CHAPITRE II LA SNCF

I. LES PRINCIPAUX PROBLÈMES POSÉS À LA SNCF

A. DES RÉSULTATS FINANCIERS PRÉOCCUPANTS

1. 1994

Le chiffre d'affaires de la SNCF a atteint 54,052 milliards de francs en 1994, soit une augmentation de 2,1 % par rapport à 1993.

L'excédent brut d'exploitation a représenté 7 milliards de francs, soit une hausse de 20 %, sur l'année précédente.

En revanche, une perte nette de 8,2 milliards de francs -plus importante qu'en 1993 où elle avait déjà atteint 7,7 milliards de francs- a été enregistrée.

En effet, les charges de capital se sont alourdies. L'endettement total, infrastructures comprises, à la charge de la SNCF est passé de 137 milliards de francs en 1993 à 155 milliards de francs en 1994.

Le compte « gestion de l'infrastructure » a été en déficit de 8,6 milliards de francs malgré un repli, en 1994, des dépenses d'investissement qui ont représenté 16,7 milliards de francs.

2. 1995 : un endettement catastrophique

La SNCF attendait un excédent brut d'exploitation de 9,1 milliards de francs en 1995 et un progrès de 12,5 % du chiffre d'affaires.

Les premiers résultats de l'année étaient encourageants. Ainsi, sur les huit premiers mois de 1995, le chiffre d'affaires « voyageurs » avait-il cru de 6,8 %.

Mais un déficit de l'ordre de 12 milliards de francs reste à redouter en raison du creusement des charges financières (14 milliards de francs attendus en 1995).

Bien plus, un endettement de 175 milliards de francs est attendu à la fin de 1995.

Tout en saluant les résultats relativement positifs atteints par la SNCF grâce au recours à la location vente ou à la cession-bail, notamment par l'intermédiaire d'Eurofina (4 milliards de francs en 1995) pour l'exploitation du matériel roulant, votre Commission des Affaires économiques et du Plan juge que la situation exige d'autres réponses que de simples expédients.

L'État doit, à cet égard, prendre ses responsabilités. Dans le passé, la mise en place du service annexe de la dette avait constitué une réponse. Le moment est sans doute venu de procéder à la prise en charge par l'État d'une partie -à déterminer- de l'endettement accumulé par la SNCF. Le chiffre de 100 milliards de francs à prendre en charge a été avancé par le président de la SNCF en juillet 1995.

Mais votre Commission accueille également avec intérêt les projets d'utilisation par la SNCF, en tant qu'opérateur, de son réseau de télécommunications (25.000 kilomètres de câbles dont 5.000 en fibre optique). La SNCF explore, en effet, actuellement, la possibilité de vendre soit par le biais d'intermédiaires, soit, directement, des capacités de transport de données permettant de relier entre eux les différents sites industriels d'une même société. Avec la libéralisation totale du secteur qui se profile, le vaste réseau privé de téléphonie de la SNCF pourrait ainsi servir de point de départ à la mise en place d'une source de profits.

B. DES TRAFICS EN INÉGALE REPRISE

1. 1994

Globalement le compte « transporteur » -établi, conformément aux normes européennes, distinctement du compte « Infrastructures »- est devenu positif de 414 millions de francs en 1994.

L'activité voyageurs grandes lignes s'est redressée en fin d'exercice mais les recettes voyageurs ont reculé de 1 % par rapport à 1993.

L'activité fret s'est redressée de 7,7 % par rapport à 1993, grâce à la progression du transport combiné.

2. 1995 : amorce d'une reconquête commerciale ?

- Le trafic voyageurs a cru de 6,8 % au premier semestre de 1995. Le résultat est atteint grâce à l'effet de l'Eurostar sur Paris-Londres et à l'ensemble des TGV.

Sur l'ensemble de l'année, une progression de 7 % est espérée.

La hausse moyenne des tarifs de 2,4 % intervenue en janvier apparaît modérée et l'action de la SNCF en direction de la clientèle (carte carrisimo, réductions) devrait porter des fruits.

- Le trafic marchandises a cru, quant à lui, de 7 % au premier trimestre de 1995 et 10,6 % sur les six premiers mois. Le transport combiné devrait croître de 15 % sur l'année.

La clientèle du secteur du bâtiment-travaux publics est particulièrement recherchée.

Au total, pour le fret, l'activité devrait dépasser les 50 milliards de tonnes-kilomètres en 1995.

C. DES PERSONNELS PARFOIS INQUIETS


• Les effectifs de la SNCF sont à la baisse. La compagnie prévoit6.800 départs naturels en 1995 en partie compensés par 2.400 embauches (essentiellement dans le secteur commercial) soit un solde net de 4.600 postes de travail supprimés.

En 1995, 177.900 agents travaillent à la SNCF. En 1984, ils étaient au nombre de 245.750. En dix ans, la SNCF a donc perdu près de 68.000 salariés. Cette chute drastique des effectifs est à mettre en rapport avec le montant de sa dette globale qui a plus que doublé au cours de la même décennie, tandis que les recettes sont restées stables.

ï Depuis avril 1995, les personnels portent une attention particulière à la négociation du contrat de plan à conclure par la SNCF avec l'État. Une partie des cheminots craint, en effet, que le contrat de plan ne se traduise par un éclatement de l'entreprise et par des suppressions d'emplois. L'ouverture à la concurrence de son réseau, dans le cadre de la déréglementation des chemins de fer en Europe, ajoute à leur inquiétude.

ï L'année 1995 est marquée par la mise en place opérationnelle d'un système de gestion par centres de responsabilité, baptisé « GCR ». En préparation depuis quatre ans, cette réorganisation a trois objectifs : le pilotage de l'entreprise par ses activités, le renforcement de la décentralisation, notamment au niveau des établissements et, enfin, l'amélioration de la capacité de réaction et de l'efficacité de la SNCF. Celle-ci devrait lui permettre de mieux cerner ses coûts.

Définies comme des centres de responsabilité, les activités chargées de la clientèle ont désormais leur propre compte et un objectif à atteindre en termes de résultat annuel. Dans le cadre des travaux budgétaires, elles vont devoir négocier avec les directions techniques les moyens nécessaires à leur exploitation et leur coût.

Les 23 régions SNCF, qui disposeront elles aussi d'un compte, passeront des contrats avec les directions de la SNCF, l'adhésion du personnel semble indispensable. La refonte en cours des établissements nécessitera une adaptation des mentalités et une formation.

Au total, la SNCF prévoit de délocaliser environ 30 % du personnel de ses administrations centrales. Ce programme concerne l'ensemble des états-majors parisiens de la SNCF qui emploient environ 13.000 personnes.

D'ici à 1997, la société nationale prévoit de réduire de moitié le nombre de ses établissements.

D. UN CONTRAT DE PLAN (1996-2000) QUI TARDE À ÊTRE CONCLU

Le prochain contrat de plan État-SNCF couvrira une période de 5 ans, de 1996 à 2000. Les discussions entre l'État et la SNCF en vue de l'élaboration de ce contrat de plan sont en cours, dans la perspective d'une signature au cours du deuxième semestre 1995. Elles portent notamment sur : la consistance et la performance des infrastructures ; la définition d'un système de tarification de cette infrastructure ; les services régionaux de voyageurs ; l'aménagement du territoire, en visant à ce que la SNCF assure pleinement sa mission de service public ; et plus généralement, l'examen des mesures permettant un rétablissement de la situation financière de l'établissement public.

Le Premier ministre a confirmé son souhait de voir le nouveau contrat de plan État/SNCF conclu avant la fin de 1995. Techniquement cette échéance pourra, selon la SNCF, être respectée « sans difficulté », l'ensemble des dossiers ayant donné lieu à des échanges entre la SNCF et les administrations concernées au sein d'un comité de pilotage dont les travaux se sont déroulés de février à juin 1995.

Ont, en particulier, été abordés des points centraux du futur contrat comme :

- le desendettement de la SNCF ;

- le financement des infrastructures, qu'il s'agisse du réseau classique ou des lignes nouvelles ;

- l'équilibre des missions de service public, qu'il s'agisse des services régionaux ou des liaisons nationales d'aménagement du territoire ;

- le développement du transport combiné.

Pour votre Commission des Affaires économiques et du Plan, le point essentiel à clarifier est la contribution de la SNCF à l'aménagement du territoire.

Celle-ci passe par :


une réflexion sur l'« effet TGV ». Dune part, il s'agit d'augmenter le nombre de villes desservies à grande vitesse. D'autre part, il s'agit de maîtriser la polarisation des emplois qu'induit, dans certains cas, le réseau TGV ;


un maintien de l'effort de la SNCF sur ses grandes lignes traditionnelles.

Un des enjeux de la négociation porte sur le mode de soutien à apporter à la SNCF pour éviter la fermeture d'une quinzaine de grandes lignes déficitaires. Deux milliards de francs seraient nécessaires pour financer sur cinq ans cette nouvelle procédure.

Mais au delà de la lutte contre les fermetures, il importe de maintenir la qualité et d'assurer la modernisation des lignes.

Ainsi l'électrification de lignes aussi importantes que Paris-Caen-Cherbourg, en voie d'achèvement, et Paris-Troyes-Chaumont-Belfort doit être réalisée dans les meilleurs délais, à l'imitation de ce qui a été achevé de réaliser, en 1995, pour la ligne Strasbourg-Lyon.

Au moment même où l'on se plaint de la concentration de 80 % de nos concitoyens sur 20 % du territoire français et où toutes les études, y compris les débats parlementaires, soulignent le nécessaire rééquilibrage économique et démographique des régions il ne convient pas de fonder sur les défaillances actuelles. C'est, au contraire, une véritable opération de réanimation qu'il importe de mener avec ces lignes.


• Enfin, le maintien en fonctionnement de certaines dessertes jugées -à tort- non rentables mais qui constituent l'ossature de base de tout aménagement du territoire est essentiel (exemple : la transversale Nantes-Lyon), sans, pour autant, qu'un participation financière excessive soit éxigée des régions.

Depuis 1990, la SNCF a proposé aux régions concernées, qui l'ont accepté, le transfert sur route de certains services inclus dans la convention liant chacune d'entre elles et la SNCF. Ces mesures ont été prises sur des relations où la faible fréquentation des trains montrait que le mode ferroviaire était moins en mesure que le mode routier d'assurer une prestation dans des conditions raisonnables de prix et de coût pour la collectivité. Les lignes concernées ont été les suivantes : en 1990, Neussargues - Bort-les-Orgues ; en 1991, Firminy - Dunières ; en 1992, Briouze - Bagnoles-de-l'Orne ; en 1993, Belfort - Delle ; en 1994, Bort-les-Orgues - Aurillac. Mais, pour votre Commission des Affaires économiques et du Plan, la « mise sur la route » ne doit être envisagée qu'en dernier ressort.

Le rapport « Barel » remis au président de la SNCF en mars 1995 suscite pourtant des inquiétudes.

LE RAPPORT « BAREL »

Ce rapport de 24 pages reprend assez largement les thèses de la SNCF, à savoir la nécessité de conventionner certaines grandes lignes au motif de leur mission d'aménagement du territoire ; la responsabilité première de l'État dans ce domaine ; les régions n'ayant pas à participer directement à l'équilibre d'une relation ; le rôle essentiel de la procédure contractuelle pour permettre, au niveau local, une recomposition adaptée de l'offre.

Il est divisé en trois parties qui portent sur : la définition du périmètre concerné ; le type de contrat à prévoir ; le processus de mise en oeuvre de la réforme proposée.

M. Barel propose certains critères de définition pour les relations d'aménagement du territoire : désenclavement de zones isolées et à faible population ; satisfaction de besoins interrégionaux ; insuffisance structurelle de couverture des charges.

Il propose que leur prise en charge par une personne publique soit conditionnée par : une distance couverte d'au moins 250 kilomètres ; un trafic d'au moins 75 voyageurs par train, de bout en bout, 9 pour un autocar et 160 pour un corail ; la possibilité d'organiser au minimum 2 allers-retours par jour en moyenne.

Il n'exclut, en théorie, ni le recours aux trains express régionaux, ni la mise sur la route. En revanche, son analyse l'amène à exclure tout transfert de la mission d'aménagement du territoire à l'aérien.

Les quinze relations proposées correspondent aux critères, même s'il s'interroge sur la possibilité de basculer sur route Caen-Le-Mans-Tours.

M. Barel préconise une contractualisation au nom du service public (engagement de la SNCF sur les charges, partage du risque recettes) entre la SNCF et SNCF et l'État, sur une durée de 5 ans et placé sous le contrôle du comité de suivi.

Il exclut clairement que les régions, déjà sollicitées dans le processus de régionalisation, doivent participer aux conventions d'exploitation, même si des financements d'investissement ou des améliorations de dessertes locales peuvent représenter leur participation indirecte au contrat.

Par rapport aux principes déjà proposés par la SNCF, M. Barel introduit une exigence nouvelle visant à borner le niveau d'engagement de l'État. Il suggère, en effet, que la contribution de l'État à un contrat ne dépasse pas la recette commerciale. Autrement dit, le contribuable ne saurait couvrir plus que l'usager.

M. Barel prévoit qu'à l'occasion d'un contrat, des conversions sur trains express régionaux soient possibles mais préconise que les ressources supplémentaires nécessaires soient allouées aux régions. De même, il souligne le rôle complémentaire que peuvent jouer les investissements prévus aux contrats États-région, dans l'aménagement d'une desserte.

M. Barel propose que chaque contrat soit négocié de manière déconcentrée, dans le cadre d'une commission régionale des lignes d'aménagement du territoire.

Pour votre rapporteur, en France, tout est possible pour rééquilibrer les régions si la volonté politique exprimée au niveau national est bien relayée, sur le terrain, par les orientations et les décisions des services instructeurs des projets.

Il convient donc que ceux qui, aujourd'hui, veulent restructurer la SNCF, du moins le réseau « hors grande vitesse », aient l'esprit aussi ouvert, entreprenant et novateur que ceux qui, à partir de 1838, ont construit les réseaux ferroviaires français, sans tenir compte des situations du moment, mais en pariant sur la généralisation de ces liaisons et le développement économique. Mais votre Commission reste persuadée que la suppression de 6.000 kilomètres de lignes ne pourra, à elle seule, permettre de résoudre la question de l'endettement de la SNCF.

E. UN TRANSFERT DE COMPÉTENCES EN MATIÈRE DE TRANSPORT FERROVIAIRE RÉGIONAL EN EXPÉRIMENTATION

Décidée dans le cadre de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, l'expérimentation d'un transfert de compétences de l'État vers les régions en matière de transport ferroviaire régional a fait l'objet d'un protocole d'accord conclu en avril 1995, entre la SNCF et neuf régions : Alsace, Aquitaine, Basse-Normandie, Centre, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Pays-de-la-Loire et Rhône-Alpes.

Une commission de suivi, associant l'État, 6 régions et la SNCF et présidée par notre collègue M. Hubert Haenel a tracé les contours du nouveau dispositif.

Des schémas régionaux de transport, élaborés dans chaque région, devraient permettre de tracer les perspectives d'avenir des transports collectifs. La plupart des régions ont, à ce jour, engagé la réalisation de ces schémas régionaux.

Une expertise conduite par le cabinet KPMG sous la responsabilité des régions, de l'État et de la SNCF- est lancée sur les comptes régionaux de la SNCF, elle s'achèvera à la fin de 1995. Elle garantira aux régions que la comptabilité analytique interne constitue un fondement solide pour le futur système de facturation. Elle permettra également d'évaluer, région par région, les moyens nécessaires pour assurer la pérennité et le développement des transports régionaux et servira de base à la négociation avec l'État sur le niveau des moyens financiers à allouer.

Les futures conventions qui lieront chaque région à la SNCF pour la réalisation des transports régionaux clarifieront les responsabilités de chacun. Prenant la responsabilité de la consistance des dessertes, de la qualité du service offert, des tarifs pratiqués, tout en respectant la nécessaire cohérence inter-régionale, la région pourrait ainsi disposer d'un levier déterminant pour sa politique d'aménagement du territoire.

La SNCF aura un devoir de proposition à l'autorité organisatrice pour améliorer ses services à partir de sa connaissance des besoins régionaux. Elle mettra en oeuvre la politique définie dans le cadre d'un engagement ferme et définitif, basé sur un devis correspondant aux services arrêtés en commun. Elle rendra compte à la région pour lui permettre de vérifier l'efficacité de son engagement financier. Pour cela, elle poursuivra la décentralisation des responsabilités vers ses directions régionales en l'accompagnant de la mise en place des compétences correspondantes.

Mais pour clarifier le cadre dans lequel s'effectuent les transports régionaux, l'État aura à préciser sa politique en matière d'infrastructures ferroviaires comme le prévoit la directive européenne 91/440 et son décret de transposition. Il sera amené à transférer aux régions les ressources nécessaires au maintien et au développement des transports régionaux. Garant de l'intérêt général et d'un développement équilibré du territoire, il doit, en effet, attribuer les moyens qui permettent à la fois d'assurer un transport public performant et de participer au financement des investissements nécessaires à la modernisation (évalués par le rapport de notre collègue M. Hubert Haenel à 29 milliards de francs sur 10 ans).

Les initiatives prises par l'État, les régions et la SNCF vont ainsi conduire, jusqu'au début de 1996, à la négociation de premiers contrats de service public expérimentaux pour la réalisation des transports régionaux assurés par la SNCF.

F. UNE POLITIQUE DE SÉCURITÉ À POURSUIVRE

Si l'on observe les douze accidents graves de l'année 1994, c'est-à-dire ceux ayant entraîné des décès ou des blessés dans le train ou mis en cause de marchandises dangereuses, ainsi que le dénombrement, en fonction de la gravité de leurs conséquences potentielles, des événements critiques de circulation survenus sur voie principale, on constate que l'évolution à long terme est, à première vue, favorable : le nombre de voyageurs tués par milliard de voyageurs-kilomètres, représenté en moyenne mobile, apparaît en diminution, tout comme la plupart des nombres d'événements critiques recensés.

L'action menée en 1994-1995 a porté sur les points suivants :


• Poursuite du développement des automatismes Les principaux efforts ont été les suivants :

- protéger les cabines de conduite et certains organes extérieurs des intentions malveillantes ;

- continuer à supprimer des passages à niveau (60 suppressions en 1994) ;

- développer le réseau de radio sol-trains qui déborde maintenant les doubles voies électrifiées et le parc électrique (700 kilomètres de ligne et 450 engins équipés en 1994) ;

- munir tous les postes de conduite de l'automatisme coupant l'effort de traction quand un freinage est commandé ; développer des automates pour essayer et surveiller la qualité du frein ;

- améliorer l'équipement des voies uniques pour réduire le risque de nez-à-nez (toutes les gares sont maintenant munies d'un dispositif d'arrêt automatique, tous les engins le seront d'ici à 1997) ;

- déployer le contrôle de vitesse à balise (KVB) sur l'ensemble du réseau électrifié, ce qui devrait apporter en 1998, à l'achèvement du programme, une réduction des trois quarts du risque de franchissement intempestif de signaux par des trains (fin 1994, le niveau d'équipement est de : 6.450 signaux origine d'itinéraires sur 16.300, 1.520 signaux de limitation de vitesse sur 1.550, 3.600 engins moteurs sur 4.600. L'efficacité du système se fait pleinement sentir pour le respect des limitations de vitesse et commence à devenir perceptible sur les franchissements de signaux fermés ;


• continuation de l'amélioration de la prise en considération du facteur humain ;


• poursuite de l'action en faveur de la sécurité du transport des marchandises dangereuses ;

- amélioration de la qualité et de l'organisation du travail des gares expéditrices de trains de marchandises dangereuses, afin d'accroître l'assurance que ces trains sont sans défaut au départ ;

- le développement des études locales de sites où se concentrent des wagons de marchandises dangereuses, en concertation étroite avec les services de l'État concernés localement.

LE RÉSEAU TGV EN SERVICE EN 1996

II. LES TGV : UNE VITRINE VOUÉE À LA REMISE EN CAUSE

La technologie du TGV se perfectionne. Le TGV à deux étages, présenté en juin 1995, entrera en service fin 1996 et pourra transporter 45 % de passagers de plus dans un confort accru. En outre, le TGV pourrait être exploité à 350 kilomètres/heures au début des années 2000.

Mais, alors que les projets se multiplient et suscitent les demandes des élus des zones susceptibles d'être desservies, les difficultés financières de la SNCF rendent aléatoires les réalisations dont le coût est devenue énorme.

Votre commission forme le voeu que la mission confiée à M. Philippe Rouvillois permette de mieux hiérarchiser les priorités du programme TGV.


• Le TGV « Méditerranée
»

La SNCF a lancé, en février 1995, les travaux de la section Valence-Nîmes. Le plus gros des travaux devait être engagé à l'été 1995 pour une mise en service au deuxième semestre de 1999.

Sept viaducs et deux tunnels sont prévus au long des 285 kms de cette section. 11.000 emplois par an sur cinq ans seront assurés par ces travaux.

Le coût des travaux est évalué à 26,5 milliards de francs. Le taux de rentabilité est évalué à 6,8 % par la SNCF, soit inférieur au seuil du 8 % jugé indispensable. L'État devra donc subventionner l'opération à hauteur de 2,4 milliards de francs et les collectivités locales à hauteur de 750 millions de francs.

À hauteur de Valence, une gare baptisée « Rhône Alpes Sud » permettra l'interconnexion du TGV, des TER et des autocars.

Le nouveau site devrait accueillir environ 3 millions de voyageurs et pourrait jouer un rôle de levier économique au coeur d'un bassin de 200.000 habitants, les premières estimations de coûts du projet font état d'un investissement total de l'ordre de 440 millions de francs hors taxes, dont 250 pour la gare TGV, elle-même financée par la SNCF : 130 millions de francs pour la gare transports express régionaux financés par la région Rhône-Alpes et le reste pour la gare routière et les accès.

Marseille verra l'aménagement de la gare Saint-Charles pour un coût de 715 millions de francs dont 415 à la charge de la SNCF.


• Le TGV « Nord »

Le Paris-Bruxelles-Amsterdam/Cologne (PBKA) sera en service à partir de mai 1996 avec des rames tricourant. Mais l'ensemble des infrastructures ne sera pas achevé avant l'an 2000.


Le TGV « Narbonne-Barcelone »

Lors des différents sommets franco-espagnols, les ministres français et espagnol des transports ont rappelé leur volonté de voir se réaliser une liaison ferroviaire à grande vitesse entre la France et l'Espagne. Ce projet, appelé TGV sud-européen, a été inscrit aux sommets de Corfou et d'Essen comme un des projets prioritaires et retenus au titre de l'initiative européenne de croissance.

Le projet Barcelone-Narbonne consiste en la construction d'une nouvelle ligne à grande vitesse à écartement international qui sera raccordée en France au TGV méditerranée et côté Espagne à la ligne à grande vitesse Madrid-Barcelone.

Les ministres ont engagé les réseaux à se constituer en groupement économique d'intérêt européen dans le but de finaliser les études techniques relatives au tronçon international. Ce GEIE a été créé le 6 avril 1995 à Madrid. Le siège a été fixé à Perpignan. Par ailleurs, les ministres ont demandé à leurs administrations respectives d'approfondir leurs réflexions sur le projet de traité intergouvernemental. Les échanges se poursuivent à ce sujet entre les deux États.

Les premières dépenses d'études sont évaluées à une soixantaine de millions de francs Quatre millions d'écus leur seront consacrés par l'Union européenne.

En ce qui concerne la partie française, le préfet de la région a remis, en mai 1995, l'avant-projet sommaire du TGV Languedoc-Roussillon, de Montpellier jusqu'au Perthus. Ce dossier fait l'objet de consultations inter-services des ministères à l'échelon central, au terme desquelles seront précisées les études détaillées à poursuivre pour préciser le tracé.

Le Gouvernement et la région Languedoc-Roussillon se sont fixés comme objectif le lancement le plus rapidement possible de l'enquête publique de ce projet. Pour bâtir le dossier nécessaire au lancement de cette enquête, le Premier ministre a confié à un expert la mission de définir les conditions financières d'une réalisation progressive de ce projet. La SNCF ne peut, dans la situation financière difficile qui est actuellement la sienne, supporter seule un investissement de cette ampleur. Aussi ce projet devra-t-il mobiliser des concours externes auprès de l'Union européenne, de l'État et des collectivités territoriales concernées, de manière que la rentabilité des capitaux investis par la SNCF atteigne un seuil d'équilibre 8 %.


• Le TGV « Est »

Jugé par le commissaire européen en charge des transports, comme « peut être le moins transeuropéen de tous les projets » d'Essen, le TGV « Est » voit son coût évalué à quelque 27 milliards de francs.

On se rappelle l'engagement pris, au printemps 1994, par le précédent Gouvernement de faire financer à hauteur de 60 % le projet et d'assurer un taux de rentabilité de 8 % des capitaux investis par la SNCF. Or, le montage financier actuel n'est pas complet.

L'État français entend ne pas excéder son engagement initial de contribution, soit 3,5 milliards de francs mais, selon certains experts, cette contribution pourrait atteindre 7 milliards en définitive.

Les régions directement concernées par le TGV Est (Alsace, Champagne-Ardennes, Lorraine) ont prévu de participer à hauteur de 3 milliards. L'Île-de-France hésite à apporter plus de 500 millions. L'État du Luxembourg pourrait participer à hauteur de 400 millions. Le total des subventions avoisine 4 milliards de francs. Dans le meilleur des cas, selon le mécanisme de répartition concernant la dépense de construction (10 % du total au maximum), la France peut espérer de Bruxelles une enveloppe d'environ 2,5 milliards.

Ce nouvel axe sera construit en deux phases, la première phase consistant en la réalisation d'une ligne nouvelle entre Vaires et la vallée de la Moselle, d'une part, et entre Strasbourg et Sarrebourg, d'autre part. L'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique est close depuis le 16 novembre 1994. Elle a porté sur la totalité du tracé du TGV. La déclaration d'utilité publique devra intervenir avant le 16 mai 1996.

Un protocole d'accord ayant pour objet de définir les modalités de réalisation des études avant-projet détaillé ainsi que des travaux préliminaires est en cours d'adoption entre l'État, la SNCF et les collectivités locales concernées. Une convention finale succédera à ce protocole fixant les conditions de réalisation du projet. Elle permettra de contractualiser les dispositions financières lorsque seront connus la consistance finale du projet, le coût total de la première phase, le montant définitif et les modalités de versement des subventions attendues de l'Union européenne, du Grand-Duché du Luxembourg et des collectivités locales.

Dans un rapport présenté par le préfet de la Moselle, une commission d'enquête a donné, fin juin 1995, à la majorité, son aval aux 405 km de lignes nouvelles entre Vaires-sur-Marne (Seine-et-Marne) et Vendenheim (Bas-Rhin).


Le TGV « Lyon-Turin »

Le Conseil européen, lors du sommet d'Essen, a confirmé l'inscription de la liaison Lyon-Turin sur la liste des projets prioritaires dans le domaine des transports. C'est dans ce contexte que les ministres français et italien ont pris à Aix-en-Provence le 16 décembre 1994, un engagement pour la section internationale du projet d'un nouveau programme d'études évalué à 800 millions de francs, comprenant, notamment, le percement de galeries de reconnaissance pour le tunnel de base. Une première tranche de financement à hauteur de 220 millions de francs doit être consacrée à ces études en 1995. Pour mener à bien tout ou partie de ces études, la SNCF et les chemins de fer italiens ont constitué un groupement économique d'intérêt européen (GEIE). Une prise en charge à hauteur de 50% des dépenses hors études par l'Union européenne a été évoquée. Les ministres sont également convenus d'étudier la possibilité de doit être consacrée à ces études en 1995. Pour mener à bien tout ou partie de ces études, la SNCF et les chemins de fer italiens ont constitué un groupement économique d'intérêt européen (GEIE). Une prise en charge à hauteur de 50 % des dépenses hors études par l'Union européenne a été évoquée. Les ministres sont également convenus d'étudier la possibilité de réaliser cette infrastructure dans le cadre d'une concession susceptible d'attirer les investisseurs privés. Enfin, le 18 avril 1995, le Premier ministre français a chargé un inspecteur général des finances, de mettre en place une structure intergouvernementale dont la mission sera de préparer un cahier des charges de la concession ainsi qu'un projet de traité intergouvernemental.

Au total, le coût de l'investissement pourrait représenter 30 à 35 milliards de francs. L'idée de valoriser la ligne pour y faire passer l'autoroute ferroviaire implique un doublement de cette somme.


Le TGV « Rhin-Rhône »

Le ministre des transports a tranché, en mai 1995, la question du tracé du TGV « Rhin-Rhône ».

Mais le département du Jura, qui ne bénéficie d'aucune gare dans l'immédiat, craint que la construction de la branche sud de la ligne n'intervienne trop tardivement.

Il reste à lancer la phase des études d'avant-projet sommaire destiné à affiner le projet.


Le projet de TGV « Paris-Toulouse »

Inscrit au schéma directeur national depuis 1991, le projet de TGV « Centre » entre Paris et Toulouse via Limoges est estimé à 29 milliards de francs.

Une association « TGV Centre France », en assure la promotion avec le soutien des régions Centre, Limousin et Midi Pyrénées.

Ce projet n'est toutefois pas jugé très rentable par la SNCF. Entre Orléans et Toulouse, la ligne pourrait cependant intéresser 6,5 millions d'habitants.

En réponse, la SNCF a désigné un comité de pilotage chargé d'étudier la mise en valeur de la ligne classique Paris-Limoges-Toulouse.

La SNCF s'est engagée le 3 mars 1995, à lancer les premières études pour la réalisation d'un TGV Paris-Toulouse à l'horizon 2003.

On notera que le Conseil des ministres européens des transports n'a pas fait figurer Paris-Limoges-Toulouse parmi les lignes du schéma directeur européen des trains à grande vitesse qu'il a approuvé.

Par ailleurs, une pression se développe en faveur d'une future ligne de TGV Toulouse-Barcelone via Montpellier et Narbonne.


• Une lacune : le « barreau Sud de l'Essonne »

Une ligne de jonction Sud du TGV Paris-Tours devait, selon le schéma directeur des liaisons à grande vitesse arrêté par le CIAT du 14 mai 1991, permettre de rallier à la fois la ligne Paris-Lyon et l'aéroport de Roissy.

En janvier 1992, à la suite de protestation de certains élus de l'Essonne, des études complémentaires avaient été conduites sur ce sujet.

Le barreau sud de l'Essonne figurait dans le schéma directeur approuvé par décret le 1er avril 1992.

Or, le schéma directeur de l'Île-de-France ne comporte de jonction sud que sous forme d'une ligne susceptible d'être améliorée et non d'une ligne nouvelle. Cette lacune conduira inévitablement à rallonger la durée des trajets depuis le sud de Tours jusqu'à Roissy vers la ligne TGV Paris-Lyon, ce qui pénalise potentiellement des villes comme Bordeaux.

Un problème est posé : faut-il sacrifier l'aménagement du territoire à l'environnement d'une zone limitée ?

III. DES QUESTIONS À RÉSOUDRE À TERME

A. LA RESTRUCTURATION DU SERNAM ET DE LA SCETA

La SNCF est à la tête du plus grand groupe national de messagerie et de transport express. Ensemble, le Sernam, le service de messagerie de la SNCF, et le groupe Sceta, détenu à 75,6 % par la SNCF, représenteraient près d'un quart du marché national.

Mais le Sernam et le groupe Sceta ne font pas front commun. Ainsi, la filialisation annoncée du Sernam et le désengagement partiel de la SNCF du pôle « général cargo » de Sceta devraient aller dans le sens d'une clarification de la position des uns et des autres.

1. La filialisation du SERNAM

Alors que le SERNAM a perdu 197 millions de francs en 1994, pour un chiffre d'affaires de 4,7 milliards de francs, sa filialisation est à l'étude.


Les raisons de la filialisation du SERNAM

La première raison de la filialisation du SERNAM est l'éloignement croissant de cette activité par rapport aux schémas d'exploitation ferroviaire classique. Aujourd'hui, force est de constater que, même si les deux tiers de la messagerie traditionnelle nationale et une part de l'express restent acheminés par fer, le SERNAM s'est éloigné du mode ferroviaire depuis plusieurs années. Toutes les analyses de marché montrent de plus que ce mouvement ne s'inversera pas dans les années à venir et ira probablement en s'amplifiant.

Confrontée, d'une part, à cet état de fait, et, d'autre part, à la loi d'orientation des transports intérieurs qui autorise la SNCF à détenir des filiales exerçant dans des activités connexes ou complémentaires au transport ferroviaire, la SNCF a jugé que la filialisation du SERNAM était une solution permettant de répondre aux différentes contraintes pesant sur elle.

La filialisation du SERNAM apportera aussi les avantages traditionnels de ce genre d'opération : une plus grande latitude pour contracter des alliances avec des partenaires privés ou publics, nationaux ou étrangers ; une souplesse accrue en termes d'organisation ; une transparence comptable attendue par la profession et qui contribuera à harmoniser les conditions de concurrence, et, à terme, un renouveau du dialogue social et de la motivation dans une petite structure autonome dotée d'une forte identité.

La filialisation du SERNAM devrait, selon la SNCF, pouvoir être effective le 1er janvier 1997. Les différents travaux menés actuellement ne rencontrent pas de difficultés notables.


• Les conséquences pour les sous-traitants du SERNAM

Comme toutes les sociétés exerçant sur le marché de la messagerie et de l'express, le SERNAM sous-traite une partie de son activité routière. Il ne possède pas de camions en propre, mais maîtrise le « contact client », qui est un point essentiel dans la chaîne, via ses filiales de camionnage terminal. Les liaisons routières inter-agence, qui représentent la majorité des parcours, sont sous-traitées.

Le SERNAM exerce aussi une activité d'affréteur en plein développement.

Dans le cadre du plan de redressement, un effort tarifaire sera demandé aux sous-traitants. Néanmoins, on peut penser que la filialisation ne devrait pas avoir d'impact particulier sur les sous-traitants du SERNAM, puisque :

- le niveau d'effort demandé aux sous-traitant est et sera fonction des résultats économiques du SERNAM, bien plus que de son statut juridique ;

- le redressement du SERNAM est vécu comme une nécessité pour la SNCF, indépendamment de la filialisation. Tout au plus, peut-on remarquer que la décision de filialiser tend le calendrier du plan de redressement et renforce sa dimension impérative.

2. L'ouverture du capital de la SCETA

Premier groupe français dans le transport routier, la Sceta, est marquée par une culture d'entreprise forte.

La SCETA qui a réalisé 21,4 milliards de chiffre d'affaires en 1994 rassemble 334 sociétés de transport routier de marchandises, par autocar, de tourisme ou spécialisés et emploie 25.000 personnes.

Dans la logique du récent rapport « Gressier », la SNCF, qui détient 75,6 de son capital, semble à la recherche de partenaires pour l'aider au développement de certaines activités. L'objectif pourrait être de rendre leur liberté aux entreprises qui n'ont pas un lien direct avec le rail, soit 75 % du chiffre d'affaires.

Est notamment concerné, le groupe Calberson (6,7 milliards de francs de chiffre d'affaires et un résultat net de 36,9 millions en 1994 contre 15,2 millions en 1993).

Une restructuration pourrait conduire à regrouper Calberson, SCETA-International, SCETA-Transports et Bourgey-Montreuil dans le nouveau pôle General cargo et à céder jusqu'à 70 % du capital de ces entreprises. Un groupe financier (Société générale, Suez, AGF) pourrait être chef de file.

B. LA NÉCESSAIRE ADAPTATION À L'EUROPE ET À LA LIBÉRALISATION

Alors qu'un rapport baptisé « L'Europe : avenir du ferroviaire » a été remis en 1995 au ministre des Transports, la SNCF est contrainte de s'adapter à cette donnée.

Le décret d'application de la directive 91-440 du Conseil de l'Union européenne a été publié en mai. La SNCF conserve les pouvoirs de gestion de l'infrastructure et d'exploitant ferroviaire. L'État, lui, sera décisionnaire en ce qui concerne la répartition des sillons.

L'instruction technique de chaque dossier de demande des compagnies étrangères candidates au transit ou à l'accès à ses infrastructures incombera à la SNCF.

Votre Commission des Affaires économiques et du Plan forme le voeu que l'éventuelle introduction d'une concurrence sur le réseau ferré donne une chance d'adaptation et de modernisation à la SNCF.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page