II. UN RÉSEAU D'ACTION CULTURELLE GRAVEMENT ATTEINT MAIS EN CAPACITÉ DE REBONDIR

A. UNE CRISE AUX CONSÉQUENCES FINANCIÈRES IMPORTANTES AYANT NÉCESSITÉ UNE RÉALLOCATION DE MOYENS EN COURS D'ANNÉE

1. Les instituts culturels et les alliances françaises confrontés à un choc sans précédent, qui pose la question de la pérennité de certaines structures

L'activité du réseau culturel a été fortement affectée par la crise sanitaire, au plus fort de laquelle 105 des 117 instituts français étaient fermés, ainsi que 650 des 830 alliances françaises . Début octobre 2020, 36 instituts français étaient encore fermés, 45 avaient rouvert de façon partielle et seuls 13 avaient repris entièrement leurs activités. 577 alliances françaises étaient également toujours fermées, une trentaine avaient rouvert partiellement et 44 normalement. La situation est cependant extrêmement évolutive et suivie presque au jour le jour par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

Sur place, les équipes ont fait preuve d'une grande mobilisation et d'une réelle capacité d'imagination pour réorganiser, autant que faire se pouvait, leurs activités à distance. Ces mesures d'adaptation n'ont cependant pas permis d'empêcher la baisse des recettes issues des activités rémunérées (cours de langue, organisation d'examens ou de certifications...), qui devrait se traduire par une diminution de 10 % du taux d'autofinancement des instituts français, alors qu'il atteignait 75 % en 2019 .

Le ministère distingue trois catégories d'établissements :

- un premier tiers d'instituts serait en situation budgétaire fragile , comprenant notamment de grands établissements ayant des coûts de structures élevés, alors qu'ils ont dû annuler leurs manifestations les plus lucratives (États-Unis, Chine, Japon, Turquie et certains établissements en Europe et au Moyen-Orient) ;

- un deuxième tiers serait sous surveillance accrue en Afrique du Nord, en Amérique Latine (Argentine, Mexique) et en Asie du Sud-Est (Indonésie, Vietnam) ;

- un dernier tiers aurait montré des signes encourageants de résistance (Algérie, Sénégal, Côte d'Ivoire, Inde, Russie et certains pays européens).

De façon générale, les incertitudes sur les dates de réouverture et sur la capacité des instituts à retrouver leurs publics lors de la reprise, constituent un véritable défi. Faute de réouverture, le taux d'autofinancement des établissements continuera à baisser et les fonds de réserves de certains instituts pourraient être entièrement épuisés d'ici la fin de l'année 2020 et le premier trimestre 2021, laissant craindre de possibles fermetures définitives .

Les alliances françaises sont confrontées aux mêmes problématiques de baisse du nombre d'apprenants, d'interruption de leurs activités culturelles, d'incertitude sur la date de réouverture et de capacité à retrouver leurs publics. Une première estimation des postes diplomatiques, restant à affiner, évaluait le montant des besoins supplémentaires d'appui d'ici la fin de l'année - si la situation ne s'améliorait pas - à une fourchette située entre 800 000 et 1,5 million d'euros. Les demandes concernent principalement des alliances situées en Amérique latine et en Afrique.

2. Des mesures de réallocation de crédits nécessaires, mais sans doute pas suffisantes

Si la troisième loi de finances rectificative pour 2020 n'a pas ouvert de crédits de soutien spécifiques en direction des instituts culturels et des alliances françaises, le ministère a procédé à des redéploiements de crédits depuis des enveloppes du programme 185 , dont la sous-consommation paraissait évidente dès le mois de juin, en raison de la crise. Sur une réallocation globale de moyens de 7 millions d'euros, 5 millions ont été attribués d'urgence aux instituts et 2 millions aux alliances .

En outre, les ambassades ont été invitées à effectuer, sur leurs crédits issus du programme 185, des économies sur plusieurs postes de dépenses pour venir en soutien de leurs instituts. Une enveloppe de 596 000 euros a par ailleurs été affectée aux alliances à mi-gestion au titre du renforcement des capacités numériques du réseau.

Le rapporteur pour avis salue cette gestion pragmatique des crédits, mais doute que celle-ci puisse suffire à sauver les établissements en situation de grande vulnérabilité financière . Des mesures de soutien spécifique devront être envisagées, si les réouvertures venaient à être encore repoussées.

3. L'Institut français de Paris : un rôle d'appui au réseau renforcé

Depuis le déclenchement de la crise sanitaire, l'Institut français de Paris a travaillé à une reprogrammation budgétaire au fil de l'eau en fonction des annonces de report, d'annulation ou de confirmation de ses projets, partenariats et programmes.

Sur le volet des aides aux établissements du réseau et aux équipes artistiques et culturelles françaises , dont certains connaissent des situations financières alarmantes, des modalités dématérialisées ont été mises en place pour répondre aux différents cas de figure (report, annulation, maintien), tout en garantissant le niveau d'engagement de l'Institut afin de ne pas les pénaliser davantage. Au-delà de ce soutien financier, l'opérateur a organisé le partage des bonnes pratiques entre les établissements et encouragé la formation à distance des équipes aux pratiques numériques.

Sur les projets menés en propre par l'Institut , à l'instar des Focus (BD, arts visuels, etc.), des dispositifs Langue française, ou encore des plateformes de partage des pratiques et des ressources (Culturethèque, panoramas numériques, IF Cinéma, etc.), de nouvelles formes d'actions entièrement digitales ont été développées , dans le respect du cadre budgétaire fixé. Les saisons culturelles (Africa 2020, France-Japon, France-Portugal) ont toutes été décalées et reportées à des dates ultérieures. La saison Africa 2020, s'inscrivant dans l'ambition d'un partenariat renouvelé entre la France et les pays africains, aura finalement lieu de décembre 2020 à juillet 2021, sur tout le territoire français.

Le rapporteur pour avis constate avec satisfaction que la crise aura au moins eu le mérite de clarifier le positionnement de l'Institut français de Paris par rapport aux réseaux des instituts culturels et des alliances françaises . Celui-ci s'engage de plus en plus dans un rôle d'interface, permettant de renforcer les interactions entre les établissements.

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