N° 88

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1996.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 1997, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XXII

OUTRE-MER

Par M. Rodolphe DÉSIRÉ,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Gérard Larcher, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis Minetti, vice-présidents : Georges Berchet, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jean Besson, Claude Billard, Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cléach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Jaques Dominati, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Jean-Paul Émorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Philippe François, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Claude Haut, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Edmond Lauret, Jean-François Le Grand, Félix Leyzour, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, René Rouquet, Raymond Soucaret, Michel Souplet, André Vallet, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10ème législ.) : 2993, 3030 à 3035 et T.A. 590.

Sénat : 85 et 86 (annexe n° 32) (1996-1997).

Lois de Finances.

Mesdames, Messieurs,

Du bilan de l'année écoulée, on peut conclure que l'activité économique des départements et territoires d'outre-mer reste assez préoccupante, et reflète un sentiment d'attentisme des agents économiques.

La mise en place par les pouvoirs publics d'un ensemble d'incitations financières et fiscales à la création d'entreprises et le début de la mise en oeuvre des dispositions prévues dans les contrats de plan, de même que le doublement des fonds communautaires, ainsi que l'augmentation de la ligne budgétaire unique, n'ont pas encore produit d'effet significatif sur la situation économique des DOM.

Dans l'ensemble des DOM, le secteur du bâtiment-travaux publics continue de subir les conséquences des difficultés financières des collectivités locales qui, malgré le redressement de leur situation financière, n'ont pas encore repris leurs investissements au point de les porter aux niveaux atteints antérieurement.

Dans le domaine agricole, les résultats des campagnes sont contrastés : certes, la banane a connu une progression à la Martinique, mais moins forte que prévue. À la Guadeloupe, les exportations ont baissé. L'organisation commune de la banane est en proie à des attaques de plus en plus vives des États-Unis et de certains pays latino-américains mais également de certains États membres de l'Union européenne.

La situation de l'industrie sucrière des DOM reste dans l'ensemble fragile, même si on peut relever une certaine progression de la production à la Martinique et à la réunion.

L'augmentation sensible du pouvoir d'achat des bénéficiaires du SMIC a eu des effets dans tous les DOM. Mais, c'est surtout à la Réunion que l'on a assisté à une vive relance de la consommation, notamment dans le secteur de l'automobile. Cependant, la recherche par les entreprises de gains de productivité, destinés à compenser la revalorisation rapide des plus bas salaires, a contrarié la création d'emplois.

L'économie des DOM reste en définitive caractérisée par de déséquilibres structurels ; malgré une croissance plus rapide qu'en métropole de la production, l'évolution de la consommation est plus forte que celle du PIB, entraînant une dégradation du taux de couverture des importations par les exportations.

De plus, la croissance rapide des rémunérations du fait de la politique d'égalité sociale et des effets de la contagion de la sur-rémunération des fonctionnaires place les DOM dans une position non concurrentielle non seulement vis-à-vis de leur environnement régional, mais également dans l'environnement européen, alors qu'il s'agit d'un débouché naturel.

Dans ce contexte économique fragile, les crédits demandés au titre de l'outre-mer atteignent, pour 1997, 4,86 milliards de francs, soit une reconduction des moyens de paiement inscrits dans la loi de finances initiale pour 1996.

En revanche, le total des autorisations de programmes diminue de 8,7 % pour être fixé à 1,95 milliards de francs.

Ce budget, tout en participant à la maîtrise des dépenses publiques engagés par le Gouvernement, cherche à traduire concrètement les engagements pris en matière d'emploi, de logement et de développement les économique, dans le cadre des Assises de l'égalité sociale et du développement des départements d'outre-mer.

PREMIÈRE PARTIE - LES DÉPARTEMENTS D'OUTREMER

I. L'ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER

A. LA MARTINIQUE : LES DIFFICULTÉS DU REDRESSEMENT ÉCONOMIQUE

La conjoncture économique du département a été marquée en début année 1996 par un ralentissement qui est à la fois le reflet du mouvement observé en métropole et la conséquence du long conflit du secteur bancaire. Ce phénomène s'est traduit par une activité réduite dans plusieurs secteurs et des difficultés pour de nombreuses entreprises. Sur le plan social, la situation du marché du travail n'a pas enregistré d'amélioration et le nombre d'allocataires du RMI a sensiblement augmenté. L'absence de créations nettes d'emplois depuis 1993 illustre la difficile adaptation des structures économiques face à la croissance de la population active.

Toutefois, les secteurs essentiels de l'économie locale affichent un certain dynamisme, tandis que pour d'autres, qui connaissent encore des difficultés, une inversion de tendance pourrait intervenir. C'est notamment le cas du secteur du BTP dont l'activité est fortement liée au niveau de la commande publique et donc aux investissements des collectivités locales.

1. La dégradation de la situation de l'emploi

Le nombre de personnes à la recherche d'un emploi a progressé de 4 % environ en un an, tandis que la durée moyenne de la quête d'un emploi a continué de s'allonger. L'indicateur de chômage est ainsi passé de 26,7 % en janvier 1995 à 27,9% en janvier 1996. Il convient cependant de noter la diminution du nombre de jeunes au chômage, qui représente 15 % du nombre total des demandeurs d'emploi contre 17 % un an plus tôt.

Le nombre de bénéficiaires du RMI est sensiblement accru : la détérioration de la situation de l'emploi s'est traduite par une nouvelle progression du nombre d'allocataires du RMI (+13%). Le montant des prestations versées par la caisse d'allocations familiales de Martinique a enregistré une hausse de 9 % en glissement annuel. La mise en oeuvre du volet insertion de la loi connaît toujours des difficultés, qui se traduisent par une réduction du nombre de contrats d'insertion signés en 1995.

2. Un climat économique général encore pessimiste

Les agents économiques font preuve d'attentisme : l'absence de perspectives claires de reprise de la demande constitue un frein aux décisions d'investissement des entreprises : l'encours des crédits à l'équipement octroyés par les établissements de crédits locaux s'est inscrit en repli de 9 % en glissement annuel au 31 décembre 1995 et le recul est plus important encore pour les crédits accordés aux entreprises, qui régressent de 12 % en un an.

Les productions agricoles traditionnelles marquent le pas : les exportations de produits végétaux autres que la banane se sont de nouveau inscrites en baisse. Il en a été de même pour les conserves d'ananas dont la production a régressé de 14 % par rapport à l'année précédente.

Néanmoins, la hausse modérée des prix à la consommation (+ 1,7 % après + 1,8% en 1994) conjuguée à l'accroissement de certains salaires et plus particulièrement du SMIC a, semble-t-il, favorisé une reprise de la consommation des ménages en fin d'année. Cette reprise a par ailleurs été en grande partie financée par un recours accru au crédit : l'encours des crédits de trésorerie aux particuliers accordés par les établissements de crédit locaux a ainsi progressé de 16 % entre décembre 1994 et décembre 1995.

3. Mais des perspectives encourageantes dans des secteurs d'activité économique essentiels


• Des résultats encourageants sont à noter en matière d'activité agricole :

- les exportations de bananes ont enregistré une forte croissance, en dépit des intempéries qui ont détruit une partie des bananeraies. L'année a été marquée par une chute sensible des cours, conséquence de l'offre excédentaire alimentée par des relèvements successifs des contingents de « banane dollar ». Par ailleurs, la qualité irrégulière de la production locale a également pesé sur les recettes. Toutefois, l'aide compensatoire attribuée au titre de la campagne 1995 (1,80 F/kg) devrait permettre aux producteurs locaux d'atteindre la recette de référence (3,87 F/kg). Il convient également de souligner l'extension récente des surfaces consacrées à la culture de la banane (de l'ordre de 1.000 hectares), au détriment d'autres cultures spéculatives et notamment de la canne à sucre ;

- la production de sucre s'est établie à plus de 8.000 tonnes en 1995, en progression de 10 % par rapport à la précédente campagne. Si certaines performances techniques de l'unité de production se sont améliorées, d'importants progrès de productivité sont encore attendus. De nouveaux investissements devraient être réalisés en 1996 (amélioration du matériel existant et augmentation du nombre de cuves de fermentation), financés par les assemblées locales et les fonds européens.

- En dépit de la baisse de la production de rhum, les ventes ont sensiblement progressé, tant en métropole (+ 50 %) que sur le marché local.


L'évolution est satisfaisante dans plusieurs secteurs économiques Cette évolution a été particulièrement sensible dans les industries agro-alimentaires, qui ont enregistré un niveau d'affaires soutenu, et dans le secteur automobile, comme en témoigne la progression de 9 % du nombre des immatriculations de véhicules neufs. En revanche, la reprise ne semble pas avoir pleinement profité à la grande distribution traditionnelle qui continue à pâtir de la concurrence des chaînes de distribution très économiques.

L'activité touristique a été jugée globalement satisfaisante par les professionnels. Le report de la clientèle traditionnelle du bassin méditerranéen a profité à l'hôtellerie qui a enregistré des taux d'occupation de l'ordre de 61 % en moyenne.

Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, l'activité n'a guère évolué par rapport à l'année 1994 et s'est maintenue à un niveau globalement peu élevé.

Toutefois, certaines entreprises de travaux publics ont bénéficié de la poursuite de plusieurs chantiers importants, et les perspectives du secteur pour l'année 1996 paraissent plus optimistes, l'amélioration de la situation financière de la région devant enfin permettre à cette collectivité de restaurer sa capacité d'investissement.

SOLDE DES ÉCHANGES EXTÉRIEURS DEPUIS 1992

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