l'on n'a pas assez exploré la piste consistant à faire preuve de transparence sur les indemnités d'expatriation qui varient tant d'un ministère à l'autre. Il nous faut également penser à moyen terme, après 2022 et cette réduction de 10 % : comment motiver les personnels qui resteront en poste, quelle vision leur proposer ? Nous sommes en perte de dynamique quand nos grands voisins augmentent les moyens humains et financiers de leurs réseaux.

M. Ladislas Poniatowski , co-rapporteur . - Cette analyse est juste, la politique immobilière est en partie bâtie sur de fausses idées d'économies à court terme qui empirent la situation et contribuent à appauvrir l'État. Sur la réduction de la masse salariale, je voudrais apporter les précisions suivantes : après la conférence des ambassadeurs, il a été demandé aux ambassadeurs interrogés début octobre de transmettre pour le début du mois de novembre leur proposition de réduction du réseau pour 2019, puis pour le mois de décembre leur plan de réduction sur 4 ans. Cela me semble impossible. J'attends de connaître les retours et je souhaite que nous ayons un droit de regard sur les réponses apportées. Si les ambassadeurs font leur travail, ils indiqueront quelles missions ne peuvent être accomplies après application de la réduction de masse salariale demandée. Nous devrons être attentifs à ces réponses.

M. Bernard Cazeau , co-rapporteur . - J'ai été assez étonné de constater lors de la réunion d'examen des crédits de la mission par la commission des finances que nos collègues pensent qu'il y a de vraies marges d'économie sur cette mission.

Mme Hélène Conway-Mouret . - Je comprends mal comment concilier le vote des crédits de cette mission et les propos de nos rapporteurs qui nous expliquent que ce budget est une variable d'ajustement et que les économies sont réalisées de la mauvaise façon et sur les mauvaises lignes. Il me semble que voter ce budget c'est envoyer un mauvais signal au gouvernement.

M. Ladislas Poniatowski , co-rapporteur . - Notre position de vote s'appuie sur une vision globale des crédits du ministère qui connaît une très forte augmentation des crédits de l'aide publique au développement. Or lors de nos récentes auditions, il nous a bien été précisé que ces nouveaux crédits tiendraient compte des priorités définies par les ambassades, les militaires et les ONG. Je suis certes dans l'opposition mais je ne me cantonne pas à la seule critique systématique et je considère que nous pouvons dans ces termes voter les crédits de cette mission.

M. Bernard Cazeau , co-rapporteur . - J'attire également votre attention sur le fait que les crédits consacrés à la coopération structurelle retrouvent enfin leur niveau d'il y a 10 ans. Je donne, moi aussi, un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission.

M. Christian Cambon , président . - Je voudrais également vous rappeler que certaines diminutions de crédits sont mécaniques, telles que la baisse des contributions internationales obligatoires que nous a présenté nos rapporteurs. Des points de vigilance existent : le secrétaire général du quai d'Orsay l'a précisé lors de son audition, la réduction de la masse salariale s'accompagne du transfert de biens immobiliers vers le MEAE et d'un remplacement des fonctionnaires par des agents de droit local.

M. Jean-Pierre Vial , co-rapporteur du programme 209 . - Je m'abstiendrai de voter les crédits de cette mission n'ayant pas obtenu toutes les précisions nécessaires sur les modalités d'utilisation des crédits supplémentaires alloués à l'AFD.

M. Richard Yung . - L'augmentation des crédits de l'aide au développement est importante et la montée des compétences est réelle avec Expertise France. J'attends beaucoup, pour ma part, de la réforme de l'enseignement du français à l'étranger qui doit être mise en oeuvre en 2019.

M. Pierre Laurent . - Notre groupe votera contre l'adoption des crédits de cette mission. Ils démontrent une trajectoire claire et qui se confirmera en 2019 : la politique d'influence de la France se joue dans l'accroissement de son rôle militaire au détriment de sa politique diplomatique. Dans le contexte international inquiétant, la diminution de la contribution à l'ONU est un signal négatif.

M. Joël Guerriau . - Dans un contexte international où la force doit s'imposer, l'exercice d'équilibre entre les différents budgets n'est pas simple. La solution proposée me semble satisfaisante, c'est pour cela que notre groupe approuvera l'adoption des crédits de cette mission.

M. Gilbert Bouchet . - L'augmentation des moyens de l'AFD me convainc de voter pour l'adoption de ce budget.

M. Olivier Cadic . - Nous avons eu un débat interne. C'est une réelle préoccupation de voir que le gouvernement continue de raboter les outils de politique étrangère. Le MEAE est à la Défense ce que la Justice est à l'Intérieur, on ne peut pas découpler ces ministères. Nous voterons ce budget, que nous amenderons. Nous serons notamment attentifs aux réponses que nous attendons sur l'AEFE.

La commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'État », le groupe socialiste, MM. Jean-Pierre Vial et Stéphane Ravier s'étant abstenus et le groupe communiste républicain citoyen et écologiste ayant voté contre.

LISTE DES DÉPLACEMENTS ET DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Déplacement :

Le 8 mars 2018, visite des chantiers en cours sur le site du Quai d'Orsay : chantier de curage/désamiantage/déplombage de l'Aile des Archives rue de l'Université, chantier de rénovation de l'Aile des Gardes sur la rue Esnault Pelterie et chantier du 37 Quai d'Orsay.

Personnes auditionnées :

Mardi 9 octobre : Mme Hélène FARNAUD-DEFROMONT , Directrice générale de l'administration et de la modernisation du MEAE

Jeudi 11 octobre : M. Nicolas de RIVIÈRE , Ministre plénipotentiaire, Directeur général des affaires politiques et de la sécurité du MEAE et responsable du P105

Mardi 16 octobre : Mme Isabelle SAURAT , Directrice de l'immobilier de l'État au Ministère de l'économie et des finances, responsable du P723 : « Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État »

Jeudi 18 octobre : Mme Odile ROUSSEL , Directrice des immeubles et de la logistique du MEAE et M. Hubert BONNEAU , Général de brigade, Directeur de la sécurité diplomatique du MEAE

Jeudi 8 novembre : M. Didier BROUSSE , Général, Directeur de la coopération de sécurité et de défense du MEAE


* 1 Cette évolution masquait en fait un effet de périmètre avec la création d'un nouveau programme dédié à la présidence française du G7, sans que cela ne se traduise par une augmentation du total des crédits de la mission.

* 2 Hors charge de la dette et pensions.

* 3 Regroupant les contributions aux organisations à vocation européenne : Conseil de l'Europe pour 38,4 millions d'euros, Union pour l'Europe occidentale (au titre des retraites après dissolution de l'UEO) pour 1,4 million d'euros, Expertise France-Agence française d'expertise technique internationale(AFETI) pour 1,2 million d'euros, OSCE-Fonds fiduciaire pour 1 million d'euros, etc.

* 4 Conférence des ambassadeurs et des ambassadrices du 27 août 2018 - discours d'Emmanuel Macon, Président de la République.

* 5 Soit 102,2 millions d'euros de fonctionnement.

* 6 Le programme de transformation Action publique 2022 (AP2022) a été lancé le 13 octobre 2017, par le Président de la République et le Premier ministre, afin de transformer l'action publique en poursuivant les trois objectifs suivants : « améliorer la qualité de service en développant la relation de confiance entre les usagers et l'administration, offrir un environnement de travail modernisé aux agents publics en les impliquant pleinement dans la définition et le suivi des transformations, accompagner la baisse de la dépense publique », selon le site du portail de la modernisation de l'action publique (www.modernisation.gouv.fr).

* 7 La mise en place de loyers budgétaires visait à rationaliser l'occupation des locaux grâce à des mécanismes de sanctions-incitations. Ceux-ci n'ayant jamais été appliqués au MEAE, les loyers budgétaires, inscrits chaque année sur son budget, augmentaient artificiellement le montant de ses crédits de fonctionnement.

* 8 La fermeture de la mission des Nations unies au Libéria (MINUL) était prévue le 31 mars 2018.

* 9 Mission des Nations unies en République démocratique du Congo

* 10 Force intérimaire de sécurité des Nations unies pour Abiyé au Soudan.

* 11 Mission au Soudan du Sud.

* 12 Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali.

* 13 Mission des Nations unies en Haïti.

* 14 Mission des Nations unies pour l'appui à la justice en Haïti.

* 15 Le vote de barème 2019 intervient en décembre 2018.

* 16 D'après le Centre for Economics and Business Research , la France n'est plus classée qu'à la 7 e place de l'économie mondiale.

* 17 Il s'agissait des loyers de 10 sites localisés à Paris, Nantes et Strasbourg.

* 18 La dotation réservée au gros entretien des implantations à l'étranger est passée de 2 millions d'euros en 2015 à 7 millions d'euros en 2016 puis 12 millions d'euros en 2017 .

* 19 Un rapport de l'Inspection générale des finances de 2003 en avait recensé une quarantaine, très dispersées, relevant de ministères différents avec des statuts différents.

* 20 80 % sont destinés au logement des agents du réseau français à l'étranger ce qui rend ces biens peu « vendables ».

* 21 Les agents expatriés, titulaires ou contractuels, civils ou militaires (depuis 2015) bénéficient d'une indemnité de résidence à l'étranger (IRE) destinée à compenser les charges liées aux fonctions, à leurs conditions d'exercice et aux conditions locales d'existence, notamment le maintien de leur pouvoir d'achat. Les agents sont rémunérés en euros et le mécanisme change-prix consiste à ajuster leur IRE pour compenser les effets de change et de prix. S'y ajoute, depuis 2011, un mécanisme de couverture de perte au change pour les rémunérations, versées en devises, des agents de droit local. Extrait de la Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2017 - Mission Action extérieure de l'État de la Cour des Comptes.

* 22 Sur la même période, les ETP en poste à l'étranger ont diminué de 10 % pour le ministère des Armées et pour le ministère des Finances et ont progressé de 3 % pour le ministère de l'intérieur.

* 23 Notamment la question de l'abattement de l'IRE pour les couples.

* 24 Et les remarques de la Cour des comptes sur ce sujet.

* 25 Toutefois, en réponse aux questions posées par vos rapporteurs pour avis, les éléments suivants ont été communiqués :

- Sur les PPD : Les 25 ambassades en format PPD disposaient avant la réforme d'un total de 395,5 ETP. 219,5 ETP ont été supprimés ce qui représente une baisse de 55% des effectifs . L'ensemble de ces postes compte 174 ETP ce qui représente une moyenne de 7 ETP par ambassade en format de présence diplomatique.

- Sur l'exercice Grands formats qui visait à réduire de l'ordre de 10% les effectifs MEAE des 33 postes les mieux dotés en ETP pour réorienter une partie de ces effectifs vers les pays prioritaires (pays émergents du G20). L'exercice portait donc sur 4818 ETP dans 33 ambassades en 2012. En 2016 au terme de l'exercice, les effectifs avaient été réduits de 353,5 ETP soit une baisse de 8% . Les ambassades dans les 11 pays émergents du G20 ont bénéficié en moyenne en contrepartie d'une dotation en augmentation de 4%. Plus précisément, 7 de ces 11 ambassades ont bénéficié d'une augmentation (Mexique, Arabie Saoudite, Corée du sud, Indonésie, Chine, Inde et Turquie) ou les effectifs en Afrique du Sud ont été stabilisés.

* 26 La comparaison des réseaux a ses limites, compte tenu des différences de périmètre (notamment action culturelle et APD).

* 27 Tels que notamment la lutte contre le terrorisme, les trafics, la criminalité organisée ou la piraterie.

* 28 Sur 2015-2019, l'effort global de la DCSD s'élève à moins 35 ETP .

* 29 Elle est une direction interministérielle du MEAE : les agents du ministère y sont minoritaires (16 %), par rapport aux personnels issus des armées représentant (73 %) et ceux de l'intérieur (11 %). Cette direction anime une coordination interministérielle approfondie , en étant en liaison quotidienne avec les armées (via la DGRIS, mais aussi l'EMA) et le ministère de l'intérieur (essentiellement via DCI, mais pas exclusivement, en matière de protection civile par exemple), mais aussi avec le SGDSN, ou tout autre ministère en lien avec ses missions de coopération structurelle militaire, sécuritaire et de protection civile : douanes, justice...

* 30 Réunissant les directeurs généraux politiques du Quai, les personnels en charge des relations internationales de sécurité du ministère des armées et du directeur de la coopération internationale du ministère de l'intérieur. La direction générale des douanes y est observatrice.

* 31 Pour mémoire, en 2018, les principaux postes concernés (opérations engagés pour des montants supérieurs à 0,5 M€) étaient les suivants : Singapour, Centrafrique (Bangui), Togo (Lomé), Côte-d'Ivoire (Abidjan), Arabie Saoudite (Riyad), Oman (Mascate), Jérusalem, Liban (Beyrouth), Djibouti, Irak (Bagdad), Jordanie (Amman), Guinée Équatoriale (Malabo), Sri Lanka (Colombo), République Démocratique du Congo (Kinshasa), Tunisie (Tunis).

* 32 Ce plan concerne également les établissements scolaires du réseau de l'AEFE. En 2019, Les principales opérations concerneront :

- pour des opérations nouvelles : Afghanistan, Afrique du Sud, Algérie, Brésil, Burkina Faso, Canada, Chine, Cuba ;

- pour des poursuites d'opérations : Côte d'Ivoire, Djibouti, Guinée Équatoriale, Grèce, Libye, Mali, Mauritanie, Oman, Serbie, Soudan.

* 33 Au 31 décembre 2016, le patrimoine du ministère représentait 4,328 milliards d'euros (en diminution car au 31 décembre 2014, il était évalué à 4,9 milliards d'euros et 5,349 en 2012). Au total, on compte un peu moins de 2 millions de mètres carrés de surface utile brute , pour environ 1 700 bâtiments répartis dans 170 pays, dont la France.

* 34 Il doit permettre de rénover l'aile des Archives (vacante depuis le transfert des Archives diplomatiques à La Courneuve en 2009), et de créer 300 postes de travail supplémentaires sur le site (dans les ailes en retour prolongées ou rehaussées et dans un bâtiment neuf à construire dans la cour des Archives). Il s'accompagnera également d'une mise aux normes des autres bâtiments du site.

* 35 Elle est passée de 2 millions d'euros en 2015 à 7 millions d'euros en 2016 puis 12 millions d'euros en 2017 et en 2018.

* 36 Exemples de rénovations envisagées mais non financées en 2018 sur le programme 105 :

- Rénovation technique du campus diplomatique d'Helsinki (2 M€) ;

- Rénovation technique de l'immeuble de France à Moscou (3,6 M€ à réaliser sur 6-7 ans) ;

- Rénovation de la cité Lamy à N'Djamena (0,8 M€)

- Rénovation de l'Institut à N'Djamena (0,5 à 1 M€) ;

- Rénovation de la résidence à Québec (0,8 M€) ;

- Poursuite de la rénovation du Palais Dos Santos à Lisbonne (ambassade) ;

- Rénovation de la résidence d'Édimbourg (0,5 M€) ;

- Rénovation de la résidence de Dublin (0,6 M€) ;

- Rénovation de la résidence à Tunis (6,6 M€) ;

- Rénovation des menuiseries des logements Delacroix à Rabat (1,7 M€).

* 37 Les ratios permettant d'évaluer ce besoin annuel peuvent être calculés de deux façons :

-soit en se référant au « niveau correct » des financements d'entretien lourd à consacrer aux bâtiments, à savoir entre 1% et 2% de la valeur du bien. La valeur du patrimoine à l'étranger étant estimée à 4 milliards d'euros, le besoin serait compris entre 40 et 80 millions d'euros.

-soit en retenant un coût moyen par an et par m 2 de bâtiment à consacrer à son entretien lourd d'environ 50€/m 2 , ce qui, pour les surfaces du MEAE à l'étranger, établies à 1.4 M m 2 , conduirait à réserver un montant d'environ 70 millions d'euros.

* 38 La location ne doit être qu'une exception temporaire.

* 39 Avec le Service européen d'action extérieure , les projets sont aboutis :

-  Depuis 2008, le Bureau de coopération technique est situé au sein de la Casa Europa à Dili

- Le MEAE loue à l'Union Européenne la chancellerie à Kigali

- Cinq colocalisations sont effectives à Djouba, Tegucigalpa, Port-Moresby (PPD), Assomption (PPD) et Gaziantep

- La future ambassade de France à Abuja sera construite sur un terrain acquis avec le Service européen d'action extérieure et des partenaires européens.

Huit implantations diplomatiques ou consulaires franco-allemandes sont effectives :

- L'ambassade de France accueille à Pékin un centre médical de santé franco-allemand depuis 2011

-  La France héberge depuis novembre 2012 la représentation allemande à Brazzaville au sein de son ambassade

- Le Bureau de coopération français de Pyongyang est installé depuis septembre 2013 avec la représentation suédoise au sein de la chancellerie allemande

- L'Allemagne a ouvert le 13 décembre 2013 son Consulat général à Rio de Janeiro au sein de la Maison de France

- Les chancelleries diplomatiques à Asmara et Bandar Seri Begawan (PPD) sont accueillies au sein des ambassades d'Allemagne, respectivement depuis décembre 2014 et mars 2015

- Depuis juillet 2016 les ambassades française et allemande sont colocalisées au sein d'un plateau de bureaux à Koweït-City

- À Dacca l'ambassade conjointe franco-allemande, dont la France est pilote de l'opération, a été livrée en mai 2017.

* 40 Les exigences sécuritaires et le recours systématique à des prestataires allemands surenchérissent largement le coût de la construction.

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