IV. UNE SITUATION QUI RESTE PRÉOCCUPANTE

A. LES CONCLUSIONS DU RAPPORT D'AUDIT SUR LA PÊCHE ARTISANALE

Le rapport de l'audit réalisé sur la situation financière des marins de pêche artisanale et des organisations d'intervention montre, en effet, que la situation des armements reste préoccupante.

Il apparaît ainsi que la situation des 173 bateaux de pêche industrielle et semi-industrielle est difficile pour les marins pratiquant la pêche des espèces « blanc de fond » (cabillaud, merlan, lieu noir, hareng).

S'agissant de l'armement artisanal, la situation serait très contrastée selon les catégories de navires.

Globalement, les navires de moins de 12 mètres (5.033 bateaux, 75 % du total) qui pratiquent une pêche de proximité connaissent la situation la moins défavorable, même si certains armements, notamment en Méditerranée, connaissent de réelles difficultés. D'une façon générale, la bonne valorisation des produits, des charges d'exploitation limitées, l'évolution positive des captures pour certaines espèces, l'ancienneté des équipements déjà largement amortis expliquent que cette catégorie connaisse des difficultés moindres.

En revanche, la situation des 12-25 mètres (1.638 bateaux) est beaucoup plus préoccupante : les résultats financiers d'une proportion importante des armements compromettent la pérennité des outils. Le rapport évalue les armements en difficulté à environ 370. Une centaine d'entre eux, avant imputation de toute charge d'endettement, connaîtraient des difficultés d'exploitation et une quarantaine aurait même un résultat d'exploitation négatif.

Les difficultés seraient d'ailleurs concentrées sur quatre départements : le Finistère, le Morbihan, la Loire-Atlantique, la Charente-Maritime, qui représentent 42 % de la flotte des 12-25 mètres, mais 61 % des navires de cette catégorie en difficulté. C'est dans ces départements que se trouvent majoritairement les armements dont la viabilité n'est pas assurée : 40 % dans le Finistère, un quart dans le Morbihan et la Loire-Atlantique, 10 % en Charente-Maritime.

En revanche, les flottilles de Méditerranée et du Nord, sembleraient bien placées pour gérer la période de mutation en cours. Alors qu'elles représentent près de 20 % de la flotte des 12 à 25 mètres, on ne relève que moins de 10 % de navires en difficulté (contre une moyenne nationale de 23 %), et un nombre très réduit (moins d'une dizaine) de navires en grande difficulté.

Le rapport estime aussi qu'il existe trois catégories de situation :

- les départements en crise : Finistère, Morbihan, Loire-Atlantique, Charente-Maritime ;

- les secteurs connaissant un nombre significatif de difficultés : la Bretagne nord, la Vendée, la Normandie ;

- les secteurs confrontés à des problèmes d'ampleur limitée : l'Aquitaine, la Méditerranée et le Nord.

Mais, cette approche régionale ou départementale recouvre d'importantes disparités entre ports d'une même zone géographique.

Ces disparités s'expliquent, en premier lieu, par la représentation des différentes catégories d'armements : les petits ports, centrés sur l'accueil des moins de 12 mètres, sont moins éprouvés. De même, les différents types de pêche sont variablement affectés : les ports de fileyeurs souffrent moins que ceux de chalutage, et, parmi les chalutiers, les chalutiers pélagiques moins que les chalutiers de fond. De leur côté, les types d'espèces pêchées -les espèces communes sont de plus en plus difficiles à valoriser, tandis que les espèces nobles ou pélagiques semblent mieux résister- expliquent la diversité des situations entre ports.

Il apparaît enfin qu'au sein d'une même région, les ports qui pratiquent une pêche axée sur des espèces à forte valeur ajoutée, et qui privilégient la qualité ont un prix moyen du poisson, y compris pour les mêmes espèces, largement supérieur à celui observé dans les ports qui connaissent des marées de plus longue durée. Ainsi, selon le rapport, les situations les plus délicates ont été relevées dans les ports pratiquant les marées les plus longues.

B. LA PÊCHE FRANÇAISE EN 1994

1. La production

En 1994, la production des pêches françaises s'est élevée à 624.000 tonnes pour une valeur globale de 5,96 milliards de francs.

Depuis 1990, on constate une baisse des apports, liée à la réduction de la flotte et la diminution de l'effort de pêche et à la raréfaction de certaines espèces.

Alors que l'année 1993 avait été marquée par une baisse sensible du chiffre d'affaires de la pêche, traduisant la crise des marchés, les résultats provisoires de 1994 laissent entrevoir une stabilisation du chiffre d'affaires à un niveau supérieur à 1993, grâce notamment à des apports revenus à un niveau élevé.

PRODUCTION FRANÇAISE DES PÊCHES MARITIMES ET DES CULTURES MARINES

Selon les prévisions disponibles, l'année 1995 se traduirait par une hausse modeste des apports (2 %) et du chiffre d'affaires (2,75 %), alors que le prix moyen reste stagnant (+0,85 %). Dans un contexte de stabilité des prix, l'augmentation du chiffre d'affaires s'explique donc par la progression des captures, ce qui peut d'ailleurs conduire à des difficultés compte tenu de la raréfaction de la ressource. Il semblerait ainsi que la crise, qui s'était prolongée en 1994, ne s'est pas aggravée en 1995.

On peut ainsi estimer que le revenu des pêcheurs, qui s'était encore réduit en 1994, devrait se stabiliser en 1995, mais à un niveau très sensiblement inférieur à celui dégagé en 1989.

2. Les échanges

Le déficit commercial de la France, dans ce secteur, est structurel : la production nationale ne couvre qu'environ 50 % de la demande intérieure. Cette situation est d'ailleurs celle de l'ensemble de la Communauté : le déficit de la balance commerciale de l'Union représente, globalement, 45 % du bilan des approvisionnements.

Ce déséquilibre s'explique par la conjonction d'une forte demande communautaire, tant en matière première (poisson frais, réfrigéré et congelé) pour les besoins des industries de transformation, qu'en produits transformés (poissons fumés, conserves...) très prisés par les consommateurs alors que dans le même temps on assiste à la diminution des captures débarquées par les flottilles de l'Union confrontées à une diminution des ressources.

Comme l'illustre le tableau ci-après, le déficit commercial (10 milliards de francs) se sera détérioré de 6 % par rapport à 1993, mais reste, cependant, inférieur à ceux enregistrés avant 1993

La détérioration de ce solde, sous l'effet de la baisse moyenne des produits de la mer, résulte de la reprise des importations (+5,6 %, après deux années de baisse) sur un rythme supérieur à celui des exportations (+4,9 %). Enfin, les fluctuations monétaires ont largement contribué à cette évaluation défavorable : la compétitivité de la pêche française a été affectée à la fois par les dévaluations de notre principal fournisseur, la Grande-Bretagne, et de nos principaux clients : l'Espagne et l'Italie.

ÉVOLUTION DE LA BALANCE COMMERCIALE DES PRODUITS

DE LA MER DE LA FRANCE

Année

IMPORTATIONS

EXPORTATIONS

SOLDE

QUANTITÉ

VALEUR

QUANTITÉ

VALEUR

QUANTITÉ

VALEUR

mT

Variation (%)

MF

Variation (%)

mT

Variation (%)

MF

Variation (%)

mT

Variation (%)

MF

Variation (%)

1990

867

11,15

15,4

10

350

11,46

5,2

3,38

517

11,18

10,2

13,21

1991

865

-0,23

16,51

7,21

352

0,57

5,33

2,50

513

-0,77

11,18

9,61

1992

876

1,27

15,5

- 6,12

363

3,13

5,05

- 5,25

513

0

10,45

- 6,53

1993

839

-4,22

14,2

- 8,39

397

9,37

4,7

-6,93

442

- 13,84

9,5

- 9,09

1994

880

4,89

15

5,63

412

3,78

4,93

4,89

468

5,88

10,07

6,00

Sources : Observatoire économique de FIOM d'après statistiques DGDDI provisoires

3- Les effectifs

En 1994, les effectifs de la pêche française étaient d'environ 27 500 marins, soit une diminution de 700 emplois par rapport à 1993.

Au cours des cinq dernières années, les effectifs ont diminué de plus de 15 %, soit une perte d'environ 5.000 emplois.

Les plans de restructuration de la flotte, mis en oeuvre expliquent en partie cette évolution.

En effet, comme l'illustre le tableau ci-après, on assiste à une diminution régulière depuis 1988/1989, conformément aux objectifs des plans d'orientation pluriannuels (POP) successifs. Par rapport à 1988, le nombre d'unités a été réduit de 40 % (-15 % pour la puissance et le jaugeage).

FLOTTE DE PÊCHE/PAR TRANCHES DE LONGUEUR

Les objectifs de décroissance de la flotte fixés par le Programme d'Orientation Pluriannuelle ont été respectés en 1992 et 1993. Conformément à ce Programme, une décroissance sensible est intervenue en 1994.

* au 31-08-1995

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