D. LA BRANCHE VIEILLESSE

1. La modification du mécanisme de revalorisation des pensions

La loi n° 93-936 du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale a déterminé le mécanisme de revalorisation des pensions de retraite et d'invalidité pour la période 1994-1998.

Ce mécanisme, codifié aux articles L. 351-11 et L. 341-6 du code de la sécurité sociale, garantit l'indexation des pensions déjà liquidées, ainsi que des salaires servant de base au calcul des pensions à liquider, sur l'évolution des prix à la consommation. Les rentes d'accidents du travail sont également ainsi indexées.

Si l'évolution constatée des prix à la consommation hors tabac est différente de celle initialement prévue, il est alors procédé à un ajustement l'année suivante. Cet ajustement est positif si l'évolution des prix constatée est supérieure à la prévision, ou négatif dans le cas contraire.

Ce mécanisme d'indexation n'est pas exclusif d'un éventuel "coup de pouce" discrétionnaire, tel celui de 0,5 % qui est intervenu au 1er juillet 1995.

Au cours de la période récente, le ralentissement de l'inflation plus rapide que prévu s'est traduit par des ajustements à la baisse des pensions. Ainsi, en 1997, les pensions n'ont été revalorisées que de 1,2 %, alors que l'augmentation prévisionnelle des prix à la consommation était de 1,3 %, en raison d'un rattrapage négatif de 0,1 % au titre de l'année précédente.

En 1998, les pensions ont été revalorisées de 1,1 % seulement, alors que l'augmentation prévisionnelle des prix à la consommation était de 1,3 %, en raison d'un rattrapage négatif de 0,5 % au titre de l'année précédente.



Pour 1999, la prolongation de ce mécanisme aboutirait à une revalorisation des pensions de 0,7 %, alors que le taux d'augmentation prévisionnel des prix hors tabac est de 1,2 %. En effet, l'inflation effective ne devrait être que de 0,8 %, au lieu de 1,3 % initialement prévu, ce qui justifierait un rattrapage négatif de 0,5 %.

L'article 29 du projet de loi de financement propose de remplacer, pour la seule année 1999, le mécanisme de revalorisation arrivé à échéance par une indexation des pensions sur le taux d'évolution prévisionnel des prix à la consommation hors tabac, sans rattrapage des écarts éventuels.

Cette nouvelle règle aura pour conséquence une revalorisation des pensions de retraite et d'invalidité, ainsi que des rentes d'accidents du travail, de 1,2 % au lieu de 0,7 %.

La dépense supplémentaire pour le régime général est estimée à 1,9 milliard de francs en 1999, dont 1,7 milliards de francs pour les pensions de vieillesse, 120 millions de francs pour les pensions d'invalidité et 150 millions de francs pour les rentes d'accidents du travail.

Le coût pour les régimes obéissant aux mêmes règles de revalorisation des pensions que le régime général (régimes des non salariés, des professions libérales, des cultes, des clercs de notaires et des mines) est estimé à 285 millions de francs.

La branche vieillesse du régime général fera face à cette dépense supplémentaire grâce au versement exceptionnel du FSV de 2,9 milliards de francs au titre des chômeurs dans les DOM, prévu par l'article 3 du projet de loi de financement. Son déficit devrait même se trouver globalement réduit de - 5,9 milliards de francs à - 3,9 milliards de francs.

Votre rapporteur pour avis ne peut être que défavorable au financement d'une mesure structurelle, qui entraînera des effets en base au delà de l'exercice 1999, par une recette non reconductible. La distribution de pouvoir d'achat supplémentaire aux pensionnés apparaît peu responsable, alors que la branche vieillesse du régime général reste tendanciellement déficitaire.

2. Les autres mesures

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte deux autres mesures, dont l'impact financier reste virtuel ou marginal.

a) La prorogation des règles de limitation du cumul emploi-retraite

Le cumul d'une pension de retraite avec une activité rémunérée est soumis à la condition de l'abandon de l'emploi occupé lors de la demande de liquidation de la pension. S'ils souhaitent pouvoir cumuler, les salariés doivent exercer leur activité chez un nouvel employeur, et les non-salariés exercer une autre profession.

Ces règles de limitation du cumul emploi-retraite ont été fixées, corrélativement à l'abaissement de l'âge de la retraite, par l'ordonnance n° 82-290 du 30 mars 1982 pour le régime général et le régime des pensions civiles et militaires. Elles ont été ultérieurement étendues aux professions non-salariées.

Elles ont été régulièrement reconduites depuis 1982, et dernièrement par la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, jusqu'au 31 décembre 1998.

L'article 30 du projet de loi de financement tend à proroger jusqu'au 31 décembre 1999 les dispositions limitant les possibilités de cumul entre un emploi et une retraite.

Dans l'exposé des motifs, le Gouvernement précise que " ce délai d'un an permettra de procéder à une étude spécifique sur les dispositions régissant le cumul d'un emploi et d'une retraite dans le cadre de l'analyse confiée au Commissaire général du Plan sur la situation de l'ensemble des régimes de retraite ".

L'impact financier de cette mesure de prorogation est indirect. Celle-ci permet de faire l'économie des dépenses de retraite supplémentaires qui résulteraient de la disparition au 31 décembre 1998 des règles actuelles de limitation du cumul.

b) Le reprofilage de l'allocation de veuvage

L'article 29 bis, qui résulte d'un amendement du Gouvernement, redéfinit l'allocation de veuvage. Cette allocation garantit un minimum de ressources au conjoint survivant de toute personne affiliée à l'assurance vieillesse du régime général.

L'allocation de veuvage ne serait plus attribuée selon un montant dégressif sur trois ans, mais selon un montant unique sur deux ans. Selon les chiffres avancés par la ministre de l'Emploi et de la solidarité, l'allocation serait portée d'un montant mensuel de 2.041 francs la deuxième année à un montant de 3.107 francs, identique à celui de la première année. En pratique, l'indemnisation garantie la troisième année est inférieure au RMI et ne présente donc pas d'intérêt.

Ce reprofilage a priori favorable aux allocataires s'accompagne de deux modifications restrictives, qui reviennent sur des arrêts de la Cour de cassation :

- la première modification tend à autoriser légalement l'administration à fixer une période d'affiliation minimale pour l'ouverture du droit à l'allocation veuvage ;

- la seconde modification tend à préciser expressément que la majoration pour enfants des pensions de retraite est prise en compte pour l'application de la limite de cumul entre une pension de droit directe et une pension de réversion.

La dépense nette résultant de ces dispositions est estimée à 100 millions de francs, sans que soit d'ailleurs précisé l'équilibre entre les dépenses supplémentaires résultant du reprofilage de l'allocation veuvage et les économies résultant des restrictions apportées aux droits existants.

Votre rapporteur pour avis s'étonne qu'une réforme complexe des droits ouverts aux conjoints survivants soit ainsi présentée en dernière minute par le Gouvernement, au détour de la discussion du projet de loi de financement, et revienne sur une jurisprudence de la Cour de cassation favorable aux personnes concernées.

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Le Gouvernement a par ailleurs annoncé devant l'Assemblée nationale une revalorisation du minimum vieillesse de 2 %, au lieu des 1,2 % initialement prévus. La dépense supplémentaire est estimée à 250 millions de francs, et viendra s'imputer sur l'excédent de 2,1 milliards de francs du FSV, qui est chargé de financer le minimum vieillesse.



Nota bene : 1. Le solde de la branche maladie du régime général est par construction équilibré par une attribution supplémentaire du produit de la CSG et du droit de consommation sur les alcools à la CNAMTS. 2. Le relèvement de 1 milliard du produit du droit de consommation sur les tabacs n'est affecté qu'à hauteur de 9,1 % à la CNAMTS.

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