B. LA RÉPARTITION DE LA DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT (ARTICLE 78)

1. Le projet du Gouvernement apporte globalement satisfaction

L'article 78 du projet de loi dans sa rédaction initiale prévoyait diverses dispositions relatives aux montants perçus par le bloc communal et les départements :

- une majoration de 10 millions d'euros de la dotation de péréquation des départements, financée par une minoration d'un même montant de leur dotation forfaitaire ;

- la prorogation pour les communes nouvelles, au-delà de 2021 et sans date d'échéance, du dispositif d'incitation financière sur leur dotation forfaitaire, leur dotation de péréquation étant par ailleurs stabilisée pendant trois ans. Votre commission a uniquement, sur proposition de votre rapporteur, clarifié les règles d'éligibilité à ces dispositifs par un amendement n° II-321 ;

- en ce qui concerne les « communes-communautés » , le Gouvernement a pris acte de l'évolution législative récente 97 ( * ) en prévoyant qu'elles perçoivent, au cours des trois premières années suivant leur création, une attribution de dotation forfaitaire au moins égale à la somme des dotations forfaitaires perçues par chacune des anciennes communes la composant ainsi qu'une dotation de compensation égale à celle perçue par l'EPCI préexistant à sa création ;

- au niveau intercommunal, le Gouvernement a proposé l'ajout au dispositif de « mutualisation » de DGF au niveau intercommunal, déjà prévu à l'article L. 5211-28-2 du code général des collectivités territoriales mais inusité, un nouveau dispositif moins ambitieux mais plus opérationnel . Celui-ci consiste en une mise en commun, à l'initiative de l'organe délibérant de l'EPCI mais uniquement après avoir recueilli l'accord explicite de l'ensemble des conseils municipaux concernés , des montants de DGF perçus par les communes selon des critères fixés au niveau intercommunal.

La création de cette souplesse supplémentaire est saluée par votre rapporteur. Elle pourrait permettre de pallier partiellement les insuffisances des critères législatifs de répartition de la DGF. L'opérationnalité du dispositif est cependant à parfaire , dans la mesure où la rédaction actuelle prévoit que seul un accord explicite de l'ensemble des conseils municipaux permet de mobiliser le dispositif, alors même que le silence d'un conseil municipal durant deux mois vaut rejet. Par un amendement n° II-322 proposé par votre rapporteur, votre commission a assoupli le dispositif en inversant la présomption : si un conseil municipal ne délibère pas sur la proposition de l'EPCI, il sera réputé l'avoir acceptée. Un conseil municipal exprimant explicitement son désaccord pourra toujours bloquer le processus, garantissant la constitutionnalité du dispositif .

L'examen de l'article 78 par nos collègues de l'Assemblée nationale a permis d'y ajouter certaines dispositions. En particulier :

- en ce qui concerne les communes nouvelles , a été ajoutée au sein de la DGF une dotation d'amorçage d'un montant forfaitaire de 6 euros par habitant pour celles qui seraient nouvellement créées ;

- en ce qui concerne les conséquences de la réforme de la fiscalité locale, notamment en matière d'indicateurs financiers , une demande de rapport du Gouvernement a été prévue au IX de l'article 78.

Votre rapporteur porte une appréciation positive sur ces dispositifs qui contribueront dans les deux cas à doter les collectivités territoriales d'une meilleure visibilité sur leurs finances .

2. Une réforme inaboutie en ce qui concerne la dotation d'intercommunalité

L'article 78 prévoit, à l'alinéa 110 dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale, un report à 2026 de la prise en compte des redevances d'eau potable et d'assainissement dans le calcul du coefficient d'intégration fiscale (CIF) des communautés de communes. Dans la mesure où seules 38 % 98 ( * ) des communautés de communes exercent la compétence d'assainissement, son intégration aux bases de calcul du CIF aurait conduit à défavoriser les autres communautés de communes. Cette disposition de bon sens, adoptée par votre commission l'année dernière à l'initiative de votre rapporteur, est donc bienvenue .

Malgré ce point de satisfaction, les modalités de calcul du CIF restent source d'incompréhension pour les élus . À la suite de la refonte de la carte intercommunale, de nombreux EPCI à fiscalité propre, devenus extrêmement vastes, ont été conduits à restituer des compétences de proximité à leurs communes membres , elles-mêmes parfois renforcées par leur regroupement en communes nouvelles. C'est le cas, par exemple, de la communauté d'agglomération du Grand Annecy, qui a restitué aux communes l'exercice des compétences relatives à la petite enfance, aux bâtiments scolaires et aux activités périscolaires, au sport, à la culture ou à l'action sociale (à l'exception de la prise en charge des personnes âgées). La restitution de compétences s'étant naturellement accompagnée de celle des ressources nécessaires, ce choix, guidé par le principe de subsidiarité, a fait baisser le coefficient d'intégration fiscale de la communauté et, partant, sa dotation d'intercommunalité, sans que les communes bénéficient pour autant d'un surplus de dotations. En un mot, la restitution de compétences aux communes se traduit par une perte nette de recettes pour l'ensemble intercommunal formé par les communes et leur groupement.

Votre rapporteur recommande donc un aménagement à même d'assurer la neutralité financière de ces redditions de compétences. Sur sa proposition, votre commission a adopté un amendement n° II-323 rect. visant à ce que, en cas de baisse du CIF d'un EPCI à fiscalité propre, la somme correspondant à la diminution de dotation d'intercommunalité qui en résulte vienne financer une dotation de territorialisation répartie entre les communes membres au prorata de leur population. Afin de prévenir tout risque de « désintégration » excessive, cette garantie ne s'appliquerait cependant qu'aux EPCI à fiscalité propre dont le CIF reste, à l'issue d'une restitution de compétences, supérieur ou égal à 0,4.

Ainsi, les élus locaux pourront ajuster la répartition des compétences au niveau local en fonction des nécessités du terrain , au lieu de se déterminer selon des considérations purement financières.


* 97 Article 4 de la loi n° 2019-809 du 1er août 2019 visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires .

* 98 Ce chiffre est issu des réponses aux questions de votre rapporteur à la DGCL.

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