EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 25 novembre 2020, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, a procédé à l'examen des crédits du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » de la mission «  Action extérieure de l'Etat ».

Après l'exposé des rapporteurs, un débat s'est engagé.

M. Christian Cambon, président. - Je suis étonné de voir que nous augmentons notre contribution à l'AIEA pour mener à bien des missions de contrôle en Iran, alors que le traité est mal en point.

M. Olivier Cadic. - Je souhaite appeler à la plus grande vigilance lorsque nous posons un diagnostic sur les modalités de communication à l'égard des Français à l'étranger lorsque des attaques se produisent, comme cela a été le cas à Djeddah. Dans la boucle des Français à l'étranger, l'information a circulé tôt car une élue française était présente sur les lieux, dans le cimetière où a eu lieu l'attentat. Les ressortissants américains qui vivent en Arabie saoudite ont reçu en très peu de temps, moins d'une heure, un message sur l'application WhatsApp donnant des informations précises sur l'évènement. Une heure plus tard un tweet de l'ambassadeur américain précisait les lieux à éviter. Nos ressortissants n'ont pas eu d'information. Une information est passée dans les médias et ensuite, il a été diffusé un avis de vigilance « urbi et orbi » dans le monde entier. J'ai proposé lors de la réunion du bureau de notre commission que nous nous penchions sur ce sujet. Chaque rapporteur peut se pencher sur cette question. Pour ma part, dans mon champ de compétence, je m'interroge sur les moyens techniques de communication choisis. Pourquoi précédons-nous par SMS, au lieu d'utiliser des applications ? Nous devrions nous pencher sur les procédures américaines qui gèrent depuis longtemps un niveau de menace très élevé, pour favoriser la mise en oeuvre d'une solution d'alerte mieux construite et plus efficace. Les différents rapporteurs des programmes budgétaires peuvent travailler à cette solution. Il est intéressant de partir de l'expérience vécue par les Français sur le terrain et de ne pas se limiter aux discours tenus depuis Paris.

M. Christian Cambon, président. - C'est un point tout à fait important et rien n'empêcherait d'ailleurs à terme qu'il y ait une étude plus approfondie sur ce sujet.

M. Joël Guerriau. - Nos rapporteurs ont-ils connaissance du rang de la Turquie au titre de ses contributions aux institutions onusiennes ? Je me pose pour ma part des questions sur l'efficacité de l'ONU dans la gestion des crises contemporaines dramatiques, notamment celle du Haut Karabagh. Nous devons nous interroger sur le niveau de nos contributions à l'ONU, mais aussi sur l'efficacité des efforts ainsi consentis.

Mme Hélène Conway-Mouret. - Il me semble qu'un rapport sur les milliards investis dans l'aide au développement et dans les contributions internationales de la France et la façon dont ils sont dépensés serait utile. Ce pourrait être sous la forme d'une étude courte et rapide. On a souvent l'impression, sur le terrain, que l'action de la France n'est pas assez visible. La France intervient par le biais de l'AFD, avec les questions de pilotage qui ont été soulevées plus tôt dans notre réunion. Dans le multilatéral, l'apport français est peu lisible, nous avons là une réflexion à mener. J'aimerais savoir si une mission sur ce sujet est possible.

M. Christian Cambon, président. - Il faudra en saisir le bureau de la commission. Les missions où le Sénat va vérifier sur place la situation se multiplient et sont très intéressantes. On voit que sur la sécurité des Français à l'étranger, les sénateurs français de l'étranger sont en suffisamment grand nombre pour faire les déplacements, lorsque cela sera de nouveau possible, et mesurer comment les choses se passent. J'ai eu, pour ma part, l'occasion de voir, lorsque j'ai accompagné Jean-Yves Le Drian récemment, aussi bien en Égypte qu'au Maroc, que lorsqu'une crise se produit, telle que celle consécutive à la publication des caricatures, les Français de l'étranger et nos agents consulaires sont les premiers visés. La tension ne diminue pas dans ces pays sur cette affaire. Il y a sans doute des choses à faire pour améliorer la rapidité de la transmission de l'information lorsqu'il se passe quelque chose intéressant la sécurité des Français.

M. Jean-Pierre Grand, co-rapporteur. - Sur ce sujet, nous sommes satisfaits de la qualité de l'échange avec la direction de la sécurité diplomatique, mais nous ne nous sommes pas prononcés sur les procédures d'information mises en oeuvre. Il nous a été dit que les Français inscrits sur Ariane avaient reçu des messages d'information.

M. Olivier Cadic. - Cela concerne les Français en voyage, pas ceux qui sont installés à l'étranger.

M. Jean-Pierre Grand, co-rapporteur. - Il me semble qu'il serait intéressant que la commission visite le centre de crise et de soutien pour travailler sur ces sujets.

M. André Gattolin, co-rapporteur. - La question du délai et des modalités d'information des ressortissants français en cas d'attaque a été posée. Nous avons soulevé ce problème lors de nos auditions. Je défends pour ma part la mise en oeuvre d'une technique de « pushing », c'est-à-dire d'envoi actif d'information. La publication de communiqué de presse n'est pas satisfaisante, elle ne saurait suffire.

Nous allons également creuser la question du classement de la France en tant que contributeur aux organisations internationales. On a parfois des surprises, j'ai découvert il y a quelques années que la France était le premier contributeur au Conseil de l'Europe. En ce qui concerne les instances onusiennes, les contributions obligatoires sont fonction du PIB par habitant. Le développement des pays émergents diminue mécaniquement la contribution de la France. Il nous a été précisé que pour maintenir le dixième rang de contributeur lors des prochains triennats, il faudrait consentir un effort qui se chiffre en centaine de millions d'euros. Pour autant, je dois dire que je m'interroge lorsque je constate que la France est classée après les Pays-Bas.

Il faut bien sûr regarder de près, comment sont utilisées les participations de la France, en distinguant les contributions obligatoires du programme 105, des contributions volontaires du programme 209 et l'aide au développement. Décider cette année de verser des contributions volontaires au titre du programme 105, c'est mettre en oeuvre une politique d'influence. Je rappelle qu'en 2022, le mandat de chef des opérations de paix des Nations Unies traditionnellement dévolu à la France arrivera à échéance. Augmenter notre contribution volontaire permet de prouver notre volonté de rester engagés dans ce domaine qui aiguise les appétits.

M. Christian Cambon, président. - Il faut que soient intégrées dans ces calculs comparatifs les dépenses supportées par la France au titre de nos OPEX qui contribuent à la sécurité collective. Leur prise en compte change singulièrement les résultats.

M. André Gattolin, co-rapporteur. - Nous avons souligné ce point, mais les services nous ont parlé d'un décalage perçu entre nos activités extérieures et nos contributions internationales qui pourrait nuire à notre capacité de mobilisation, notamment de nos partenaires européens. Je souscris à votre remarque, il faut voir les OPEX et les contributions internationales comme un ensemble.

M. Christian Cambon, président. - C'est un message essentiel qu'il nous faut porter, chaque fois que la commission se déplace à l'ONU.

À l'issue de sa réunion du 25 novembre, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'État ».

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