AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

" Le projet de budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants (...) s'inscrit dans la continuité des budgets précédents : l'érosion continue des crédits se poursuit, les rares mesures nouvelles ne répondent qu'imparfaitement aux demandes légitimes des associations du monde combattant (...) ".

C'est par ces mots que débutait, l'an dernier, le rapport pour avis de votre commission sur les crédits des anciens combattants pour 1999. Ils pourraient être repris tels quels pour qualifier le présent budget.

Les crédits budgétaires diminuent de 2 % pour atteindre 25 milliards de francs à structure constante. Les mesures nouvelles se limitent à 81 millions de francs dans le projet de budget initial alors que les crédits diminuent de 501 millions de francs.

Or ce budget intervient pourtant dans un contexte fort différent.

D'une part, la réforme du département ministériel est effective. Les services du secrétariat d'Etat aux anciens combattants sont désormais intégrés au sein du ministère de la défense, même s'il subsiste toujours un budget autonome. Toujours est-il que cette réforme se traduit par une évolution sensible du périmètre du budget des anciens combattants, les crédits du titre III (hors subventions aux établissements publics) et certains crédits du titre IV étant maintenant inscrits au budget de la défense à hauteur de 949 millions de francs.

D'autre part, le Parlement vient d'adopter à l'unanimité une proposition de loi reconnaissant enfin la réalité de la guerre d'Algérie 1( * ) . Votre commission ne peut d'ailleurs que se féliciter de cette mise en accord tant attendue du droit et des faits. Mais, si cette loi n'a aucune incidence budgétaire, son vote a toutefois montré que les questions touchant les anciens combattants peuvent être résolues, dans le cadre du débat parlementaire, en associant dans un consensus à la fois la représentation nationale, les associations et le Gouvernement. Votre commission aurait souhaité qu'une telle démarche consensuelle se poursuive à l'occasion de l'examen du budget.

Ce nouveau contexte n'a pourtant pas modifié la politique budgétaire du Gouvernement.

Se fondant sur la diminution continue du nombre de pensionnés, les crédits inscrits dans le projet de loi de finances diminuent de 2 % après des baisses de 3,5 % en 1999, 3,5 % en 1998, 5 % en 1997 et 1,2 % en 1996.

Parallèlement, le Gouvernement se montre pour le moins parcimonieux, attendant les réactions défavorables des parlementaires pour présenter, lors de l'examen du budget à l'Assemblée nationale, des mesures nouvelles supplémentaires, qui sont alors considérées comme autant de concessions arrachées à un ministère des finances sourcilleux alors qu'elles ne modifient qu'à la marge les équilibres généraux.

I. LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES SONT TOUJOURS ORIENTÉS À LA BAISSE

A. UNE NOUVELLE DIMINUTION DES CRÉDITS

1. Une diminution qui tient avant tout à la baisse des dépenses de solidarité et non à la diminution des parties prenantes à la dette viagère

a) Une érosion sensible de l'effort budgétaire

Le secrétariat d'Etat précise, dans ses réponses au questionnaire budgétaire que lui a adressé votre rapporteur, que " l'ensemble des crédits (...) représente une diminution de 2 % par rapport à 1998, taux inférieur de moitié à celui de l'évolution du nombre de parties prenantes à la dette viagère ".

L'examen détaillé de l'évolution des crédits montre toutefois que l'érosion des crédits tient moins à la baisse des charges liées à la dette viagère qu'à la diminution des dépenses du fonds de solidarité.

Evolution des crédits à structure constante 2( * )

(en millions de francs)

 

Crédits votés pour 1999

Crédits demandés pour 2000

Evolution (en %)

Titre III : moyen des services

1.206,9

1.195,9

- 0,9 %

dont subventions

271,8

282,3

+ 3,9 %

ONAC

228,9

138,3

+ 4,1 %

INI

42,9

44,0

+ 2,6 %

Titre IV : Interventions publiques

24.286,8

23.792,3

- 2,0 %

dont dette viagère

19.893,4

19.877,0

- 0 %

dont fonds de solidarité

1.576,8

1.106,6

- 28,6 %

Titre V : Investissement

16,2

20,3

+ 25,5 %

TOTAL

25.509,9

25.008,5

- 2 %

(en dépenses ordinaires et crédits de paiement).

Le budget des anciens combattants pour 2000 marque ainsi une rupture très nette avec les budgets précédents. Jusqu'à présent, c'étaient les dépenses liées à la réparation qui diminuaient. Désormais, alors que les dépenses liées à la dette viagère se stabilisent, ce sont les dépenses de solidarité qui diminuent.

b) L'impact ambigu des évolutions démographiques

L'évolution des parties prenantes à la dette viagère (pensions d'invalidité et retraites du combattant) tient à deux mouvements contradictoires.

D'une part, le nombre de pensionnés diminue régulièrement du fait de la mortalité naturelle.

Evolution du nombre de pensionnés

 

1997

1998

1999*

2000*

Invalides pensionnés

375.054

357.479

343.180

329.453

Pensions de veuves et d'orphelins

161.479

154.634

148.449

142.511

Pensions d'ascendants

15.315

13.591

13.047

12.525

Total

551.848

525.704

504.676

484.489

* Prévision Source : SEDAC

En revanche, le nombre de titulaires de la carte du combattant augmente rapidement. Cette hausse s'explique à la fois par l'arrivée massive, à l'âge de 65 ans, des anciens combattants d'Afrique du nord et par l'assouplissement progressif des conditions d'attribution de la carte du combattant.

Evolution du nombre de titulaires de la retraite du combattant

 

1997

1998

1999*

2000*

Titulaires de la retraite du combattant

888.342

920.000

938.400

985.300

Nombre de retraites du combattant attribuées au cours de l'année

72.374

80.045

95.000

104.238

Evolution annuelle des parties prenantes

- 1.43 %

+ 3,6 %

+ 2 %

+ 5 %

* Prévision Source : SEDAC

Au total, le nombre de parties prenantes à la dette viagère a désormais tendance à augmenter. Si les dépenses liées à la dette viagère se stabilisent, c'est donc parce que le coût budgétaire unitaire moyen de la retraite du combattant (2.660 francs) reste bien inférieur à celui de la pension (34.700 francs 3( * ) ).

2. Un redéploiement sujet à caution

a) L'affectation contestable des marges de manoeuvre budgétaire

L'évolution des structures démographiques se traduit budgétairement par les effets suivants :

Ajustement des crédits budgétaires
aux évolutions démographiques en 2000

- diminution du nombre de pensionnés

- 604

- diminution du nombre de bénéficiaires du fonds de solidarité

- 450

- diminution du nombre de bénéficiaires des soins médicaux gratuits

- 59

- augmentation du nombre de titulaires de la retraite du combattant

+ 324

- augmentation du nombre d'anciens combattants bénéficiant de la rente mutualiste

+ 80

Solde

- 709

(en millions de francs)

Les évolutions démographiques permettent donc de dégager, en 2000, une marge de manoeuvre budgétaire de 709 millions de francs.

Toutefois, l'application du rapport constant se traduit en 2000 par une dotation supplémentaire de 248 millions de francs.

Dès lors, la marge de manoeuvre réelle liée aux évolutions démographiques n'est plus que de 461 millions de francs. Or, la diminution du budget atteint 501 millions de francs. Il en découle que cette marge de manoeuvre a été entièrement utilisée à une réduction des crédits.

b) Un nécessaire débat sur le redéploiement des crédits

Votre commission considère que le redéploiement des crédits budgétaires " libérés " par les évolutions démographiques ne peut se fonder sur un seul raisonnement comptable. Elle se prononce en faveur d'une démarche plus qualitative, ces crédits " libérés " devant être pour partie affectés à améliorer la situation des anciens combattants les plus en difficulté et à apporter une réponse aux questions les plus importantes laissées en suspens.

Mais elle observe que les mesures nouvelles (qui s'élevaient à 81 millions de francs dans la version initiale du projet de loi de finances) sont entièrement financées par la révision des services votés. Elle constate également que les marges de manoeuvre réalisées sur les dépenses de solidarité sont intégralement utilisées au financement de dépenses liées à la réparation (application du rapport constant) et à la réduction des crédits.

Une telle politique budgétaire, qui est d'ailleurs particulièrement opaque, tend alors à modifier sensiblement la structure du budget des anciens combattants. Celui-ci prend de plus en plus la forme d'un budget propre à un " ministère des pensions " au détriment des mesures de solidarité.

Votre commission ne peut alors que souhaiter qu'un vaste débat s'engage rapidement, sur des bases claires, entre l'ensemble des parties prenantes pour fixer un cadre général au redéploiement des crédits budgétaires. Elle estime indispensable d'essayer d'aboutir à un consensus sur cette question. Pour sa part, votre commission considère qu'une part des crédits libérés du fait des évolutions démographiques devrait être affectée au financement de nouvelles actions de solidarité, se substituant à celles du fonds de solidarité dont l'extinction progressive est inéluctable, et non au seul financement des actions de réparation.

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