II. DES EFFORTS EN FAVEUR DE LA RÉINSERTION

Selon l'article premier de la loi du 22 juin 1987. le « service public pénitentiaire (...) favorise la réinsertion sociale des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire ».

Des efforts ont été entrepris en ce sens qui ont consisté en une meilleure prise en charge des détenus et en un développement de la politique d'aide aux libérés.

A. UNE MEILLEURE PRISE EN CHARGE DES DÉTENUS

1. L'enseignement général

C'est en 1963 que furent affectés pour la première fois des instituteurs spécialisés en milieu ouvert. Depuis lors, l'enseignement général dans les prisons s'est développé et progressivement adapté aux spécificités du milieu carcéral, grâce en particulier à une politique de partenariat étroit entre l'administration pénitentiaire et les directions compétentes de l'éducation nationale.

Ainsi, en 1994, plus de 300 000 heures d'enseignement ont été assurées. D'après le dernier rapport d'activité de l'administration pénitentiaire, 16 883 personnes (soit un tiers des détenus) ont suivi une formation relevant de l'alphabétisation, de la lutte contre l'illettrisme et de la remise à niveau sur les apprentissages fondamentaux. S'y sont ajoutés près de 6 000 détenus ayant préparé un diplôme national, ce qui a notamment conduit à la délivrance de 137 brevets des collèges, 265 CAP, 38 baccalauréats et 83 diplômes de l'enseignement supérieur. Enfin, un millier a suivi des cours par correspondance.

Au total, près de 24 000 personnes, soit environ un détenu sur deux, ont bénéficié d'un enseignement général en 1994.

Cette politique a été relancée par la signature, le 19 janvier 1995, d'une convention entre la Direction des écoles, la Direction des lycées et collèges, la Direction des personnels d'inspection et de direction et la Direction de l'administration pénitentiaire. Cette convention opère une régionalisation de l'enseignement par la création d'une nouvelle structure : l'unité pédagogique régionale.

Selon le dernier rapport d'activité de l'administration pénitentiaire, « l'unité pédagogique doit permettre que tous les détenus puissent avoir accès à une éducation de qualité équivalente à celle dispensée dans le monde extérieur, particulièrement ceux qui n'ont ni qualification, ni diplôme et parmi eux, en priorité, les détenus illettrés ou analphabètes. Outre ces missions prioritaires, l'unité pédagogique régionale a pour vocation de dispenser l'ensemble des formations initiales et de préparer aux diplômes de l'éducation nationale ».

L'unité pédagogique est rattachée administrativement à la direction régionale des services pénitentiaires. Ses personnels dépendent cependant du ministère de l'éducation nationale.

2. Les activités de loisirs

a) L action culture lie

En relation avec le ministère de la culture, la Chancellerie s'efforce d'inciter au développement de programmes culturels en direction des détenus.

C'est ainsi qu'une circulaire du 14 décembre 1992 signée par le directeur du livre et de la lecture et par le directeur de l'administration pénitentiaire a visé à sensibiliser les bibliothécaires territoriaux sur leurs missions auprès de la population carcérale.

Des manifestations culturelles sont également organisées par les établissements pénitentiaires, le plus souvent en collaboration avec des associations.

b) Les activités sportives

L'administration pénitentiaire attache une attention particulière au développement des activités physiques et sportives qu'elle considère à juste titre comme éminemment favorable à l'intégration sociale et donc à la prévention de la récidive.

A la pratique régulière de sports collectifs (football, volley-ball, ...) ou individuels (tennis de table...), se superposent des manifestations ponctuelles : tournois, rencontres amicales intergroupes ...

Plus récemment, se sont développées les activités de pleine nature (escalade, cyclisme, ...) dans le cadre de permissions de sortie ou de placements à l'extérieur.

3. Les efforts en matière sanitaire

La loi n° 94-43 du 18 janvier 1994, le décret n° 94-929 du 27 octobre 1994 et la circulaire interministérielle du 8 décembre 1994 constituent les trois textes essentiels de la réforme de la santé en milieu pénitentiaire.

Cette réforme a pour ambition d'intégrer la population pénale dans le système général de santé, d'une part en lui accordant, ainsi qu'à ses ayants droit, une couverture sociale, d'autre part en lui permettant d'accéder à des soins comparables à ceux dispensés en milieu libre, au travers du service public hospitalier.

Depuis le 1er janvier 1994, toute personne détenue est obligatoirement affiliée aux assurances maladie et maternité du régime général de la sécurité sociale, à compter de la date de son incarcération.

L'État doit acquitter les cotisations sociales correspondantes et financer également la part qui n'est pas prise en charge par l'assurance maladie : le ticket modérateur pour les soins et le forfait journalier lors des hospitalisations.

Les ayants droit des détenus français et des détenus étrangers en situation régulière bénéficient également des prestations en nature des assurances maladie et maternité.

Le service public hospitalier doit assurer désormais les soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire, à l'exception des établissements du «programme 13000» dans lesquels la fonction santé continuera d'être exercée par les groupements privés lorsqu'elle n'impliquera pas d'hospitalisation.

Une unité de consultations et de soins ambulatoires (UCSA), qui est une unité d'un service hospitalier, doit être implantée dans chaque établissement pénitentiaire.

Les soins, tant somatiques que psychiatriques, sont prodigués par des équipes pluridisciplinaires de l'hôpital.

Au plan local, cette organisation nouvelle est formalisée au travers d'un protocole signé par le directeur de l'établissement pénitentiaire et le directeur de l'hôpital, sous l'égide des autorités régionales.

La charge de l'organisation des soins aux détenus est financée par le budget du ministère de la santé, à partir des cotisations sociales versées chaque année par le ministère de la justice pour l'ensemble de la population pénale (393 millions de francs en 1994). Parallèlement, la direction de l'administration pénitentiaire assure le financement de la rénovation des infirmeries des établissements pénitentiaires (51 MF sur trois ans).

La réforme s'est par ailleurs attachée à assurer le reclassement des infirmiers pénitentiaires, en instituant notamment des dispositions particulières d'intégration de plein droit dans la fonction publique hospitalière.

La réforme de la Santé constitue l'aboutissement d'une politique de décloisonnement menée dans le domaine de la réinsertion par l'administration pénitentiaire et entamée depuis plus de dix ans dans le domaine de la Santé. En effet, depuis 1984, le ministère de la Santé a été constamment associé par le ministère de la justice à l'élaboration de sa politique sanitaire, notamment au travers du comité interministériel de coordination de la santé en milieu carcéral.

Les enjeux de cette réforme sont considérables car l'état de santé physique et mental de la population pénale est particulièrement préoccupant. Le rapport publié en 1993 par le Haut comité de la santé publique l'a souligné, notamment dans le domaine des pathologies transmissibles ou contagieuses, (tuberculose, hépatites, sida, avec un taux de prévalence du virus de l'immodéficience humaine dix fois supérieur à celui de la population générale).

Ainsi, au delà des soins, l'engagement d'une véritable politique de prévention et d'éducation pour la santé de la population pénale paraît-il déterminant pour l'avenir et appelle à cet égard la mobilisation des conseils généraux aux côtés de l'État.

Le décret du 27 octobre 1994 mentionnait dans son article 17 que tous les protocoles devaient être signés le 1er juillet 1995. Il précisait par ailleurs que la date d'effet des protocoles devait être fixée au premier jour d'un mois, en principe le premier jour du mois suivant la signature, sauf si les cocontractants en décident autrement.

Cet échéancier n'a pu être respecté.

Au 1er juillet 1995, 39 sur les 139 protocoles prévus avaient été signés (en effet les établissements pénitentiaires du « Programme 13 000 » et ceux situés dans les territoires d'outre-mer ne sont pas concernés par la signature des protocoles). L'état d'avancement actuel des signatures des protocoles concernait alors 20 % de la population pénale.

Il résulte en outre des évaluations recueillies au niveau des régions que 64 protocoles supplémentaires ont depuis été mis en oeuvre portant à 72 % le taux de couverture des détenus par le nouveau dispositif de soins en milieu pénitentiaire.

Le non-respect des échéances fixées par le décret d'octobre 1994 est imputable essentiellement à des questions budgétaires. En effet, la question du financement des travaux des locaux de soins (les UCSA et les services médico-psychologiques régionaux -SMPR-) persiste. Faute de crédits de paiement suffisants en 1995, l'administration pénitentiaire a été contrainte de reporter à 1996 l'engagement de la plupart des travaux de rénovation des UCSA et des SMPR.

Pour 1996, une mesure d'ajustement d'un montant de 72,450 MF est inscrite au projet de loi de finances pour assurer le financement de la réforme dans l'ensemble des établissements pénitentiaires. En outre, une mesure nouvelle de 4 MF doit permettre le financement d'actions de prévention ainsi que la vaccination contre l'hépatite B.

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