C. UNE MISSION APD EN PROGRESSION AU SEIN DU PLF 2019

Le Gouvernement a présenté un budget 2019 de la mission « Aide publique au développement » en hausse de près de 130 millions d'euros en crédits de paiement par rapport aux crédits votés en 2017, et surtout en augmentation de 1,8 milliard d'euros en autorisations d'engagement.

1. Des crédits de la mission en hausse de 4,7%

La mission interministérielle « Aide publique au développement » rassemble les crédits de deux programmes concourant à la politique française d'aide au développement : le programme 110 « Aide économique et financière au développement », mis en oeuvre par le ministère de l'économie et des finances, et le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », mis en oeuvre par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

Dans le projet de loi de finances pour 2019, le budget de la mission interministérielle « Aide publique au développement » s'élève à 3 098 millions d'euros en crédits de paiement , ce qui représente une hausse de 398 millions d'euros.

Toutefois, au sein de ce montant, 270 millions d'euros correspondent à la rebudgétisation de la part de taxe sur les transactions financières qui était affectée directement à l'AFD en 2017 à la suite d'un amendement voté par les députés lors de l'examen du PLF 2018. Le Gouvernement a en effet considéré qu'il était de meilleure gestion de réintégrer ce montant au sein des programmes 110 et 209. En conséquence, la hausse n'est en réalité que de 128 millions d'euros, soit une hausse d'environ 4,7% par rapport aux crédits demandés en LFI pour 2018 (2 700 millions d'euros). Rappelons que l'augmentation était de 3,6% en 2017 et 5,3% en 2016, année du retournement après une baisse continue sur plusieurs années.

Par ailleurs, les recettes extrabudgétaires (TTF et taxe sur les billets d'avion) affectées au fonds de solidarité pour le développement (FSD) s'élèveront à 738 millions d'euros, comme en 2017.

En revanche, les autorisations d'engagement de la mission connaitront une hausse très significative , passant de 2 684 millions d'euros à 4 519 millions d'euros, soit une hausse de 1 835 millions d'euros, +68%, une grande partie de cette progression étant affectée à l'AFD pour ses dons-projets.

a) Les crédits du programme 110 : une hausse de 2,5%

en millions d'euros

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2018

PLF 2019

évolution

LFI 2018

PLF 2019

évolution

Aide multilatérale

431

72

-83 %

594

648

+9 %

Aide bilatérale

410

1 239

+202%

263

339

+29 %

Traitement de la dette des pays pauvres

0

0

-100 %

104

92

-11,5 %

Total du programme 110

841

1 310

+56%

961

1 079

+12,2 %

Source : projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2019.

Les crédits de paiement du programme 110 passent de 961 à 1 079 millions d'euros, soit une augmentation de 12,2%. Tous les postes de dépenses sont en progression au sein du programme.

À noter que l'évolution très importante des autorisations d'engagement d'une année à l'autre résulte du rythme des reconstitutions de fonds multilatéraux, qui implique un fort montant d'autorisations l'année de la reconstitution puis des crédits de paiement les années suivantes.

(1) Une aide multilatérale pour laquelle l'Afrique subsaharienne constitue aussi une priorité

Les crédits du programme 110 permettent notamment d'alimenter les contributions de la France aux institutions internationales : Fonds monétaire international (FMI), Banque mondiale, Banque africaine de développement (BAfD), Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), Banque interaméricaine de développement (BID), Banque asiatique de développement (BAsD), Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures (BAII ou AIIB), Fonds international de développement agricole (FIDA).

Il est important de remarquer que ces institutions financières internationales apportent un soutien croissant aux pays pauvres, notamment en Afrique subsaharienne, pays prioritaires de l'aide française .

Nouveaux engagements des IFI en Afrique subsaharienne en 2017

Nouveaux engagements en Afrique subsaharienne en 2017

Groupe Banque mondiale : 16,2 Mds$

Dont AID : 10,7 Mds$

BIRD : 1,2 Mds$

SFI : 2,3 Mds$

MIGA : 1,04 Md$

Groupe Banque africaine :

5,3 Mds DTS

FMI : 1 726 MDTS

Compte general : 0 MDTS

FRPC : 1491 MDTS

FIDA : 453 M$

Source : rapports annuels

La France soutient notamment la facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC) du FMI (7 millions d'euros en AE=CP prévus pour 2019) . Sa contribution y est très importante (2 ème contributeur mondial avec 6,9 milliards de DTS) et nettement supérieure à sa quote-part actuelle au sein du FMI. Elle a pris jusqu'ici la forme de prêts concessionnels mis en oeuvre par l'AFD, pour le compte de l'Etat qui les bonifie par des moyens budgétaires, et a fait l'objet de cinq accords internationaux successifs en 1988, 1995, 1999, 2001 et 2009. Ce dernier accord, pris dans le cadre de l'appel à contribution lancé par le FMI en 2005, a permis l'octroi par l'AFD d'un prêt concessionnel de 670 millions de DTS au FMI. En outre, deux prêts de 1,328 milliard et de 2 milliards de DTS, portés par la Banque de France et garantis par l'Etat, sont entrés en vigueur en juillet 2010 et février 2018. Ainsi, au total, les engagements de prêts de la France atteignent 6,9 milliards de DTS, soit près de 18,3% du total des engagements de prêts reçus par la FRPC, ce qui place la France en deuxième position, derrière le Japon .

Il en va de même pour l'aide apportée par la Banque mondiale (346 millions d'euros de crédits de paiement prévus pour 2019), pour laquelle l'Afrique subsaharienne, qui concentre la majeure partie des pays à faible revenu, constitue une zone prioritaire, principalement pour le fonds concessionnel AID (Association Internationale du développement). Durant l'exercice budgétaire 2017, celui-ci s'est engagé en Afrique subsaharienne à hauteur de 10,7 Md$ sous forme de financements concessionnels. La dix-huitième reconstitution des ressources de l'AID, dont les négociations se sont conclues fin 2016 et qui concerne le cycle 2018-2020, a vu son volume augmenter de 50% par rapport à l'AID-17. Cette augmentation s'accompagne d'un effort renforcé pour les pays fragiles et donne lieu à une augmentation substantielle des financements destinés à l'Afrique subsaharienne , l'AID ayant pour objectif d'y engager 15 Md$ par an à partir de l'exercice 2018.

En outre, l'Afrique subsaharienne concentre 5,3 Mds d'unités de comptes (UC) d'engagements du groupe de la Banque africaine de développement (à laquelle le programme 110 contribuera pour 123 millions de CP en 2019) en 2017 sur un total de 6,2 Mds UC, soit 85% des engagements. Ce montant total d'engagements en Afrique subsaharienne de 5,3 Mds UC inclut le Fonds africain de développement (FAD), dont la totalité des engagements (959 millions d'UC) va à l'Afrique subsaharienne, et la BAfD (qui prête par ailleurs également à l'Afrique du Nord).

Enfin, en 2017, le FIDA (avec une contribution de 12,3 millions d'euros du programme 110 en 2019) soutient 35 projets en cours dans 21 pays en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale pour un montant de 1,2 milliard d'USD et 42 projets dans 17 pays sont également en cours en Afrique orientale et australe pour un montant de 1,6 milliard d'USD. L'Afrique subsaharienne concentre donc 2,8 milliards d'USD des investissements en cours du FIDA en 2017 . Sur la période 2016-2018, le FIDA s'est donné pour objectif de concentrer 45% de ses financements dans cette région. Dans le cadre de sa 11 ème reconstitution, le FIDA vise un objectif de 1,2 milliard d'USD pour financer un programme de prêts et dons d'un montant total de 3,5 milliards d'USD pour la période 2019-2021. Il continuera d'accorder 50% de ses ressources à l'Afrique, dont 45% à l'Afrique subsaharienne.

Ainsi, les grandes institutions multilatérales auxquelles la France contribue partagent sa priorité africaine .

(2) D'importantes contributions « climat » tant bilatérales et multilatérales

Le programme 110 contribue pour 120 millions d'euros d'AE et 25 millions de CP au fonds français pour l'environnement mondial (FFEM) .

Le Fonds Français pour l'environnement mondial

Le FFEM est un fonds public bilatéral créé en 1994 par le gouvernement français à la suite de la conférence des Nations unies pour l'environnement et le développement de Rio (1992). Comme le Fonds pour l'environnement mondial qui lui a servi de modèle, le FFEM a pour mandat de cofinancer des projets contribuant à deux grands objectifs : la préservation de l'environnement mondial et le développement local.

Le FFEM est désormais rattaché à la direction de l'innovation, de la recherche et des savoirs (IRS) au sein de l'AFD et son secrétariat est situé dans les locaux de l'agence. L'AFD fournit à ce dernier les moyens humains et matériels nécessaires à son fonctionnement. L'AFD est chargée de la gestion financière du FFEM. Les fonds du FFEM sont versés sur un compte ouvert dans les livres de l'Agence. L'AFD signe, en son nom mais pour le compte et aux risques de l'Etat, d'une part les conventions, marchés et contrats concernant les projets financés par le FFEM et, d'autre part, les actions hors projets. Elle effectue les règlements sur ces conventions, marchés et contrats. Enfin, l'AFD est une des institutions-membres du FFEM et, à ce titre, bénéficie d'une partie des fonds du FFEM en portant des projets pour engagement par le Comité de pilotage.

Le FFEM est l'homologue bilatéral du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et s'est fixé les mêmes objectifs. Il est donc nécessaire de développer les synergies entre les deux fonds. Ainsi, le secrétaire général du FFEM est membre suppléant du Conseil du FEM, aux côtés du représentant de la DG Trésor. En outre, des financements conjoints du FFEM et du FEM sont recherchés dans la limite de 20% des concours du FFEM. De même, sur le volet climatique, le FFEM peut constituer un tremplin pour la présentation de projets au Fonds vert pour le climat (FVC).

Par ailleurs, une partie de la contribution française au Fonds vert transite par le programme 110 : un prêt très concessionnel de 285 millions d'euros de l'AFD, versé en une seule fois fin 2017, a en effet donné lieu à des bonifications portées par ce programme.

La stratégie globale et la stratégie française de lutte contre le changement climatique sont décrites plus précisément ci-dessous.

(3) Une forte hausse des crédits de bonification des prêts accordés à l'étranger par l'AFD : 994,50 millions d'euros d'AE et 192,30 millions d'euros de CP

En 2017, l'AFD a octroyé 4,6 milliards d'euros de prêts concessionnels dans les États étrangers, dont 4 milliards d'euros de prêts souverains et 0,7 milliard de prêt à des contreparties non souveraines. En 2017 et 2018, les AE demandées avaient progressé de 294 millions d'euros à 370 millions d'euros, ce qui correspondait au début de mise en oeuvre des décisions du CICID de novembre 2016 d'une hausse de l'activité de 4 milliards d'euros en 2020 (soit 12,5 Md€ d'octrois en 2020, à partir du volume d'octrois de 8,5 Md€ en 2016, fixés par le contrat d'objectifs et de moyens 2014-2016), pour une cible d'activité de 9 milliards d'euros d'octrois en 2016 et 9,5 milliards d'euros d'octrois en 2017.

En 2019, les AE augmentent à 994,5 millions d'euros, soit une hausse de plus de 624 millions d'euros par rapport à 2018, en cohérence avec la poursuite de la montée en puissance prévue pour l'activité globale de l'agence .

(4) Des aides budgétaires globales (ABG) en hausse significative

Il est prévu de consacrer, en 2019, 60 millions d'euros aux ABG. Les ABG visent à apporter un soutien budgétaire aux stratégies nationales de lutte contre la pauvreté, de stabilisation macro-économique et d'amélioration de la gestion des finances publiques des pays partenaires. Elles ne servent pas à financer un projet particulier.

Les ABG bénéficient essentiellement à des pays et institutions d'Afrique subsaharienne. Au cours des dernières années, les principaux pays qui en ont bénéficié sont la République centrafricaine, le Niger, le Mali et le Burkina Faso.

L'année précédente, les crédits étaient passés de 37 millions d'euros à 10 millions d'euros mais cette diminution sur le programme 110 avait été compensée par le financement de 50 millions d'euros d'ABG sur le Fonds de solidarité pour le développement (FSD). Au total, ce sont donc 60 millions d'euros qui étaient consacrés aux ABG l'année dernière : ce montant est reconduit en 2019 mais entièrement intégré au programme 110.

En tout état de cause, vos rapporteurs se félicitent du maintien de cet outil dont votre commission avait plusieurs fois regretté l'extinction progressive.

b) Le programme 209 : une très forte hausse en autorisations d'engagement, une hausse plus modérée en crédits de paiement

en millions d'euros

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2018

PLF 2019

évolution

LFI 2018

PLF 2019

évolution

Aide bilatérale

683

1 990

+191,22

573

793

+38,42 %

Aide multilatérale

145

188

+29,84 %

151

194

+28,71 %

Union européenne

850

878

+3,32 %

850

878

+3,32 %

Dépenses de personnel concourant au programme

165

153

-7,31 %

165

153

-7,31 %

Total du programme 209

1 843

3 209

+74,10 %

1 739

2 018

+16,08 %

Source : projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2019.

Alors que l'aide bilatérale avait progressé de 3% lors de l'exercice précédent, la hausse est cette fois massive avec +38,42% en crédits de paiement, et surtout +191% en autorisations d'engagement, ce qui correspond à la remontée en puissance attendue de l'AFD sur les dons-projets.

(1) La coopération bilatérale
(a) Des « dons-projets » en forte hausse

Les « dons-projets » sont les subventions versées de manière bilatérale en vue de financer des projets de développement. Ils ont connu une baisse importante ces dernières années alors qu'ils constituaient auparavant l'essentiel de l'aide au développement .

Pour 2019, ces dons-projets se montent à environ 1,63 milliard d'euros en autorisations d'engagement et environ 437 millions d'euros en crédits de paiement, contre environ 468 millions d'euros en autorisations d'engagement et environ 358 millions d'euros en crédits de paiement en 2018.

Il s'agit donc d'une progression très substantielle, répondant aux annonces faites par le Président de la République sur l'objectif des 0,55% du RNB consacrés à l'APD.

Les dons-projets sont répartis entre quatre canaux :

- l'AFD en attribue la plus grande part. Alors qu'ils se montaient à 396 millions d'euros en AE et 286 millions d'euros en CP du PLF 2018, les dons-projets de l'AFD passent à 1,320 milliard d'euros en autorisation d'engagement et 280 millions d'euros en crédits de paiement au sein du PLF 2019. Il s'agit de la plus forte augmentation du budget de la mission APD en 2019. Le projet annuel de performance indique qu'« une attention particulière sera donnée à la déclinaison sectorielle du milliard d'euros additionnel, afin que son utilisation soit conforme à la vision politique forte et renouvelée portée par le CICID ». Il s'agit notamment de favoriser les secteurs de l'éducation, de la santé, de l'environnement, ainsi que, de manière plurisectorielle, les pays en crise ;

- les financements transitant par les ONG étaient passés de 79 millions d'euros en 2017 à 77 millions d'euros en 2018 ; conformément à l'engagement du Président de la République de doubler ce canal d'acheminement de l'aide d'ici la fin du quinquennat, ils progressent à 97,8 millions d'euros en AE en 2019 (85 millions d'euros en crédits de paiement) ;

- le fonds « Minka » (la facilité vulnérabilité et réponse aux crises) sera doté de 190 millions d'euros en AE et 47,5 millions d'euros en crédits de paiement ;

- enfin, 24 millions d'euros alimenteront les nouveaux fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI). Il s'agit de l'instrument de l'aide projet du ministère des affaires étrangères qui remplace le FSP depuis 2017, afin de s'adapter aux recommandations du CICID et de simplifier les procédures. Ce nouveau dispositif se traduit par la suppression de la pluri-annualité des crédits, l'abandon du caractère interministériel de la procédure et la mise en place de procédures simplifiées d'approbation des projets, enfin une concentration des moyens sur les 16 pays prioritaires (PPP, au moins 50% des autorisations d'engagement), l'Afrique subsaharienne et les pays voisins de la Méditerranée (ASM).

Au total, on observe donc une forte progression, du moins en autorisations d'engagement, des crédits budgétaires consacrés aux dons , particulièrement nécessaires pour les pays les plus en difficulté.

En 2017, 51% de ces ressources ont bénéficié à des PMA, 64% à l'Afrique subsaharienne et 20% à la zone Méditerranée et Moyen-Orient. La baisse entre 2016 et 2017 de ces deux parts s'explique par la hausse des activités de l'AFD en zone Méditerranée et Moyen-Orient, non par la diminution des engagements correspondants :

La répartition des autorisations d'engagement en dons projets par secteur (CICID 2013) est présentée ci-dessous, en millions d'euros :

L'analyse des montants des engagements relatifs aux dons projets par pays en 2017 montre une forte dispersion :

L'augmentation du volume de l'enveloppe disponible devrait permettre de diminuer cette dispersion, de financer davantage de gros projets, avec un impact plus important sur le bien-être des populations des pays bénéficiaires.

(b) Une grande diversité d'aides bilatérales

Hors dons-projets, les aides bilatérales recouvrent des types d'aide très divers.

Parmi les montants les plus importants, les contrats de désendettement et de développement (C2D) 1 ( * ) liés à l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, concentrent en 2019 un financement de 52 millions d'euros (contre 48,4 millions en 2017). Le programme 209 de la mission APD ne prend en compte que la part de l'AFD sur ces contrats, celle de l'Etat étant inscrite dans la mission « Prêts à des États étrangers ». L es principaux pays concernés par les C2D en 2019 seront le Cameroun, la Guinée et la RDC. La RDC et la Côte d'Ivoire devraient signer un nouveau contrat en 2018 .

Les crédits de gestion de crise et de sortie de crise, pour leur part, connaissent une augmentation significative, passant de 86 millions d'euros en 2018 à 100 millions d'euros en 2019. Ces crédits comprennent les aides budgétaires post-conflit et sortie de crise 2 ( * ) (14 millions d'euros) ; le fonds d'urgence humanitaire (FUH, 45,6 millions d'euros), principal instrument financier du Centre de crise et de soutien (CDCS), dont les missions dans ce domaine sont menées par la mission pour l'action humanitaire (MAH) et la mission de stabilisation (MS) ; enfin l'aide alimentaire (40 millions d'euros) .

Par ailleurs, la rémunération de l'AFD pour les actions qu'elle mène pour le compte de l'Etat (dons-projets, dont assistante technique et ONG, C2D et crédits délégués) s'élèvera à près de 100 millions d'euros en 2019, logiquement en très forte augmentation par rapport à 2018 (35,2 millions d'euros) en raison de l'attribution d'un milliard d'AE supplémentaires à l'agence pour réaliser des dons .

Enfin, le soutien à la coopération décentralisée est en légère progression, à hauteur de 9,2 millions d'euros en 2018 contre 8,9 millions d'euros en 2017.

(2) La coopération multilatérale et européenne
(a) La contribution au Fonds européen de développement (FED) : 878 millions d'euros en 2018

Le FED, instrument spécifique situé hors du budget de l'Union européenne, a été créé en 1957.

Les États membres de l'Union européenne ont signé, le 24 juin 2013, un « accord interne » instituant le 11 ème fonds européen de développement qui couvre la période 2014-2020. Dans le cadre de l'accord de partenariat ACP - UE signé à Cotonou en 2000, les objectifs poursuivis par ce 11 ème FED sont « l'éradication de la pauvreté, le développement durable et l'intégration progressive des Etats ACP dans l'économie mondiale ». Ses considérants prévoient en outre : « il y a lieu d'accorder un traitement particulier aux pays les moins avancés ».

Le 11 ème FED est doté d'un montant total de 30,5 milliards d'euros pour la période 2014-2020. Les clés de répartition entre les États membres de l'Union européenne ont été fixées dès les conclusions du Conseil européen des 7 et 8 février 2013 relatives au cadre financier pluriannuel de l'Union. Elles sont reprises à l'article 1 er de l'accord interne instituant le fonds. Le premier pays contributeur reste ainsi l'Allemagne avec 20,6% de l'enveloppe totale, puis viennent la France (17,8%), le Royaume-Uni (14,7%) et l'Italie (12,5%).

La contribution de la France continue de diminuer pour s'aligner progressivement sur sa clé de contribution au budget général de l'Union européenne : elle contribuait au 9 ème FED (2000-2007) à hauteur de 24,3% et au 10 ème FED (2008-2013) à hauteur de 19,6%. Pour le 11 ème FED (17,8%), sa contribution totale s'élèvera à 5,4 milliards d'euros, soit une moyenne annuelle de 776 millions.

La Commission européenne a présenté, le 2 mai 2018, sa proposition pour le prochain cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 . Celle-ci est assortie d'une proposition de règlement pour un instrument couvrant le voisinage, le développement et la coopération internationale, lequel intègrerait notamment le FED. L'objectif de la Commission est d'arriver à un accord avant la fin de la législature du Parlement européen actuel.

Alors que la Commission justifie sa proposition par son souhait de procéder à une simplification de l'architecture actuelle des instruments européens d'action extérieure, la recherche d'une cohérence et d'une lisibilité accrues de celle-ci, il paraît impératif que le Gouvernement s'efforce de sécuriser les fonds alloués à l'Afrique subsaharienne et à l'Afrique du Nord, de préserver la prévisibilité des financements ainsi que la capacité dont disposeront les États membres pour piloter l'instrument .

Par ailleurs, la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne est source d'incertitudes à court et moyen termes sur les instruments européens de développement . Le Brexit aura des conséquences financières importantes pour le FED, la contribution du Royaume-Uni au 11 ème FED s'élevant à 4,5 milliards d'euros, soit 14,7 % du fonds.

Le Royaume-Uni a toutefois appelé de ses voeux une architecture du développement de l'UE ouverte à des ressources extérieures affectées, afin de maintenir une possibilité de coopération sur des priorités thématiques et géographiques d'intérêt mutuel. La position officielle de l'UE sur ce sujet devra être précisée dans le cadre des négociations en cours sur le Brexit. En tout état de cause, une contribution britannique au FED, dans l'éventualité où celui-ci ne serait pas budgétisé, supposerait une modification des bases légales de l'instrument afin de permettre la contribution d'États tiers.

(b) Les autres aides multilatérales financées par le programme

Les contributions volontaires de la France à des organisations des Nations unies sont essentiellement concentrées sur quatre organismes : le PNUD (programme des Nations unies pour le développement), le HCR (haut-commissariat aux réfugiés), UNICEF (fonds des Nations unies pour l'enfance) et l'UNRWA (réfugiés de Palestine).

Le discours prononcé par le Président de la République devant l'Assemblée générale des Nations unies le 19 septembre 2017, plaidoyer en faveur du multilatéralisme, suppose la poursuite d'un soutien politique et financier importants. Dès lors, le CICID du 8 février 2018 a notamment prévu :

- la participation de la France à l'augmentation des financements destinés à l'action d'urgence humanitaire et de stabilisation en sortie de crise. Il s'agit notamment de renforcer l'aide de la France aux agences répondant à la crise humanitaire des réfugiés, principalement syriens. Malgré cette augmentation, la France reste le 20 ème bailleur humanitaire ;

- le versement par le MEAE d'une contribution volontaire de 10 millions d'euros par an à l'UNESCO, afin d'appuyer des programmes dans la région d'Afrique de l'Ouest-Sahel sur des priorités thématiques telles que l'éducation des filles et la production de biens publics mondiaux (renforcement des systèmes de collecte de données en éducation notamment).

Enfin, la mission « Aide publique au développement » regroupe également des crédits pour la francophonie : 48,4 millions d'euros sont ainsi prévus en 2019, sans évolution notable par rapport à 2018. Ces crédits financent le loyer de la Maison de la francophonie, l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) et divers opérateurs (Agence universitaire de la francophonie, association internationale des maires francophones...).

(3) Les dépenses de personnel concourant au programme

Les dépenses de personnel concourant au programme 209 diminuent d'environ 11 millions d'euros de 2018 à 2019, passant de 164 millions d'euros à 153 millions d'euros. Ces personnels relèvent principalement de la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats (DGM), direction qui est aussi responsable du programme « Diplomatie culturelle et d'influence », et des 112 services de coopération et d'action culturelle (SCAC).

2. La rebudgétisation d'une partie de la taxe sur les transactions financières (TTF)

La France a mis en oeuvre la taxe sur les transactions financières (TTF) à partir de juillet 2012, conformément aux engagements du Président de la République à la tribune des Nations unies ainsi qu'au G8 et au G20. La TTF est une taxe de 0,2% sur les acquisitions de titres de capital 3 ( * ) , qui comprend également deux autres dispositifs : une taxe sur les ordres annulés dans le cadre d'opérations à haute fréquence et une taxe sur les acquisitions de contrats d'échange sur défaut d'un État ( Credit default swaps ).

Conformément aux engagements du Président de la République, une partie des recettes de la TTF française est affectée à la lutte contre le changement climatique et les grandes pandémies, par le biais d'une affectation au fonds de solidarité pour le développement (FSD) . Le reste des recettes de la TTF est affecté au budget général de l'État. La part maximale pouvant être affectée au développement a progressivement augmenté, passant de 10% des recettes en loi de finances pour 2013 avec un plafond de 60 millions d'euros, à 15% dans celle pour 2014 (plafond de 100 millions d'euros), puis 25% dans celle pour 2015 (plafond de 140 millions d'euros). La loi de finances pour 2016 a supprimé la notion de pourcentage d'affectation du produit de la TTF au FSD, augmenté le plafond à 260 millions d'euros et prévu en sus une affectation directe de 25% du produit de la taxe à l'AFD. Lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2017 à l'Assemblée nationale, les députés ont à nouveau adopté un amendement affectant directement une part supplémentaire de 270 millions d'euros de TTF à l'AFD , soit un total de 798 millions de TTF utilisés en faveur de l'aide au développement, compte tenu d'un versement de 528 millions d'euros au FSD.

Lors de l'examen du PLF 2018, en séance publique, les députés avaient, une nouvelle fois, adopté contre l'avis du Gouvernement un amendement ayant pour effet de préserver l'affectation de 270 millions issus de le TTF directement à l'AFD.

Au sein du PLF 2019, le Gouvernement a fait le choix de « rebudgétiser » à nouveau ce montant de 270 millions d'euros de TTF , mais en direction du budget général, et non du FSD, ce dernier recevant pour sa part, comme l'année précédente, 528 millions d'euros issus de la TTF.

Parallèlement, les crédits de la mission « Aide publique au développement » ont été augmentés de 270 millions d'euros, soit 190 millions d'euros pour le programme 209 et 80 millions d'euros pour la programme 110.

Cette manoeuvre budgétaire présente, selon le Gouvernement, deux avantages :

- elle permet de trouver les crédits de paiement nécessaires à la poursuite de la progression de l'APD vers les 0,55 du RNB sans rouvrir la LPFP, qui ne tenait pas compte de cette progression ;

- elle permet également d'optimiser l'allocation des crédits de paiement à l'AFD. En effet, en 2017 et 2018, une partie substantielle des 270 millions d'euros alloués à l'AFD s'est accumulée en trésorerie de l'agence et a donc été inutilisée. Ainsi, en 2017, l'AFD n'a effectivement décaissé que 55 millions d'euros. En effet, les dépenses liées aux projets engagés par l'AFD donnent lieu à un décaissement sur plusieurs années (7 ans environ pour les aides projets). De ce fait, l'AFD n'a pas besoin de recevoir chaque année un même volume d'autorisations d'engagement (AE) et de crédits de paiement (CP) : l'affectation directe à l'AFD de 270 millions d'euros en AE et en CP la même année méconnaît la réalité de l'activité de l'Agence.

Notons que cette opération a suscité une vive opposition de certaines organisations non gouvernementales (ONG), comme Oxfam France, qui craignent que la « désaffectation » de la TTF ne conduise in fine à des baisses de crédits.

Toutefois, il convient de souligner que l'affectation au FSD, seule alternative valide sur le long terme dans la mesure où l'affectation directe à l'AFD pose des problèmes de gestion 4 ( * ) , n'était elle-même pas exempte d'inconvénients, ce fonds n'étant pas retracé en loi de finances et alimentant essentiellement des fonds multilatéraux. Ainsi, les crédits figurant désormais dans le projet annuel de performance, la budgétisation permet d'améliorer la visibilité du Parlement sur l'utilisation de la ressource, tandis que, dans le cas d'une taxe affectée, le Parlement décide du montant affecté mais ne peut pas en orienter l'affectation.


* 1 Les C2D visent à rendre la dette de certains pays en développement soutenable : ceux qui ont conclu un tel contrat avec la France remboursent effectivement leurs créances mais les sommes correspondantes lui sont reversées pour financer des projets de développement.

* 2 Ces aides financent par exemple la prise en charge d'arriérés de salaires ou des dépenses relevant des ambassades de ces pays en France. Notons que, comme les années précédentes, cette ligne budgétaire constitue un doublon avec la ligne d' « aides budgétaires globales » gérée par le ministère de l'économie et des finances.

* 3 Aucune taxe n'est à ce jour prélevée sur les contrats dérivés non dénoués physiquement.

* 4 Et n'avait été décidée par les députés qu'à cause de l'impossibilité, due aux règles de la discussion budgétaire, d'augmenter directement les crédits du programme 209.

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